CA LYON (1re ch. civ. A), 30 juin 2016
CERCLAB - DOCUMENT N° 5682
CA LYON (1re ch. civ. A), 30 juin 2016 : RG n° 14/06468
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2016-013335
Extrait : « Attendu cependant que la clause du contrat selon laquelle « la vente de caravanes ou mobiles homes sur place est interdite » et « l'emplacement ne peut faire l'objet d'un transfert à une autre personne » doit être interprétée en ce sens que la cession du droit au bail sur l'emplacement est interdite ; que cette clause, qui n'a pas pour objet ou pour effet de créer au détriment de M. X. un déséquilibre entre les droits et obligations des parties au contrat, n'est pas abusive ;
Attendu ensuite que la gérante de la société CLAIRE RIVIERE, dans un courrier du 19 mai 2012 adressé au conseil de M. X., précise qu'elle ne lui a jamais interdit de vendre son mobile home, mais lui avoir indiqué ainsi qu'à ses « futurs acheteurs », qu'ils ne pourraient pas le revendre ; que cette information ainsi donnée n'est pas constitutive d'une faute imputable à la société CLAIRE RIVIERE, en raison de sa fausseté, dès lors que le contrat conclu avec M. X. stipule une clause interdisant l'installation d'un mobile home de plus de cinq ans sur l'emplacement loué, que le sien en avait au moins quinze lorsqu'il l'a acheté, et qu'ainsi la société CLAIRE RIVIERE était en droit de refuser aux éventuels acheteurs la conclusion avec eux d'un contrat de location de l'emplacement ; Attendu dans ces conditions qu'en l'absence de faute commise par la société CLAIRE RIVIERE, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il déboute M. X. de sa demande de dommages-intérêts ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A
ARRÊT DU 30 JUIN 2016
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/06468. Décision du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, au fond, du 24 février 2014 : R.G. n° 12/04090.
APPELANT :
M. X.
né le [date] à [ville], représenté par Maître Béatrice F., avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
SARL CLAIRE RIVIERE
représentée par Maître Philippe V., avocat au barreau de l'AIN
Date de clôture de l'instruction : 9 juin 2015
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 avril 2016
Date de mise à disposition : 23 juin 2016, prorogée au 30 juin 2016, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Michel GAGET, président - Françoise CLEMENT, conseiller - Vincent NICOLAS, conseiller,
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier.
A l'audience, Vincent NICOLAS a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par acte sous-seing privé du 3 mars 2011, elle a donné en location à M. X., un emplacement, suite à l'acquisition par celui d'un mobile home en 2008, déjà stationné sur cet emplacement. Cette location a été faite pour une année, moyennant le paiement d'une redevance. Le contrat stipulait notamment que les caravanes et mobiles home âgés de plus de cinq ans n'étaient pas acceptés au camping et que tout matériel de plus de 15 ans devait être renouvelé. Il stipulait aussi que la vente de caravane ou mobiles home sur place est interdite, et que l'emplacement reste la propriété du camping, ne pouvant faire l'objet d'un transfert à une autre personne.
Au motif que la société CLAIRE RIVIERE aurait dissuadé plusieurs personnes d'acquérir son mobile home, mise en vente depuis le mois d'octobre 2010, M. X. a saisi le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse en lui demandant de condamner la société CLAIRE RIVIERE, sur le fondement de l'article 1134 du code civil, à lui payer des dommages-intérêts.
Reconventionnellement, la société CLAIRE RIVIERE demandait sa condamnation au paiement des redevances échues, afférentes aux années 2012 et 2013.
Par jugement du 24 février 2014, le tribunal de grande instance a, avec exécution provisoire, débouté M. X. de ses demandes et l'a condamné à payer à la société CLAIRE RIVIERE la somme de 3.128 euros au titre des redevances échues et impayées, outre 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration transmise au greffe le 30 juillet 2014, M. X. a interjeté appel de cette décision.
Vu les conclusions du 9 avril 2015 de M. X., déposées et notifiées, par lesquelles il demande à la cour de :
- infirmer le jugement ;
- condamner la société CLAIRE RIVIERE à lui payer la somme de 14.862,20 euros au titre du préjudice financier du fait de la non-réalisation de la vente de son mobile-home, outre 3.000 euros au titre de son préjudice moral ;
- débouter la société CLAIRE RIVIERE de sa demande reconventionnelle en paiement des redevances ;
- la condamner à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions du 16 décembre 2014 de la société CLAIRE RIVIERE, déposées et notifiées, par lesquelles elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement ;
- condamner M. X. à lui payer la somme de 1.734,20 euros au titre de la redevance pour l'année 2014, outre 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 9 juin 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI, LA COUR :
Sur la demande de M. X. :
Attendu que pour conclure au rejet de cette demande, la société CLAIRE RIVIERE fait valoir que :
1. La clause litigieuse, selon laquelle la vente de mobile home sur place est interdite, doit être interprétée en ce sens que le mobile home ne peut être vendu avec l'emplacement.
2. Elle a rappelé cette règle aux personnes qui souhaitaient acheter le mobile home de M. X., et leur a précisé qu'elle ne leur consentirait pas de contrat de location, compte tenu de la vétusté de ce mobile home âgé de plus de quinze ans ;
3. Cette clause est valable et n'a pas pour objet de créer un déséquilibre entre les parties ;
Attendu que M. X. soutient au contraire que :
1. La clause du contrat relative à l'interdiction de la vente de son mobile-home lui est inopposable pour la période d'octobre 2010 à mars 2011, dans la mesure où elle est postérieure à sa mise en vente ;
2. Pour la période postérieure, elle est abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dès lors que l'emplacement d'un mobile home constitue un élément déterminant de la vente et que cette cause a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les parties ;
3. La société CLAIRE RIVIERE est de mauvaise foi, dans la mesure où :
* sa gérante a découragé trois acheteurs potentiels de son mobile home ;
* en 2008, année de son achat du mobile home, elle n'avait pas opposé à la personne qui lui avait vendu le mobile home la clause d'interdiction de vente et ne pouvait donc affirmer aux acheteurs éventuels qu'ils ne pourraient le revendre ;
* elle fait une application discrétionnaire de cette clause en ne précisant pas les critères objectifs permettant de caractériser l'état de vétusté de l'installation ;
4. En bloquant délibérément la vente de son mobile home elle lui a causé un préjudice ;
Attendu cependant que la clause du contrat selon laquelle « la vente de caravanes ou mobiles homes sur place est interdite » et « l'emplacement ne peut faire l'objet d'un transfert à une autre personne » doit être interprétée en ce sens que la cession du droit au bail sur l'emplacement est interdite ; que cette clause, qui n'a pas pour objet ou pour effet de créer au détriment de M. X. un déséquilibre entre les droits et obligations des parties au contrat, n'est pas abusive ;
Attendu ensuite que la gérante de la société CLAIRE RIVIERE, dans un courrier du 19 mai 2012 adressé au conseil de M. X., précise qu'elle ne lui a jamais interdit de vendre son mobile home, mais lui avoir indiqué ainsi qu'à ses « futurs acheteurs », qu'ils ne pourraient pas le revendre ; que cette information ainsi donnée n'est pas constitutive d'une faute imputable à la société CLAIRE RIVIERE, en raison de sa fausseté, dès lors que le contrat conclu avec M. X. stipule une clause interdisant l'installation d'un mobile home de plus de cinq ans sur l'emplacement loué, que le sien en avait au moins quinze lorsqu'il l'a acheté, et qu'ainsi la société CLAIRE RIVIERE était en droit de refuser aux éventuels acheteurs la conclusion avec eux d'un contrat de location de l'emplacement ;
Attendu dans ces conditions qu'en l'absence de faute commise par la société CLAIRE RIVIERE, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il déboute M. X. de sa demande de dommages-intérêts ;
Sur la demande reconventionnelle de la société CLAIRE RIVIERE :
Attendu qu'elle soutient que M. X. n'ayant pas dénoncé le contrat de location, il s'est renouvelé par tacite reconduction et qu’il reste donc redevable des loyers ;
Attendu que pour conclure au rejet de cette demande, M. X. prétend que s'il avait vendu son mobile home, le contrat de location aurait été transféré à l'acquéreur, ce qui l'aurait libéré de son obligation de payer la redevance ; que la responsabilité de l'échec de la vente étant imputable à la société CLAIRE RIVIERE, elle doit en supporter les conséquences ;
Mais attendu que pour les motifs sus-exposés, la société CLAIRE RIVIERE n'est pas responsable du préjudice allégué par M. X. ;
Attendu ensuite qu'il ne conteste pas l'allégation de l'intimée selon laquelle le contrat conclu le 3 mars 2011 s'est renouvelé chaque année par tacite reconduction et que son mobile home stationne toujours sur l'emplacement pris en location ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il le condamne à payer les redevances des années 2012 et 2013, et de le condamner également à payer celle de l'année 2014 ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. X. à payer à la société CLAIRE RIVIERE la somme de 1.734,20 euros correspondant à la redevance de location de l'année 2014 ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X. et le condamne à payer à la société CLAIRE RIVIERE la somme de 800 euros ;
Le condamne aux dépens d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Joëlle POITOUX Michel GAGET
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