CA BASTIA (ch. civ. B), 8 juillet 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5230
CA BASTIA (ch. civ. B), 8 juillet 2015 : RG n° 13/00928
Publication : Legifrance
Extrait : « Qu’en application de l’article 2307 du même code, cette subrogation lui permet de disposer d’un recours pour le tout à l’encontre de chacun des locataires cautionnés lorsqu’ils étaient tenus solidairement envers le bailleur ; Que dès lors, l’article 6 du contrat Loca Pass prévoyant qu’« en cas de pluralité de locataires, ceux-ci sont solidairement et indivisiblement responsables de l’exécution de tous les engagements contractés aux termes des présentes de sorte que la signature de l’un d’entre eux les engagera tous solidairement et indivisiblement » n’a pas vocation à s’appliquer ici, qu’il ne concerne que les cas de recours personnels de la caution et non les recours subrogatoires ; Que le recours de l’Association Solendi à l’encontre des locataires ne repose donc non pas sur cette clause mais bien sur le contrat de bail et l’acte de cautionnement de sorte que la caution se trouve subrogée dans les droits du bailleur envers qui il n’est pas contesté que les locataires sont tenus solidairement ;
Attendu que M. X. a quitté le logement avant le terme du bail, qu’il ne ressort pas des éléments produits aux débats que le bailleur ait conclu avec Mme Y. seule un nouveau bail de nature à le libérer de toute obligation et que le procès-verbal de conciliation établit le 31 janvier 2012 lors de la procédure de saisie des rémunérations s’analyse comme un accord dans le cadre du règlement amiable de la dette sans pouvoir être considéré comme un acquiescement univoque de la part de la société Logirem à la volonté de M. X. de se soustraire à l’obligation de solidarité stipulé au bail initial ;
Qu’au regard de l’ensemble de ces éléments, le jugement de première instance sera infirmé et il sera jugé que M. X. et Mme Y. devront être tenus solidairement des sommes dues ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 8 JUILLET 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/00928 C. Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal d’Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 16 septembre 2013, enregistrée sous le n° 1113000056.
APPELANTE :
ASSOCIATION SOLENDI
agissant poursuites et diligences de son président domicilié en cette qualité au siège social [adresse], ayant pour avocat Maître Nelly LABOURET, avocat au barreau de BASTIA
INTIMÉS :
M. X.
c/ o Madame X. [adresse]
, ayant pour avocat Maître Jocelyne COSTA, avocat au barreau de BASTIA (bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2013/XX du [date] accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BASTIA)
Mme Y.
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 mai 2015, devant la Cour composée de : Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, Mme Laetitia PASCAL, Conseiller, Mme Marie BART, Vice-Président placé près M. le Premier Président, qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2015.
ARRÊT : Rendu par défaut, Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Dans le cadre d’un contrat de bail conclu pour un logement sis Résidence [...] à [ville B.], l’Association Solendi s’est portée caution de M. X. et de Mme Y. au profit de la société Logirem pour le paiement du loyer et des charges dans le cadre du dispositif « Loca pass ». Par exploit d’huissier en date du 28 janvier 2013, elle les a assignés pour obtenir le remboursement de la somme de 7.435,91 euros payée pour leur compte à Logirem.
Par décision en date du 16 septembre 2013, le tribunal d’instance de Bastia a déclaré nulle comme abusive la clause de solidarité figurant à l’article 6 du contrat Loca Pass signé entre les parties, a condamné M. X. à payer à l’Association Solendi la somme de 2.721,03 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2010, l’a autorisé à se libérer de sa dette en 22 mensualités de 120 euros, le premier versement devant être réalisé dans le mois de la notification du présent jugement et une 23ème mensualité correspondante au reliquat de la dette augmentée d’une somme équivalente aux intérêts échus, a dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité à bonne date l’intégralité de la dette deviendra exigible 15 jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception, a condamné Mme Y. à payer à l’Association Solendi la somme de 4.714,88 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2010, a ordonné l’exécution provisoire, a condamné conjointement les défendeurs au paiement des dépens et de la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 26 novembre 2013 l’Association Solendi a interjeté un appel total de cette décision. Cette déclaration d’appel et les conclusions d’appelant ont été signifiées à Mme Y.par voie d’huissier, lequel a dressé un procès-verbal de vaines recherches le 17 janvier 2014.
Dans ses dernières conclusions transmises le 6 mai 2014, l’Association Solendi sollicite de la cour d’appel l’infirmation de la décision déférée et statuant à nouveau qu’elle condamne solidairement M. X. et Mme Y. à lui payer la somme de 7.435,91 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 octobre 2010, qu’elle déboute M. X. de l’ensemble de ses demandes et qu’elle le condamne solidairement avec Mme Y. à lui payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Labouret-maurel en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient que la solidarité des locataires a bien été stipulée dans le contrat de bail et dans la convention Loca Pass, que le congé délivré par M. X. ne saurait y mettre fin sauf acquiescement non équivoque du bailleur lequel ne peut se déduire du seul procès-verbal de conciliation établi à l’audience de saisie des rémunérations.
Dans ses dernières écritures déposées le 8 mars 2014, M. X. demande à la cour d’appel qu’elle confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions et à titre subsidiaire, qu’elle lui accorde des délais de paiement. Il sollicite également que la somme de 3.047,84 euros soit déduite des sommes dues à l’Association Solendi et que celle-ci soit condamnée au paiement des dépens de l’instance ainsi que la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il soutient que la solidarité doit être expressément stipulée, que la signature du bail n’a pas été précédée de la mention « conjointement et solidairement » pourtant exigée par le contrat, que la solidarité n’a pas été retenue lors de la procédure de référé ni dans le cadre du procès-verbal de conciliation, qu’il a donné son congé le 20 novembre 2009 suivant courrier réceptionné le 24 novembre 2009 et qu’il ne peut en tout état de cause être tenu au paiement des loyers postérieurs au 24 février 2010. Il fait valoir également que la clause prévue dans le contrat de cautionnement (article 6) est nulle comme étant abusive, que les sommes réclamées par la caution sont incompréhensibles et que sa bonne foi justifie l’octroi de délais de paiement.
Mme Y. n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été prise le 10 septembre 2014 et a fixé l’audience de plaidoirie au 12 décembre 2014, date à laquelle l’affaire a été renvoyée au 11 mai 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
Sur la solidarité :
Attendu qu’en application de l’article 1202 du code civil la solidarité ne se présume point et qu’il faut qu’elle soit expressément stipulée ;
Attendu que le contrat de bail à effet au 24 avril 2009 a été signé par la société Logirem mais également par chacun des locataires M. X. et Mme Y., que ce contrat prévoit qu’en cas de pluralité de locataires, ceux-ci sont réputés solidaires entre eux à l’égard du bailleur pour toutes les obligations résultant du bail sans pouvoir invoquer le bénéfice de division ou de discussion ;
Que si la signature de ce contrat n’a pas été précédée de la mention manuscrite « conjointement et solidairement » comme prescrit au bas de ce document, cela ne saurait mettre à néant l’engagement solidaire des locataires envers leur bailleur ;
Qu’en effet, les articles du code de la consommation relatifs aux contrats de crédit n’étant pas applicables en l’espèce, il résulte de l’article 1322 du code civil que l’acte sous seing privé n’est soumis à aucune autre condition de forme que la signature de ceux qui s’obligent et que l’absence de cette mention ne peut priver d’effet cet acte juridique clair, univoque et régulièrement signé par les parties ;
Attendu que la convention Loca Pass a été régulièrement signée par l’Association Solendi, la société Logirem et les deux locataires de sorte que celle-ci se trouve subrogée de plein droit dans les droits du bailleur lorsqu’elle est amenée à payer des loyers et des charges en cas de défaillance des locataires en application de l’article 2306 du code civil ;
Qu’en application de l’article 2307 du même code, cette subrogation lui permet de disposer d’un recours pour le tout à l’encontre de chacun des locataires cautionnés lorsqu’ils étaient tenus solidairement envers le bailleur ;
Que dès lors, l’article 6 du contrat Loca Pass prévoyant qu’« en cas de pluralité de locataires, ceux-ci sont solidairement et indivisiblement responsables de l’exécution de tous les engagements contractés aux termes des présentes de sorte que la signature de l’un d’entre eux les engagera tous solidairement et indivisiblement » n’a pas vocation à s’appliquer ici, qu’il ne concerne que les cas de recours personnels de la caution et non les recours subrogatoires ;
Que le recours de l’Association Solendi à l’encontre des locataires ne repose donc non pas sur cette clause mais bien sur le contrat de bail et l’acte de cautionnement de sorte que la caution se trouve subrogée dans les droits du bailleur envers qui il n’est pas contesté que les locataires sont tenus solidairement ;
Attendu que M. X. a quitté le logement avant le terme du bail, qu’il ne ressort pas des éléments produits aux débats que le bailleur ait conclu avec Mme Y. seule un nouveau bail de nature à le libérer de toute obligation et que le procès-verbal de conciliation établit le 31 janvier 2012 lors de la procédure de saisie des rémunérations s’analyse comme un accord dans le cadre du règlement amiable de la dette sans pouvoir être considéré comme un acquiescement univoque de la part de la société Logirem à la volonté de M. X. de se soustraire à l’obligation de solidarité stipulé au bail initial ;
Qu’au regard de l’ensemble de ces éléments, le jugement de première instance sera infirmé et il sera jugé que M. X. et Mme Y. devront être tenus solidairement des sommes dues ;
Sur le montant de la créance :
Attendu que l’Association Solendi produit un courrier adressé à M. X. le 11 octobre 2010 selon lequel elle s’estime créancière, déduction faite des sommes perçues, de la somme de 7.435,91 euros ;
Qu’il est produit aux débats les demandes de mise en jeu de la garantie Loca Pass adressées par la société Logirem à l’Association Solendi incluant les extraits de comptes locatifs et les appels d’échéances ainsi que les quittances subrogatives suivantes :
le 21 janvier 2010 pour la somme de 2.870,05 euros correspondante aux loyers et charges pour la période du 24 avril 2009 au 31 octobre 2009,
le 17 mars 2010 pour la somme de 1.997,46 euros correspondante aux loyers et charges pour la période du 1er novembre 2009 au 31 janvier 2010,
le 20 août 2010 pour la somme de 2.728,40 euros correspondante aux loyers et charges pour la période du 1er février 2010 au 31 mai 2010 ;
Qu’il n’est pas démontré que la créance du bailleur n’a pas été fixée en considération des versements de la caution lesquels sont antérieurs de plusieurs mois à la date du titre exécutoire ;
Que les locataires ne démontrent pas plus que les sommes versées au bailleur ont profité à la caution en ayant eu pour effet de diminuer sa dette ;
Qu’il appartient à celui qui se prétend libéré d’une obligation d’en justifier son paiement ou le fait qui en a produit l’extinction, ce que ne fait pas M. X. ;
Que dès lors, les sommes réglées par M. X. et Mme Y. dans le cadre de la procédure de saisie des rémunérations fondée sur l’ordonnance de référé du 11 avril 2011 ne pourront venir en déduction des sommes dues par eux à l’Association Solendi ;
Qu’ils seront en conséquence solidairement condamnés à payer à l’Association Solendi la somme de 7.435,91 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 octobre 2010 ;
Sur les délais de paiement :
Attendu que l’article 1244-1 du code civil prévoit que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues dans la limite de deux années et qu’il peut prescrire, par décision spéciale et motivée, que les sommes correspondantes aux échéances porteront intérêts à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital ;
Que M. X. dispose d’un revenu mensuel moyen de 1.306 euros et qu’il rembourse deux crédits à hauteur de 21 euros et de 245,74 euros par mois ;
Que l’échéance de 245,74 euros résulte d’un emprunt contracté le 17 juillet 2011 à hauteur de 10.455 euros, remboursable sur 48 mois lequel sera donc soldé le 17 juillet 2015 ;
Qu’il y a lieu de tenir compte tant de la situation matérielle du débiteur que des besoins du bailleur et que ces circonstances justifient que soient accordés à M. X. des délais de paiement significatifs afin de lui permettre d’apurer sa dette dans le délai deux ans ;
Qu’il conviendra de l’autoriser à se libérer de sa dette par 23 versements mensuels d’un même montant et un 24ème versement égal au reliquat du principal augmenté d’une somme correspondante aux intérêts échus au taux légal ;
Que le jugement déféré sera également infirmé sur ce chef ;
Sur les demandes accessoires :
Attendu qu’en application de l’article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de dire qu’il sera fait masse des dépens de première instance et d’appel et qu’ils seront mis à la charge des intimés par moitié et recouvrés conformément à la loi sur l’aide juridictionnelle ;
Que ces derniers seront en outre solidairement condamnés à payer à l’Association Solendi la somme de 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement déféré dans l’ensemble de ses dispositions,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Condamne solidairement M. X. et Mme Y. à payer à l’Association Solendi la somme de sept mille quatre cent trente cinq euros et quatre vingt onze centimes (7.435,91 euros) avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 11 octobre 2010
Autorise M. X. à sa libérer de sa dette par 23 mensualités d’un même montant et une 24ème égale au reliquat du principal augmenté d’une somme correspondante aux intérêts échus au taux légal,
Dit que le premier versement devra être réalisé dans le mois de la notification du présent arrêt,
Dit qu’à défaut du paiement d’une seule mensualité à bonne date l’intégralité de la dette deviendra exigible 15 jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception,
Y ajoutant,
Condamne solidairement M. X. et Mme Y.au paiement de la somme de cinq cents euros (500 euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Fait masse des dépens de première instance et d’appel et les met à la charge de M. X. et Mme Y.par moitié avec distraction au profit de Maître Labouret Maurel en application de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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