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CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. B), 16 octobre 2014

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. B), 16 octobre 2014
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 1re ch. B
Demande : 14/03310
Décision : 2014/558
Date : 16/10/2014
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 18/02/2014
Numéro de la décision : 558
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4894

CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. B), 16 octobre 2014 : RG n° 14/03310 ; arrêt n° 2014/558

Publication : Jurica

 

Extraits (demandeur) : « Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 8 septembre 2014, Mme X. demande à la cour d’appel de : […]  - dire que l'indemnité sollicitée et allouée par la juridiction de première instance doit être qualifiée de clause abusive selon l'article R. 132-1 du code de la consommation, que cette indemnité est une clause pénale et se révèle manifestement disproportionnée par rapport aux diligences prétendument effectuées ».

Extraits (motifs) : « qu'en refusant de signer l'acte alors que l'offre correspondait aux conditions du mandat, Mme X. a commis une faute contractuelle justifiant l'application de la clause pénale ; Que toutefois, conformément à l'article 1152 du code civil, dans la mesure où elle sanctionne l'inexécution d'une obligation, elle peut être réduite et notamment lorsque comme au cas d'espèce, il y a disproportion entre son montant et le préjudice économique du créancier ; qu'il y a lieu de fixer à 3.500 euros la somme à laquelle doit être condamnée Mme X. »

 

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

PREMIÈRE CHAMBRE B

ARRÊT DU 16 OCTOBRE 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/03310. Arrêt n° 2014/558. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 13 janvier 2014 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 13/02725.

 

APPELANTE :

Madame X.

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée et assistée par Maître Nathalie MARCHESSEAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

 

INTIMÉE :

SAS SODA IMMOBILIER - SETIP OPTIMUM DELPHIA ACCED

prise en la personne de son représentant légal domicilié au siège social sis [adresse], représentée et assistée par Maître GOUGOT de la SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU-TROEGELER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE.

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 18 septembre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Monsieur François GROSJEAN, Président, Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller, Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 octobre 2014.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 octobre 2014, Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS :

Mme X. est propriétaire d’un appartement dont elle a confié la vente à la Sas Setip Optimum Delphia Acced.

Le mandat d’entremise du 21 août 2012 fixe le prix de vente à 205.000 euros, commission de l’agence incluse, soit 190.000 euros nets vendeurs, et a été conclu pour un mois avec exclusivité. Il était prévu la possibilité d’une prorogation dans les mêmes conditions pour une durée maximale de douze mois.

Mme Y., candidate acquéreur trouvée par l’agence signait une lettre d’intention d’achat au prix de 205.000 euros.

Mme X. ne donnait pas suite.

Le 10 avril 2013, la Sas Setip Optimum Delphia Acced a fait assigner Mme X. devant le tribunal de grande instance d’Aix en Provence pour solliciter la condamnation de son mandat à lui régler la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts.

 

Par jugement contradictoire en date du 13 janvier 2014, le tribunal de grande instance d’Aix en Provence a :

- vu les articles 1134 du code civil et 472 du code de procédure civile,

- condamné Mme X. au paiement de la somme de 7.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamné Mme X. au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme X. à supporter la charge des entiers dépens de l’instance, et autorise la SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU TROEGELER, à recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l’avance sans en recevoir provision.

Le tribunal énonce en ses motifs :

- il résulte des termes du mandat qu'il a été consenti avec exclusivité pour une période de trois mois, ramenée à un mois par clause particulière, et que sauf dénonciation à l'issue de cette période, il sera prorogé avec exclusivité pour une durée supplémentaire maximale de 12 mois au terme de laquelle il prendra automatiquement fin, chaque partie pouvant moyennant un préavis de 15 jours par lettre recommandée avec accusé de réception y mettre fin au terme de la période initiale ou à tout moment pendant sa prorogation,

- la prolongation est donc prévue par le contrat lui-même et aucune volonté n'était régulièrement manifestée par X. pour obtenir la fin du mandat,

- la société SODA Immobilier, qui a poursuivi ses recherches et fait signer une lettre d'intention le 3 janvier 2013, en conséquence agit pour l'exécution du mandat exclusif qui lui a été confié et le refus de donner suite sans autre motif que la mauvaise interprétation des clauses contractuelles sur la durée du mandat et la signature d'un mandat avec une autre agence malgré l'exclusivité constitue une faute contractuelle.

Mme X. a relevé appel de ce jugement par déclaration de Maître Nathalie MARCHESSEAU, avocat, en date du 18 février 2014.

L’affaire a été fixée à bref délai, en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile.

 

Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 8 septembre 2014, Mme X. demande à la cour d’appel de :

- dire que le contrat de mandat de vente exclusif est nul au regard des dispositions de l'article 1109 du code civil,

- à titre subsidiaire, selon les dispositions de l'article L. 133-2 du code de la consommation et de l'article 1134 du code civil, dire que les clauses du contrat doivent s'interpréter dans le sens le plus favorable à Mme X.,

- dire en conséquence que les relations contractuelles se sont achevées le 21 septembre 2012,

- dire que l'indemnité sollicitée et allouée par la juridiction de première instance doit être qualifiée de clause abusive selon l'article R. 132-1 du code de la consommation, que cette indemnité est une clause pénale et se révèle manifestement disproportionnée par rapport aux diligences prétendument effectuées,

- rejeter toute demande de dommages et intérêts émanant de Soda Immobilier,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- condamner Soda Immobilier à payer à Mme X. la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Mme X. fait valoir que :

- le mandat est nul faute pour l'agent immobilier d'avoir satisfait à son devoir de conseil et d'information dans la mesure où Mme X., qui a beaucoup de difficultés avec la langue française, n'a pu être à même de lire les clauses et conditions générales du contrat qui lui étaient soumises et donc de comprendre la portée de son engagement,

- à titre subsidiaire, elle a démontré son intention de mettre fin au contrat dès le 21 septembre, soit un mois après la signature du contrat dans la mesure où elle s'est présentée ce jour-là à l'agence où les clés de l'appartement lui ont été remises et où elle a rapporté le panneau de vente apposée par SODA Immobilier, comme en atteste Mme Z.,

- l'agence immobilière ne conteste pas cette remise des clés et l'enlèvement du panneau publicitaire de vente,

- SODA Immobilier, dont elle n'a eu aucune nouvelle durant la durée véritable du mandat de 20 mois et qui justifie ses prétentions en se fondant sur une lettre d'intention qui n'a pas été portée à sa connaissance et qui n'a en tout état de cause aucune valeur, n'établit pas que le mandant aurait sciemment porté atteinte à ses droits et ne justifie pas d'un comportement déloyal,

- l'indemnité sollicitée est manifestement disproportionnée par rapport aux diligences qui auraient prétendument été accomplies.

 

Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 15 septembre 2014, la Sas SODA Immobilier Setip Optimum Delphia Acced demande à la cour d’appel de :

- débouter Mme X. des fins de son appel,

- recevoir la Sas Setip Optimum Delphia Acced en son appel incident et, y faisant droit,

- juger que Mme X. a manqué à l'exécution de ses obligations contractuelles,

- juger que Mme X. doit donc, par application de l'article 1147 du code civil comme aussi à titre subsidiaire de l'article 1382 dudit Code, réparer le préjudice causé par sa faute à la Sas Setip Optimum Delphia Acced,

- condamner en conséquence Mme X. à payer à la Sas Setip Optimum Delphia Acced la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 février 2013,

- confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme X. à payer à la Sas Setip Optimum Delphia Acced une somme supplémentaire de 3.000 euros au titre de 1'article 700 du code de procédure civile en cause d'appe1,

- condamner Mme X. aux entiers dépens, ceux d'appel distraits à la SCP TROEGELER GOUGOT BREDEAU-TROEGELER, avocats.

La société SODA Immobilier fait valoir que :

- Mme X. est de nationalité française et la clause relative à la durée du mandat est imprimée en caractères majuscules et en gras,

- l'erreur de droit n'est susceptible d'entraîner l'annulation du contrat que s'il revêt un caractère substantiel, or il est manifeste que la substance du contrat de mandat consistait précisément dans le mandat donné par Mme X. à la société SODA Immobilier de rechercher un acquéreur pour l'appartement qu'elle désirait vendre,

- le 21 septembre, les clés de l'appartement ont été remises provisoirement à Mme X. que parce que celle-ci avait indiqué vouloir faire visiter son bien et c'est elle-même qui a retiré la pancarte de mise en vente. L'agence a été en possession des clés de cet appartement jusqu'en janvier 2013 puisqu'elle a fait visiter le bien le 21 septembre 2012 et le 4 octobre 2012 à Mme Y. qui a formulé une offre d'achat le 3 janvier 2013,

- en toute hypothèse, la révocation du mandat pouvait se faire que moyennant un préavis de 15 jours par lettre recommandée avec avis de réception,

- en refusant malgré son engagement contractuel de signer l'acte de vente avec Mme Y., Mme X. a commis une faute dans l'exécution loyale de ses obligations et l'agence, qui a beaucoup travaillé et fait procéder à de multiples visites, est fondée à voir réparer son préjudice par application de l'article 1147 du Code civil subsidiairement application de l'article 1382 du même code.

L’instruction de l’affaire a été déclarée close le 18 septembre 2014.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu qu'il résulte des clauses générales et particulières du mandat exclusif signé le 21 août 2012, qu'il l'a été pour une durée d'un mois et que sauf dénonciation à l'expiration de cette période initiale, il sera prorogé avec exclusivité pour une durée maximale de 12 mois supplémentaires au terme de laquelle il prendra automatiquement fin, chacune des parties ayant la possibilité d'y mettre fin moyennant un préavis de 15 jours par LRAR, au terme de la période initiale ou à tout moment pendant sa prorogation ;

Qu'à la différence de certaines clauses suspensives ou résolutoires dont la compréhension suppose parfois quelques explications de la part du mandataire professionnel de l'immobilier, la clause litigieuse se contente de préciser la durée du mandat et la manière de le dénoncer ; que Mme X., de nationalité française, était parfaitement à même de comprendre ce qui ne nécessite aucune explication ;

Que la demande tendant à voir prononcer la nullité du mandat ne peut donc prospérer ;

Attendu qu'il résulte des termes du mandat, rappelés supra, qu'il pouvait donc y être mis fin à l'issue de la période initiale mais par LRAR, dans cette hypothèse comme dans l'hypothèse d'une dénonciation pendant la période de prorogation ; qu'ainsi, en l'absence de dénonciation au 21 septembre 2012 dans les formes prévues au mandat, celui-ci a été automatiquement prorogé pour une période de 12 mois à laquelle Mme X. ne pouvait mettre fin que suivant préavis notifié par LRAR ;

Attendu qu'aux termes de la clause pénale prévue aux conditions générales du mandat, le mandant s'engage à signer aux prix, charges et conditions convenues toute promesse de vente ou tout compromis de vente avec tout acquéreur présenté par le mandataire et en cas de non-respect, il s'engage expressément à verser au mandataire, en vertu des articles 1142 et 1152 du Code civil, une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue au recto ;

Que la société SODA Immobilier justifie d'une lettre d'intention d'achat du 3 janvier 2013 émanant de Mme Armelle Y., date à laquelle le mandat était toujours en cours de prorogation à défaut de préavis ; qu'en refusant de signer l'acte alors que l'offre correspondait aux conditions du mandat, Mme X. a commis une faute contractuelle justifiant l'application de la clause pénale ;

Que toutefois, conformément à l'article 1152 du code civil, dans la mesure où elle sanctionne l'inexécution d'une obligation, elle peut être réduite et notamment lorsque comme au cas d'espèce, il y a disproportion entre son montant et le préjudice économique du créancier ; qu'il y a lieu de fixer à 3.500 euros la somme à laquelle doit être condamnée Mme X. ;

Attendu qu'il n'y a lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme X. au paiement de la somme de 7.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau,

Condamne Mme X. à payer à la Sas Setip Optimum Delphia Acced une somme de 3.500 euros ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme X. aux dépens distraits conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT