CASS. CIV. 3e, 10 décembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5353
CASS. CIV. 3e, 10 décembre 2015 : pourvoi n° 14-24696 ; arrêt n° 1404
Publication : Legifrance
Extrait : « Ayant relevé que le document d’avertissement rédigé par le notaire et soumis à leur signature le 17 juillet 2009 attirait l’attention des acquéreurs sur la situation de non-conformité du bien par rapport aux règles d’urbanisme et de la copropriété, sur les réactions possibles tant du syndic que des autorités chargées de faire respecter ces dispositions d’urbanisme et que la vente en cause ne présentait pas de caractère frauduleux, faute d’attenter sciemment aux droits des parties ou des tiers, ni illicite, la cour d’appel, qui n’était pas tenue d’effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu retenir que ce document d’avertissement et la notification d’un nouveau projet d’acte aux acquéreurs à la même date démontraient que le notaire avait rempli son obligation d’information et de conseil à leur égard ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 10 DÉCEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 14-24696. Arrêt n° 1404.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur et Madame Y.
DÉFENDEUR à la cassation : SCI Amedeo - Maitres A et Z.
M. Chauvin (président), président. SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Spinosi et Sureau, SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rennes, 3 juillet 2014), que, par une promesse de vente du 3 avril 2009, la SCI Ares a vendu à M. X. un appartement constituant le lot n° 4 d’un immeuble en copropriété ; que, par un avenant du 19 juin 2009, la SCI Amedeo s’est substituée à la SCI Ares et M. Y. s’est porté acquéreur de la moitié indivise du bien ; que, le 10 juillet 2009, le projet d’acte comportant notification du délai de rétractation de sept jours de l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation a été signé et remis aux acquéreurs par Mme A., notaire ; que, le 17 juillet 2009, par suite de la réception d’un état daté du 27 juin 2009 du syndic de l’immeuble indiquant que le lot n° 4 était un local à usage de bureau, que l’immeuble était un immeuble commercial et que le règlement de la zone dans laquelle il était situé ne permettait pas sa transformation en logement, Mme Z., notaire, a notifié aux acquéreurs un nouveau projet d’acte faisant courir un nouveau délai de rétractation de sept jours et leur a fait signer un acte reprenant les indications fournies par le syndic ; que l’acte authentique a été signé le 7 août 2009 ; que, le syndic de la copropriété ayant mis en demeure les acquéreurs de remettre le lot en état, de réparer les dégradations entraînées par les travaux de leur vendeur et de cesser les appropriations de parties communes, MM. X. et Y., ont assigné, d’une part, la SCI Amedeo en rétractation d’acquisition, nullité de la vente pour dol et résolution de la vente pour vice caché et, d’autre part, les notaires en responsabilité ;
Sur le premier moyen :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que MM. X. et Y. font grief à l’arrêt de rejeter leur demande en rétractation, alors, selon le moyen, que pour tout acte ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation, la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété d’immeubles d’habitation ou la vente d’immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l’acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de sept jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte ; que l’acte notifié doit comporter l’ensemble des annexes qui figureront à l’acte authentique définitif de vente, sans quoi le délai de réflexion ne peut utilement s’exercer ; qu’en l’espèce, en retenant que le délai de réflexion avait couru à compter du 18 juillet 2009, après avoir pourtant relevé que l’acte du 17 juillet 2009 ne comportait pas certaines annexes jointes à l’acte authentique du 7 août 2009, et notamment l’état du syndic du 27 juin 2009 avertissant de ce que la venderesse avait transformé illégalement le local initialement à usage de bureaux en local à usage d’habitation, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’ayant relevé que la notification de la promesse du 17 juillet 2009 avait été réalisée par remise en main propre, que l’acte notifié contenait l’ensemble des mentions exigées par l’article D. 271-6 du code de la construction et de l’habitation, et exactement retenu, par motifs adoptés, que les dispositions des trois premiers alinéas de l’article L. 271-1 du même code ne s’appliquaient qu’à cet acte, la cour d’appel en a déduit à bon droit que la notification était régulière ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que MM. X. et Y. font grief à l’arrêt de rejeter leur demande dirigée contre les notaires, alors, selon le moyen :
1°/ que les notaires doivent assurer l’efficacité des actes qu’ils instrumentent en considération du but poursuivi par les parties ; qu’en l’espèce, il est constant en fait que les consorts X. et Y. souhaitaient acquérir un local d’habitation, comme ils le rappelaient dans leurs conclusions et ainsi qu’en attestaient de nombreux documents, et ce que la cour d’appel ne conteste pas ; qu’en retenant pourtant que MM. A. et Z. n’ont pas privé leur acte d’efficacité au regard de la volonté exprimée par leurs clients en acceptant d’instrumenter la vente d’un local de bureau au sein d’un immeuble commercial, irrégulièrement transformé en local d’habitation, au motif inopérant que les consorts X. et Y. auraient été informés de la non-conformité du bien aux règles d’urbanisme et de la copropriété, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
2°/ que le notaire doit refuser d’authentifier un acte qu’il sait illicite ; qu’en estimant que les notaires n’avaient pas failli à leurs obligations en authentifiant un acte portant acte de vente d’un bien qu’ils savaient non conforme tant aux règles d’urbanisme que du règlement de la copropriété, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
3°/ que les notaires doivent éclairer les parties et attirer leur attention sur les conséquences et les risques des actes qu’ils authentifient ; qu’en l’espèce, les consorts X. et Y. faisaient valoir qu’ils n’avaient pas été en mesure de comprendre le sens et la portée exacts des informations contenues dans la note du 17 juillet 2009 dite « d’avertissement-décharge » ; qu’en s’abstenant de rechercher, in concreto, si les consorts X. et Y., dont le premier est scaphandrier et le second sans emploi, avaient compris le sens et la portée exacts des informations contenues dans cette note, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’ayant relevé que le document d’avertissement rédigé par le notaire et soumis à leur signature le 17 juillet 2009 attirait l’attention des acquéreurs sur la situation de non-conformité du bien par rapport aux règles d’urbanisme et de la copropriété, sur les réactions possibles tant du syndic que des autorités chargées de faire respecter ces dispositions d’urbanisme et que la vente en cause ne présentait pas de caractère frauduleux, faute d’attenter sciemment aux droits des parties ou des tiers, ni illicite, la cour d’appel, qui n’était pas tenue d’effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu retenir que ce document d’avertissement et la notification d’un nouveau projet d’acte aux acquéreurs à la même date démontraient que le notaire avait rempli son obligation d’information et de conseil à leur égard ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. X. et Y. aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille quinze.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour MM. Y. et X.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté les consorts X. et Y. de leur demande en exercice de leur faculté de rétractation relative à la vente intervenue le 7 août 2009, rejeté leur demande d’annulation des contrats de prêt souscrits par Monsieur X. et leur demande de dommages-intérêts dirigée contre Maîtres A.et Z. ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs que, « L’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation qui instaure au bénéfice de l’acquéreur non professionnel d’un immeuble à usage d’habitation un délai de rétractation de sept jours, prévoit que lorsque l’acte est conclu par l’intermédiaire d’un professionnel ayant reçu mandat de prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation ; que dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l’acte, attestée selon les modalités fixées par décret.
En l’espèce, il apparaît que suite à la promesse de vente initiale, en cours de préparation de l’acte de vente, et après que soient intervenues une rectification de l’identité de la venderesse du lot litigieux, puis de celle des acquéreurs, le notaire au vu des renseignements obtenus du syndic relatifs à la transformation par la venderesse sans autorisation de la destination du lot vendu et à son caractère irrégulier au regard des règles d’urbanisme applicables à la Zone, a le 17 juillet 2009 d’une part établi un document de délivrance d’informations sur la situation réelle du bien et ses conséquences éventuelles et d’autre part notifié à nouveau le projet d’acte, ayant à juste titre estimé que les informations obtenues modifiaient de façon substantielle les conditions de la vente et justifiaient qu’un nouveau délai de réflexion soit accordé aux acquéreurs.
La notification a été réalisée en main propre et l’acte contient l’ensemble des mentions exigées par l’article D. 271-6 du code de la construction et de l’habitation, à savoir la reproduction de l’article L. 271-2 du même code et la mention manuscrite de chaque acquéreur précisant le point de départ du délai de rétractation, soit le 18 juillet 2009. Cette notification est en conséquence régulière.
Les appelants ne peuvent utilement soutenir que le projet notifié aurait dit comporter les annexes jointes à l’acte authentique et notamment l’état du syndic du 27 juin 2009, dès lors que la note d’avertissement signée des acquéreurs le même jour, reprenait la réponse fournie par ce dernier et analysait les différentes irrégularités constatées et leurs possibles conséquences, à savoir que la venderesse avait transformé le local initialement à usage de bureaux en local d’habitation, sans obtenir de permis de construire, que la nouvelle destination contrevenait au règlement de la ZAC, qu’ils pouvaient donc s’exposer en poursuivant la vente à une demande de remise en état par le syndic outre des sanctions pénales et civiles. Il apparaît donc que lors de la notification du projet d’acte, les appelants disposaient de l’ensemble des éléments leur permettant de mesurer l’intérêt d’utiliser la faculté de rétractation qui leur était à nouveau offerte.
Dès lors, le délai de rétractation ayant été valablement purgé à l’issue du délai de sept jours à compter du 18 juillet 2009, Messieurs X. et Y. ne peuvent valablement exercer leur droit de rétractation par le biais de l’assignation. Le jugement sera confirmé sur ce point » ;
Et aux motifs non contraires des premiers juges, éventuellement adoptés :
« L’article L. 271. 1 du code de la construction et de l’habitation dispose en son alinéa 3 : « Lorsque l’acte est conclu par l’intermédiaire d’un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation. Dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l’acter qui doit être attestée selon des modalités fixées par décret. »
L’article D. 271-6 du code de la construction et de l’habitation dispose « L’acte sous seing privé ou une copie de l’avant-contrat réalisé en la forme authentique remis directement à l’acquéreur non professionnel en application du troisième alinéa de l’article L. 271-1 reproduit les dispositions de l’article L. 271-2. Le bénéficiaire du droit de rétractation y inscrit de sa main les mentions suivantes « remis par (nom du professionnel)... à (lieu) … le (date)... » et « je déclare avoir connaissance qu’un délai de rétractation de sept jours m’est accordé par l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation, et qui courent à compter du lendemain de la date de remise inscrite de ma main sur le présent acte, soit à compter du … ».
En l’espèce, le projet d’acte de vente signé le 17 juillet 2009 par Messieurs X. et Y. et établi par Maître A., notaire, reproduit l’article L. 271-2 du code de la construction et de l’habitation et porte la mention suivante manuscrite de chaque acquéreur : « Remis par Maitre A., notaire associé à [ville L.] ..., le 17/07/09, Je déclare avoir connaissance qu’un délai de réflexion de sept jours m’est accordé par l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation et qu’il court à compter du lendemain de la date de remise inscrite de ma main sur le présent projet, soit à compter du 18/07/09 suivi de la signature de chaque acquéreur.
Les formalités prévues par le troisième alinéa de l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation ont donc été respectées et la date de remise du projet d’acte le 17 juillet 2009 est certaine, de sorte que le délai de rétractation était expiré à compter du 26 juillet 2009.
De plus, à supposer que la date du 17 juillet 2009 ne puisse être considérée comme date certaine, en application de l’article 1328 du code civil la date certaine serait constituée par celle du jour où la substance de ce projet d’acte a été constatée dans un acte authentique. Or l’acte authentique de vente du 7 août 2009 relate (page 3) la substance du projet du 17 juillet 2009. Par conséquent ce projet a acquis date certaine au plus tard le 7 août 2009 et dans ces conditions, le délai de rétractation de sept jours était largement expiré lors de la délivrance des assignations en juillet et août 2010.
Il sera précisé qu’en application du quatrième alinéa de l’article L. 271. 1 du code de la construction et de l’habitation, les dispositions des trois alinéas précédents ne s’appliquent qu’au contrat préliminaire. Par conséquent le notaire n’avait pas à notifier dans les formes de l’article L. 271-1 la note « d’avertissement décharge » signée le 17 juillet 2009 par les acquéreurs, étant observé que la réponse du syndic en date du 27 juin 2009, que les demandeurs reprochent aux notaires de ne pas leur avoir notifiée, est annexée à l’acte authentique et paraphée par eux, de sorte qu’elle a également acquis date certaine au plus tard le 7 août 2009.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les demandeurs ne peuvent pas valablement exercer leur droit de rétractation par le biais de la présente instance » (jugement, pp. 4-5) ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Alors que, pour tout acte ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation, la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété d’immeubles d’habitation ou la vente d’immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l’acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de sept jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte ; que l’acte notifié doit comporter l’ensemble des annexes qui figureront à l’acte authentique définitif de vente, sans quoi le délai de réflexion ne peut utilement s’exercer ; qu’en l’espèce, en retenant que le délai de réflexion avait couru à compter du 18 juillet 2009, après avoir pourtant relevé que l’acte du 17 juillet 2009 ne comportait pas certaines annexes jointes à l’acte authentique du 7 août 2009, et notamment l’état du syndic du 27 juin 2009 avertissant de ce que la venderesse avait transformé illégalement le local initialement à usage de bureaux en local à usage d’habitation, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation.
SECOND MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté les consorts X. et Y. de leur demande en nullité pour dol de la vente conclue par acte authentique daté du août 2009, rejeté leur demande d’annulation des contrats de prêt souscrits par Monsieur X. et leur demande de dommages-intérêts dirigée contre Maîtres A.et Z. ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs que, « L’article 1116 du code civil dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ; qu’il ne se présume pas et doit être prouvé.
Il se déduit de ces dispositions que le dol doit émaner d’une partie à la convention et ne peut donc être imputé au notaire qui n’y est pas une partie.
Comme l’a justement relevé le premier juge, Messieurs X. et Y. ne rapportent pas la preuve de manœuvres ou même d’une réticence dolosive de la SCI AMEDEO déterminante de leur consentement à la vente. En effet, nonobstant le silence de la SCI AMEDEO sur le changement de destination du lot depuis sa propre acquisition en 2005, il est établi qu’au vu des informations précises transmises par le syndic dans son état du 27 juin 2009, quant au fait « que le lot n° 4 était un local de bureau, au sein d’un immeuble commercial, dans une Zone commerciale dont le règlement n’autorise pas la transformation en appartement », indications corroborées par les dispositions d’urbanisme relatives à la zone Uia où est situé l’immeuble obtenues par le notaire, celui-ci leur a délivré une information complète sur la situation du lot, sur les irrégularités l’affectant et les conséquences possibles en cas d’acquisition, éléments consignés dans le document qu’ils ont signé le 17 juillet 2009, donc très largement avant la signature de l’acte authentique du 7 août 2009. Par ailleurs, tant l’état du syndic que les dispositions d’urbanisme ont été annexés à acte et visé par les acquéreurs sans la moindre remarque. Leur consentement à la vente et la signature de l’acte authentique n’ont donc pas été provoqués par une rétention déloyale d’information de la venderesse sur des éléments déterminants de la vente.
Les appelants ne peuvent non plus invoquer une erreur sur les qualités substantielles du bien, étant informés dès le 17 juillet 2009 de ce que ce lot ne pouvait être destiné à l’habitation. Dès lors le jugement qui a débouté les acquéreurs de leur demande d’annulation de la vente doit être confirmé.
De plus, bien qu’ils aient omis d’en faire part dans leurs auditions devant les services d’enquête, le document d’avertissement rédigé par le notaire et soumis à la signature des appelants le 17 juillet 2009, comme la notification d’un nouveau projet d’acte aux acquéreurs à la même date, démontrent que le notaire a rempli son obligation d’information et de conseil à leur égard, en attirant clairement et précisément leur attention sur la situation de non-conformité du bien par rapport aux règles d’urbanisme et de la copropriété, sur les réactions possibles tant du syndic que des autorités chargées de faire respecter ces dispositions d’urbanisme. Outre que la vente en cause ne présente pas de caractère frauduleux, faute d’attenter sciemment aux droits des parties ou des tiers, ni illicite, le document d’avertissement du 17 juillet 2009 ne peut être analysé en une décharge de responsabilité du notaire, irrégulière. Il ne comporte en effet aucune renonciation à agir contre ce dernier, ni ne le dispense de son devoir de conseil. Les appelants sont également mal fondés à considérer (page 20 de leurs écritures) que ce document « constitue une clause abusive », l’article L. 132-1 du code de la consommation qu’ils invoquent trouvant à s’appliquer dans les contrats, ce que ne constitue pas le document signé le 17 juillet 2009. En conséquence, en l’absence de faute de Maîtres A. et Z., les demandes à leur encontre des appelants et du Crédit Logement ne peuvent être accueillies, les demandes présentées par les autres intimés à titre subsidiaire, devenant sans objet. Le jugement sera confirmé de ce chef » ;
Et aux motifs non contraires des premiers juges, éventuellement adoptés :
« En application de l’article 1116 du Code civil, il appartient à Messieurs X. et Y. d’établir les manœuvres pratiquées par la SCI AMADEO, voire le notaire manœuvres qui auraient eu pour conséquence de vicier leur consentement.
Les intéressés ne rapportent pas cette preuve dans la mesure où, antérieurement à l’acte authentique, ils ont été informés de ce que le vendeur avait fait réaliser des travaux d’aménagement du local initialement commercial pour le transformer en local à usage d’habitation, que cette transformation pouvait être analysée en changement de destination soumis à permis de construire, que le syndic de copropriété avait rappelé le 27 juin 2009 que l’immeuble était un immeuble commercial situé dans une zone commerciale dont le règlement n’autorise pas la transformation du lot en appartement, que le règlement de la zone d’aménagement concerté dont dépend l’immeuble prévoit que sont interdites les constructions à usage d’habitation à l’exception de celles destinées aux personnes dont la présence permanente est nécessaire pour assurer la direction, la surveillance des établissements et des services généraux de la zone.
La preuve de cette information est établie par l’écrit qu’ils ont signé le 17 juillet 2009. Ce document établit tant l’absence de vice de leur consentement de la part du vendeur que l’exécution de l’obligation de conseil et d’information par le notaire.
Messieurs X. et Y. seront donc déboutés de leur demande en nullité pour dol » (jugement, p. 6) ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Alors que, d’une part, les notaires doivent assurer l’efficacité des actes qu’ils instrument en considération du but poursuivi par les parties ; qu’en l’espèce, il est constant en fait que les consorts X. et Y. souhaitaient acquérir un local d’habitation, comme ils le rappelaient dans leurs conclusions et ainsi qu’en attestaient de nombreux documents (conclusions, p. 12 et.), et ce que la Cour d’appel ne conteste pas ; qu’en retenant pourtant que Maîtres A.et Z. n’ont pas privé leur acte d’efficacité au regard de la volonté exprimée par leurs clients en acceptant d’instrumenter la vente d’un local de bureau au sein d’un immeuble commercial, irrégulièrement transformé en local d’habitation, au motif inopérant que les consorts X. et Y. auraient été informés de la non-conformité du bien aux règles d’urbanisme et de la copropriété, la Cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
Alors que, d’autre part, le notaire doit refuser d’authentifier un acte qu’il sait illicite ; qu’en estimant que les notaires n’avaient pas failli à leurs obligations en authentifiant un acte portant acte de vente d’un bien qu’ils savaient non conforme tant aux règles d’urbanisme que du règlement de la copropriété, la Cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
Alors que, subsidiairement, les notaires doivent éclairer les parties et attirer leur attention sur les conséquences et les risques des actes qu’ils authentifient ; qu’en l’espèce, les consorts X. et Y. faisaient valoir qu’ils n’avaient pas été en mesure de comprendre le sens et la portée exacts des informations contenues dans la note du 17 juillet 2009 dite « d’avertissement-décharge » (conclusions, p. 12 et s.) ; qu’en s’abstenant de rechercher, in concreto, si les consorts X. et Y., dont le premier est scaphandrier et le second sans emploi, avaient compris le sens et la portée exacts des informations contenues dans cette note, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil.
- 5834 - Code de la consommation - Domaine d’application - Contrat - Existence d’un contrat
- 6114 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 212-1-6° C. consom.)
- 6426 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Notaire