CA TOULOUSE (1re ch. sect. 1), 18 janvier 2016
CERCLAB - DOCUMENT N° 5459
CA TOULOUSE (1re ch. sect. 1), 18 janvier 2016 : RG n° 15/04250 ; arrêt n° 22
Publication : Jurica
Extrait : « Conformément à l'article L. 121-22-4° du code de la consommation faisant échapper aux dispositions sur le démarchage les ventes, locations et locations-ventes de biens ou de prestations de service ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession, le tribunal d'instance a, à juste titre, écarté le moyen de nullité du contrat tiré de l'inobservation de l'article L. 125-23-7° du même code exigeant de mentionner aux contrats conclus après démarchage la faculté de renonciation prévue par l'article L. 125-25, dès lors que le contrat litigieux de licence d'exploitation de site internet a été souscrit par Madame X. pour promouvoir son activité artisanale exercée sous l'enseigne « L'Atelier de Y. », quand bien même cette activité de cartonnage est étrangère aux métiers de l'internet. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION 1
ARRÊT DU 18 JANVIER 2016
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/04250. Arrêt n° 22. Décision déférée du 18 novembre 2014 - Tribunal d'Instance de TOULOUSE - R.G. n° 11-13-3510. Décision déférée du 27 mai 2015 - Cour d'Appel de TOULOUSE - R.G. n° 14/6951 - Arrêt n° 674.
DEMANDERESSE À L'OPPOSITION :
Madame X.
Représentée par Maître Marie-Julie CANTIN de l'AARPI R.C.C. ASSOCIÉS, avocat au barreau de TOULOUSE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)
DÉFENDERESSE A L'OPPOSITION :
SAS LOCAM LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
Représentée par Maître Bruno MERLE, avocat au barreau de TOULOUSE, Assistée de Maître LEXI de la SELARL LEXI CONSEIL ET DÉFENSE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
COMPOSITION DE LA COUR : Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 2 novembre 2015 en audience publique, devant la Cour composée de : D. FORCADE, président, C. STRAUDO, conseiller, C. MULLER, conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : J. BARBANCE-DURAND
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par D. FORCADE, président, et par H. ANDUZE-ACHER, greffier de chambre.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant contrat de licence d'exploitation de site internet en date du 7 juin 2012, Madame X. a commandé à la SAS INCOMM la conception, la réalisation et le suivi d'un site internet pour son activité artisanale exercée sous l'enseigne « L'Atelier Y. » et s'est engagée à verser 16 loyers trimestriels de 510 euros HT soit 609,96 euros TTC chacun au fournisseur ou au bailleur susceptible de financer l'opération et de devenir cessionnaire du contrat.
Le procès-verbal de livraison et de conformité a été signé le 10 juillet 2012.
Les loyers sont impayés depuis le 30 janvier 3013, malgré mise en demeure par courrier recommandé en date du 9 août 2013.
Par acte d'huissier en date du 7 novembre 2013, la SAS LOCAM, agissant en qualité de bailleur cessionnaire du contrat, a fait assigner Madame X. devant le tribunal d'instance de TOULOUSE sur le fondement des articles 1134 et suivants et 1149 du code civil afin d'obtenir sa condamnation sous bénéfice de l'exécution provisoire au paiement des sommes de :
- 9.393,38 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation, égale au montant des loyers impayés et de la totalité des loyers à échoir majoré d'une clause pénale de 10 %, outre intérêts au taux légal
- 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu'aux entiers dépens.
Par jugement en date du 18 novembre 2014, le tribunal, considérant que les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage n'étaient pas applicables au contrat signé dans le cadre de l'activité professionnelle de Madame X., mais que la SAS LOCAM ne justifiait pas, au vu de la photocopie illisible du contrat produite, de la régularité de la cession et de sa qualité à agir, a déclaré irrecevable la demande de la SAS LOCAM et l'a condamnée aux dépens.
Suivant déclaration d'appel en date du 29 décembre 2014, la SAS LOCAM a relevé appel général de ce jugement, avant de signifier à Madame X. sa déclaration d'appel et ses conclusions et pièces le 12 février 2015 en l'étude de l'huissier, puis ses nouvelles conclusions le 20 mars 2015 à sa personne.
Par arrêt rendu le 27 mai 2015 par défaut, la cour d'appel de TOULOUSE a infirmé le jugement entrepris et condamné Madame X. à payer à la SAS LOCAM les sommes de 9.393,38 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 13 août 2013 et capitalisation de ces intérêts conformément à l'article 1154 du code civil, et de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 13 août 2015 et déposées au greffe le lendemain, Madame X. a formé opposition à l'encontre de cet arrêt signifié le 16 juillet 2015, avant d'obtenir l'aide juridictionnelle totale le 24 août 2015.
Elle demande à la cour de déclarer son opposition recevable, de rétracter l'arrêt du 27 mai 2015 et, statuant à nouveau, de dire et juger que le contrat est nul de nullité absolue et de condamner la SAS LOCAM à lui verser les sommes de :
- 1.219,92 euros au titre des loyers réglés et 179,40 euros au titre des frais d'adhésion réglés, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision à intervenir
- 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle réitère ses moyens de nullité du contrat tirés, d'une part, de l'absence de mention au contrat de la faculté de renonciation prévue en cas de démarchage à domicile et de ses conditions d'exercice, en violation des dispositions d'ordre public de l'article L. 125-23-7° du code de la consommation, applicables dès lors qu'elle n'est pas une professionnelle de la création de site internet, d'autre part, de l'absence de cause du contrat du fait de sa cession dégageant la SAS LOCAM, cessionnaire, de tout rôle et de toute responsabilité dans le fonctionnement du site et créant un déséquilibre à son détriment en l'obligeant à payer sans recours contre le cessionnaire même si le site dysfonctionne comme en l'espèce.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 septembre 2015, la SAS LOCAM demande à la cour de confirmer l'arrêt entrepris (sic) en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de débouter Madame X. de toutes ses prétentions et de la condamner à lui payer les sommes de :
- 9.393,38 euros en principal, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure et capitalisation de ces intérêts par année entière
- 2.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Maître Bruno MERLE, avocat.
Elle maintient que le contrat de licence n'est pas dépourvu de cause ni déséquilibré dans la mesure où l'obligation de Madame X. de régler les loyers financiers jusqu'au terme du contrat trouve sa cause dans l'obligation, exécutée sans réserve, de mettre le site internet à disposition de celle-ci, d'autant que le grief de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce relève de la compétence exclusive de la cour d'appel de PARIS et ne peut concerner une opération ponctuelle ne générant aucun courant d'affaires entre les parties, et que les dispositions consuméristes relatives au démarchage à domicile ne s'appliquent pas au contrat souscrit par Madame X., artisan, pour promouvoir son activité professionnelle et sont en tout état de cause exclues par le contrat lui-même.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
L'opposition faite dans les délai et formes prévus par les articles 538 et 573 et suivants du code de procédure civile étant recevable, il y a lieu de rétracter l'arrêt frappé d'opposition et de statuer à nouveau en fait et en droit.
Conformément à l'article L. 121-22-4° du code de la consommation faisant échapper aux dispositions sur le démarchage les ventes, locations et locations-ventes de biens ou de prestations de service ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession, le tribunal d'instance a, à juste titre, écarté le moyen de nullité du contrat tiré de l'inobservation de l'article L. 125-23-7° du même code exigeant de mentionner aux contrats conclus après démarchage la faculté de renonciation prévue par l'article L. 125-25, dès lors que le contrat litigieux de licence d'exploitation de site internet a été souscrit par Madame X. pour promouvoir son activité artisanale exercée sous l'enseigne « L'Atelier de Y. », quand bien même cette activité de cartonnage est étrangère aux métiers de l'internet.
Par ailleurs, force est de constater que l'obligation de Madame X., utilisatrice du site internet « latelierdeY.fr », de régler les loyers convenus à la SAS LOCAM, cessionnaire du contrat conformément à l'article 12.02 des conditions générales désormais produites en original, trouve sa cause dans l'obligation, d'une part, de la SAS INCOMM, fournisseur, de mettre ce site à la disposition de l'utilisatrice, d'autre part, de la SAS LOCAM d'en régler le prix au fournisseur après livraison et que, si l'article 12.04 des conditions générales prive l'utilisatrice de tout recours direct contre le cessionnaire pour vices rédhibitoires ou cachés du site internet ou pour toute autre raison rendant le site temporairement ou définitivement inutilisable, il ne lui interdit nullement d'agir en résolution du contrat contre le fournisseur sous réserve d'en informer le cessionnaire, ni d'obtenir l'arrêt du paiement des échéances sur notification au cessionnaire d'une décision définitive prononçant la résolution du contrat.
Le moyen de nullité du contrat tiré de l'absence de cause par suite de la cession ne peut donc qu'être écarté.
Madame X., qui a cessé de régler les loyers trimestriels en dépit de la mise en demeure du 9 août 2013 et allègue que le site internet ne fonctionne plus, sans en justifier ni avoir agi en résolution du contrat à l'encontre de la SAS INCOMM, s'expose en application de l'article 17.1 des conditions générales à la résiliation de plein droit du contrat et au paiement des trois loyers échus impayés des 30 janvier, 30 avril et 30 juillet 2013, soit 1.829,88 euros TTC, et de la totalité des onze échéances restant à courir jusqu'à la fin du contrat, soit 6.709,56 euros TTC, le tout majoré d'une clause pénale de 10 %, soit 853,94 euros.
Le jugement dont appel sera donc infirmé et Madame X. sera condamnée à verser à la SAS LOCAM la somme globale de 9.393,38 euros, assortie des intérêts de retard au taux légal courant de plein droit sur les loyers échus impayés et la clause pénale y afférente visés à la mise en demeure du 9 août 2013 à compter de celle-ci et sur le surplus à compter de l'assignation introductive d'instance du 7 novembre 2013 valant mise en demeure, conformément à l'article 1153 du code civil, tout en étant déboutée de sa demande reconventionnelle de remboursement des loyers et frais d'adhésion réglés.
En outre, la capitalisation des intérêts échus par année entière permise par l'article 1154 du même code sera ordonnée.
Enfin, en tant que partie perdante, Madame X. supportera les dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'une somme de 1.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la SAS LOCAM sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, sans pouvoir prétendre au bénéfice de ce même texte.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
DÉCLARE Madame X. recevable en son opposition à l'encontre de l'arrêt d'appel rendu par défaut le 27 mai 2015,
RÉTRACTE cet arrêt,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
INFIRME le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
DÉBOUTE Madame X. de toutes ses demandes,
La CONDAMNE à payer à la SAS LOCAM la somme de 9.393,38 euros (neuf mille trois cent quatre vingt treize euros et trente huit centimes), avec intérêts au taux légal courant à compter du 9 août 2013 sur la somme de 2.012,87 euros (deux mille douze euros et quatre vingt sept centimes) et du 7 novembre 2013 sur le surplus,
ORDONNE la capitalisation des intérêts échus par année entière,
CONDAMNE Madame X. aux entiers dépens de première instance et d'appel, à recouvrer conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Bruno MERLE, avocat, ainsi qu'à payer à la SAS LOCAM la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du même code.
Le greffier Le président
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