CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 29 janvier 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5040
CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 29 janvier 2015 : RG n° 13/09914
Publication : Jurica
Extrait : « Mais considérant que si la société SFR a fait de la clause de solidarité une condition de son acceptation de la cession du contrat, il n'en résulte pas, de ce seul fait, qu'elle aurait ainsi déséquilibré les droits et obligations des parties ; que contrairement à ce que prétend la société Flow Line, celle-ci ne pouvait nullement céder le contrat de 2001 sans l'accord du cocontractant ; qu'au demeurant, les droits et obligations nés de ce contrat ne lui ont été transférés que par l'effet de l'avenant du 5 mai 2010 conclu avec la société SFR ; que le fait que la solidarité s'étendait aux obligations de la société ICT nées antérieurement à la cession du contrat ne peut être considéré comme un déséquilibre dans les droits et obligations des parties ; qu'en effet, il est loisible aux parties à la cession d'un contrat de convenir que le cessionnaire garantira, par le jeu d'une solidarité, les dettes du cédant à l'égard du cocontractant, sans que le contrat ne s'en trouve déséquilibré ;
Considérant que la société Flow Line soutient, en second lieu, que par l'insertion de la clause de solidarité, la société SFR a obtenu, sous la menace d'une rupture des relations commerciales, des conditions manifestement abusives et que sa responsabilité est donc engagée par application des dispositions de l'article L. 442-6 4° du code de commerce ; Mais considérant que la société Flow Line ne démontre pas la réalité des menaces dont elle prétend avoir été l'objet ; qu'au demeurant, elle ne s'est trouvée en relation d'affaires avec la société SFR que par l'effet du contrat contenant la clause de solidarité ; qu'en conséquence, si la société SFR a pu faire de cette clause une condition de son acceptation, on ne saurait lui reprocher d'avoir menacé de rompre des relations qui n'étaient pas encore établies ; qu'enfin, en l'absence d'autres griefs à l'encontre de la société SFR, cette clause ne saurait être considérée, par elle-même, comme abusive puisque, d'une part, elle avait une contrepartie effective dans le droit pour la société Flow Line de bénéficier des services et des prestations jusqu'alors fournies à la société ICT et, d'autre part, elle répondait au souci légitime du cocontractant de se prémunir contre la défaillance de son cocontractant cessionnaire du contrat ;
Considérant que la société Flow Line sera dès lors déboutée de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 5
ARRÊT DU 29 JANVIER 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/09914. Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 avril 2013 - Tribunal de Commerce de PARIS - 12e chambre : RG n° J2011000953.
APPELANTE :
SAS FLOW LINE
ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ; Représentée par Maître Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056 ; Assistée de Maître Stéphanie REBE, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
SELARL MDP, Mandataires Judiciaires Associés, prise en la personne de Maître Marie DUBOIS-PEROTTI, ès qualités de Liquidateur Judiciaire de la société SMARTALLIANCES désignée à cette fonction en remplacement de Maître Patrick-Paul DUBOIS
ayant son siège social [adresse] ; Représenté par Maître Laurence TAZE BERNARD de la SCP IFL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0042 ; Ayant pour avocat plaidant la SELARL SEIGLE & Associées - PRIMALEX - avocats au barreau de LYON
SOCIÉTÉ FRANÇAISE DU RADIOTÉLÉPHONE-SFR
ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ; Représentée par Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111 ; Assistée de Maître Stéphane LEMPEREUR, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 novembre 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, et Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller, chargé du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président, Monsieur Olivier DOUVRELEUR, Conseiller
Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER
ARRÊT : contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
La société ICT, devenue société Smartalliances, a, le 18 octobre 2001, conclu un « contrat de partenariat » avec la société Louis Dreyfus Communications, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Française de Radiotéléphonie - SFR (ci-après société SFR). Ce contrat avait pour objet de permettre à la société ICT d'acquérir le service développé par la société Louis Dreyfus Communications afférent au développement d'un réseau de télécommunications ; en application de ce contrat, la société Louis Dreyfus Communications fournissait et facturait des prestations de télécommunication à la société ICT. Les parties ont ultérieurement modifié ce contrat par plusieurs avenants.
Le 5 mai 2010, un avenant à ce contrat a été signé entre, d'une part, la société SFR, venue aux droits de la société Louis Dreyfus Communications, et, d'autre part, la société ICT et la société Flow Line. Par cet avenant, la société ICT a cédé à la société Flow Line « le contrat, ainsi que l'ensemble de ses droits et obligations qui y sont attachés », la société SFR acceptant cette cession. Cet avenant prévoyait que les sociétés ICT et Flow Line seraient solidairement responsables à l'égard de SFR des manquements commis par l'une d'entre elles à ses engagements contractuels.
Le 9 juillet 2010, la société SFR a adressé à la société ICT une mise en demeure de payer la somme de 77.786,56 euros correspondant à des prestations effectuées de décembre 2009 à mai 2010 et restées impayées. Cette demande étant restée vaine, la société SFR a, le 29 septembre 2010, mis en demeure la société Flow Line de payer cette somme en invoquant la solidarité prévue par l'avenant du 5 mai 2010.
Faute d'obtenir le paiement de cette somme, la société SFR a assigné, les 26 juillet et 18 août 2011, devant le tribunal de commerce de Paris les sociétés ICT, devenue Smartalliances, et Flow Line.
Par jugement du 1er septembre 2011, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société Smartalliances et désigné Maître Dubois comme mandataire liquidateur. La société SFR a déclaré sa créance pour un montant en principal de 75.424,30 euros.
Par jugement du 24 avril 2013, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris a :
- déclaré la clause de solidarité valide ;
- dit que le dol n'était pas prouvé ;
- dit n'y avoir violation de l'article L. 442-6 du code commerce ;
- fixé la créance de la société SFR au passif de la société Smartalliances à la somme de 75.424,30 euros TTC en principal, outre 640,82 euros au titre des intérêts sur la période du 9 juillet 2010 au 31 août 2011 ;
- condamné la société Flow Line à payer à la société SFR la somme de 75.424,30 euros TTC avec intérêts portés à une fois et demie le taux légal à compter du 9 juillet 2010 ;
- pris acte que la société SFR abandonnait sa demande au titre de la somme de 6.408,92 euros TTC avec intérêts portés à une fois et demie le taux d'intérêt légal à compter du 21 mars 2011 ;
- donné acte du paiement de la somme de 885,04 euros ;
- dit que les avoirs ont été pris en compte dans le décompte des sommes dues ;
- débouté la société Flow Line de sa demande de dommages et intérêts ;
- condamné solidairement la société Flow Line et Maître Dubois, ès-qualités, à payer à la société SFR la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Flow Line a interjeté appel de ce jugement le 17 mai 2013.
Par conclusions signifiées le 2 décembre 2013, la société Flow Line demande à la Cour de :
* Sur la demande de condamnation à hauteur de 6.408,92 euros :
- Donner acte à la société SFR de ce qu'elle a abandonné sa demande au titre de la somme de 6.408,92 euros, Flow Line ayant rapporté la preuve des paiements des factures opposées par SFR ;
En conséquence,
- Confirmer le jugement critiqué sur ce chef ;
- Débouter la société SFR de l'intégralité des demandes formées à l'encontre de la société Flow Line ;
* Sur la demande de condamnation à hauteur de 885,04 euros :
- Donner acte à la société Flow Line de ce que la preuve du paiement a été rapportée ;
En conséquence,
- Confirmer le jugement critiqué sur ce chef ;
- Débouter la société SFR de l'intégralité des demandes formées à l'encontre de la société Flow Line ;
* Sur la demande de condamnation solidaire à hauteur de 75.424,30 euros :
À titre principal,
Sur la nullité de la clause de solidarité :
Vu les articles 1109 et 1116 du Code Civil,
- Dire et juger entachées de nullité la clause de solidarité opposée par SFR ;
En conséquence,
- Réformer le jugement critiqué ;
- Débouter la société SFR de l'intégralité des demandes formées à l'encontre de la société Flow Line ;
- Condamner la société SFR à rembourser à Flow Line la somme de 81.012,91 euros versée en exécution de l'exécution provisoire prononcée ;
- Condamner la société SFR à payer à la société Flow Line la somme de 50.000 euros au titre du préjudice moral subi ;
Sur la violation des dispositions de l'article L. 442-6 :
Vu l'article L. 442-6 du Code de commerce,
- Dire et juger que SFR a engagé sa responsabilité en obtenant de la société Flow Line sous la menace du refus d'accord à la cession du contrat SFR d'ICT à Flow Line, la régularisation d'une clause de solidarité l'engageant à assumer solidairement et rétroactivement les manquements de la société ICT ;
- Dire et juger que SFR a engagé sa responsabilité en soumettant Flow Line à l'obligation de souscrire une clause de solidarité comme contrepartie de l'accord de SFR à la cession du contrat d'ICT à Flow Line et ce alors même qu'aucune clause contractuelle n'imposait ni l'accord d'ICT, ni un quelconque engagement de solidarité, le tout étant obtenu en dissimulant à Flow Line l'existence de l'impayé de la société ICT à la date de l'avenant du 5 mai 2010, obligation créant manifestement un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
En conséquence,
- Réformer le jugement critiqué
- Débouter la société SFR de l'intégralité des demandes formées à l'encontre de la société Flow Line ;
- Condamner la société SFR à rembourser à Flow Line la somme de 81.012,91 euros versée en exécution de l'exécution provisoire prononcée ;
- Condamner la société SFR à payer à la société Flow Line la somme de 40.000 euros au titre du préjudice moral subi.
À titre subsidiaire,
- Dire et juger que la société Flow Line rapporte la preuve de ce qu'elle a, dans ses rapports avec la société ICT assumé la part qui lui incombait s'agissant du paiement des factures de la société SFR ;
En conséquence,
- Réformer le jugement critiqué,
- Dire et juger que la société Flow Line doit, à ce titre, être relevée et garantie par la société ICT à hauteur de 81.012,91 euros outre intérêts au taux légal, frais et dépens ;
- Condamner la société ICT à payer à la société Flow Line la somme de 81.012,91 euros outre intérêts au taux légal, frais et dépens ;
- Fixer au passif de la société ICT la créance de la société Flow Line à hauteur de 81.012,91 euros outre intérêts au taux légal, frais et dépens ;
Dans l'hypothèse où la société ICT ne contesterait plus le poste du compte courant, auquel cas la créance serait réduite à la somme de 5.588,61 euros ;
- Condamner la société ICT à payer à la société Flow Line la somme de 5.588,61 euros outre intérêts au taux légal, frais et dépens ;
- Fixer au passif de la société ICT la créance de la société Flow Line à hauteur de 5.588,61 euros outre intérêts au taux légal, frais et dépens ;
* Sur la demande reconventionnelle : avoirs détournés :
Vu l'article 1137 du Code Civil
- Réformer le jugement critiqué ;
- Condamner la société SFR à payer à la société Flow Line la somme de 12.878,66 euros au titre des avoirs consentis à la société ICT en violation des droits de la société Flow Line outre intérêts portés à une fois et demie le taux d'intérêt légal à compter du 24 janvier 2012 - date de première demande au fond à ce titre par conclusions reconventionnelles de Flow Line ;
* Sur la demande reconventionnelle de Flow Line : refus de vente :
Vu les articles 1134 du Code Civil et subsidiairement 1382 du même code,
- Réformer le jugement critiqué ;
- Dire et juger que SFR a commis une faute en refusant à Flow Line l'extension des services existants et plus généralement en bloquant, à cause du litige en présence, toutes commandes de Flow Line ;
En conséquence,
- Condamner la société SFR à payer à la société Flow Line la somme de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts dont 30.000 euros au titre du préjudice moral ;
En tout état de cause,
- Condamner la société SFR au paiement de la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Au préalable, la société Flow Line rappelle que la société ICT lui avait, le 14 janvier 2010, fait l'apport d'une branche de son fonds de commerce et que le contrat de 2001 conclu avec la société Louis Dreyfus Communications figurait dans la liste des contrats concernés par cet apport. Elle précise que la société ICT était chargée des diligences nécessaires au transfert de ce contrat, mais qu'elle ne s'en est acquittée qu'avec retard, de sorte que ce n'est qu'en mai 2010 qu'a été conclu l'avenant avec la société SFR, laquelle avait continué à facturer la société ICT après l'apport fait en janvier 2010.
Elle rappelle que la société SFR avait conditionné son acceptation à la cession du contrat à l'insertion dans l'avenant de mai 2010 d'une clause de solidarité la liant à la société ICT, mais elle soutient qu'elle ne lui avait pas révélé que celle-ci lui était redevable d'une somme de 75.424,30 euros au titre de prestations fournies avant l'apport de la branche d'activité.
Sur le fond, et en premier lieu, la société Flow Line prétend que la clause de solidarité, sur le fondement de laquelle la société SFR lui demande le paiement de factures impayées par la société ICT, est nulle pour dol. Elle soutient, en effet, que pour obtenir l'insertion de cette clause dans l'avenant du 5 mai 2010, la société SFR s'est livrée à des manœuvres dolosives et lui a délibérément dissimulé qu'au jour de cet avenant, la société ICT était débitrice à son égard.
En deuxième lieu, la société Flow Line soutient qu'en exigeant l'insertion dans le contrat de la clause de solidarité, la société SFR a, sous la menace d'une rupture brutale et totale de leurs relations, obtenu une condition manifestement abusive, au sens de l'article L. 442-6 I 4° du code de commerce. Elle affirme, au surplus, que par l'effet de cette clause, la société SFR l'a soumise à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au mépris des dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du même article. Dès lors, la société SFR a, selon elle, engagé sa responsabilité et elle demande à ce titre le paiement de la somme de 40.000 euros.
À titre subsidiaire, la société Flow Line soutient qu'elle a réglé la part qui lui incombait, puisqu'elle a toujours réglé les factures correspondant aux services fournis à partir du 14 janvier 2010. Elle ajoute qu'elle a procédé à un apport en compte courant, qui donne lieu à un litige en cours. Elle demande que la société Smartalliances, anciennement ICT, la garantisse et la relève des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle. Elle demande également la fixation au passif de la société ICT de la somme de 81.012,91 euros.
À titre reconventionnel, la société Flow Line expose que la société SFR a, le 8 juillet 2010, donc postérieurement à la cession du contrat opérée le 5 mai 2010, consenti des avoirs à la société ICT, alors qu'elle n'avait plus aucun lien avec elle, et elle soutient que ces avoirs lui reviennent. Elle prétend, par ailleurs, que la société SFR lui refuse une extension des services fournis dans le cadre de la convention ; elle considère que ce refus constitue une faute au sens de l'article 1382 du code civil et elle soutient qu'il lui a causé un préjudice, en la privant de la capacité de proposer à ses clients de l'espace de stockage ; aussi demande-t-elle, en réparation, l'allocation de la somme de 300.000 euros, dont 30.000 euros au titre de son préjudice morale.
Par conclusions signifiées le 26 septembre 2013, la société SFR demande à la Cour de :
Vu les dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil,
- Dire et juger mal fondée la société Flow Line en son appel ;
- Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 24 avril 2013 ;
Y ajoutant,
- Débouter la société Flow Line de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la société Flow Line à payer à la société SFR la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En ce qui concerne le dol qui lui est reproché, la société SFR souligne d'abord que la portée de la clause de solidarité convenue entre les parties ne souffre d'aucune ambiguïté et qu'elle lui donne le droit d'agir indifféremment contre la société ICT ou contre la société Flow Line, quelle que soit la nature ou la date du manquement en cause. Elle fait valoir, ensuite, que la société Flow Line n'a pas pu s'engager à garantir les dettes de la société ICT sans connaître la portée de son engagement. Elle rappelle que l'adoption de ce type de clause de solidarité est une pratique courante en matière de cession contractuelle. Elle conteste s'être livrée aux manœuvres dolosives que lui reproche la société Flow Line qui, selon elle, n'en rapporte pas la preuve.
En ce qui concerne L. 442-6 du code de commerce, la société SFR expose qu'en conditionnant son acceptation du transfert du contrat de 2001 à l'engagement solidaire des sociétés ICT et Flow Line, elle a légitimement voulu garantir l'exécution des obligations découlant de ce contrat. Elle soutient qu'il n'en résulte aucun déséquilibre dans les droits et obligations des parties et qu'elle n'a, ce faisant, pas obtenu de conditions contractuelles abusives.
En ce qui concerne les demandes reconventionnelles de la société Flow Line, la société SFR fait valoir que les avoirs, dont celle-ci demande le bénéfice, sont venus en déduction des sommes dues par la société ICT. Elle s'estime, par ailleurs, parfaitement fondée à refuser de souscrire un nouveau contrat avec la société Flow Line, puisque celle-ci lui est redevable de sommes dues au titre du contrat en cours. Enfin, elle souligne que la société Flow Line ne justifie nullement les sommes dont elle demande le paiement.
Par conclusions signifiées le 8 octobre 2013, la Selarl MDP, prise en la personne de Maître Dubois, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Smartalliances, demande à la Cour de :
- Déclarer la Société Flow Line mal fondée en son appel en ce qu'il est dirigé contre la Selarl MDP, prise en la personne de Maître Dubois Perotti agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société Smartalliances ;
- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 24 avril 2013 en ce qu'il a fixé la créance de la société SFR au passif de la société Smartalliances à la somme de 75.424,30 euros à titre principal ;
- Débouter la société Flow Line de sa demande en fixation d'une créance à hauteur de 81.012,91 euros ;
- Statuer ce que de droit sur les autres demandes formées par la société Flow Line ;
En tout état de cause :
- Recevant la Selarl MDP, prise en la personne de Maître Dubois Perotti agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Smartalliances, en son appel incident, y faisant droit ;
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a condamné solidairement la société Flow Line et la Selarl MDP à payer à la société SFR la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
- Condamner la société Flow Line à payer à la Selarl MDP, ès qualités, la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société MDP rappelle qu'elle agit en qualité de liquidateur judiciaire de la société Smartalliance, anciennement ICT, dont le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire le 30 septembre 2011.
Elle demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé la créance de la société SFR au passif de la société Smartalliances à la somme de 75.424,30 euros en principal.
Elle conclut, en revanche, au débouté de la demande de la société Flow Line tendant à fixer à ce même passif une créance d'un montant de 81.012,91 euros. Elle précise que la société Flow Line a déclaré une créance de 47.577,97 euros au titre, non des factures impayées, mais d'un apport en compte courant et que cette déclaration de créance fait l'objet d'une instance en cours. Elle fait valoir qu'en revanche, la société Flow Line n'a pas déclaré de créance dans les délais légaux au titre des factures impayées par la société ICT.
La Selarl s'en remet à la Cour s'agissant des autres demandes.
La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la nullité alléguée de la clause de solidarité :
Considérant que la société Flow Line soutient que, pour obtenir son consentement à la clause de solidarité, la société SFR s'est livrée à des manœuvres dolosives, en entretenant l’« apparence d'une situation créditrice de la société ICT » ;
Considérant, en premier lieu, qu'au titre des manœuvres qu'elle reproche à la société SFR, la société Flow Line fait valoir que celle-ci ne l'a pas informée de l'existence d'impayés, alors même qu'elle exigeait d'elle qu'elle engage sa responsabilité solidaire ;
Mais considérant que la mise en jeu de sa propre responsabilité dépendant, par le jeu de la solidarité, d'une dette éventuelle de la société ICT, il appartenait à la société Flow Line de s'enquérir auprès de celle-ci du point de savoir si elle était débitrice de la société SFR, et dans l'affirmative dans quelle mesure ; que cette démarche s'imposait avec d'autant plus d'évidence que, dans le cadre de la cession, le 15 janvier 2010, d'une de ses branches d'activité à la société Flow Line, la société ICT avait garanti celle-ci de toute augmentation de passif (pièce n° 18 produite par la société Flow Line) ; que, par ailleurs, puisque la société SFR exigeait une solidarité pour garantir ses créances, il incombait à la société Flow Line, avant de souscrire cet engagement, de lui demander si elle détenait d'ores et déjà des créances sur la société ICT ; que la société Flow Line n'indique pas avoir interrogé en ce sens la société SFR ; qu'enfin, en exigeant la clause de solidarité, la société SFR ne s'est, ni explicitement, ni implicitement, engagé sur l'absence de passif, puisque la clause avait précisément pour objet de la garantir que la cession du contrat à laquelle elle avait consenti, ne diminuerait pas ses droits de créancier ;
Considérant, en deuxième lieu, que la société Flow Line reproche à la société SFR de n'avoir mis en demeure la société ICT de régler les factures impayées qu'en juillet 2010, soit après la conclusion de l'avenant, alors que certaines de ces factures étaient exigibles depuis le mois de janvier 2010 ;
Mais considérant qu'on ne saurait reprocher à la société SFR, créancière des sommes facturées à la société ICT et non réglées par celle-ci, de ne pas l'avoir pas mis immédiatement en demeure de s'acquitter de ses obligations ; que la circonstance que cette mise en demeure ait été postérieure à la conclusion de l'avenant par lequel le contrat de partenariat a été cédé, ne saurait être interprétée, à elle seule, comme une manœuvre destinée à tromper la société Flow Line, en l'incitant à accepter la clause de solidarité sans en mesurer les conséquences ;
Considérant, en troisième lieu, que la société Flow Line soutient que la rédaction même de la clause de solidarité entretenait l'apparence d'une absence de dette de la société ICT ;
Mais considérant que cette clause, figurant à l'alinéa 3 de l'article 2 de l'avenant, était ainsi rédigée : « Toutefois, en contrepartie de l'accord de SFR pour réaliser cette cession, il est convenu que nonobstant ce qui précède si, avant ou après la date de cession, ICT ou Flow Line venait à manquer à l'un quelconque de ses engagements contractuels et que le manquement persistait malgré une mise en demeure adressée par SFR à la partie défaillante, ICT ou Flow Line en seront solidairement responsables (...) » (pièce n° 3 produite par la société Flow Line) ; que si, comme le fait valoir la société Flow Line, l'emploi de la conjonction « si » dans le membre de phrase « si, avant ou après la date de cession, ICT ou Flow Line venait à manquer à l'un quelconque de ses engagements contractuels (...) » donne au manquement en cause un caractère hypothétique et non pas avéré, le sens et la portée de cette clause ne s'en trouvent pas affectés ; qu'il résulte des termes clairs et précis de cette clause que les sociétés ICT et Flow Line sont solidairement responsables des manquements contractuels commis par l'une d'entre elles, que ces manquements aient précédé ou qu'ils aient suivi la cession du contrat ; que cette clause, par ailleurs, ne limite nullement la responsabilité des sociétés aux manquements qui auraient été révélés à la date de la cession ; qu'en exigeant un engagement de solidarité, la société SFR n'a nullement dit, ou laissé entendre, que cette solidarité ne vaudrait que pour les dettes qui ne lui seraient révélées qu'après la signature de l'avenant ; que dès lors, les termes dans lesquels la clause est rédigée ne sauraient être interprétés comme traduisant une manœuvre dolosive dont la société Flow Line aurait été victime ;
Considérant que des constatations qui précèdent, il résulte que la société Flow Line ne démontre pas que la société SFR aurait, par des manœuvres dolosives, obtenu son consentement à la clause de solidarité contenue dans l'avenant conclu entre les parties ; qu'elle sera donc déboutée de sa demande tendant à ce que soit prononcée la nullité de cette clause et le jugement sera confirmé ;
Sur la demande formée par la société SFR sur le fondement de la clause de solidarité :
Considérant que la société SFR demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a, sur le fondement de la clause de solidarité, condamné la société Flow Line à lui payer la somme de 75.424,30 euros ;
Considérant qu'il est constant que cette somme correspond au montant total de plusieurs factures émises entre le 3 décembre 2009 et le 4 mai 2010, déduction faite d'avoirs accordés par la société SFR le 8 juillet 2010 ; que ces factures ont été émises en paiement de prestations fournies par la société SFR à la société ICT avant l'avenant du 5 mai 2010, par lequel la société Flow Line a succédé à celle-ci dans le contrat de partenariat ; que cet avenant prévoyait que jusqu'à la date de sa conclusion, la société ICT restait redevable envers la société SFR de la bonne exécution de ses obligations « et en particulier du paiement correspondant aux services fournis jusqu'à cette date » ; qu'en application de cette clause, la société SFR a adressé les factures à la société à la société ICT et, le 9 juillet 2010, l'a mise en demeure de les payer ;
Considérant que cette demande étant restée sans effet, la société SFR est fondée, comme elle l'a fait par la mise en demeure du 29 septembre 2010, à demander le paiement de cette somme à la société Flow Line, sur le fondement de l'engagement de solidarité qu'elle a souscrit à son égard ; que c'est à bon droit que les premiers juges, dont le jugement sera confirmé, ont condamné la société Flow Line à payer à la société SFR la somme de 75.424,30 euros avec les intérêts contractuellement prévus à compter du 9 juillet 2010, date de la mise en demeure ;
Sur les demandes de la société Flow Line fondées sur l'article L. 442-6 du code de commerce :
Considérant que la société Flow Line soutient, en premier lieu, qu'en exigeant l'insertion de la clause de solidarité dans l'avenant, la société SFR l'a soumise à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et que sa responsabilité est donc engagée par application des dispositions de l'article L. 442-6 2° du code de commerce ; qu'à l'appui de cette allégation, elle fait valoir, d'une part, que la société SFR, en posant ainsi une condition nouvelle, a nié son droit à céder le contrat et, d'autre part, que la solidarité portait non seulement sur les obligations de la société ICT à la date de cession du contrat, mais encore sur les obligations antérieures sans qu'elle ait été avertie de l'existence d'un impayé ;
Mais considérant que si la société SFR a fait de la clause de solidarité une condition de son acceptation de la cession du contrat, il n'en résulte pas, de ce seul fait, qu'elle aurait ainsi déséquilibré les droits et obligations des parties ; que contrairement à ce que prétend la société Flow Line, celle-ci ne pouvait nullement céder le contrat de 2001 sans l'accord du cocontractant ; qu'au demeurant, les droits et obligations nés de ce contrat ne lui ont été transférés que par l'effet de l'avenant du 5 mai 2010 conclu avec la société SFR ; que le fait que la solidarité s'étendait aux obligations de la société ICT nées antérieurement à la cession du contrat ne peut être considéré comme un déséquilibre dans les droits et obligations des parties ; qu'en effet, il est loisible aux parties à la cession d'un contrat de convenir que le cessionnaire garantira, par le jeu d'une solidarité, les dettes du cédant à l'égard du cocontractant, sans que le contrat ne s'en trouve déséquilibré ;
Considérant que la société Flow Line soutient, en second lieu, que par l'insertion de la clause de solidarité, la société SFR a obtenu, sous la menace d'une rupture des relations commerciales, des conditions manifestement abusives et que sa responsabilité est donc engagée par application des dispositions de l'article L. 442-6 4° du code de commerce ;
Mais considérant que la société Flow Line ne démontre pas la réalité des menaces dont elle prétend avoir été l'objet ; qu'au demeurant, elle ne s'est trouvée en relation d'affaires avec la société SFR que par l'effet du contrat contenant la clause de solidarité ; qu'en conséquence, si la société SFR a pu faire de cette clause une condition de son acceptation, on ne saurait lui reprocher d'avoir menacé de rompre des relations qui n'étaient pas encore établies ; qu'enfin, en l'absence d'autres griefs à l'encontre de la société SFR, cette clause ne saurait être considérée, par elle-même, comme abusive puisque, d'une part, elle avait une contrepartie effective dans le droit pour la société Flow Line de bénéficier des services et des prestations jusqu'alors fournies à la société ICT et, d'autre part, elle répondait au souci légitime du cocontractant de se prémunir contre la défaillance de son cocontractant cessionnaire du contrat ;
Considérant que la société Flow Line sera dès lors déboutée de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce ;
Sur la demande subsidiaire de la société Flow Line contre la société ICT :
Considérant qu'au cas où elle sera condamnée sur la base de la clause de solidarité, la société Flow Line demande à la Cour de condamner la société ICT à la relever et la garantir de cette condamnation ;
Considérant que la somme au paiement de laquelle est condamnée la société Flow Line constitue le prix de prestations fournies par la société SFR à la société ICT jusqu'au 4 mai 2010 ; que dans l'avenant du 5 mai 2010, par lequel la société Flow Line a succédé à la société ICT dans le contrat conclu avec la société SFR, les parties ont expressément convenu que la société ICT resterait redevable du paiement de ces prestations fournies jusqu'à la date de cet avenant ; que, dès lors, la société Smartalliance, anciennement dénommée ICT, devra garantir la société Flow Line de la condamnation prononcée contre elle ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu de porter, comme le réclame le société Flow Line, cette garantie au montant de 81.012,91 euros, lequel procède de la prise en compte d'un apport en compte courant qui fait l'objet d'une procédure distincte dont la Cour n'est pas saisie ;
Sur la demande reconventionnelle portant sur les avoirs consentis à la société ICT le 8 juillet 2010 :
Considérant que la société SFR a, en juillet 2010, consenti à la société ICT plusieurs avoirs ; que la société Flow Line observe que l'un d'entre eux a été émis à la suite d'une erreur d'indexation pour la période allant du 1er janvier 2010 au 4 mai 2010 ; qu'elle en revendique le bénéfice, au prorota temporis à compter du 14 janvier, date de l'apport de la branche d'activité de la société ICT, pour une somme de 12.878,66 euros ; qu'elle souligne que de surcroît, à la date de l'émission de cet avoir, la société SFR n'entretenait plus aucun lien contractuel avec la société ICT depuis le 5 mai 2010, date de la cession du contrat ; qu'elle demande en conséquence la condamnation de la société SFR à lui payer la somme de 12.878,66 euros ;
Mais considérant qu'il résulte du relevé des factures impayées figurant dans la mise en demeure adressée le 9 juillet 2010 à la société ICT, que les différents avoirs émis par la société SFR en juillet 2010, s'ils ont été établis au nom de la société ICT, ont tous été imputés sur le montant dû au titre de ces factures et sont tous venus en déduction de ce montant (pièce n° 5 produite par la société SFR), lequel est aujourd'hui réclamé à la société Flow Line ; que celle-ci, en conséquence, ne saurait en demander à nouveau le bénéfice ; que la circonstance que l'un de ces avoirs ait été émis à la suite d'une erreur d'indexation pour la période postérieure à l'apport de la branche d'activité de la société ICT, en janvier 2010, est indifférent dès lors que la société Flow Line est solidairement tenue au paiement des factures impayées et correspondant à des prestations fournies avant comme après janvier 2010 ; que la société Flow Line sera donc déboutée de sa demande et la jugement sera confirmé ;
Sur la demande reconventionnelle relative au refus de vente :
Considérant que la société Flow Line expose que la société SFR lui oppose, depuis le début de la présente procédure, un refus, qu'elle juge fautif, d'étendre les services qu'elle lui fournit, en refusant, en particulier, d'augmenter la capacité d'hébergement de ses baies de stockage ;
Mais considérant que la société SFR rappelle qu'elle continue de fournir à la société Flow Line les prestations prévues par le contrat de 2001 qui a été cédé en 2010 à celle-ci ; qu'elle fait valoir que les demandes de la société Flow Line ne s'inscrivent pas dans le cadre de l'exécution de ce contrat, mais qu'elles supposent la souscription d'un nouveau contrat, ou à tout le moins d'un avenant ; qu'elle est donc fondée à refuser en l'état, sans commettre de faute, de souscrire de nouveaux engagements contractuels avec la société Flow Line, laquelle lui est redevable de sommes dues au titre du contrat déjà en vigueur ; que la société Flow Line sera donc déboutée de sa demande et le jugement sera confirmé ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il n'apparaît pas justifié, au regard des éléments du dossier, de prononcer de condamnation au regard de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris,
Y ajoutant,
DIT que la société Smartalliances devra garantir la société Flow Line de la condamnation à payer la somme de 75.424,30 euros à la société Société Française de Radiotéléphonie - SFR ;
REJETTE les demandes de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes les demandes autres, plus amples ou contraires des parties ;
CONDAMNE la société Flow Line au paiement des dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier La Présidente
B. REITZER C .PERRIN
- 6181 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Indices - Réciprocité
- 6186 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Indices - Déséquilibre injustifié - Garanties d’exécution
- 6237 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Transmission du contrat