CA DIJON (2e ch. civ.), 29 septembre 2016
CERCLAB - DOCUMENT N° 5965
CA DIJON (2e ch. civ.), 29 septembre 2016 : RG n° 14/01365
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Or, En application de l'article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans savoir été entendue ou appelée. En l'espèce, ni la société JB Services, en sa qualité de fournisseur du matériel, ni la société UBIVOX, en sa qualité de prestataire de service n'ont été attraits à la procédure, de sorte que l'éventuelle inexécution des obligations contractuelles de la société Ubi Vox, seule invoquée par l'appelante, ne peut être débattue dans l'instance qui l'oppose à la seule à la société Locam. »
2/ « Conformément aux dispositions de l'article premier des conditions générales du contrat de location daté du 23 septembre 2010, la signature par le locataire (la SCP X.) et le fournisseur du matériel (la société JB services) du procès-verbal de livraison consacre la bonne exécution de la transaction et autorise la société Locam à régler la facture du fournisseur, le paiement emportant date du contrat et engagement définitif du locataire à l'exécuter. L'obligation pour la SCP X. de régler les loyers à la société Local trouve sa cause dans l'obligation de fourniture du matériel dont elle a reconnu qu'elle était exécutée.
Il sera relevé que la SCP X. ne prétend en effet à aucun moment que la société JB services a manqué à ses obligations contractuelles et en tout état de cause, en application de l'article premier des conditions générales du contrat de location, le locataire ne peut opposer au bailleur un défaut d'exécution du fournisseur. »
3/ « Il est acquis que le contrat de location a été conclu entre 2 sociétés commerciales, d'une part la SAS Locam, d'autre part la SCP X. et que l'objet du contrat était directement lié à l'activité professionnelle de cette dernière. Il est donc inopérant pour la SCP X. d'invoquer les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives aux clauses abusives, qui ne trouvent pas à s'appliquer entre professionnels, pour se voir exonérer du paiement des loyers échus à compter du 30 novembre 2010 et postérieurement à la résiliation du contrat au motif que la clause fixant la sanction du non-paiement des loyers, insérée à l'article 2 précité, serait abusive. »
COUR D’APPEL DE DIJON
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2016
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/01365. Décision déférée à la Cour : au fond du 15 avril 2014, rendue par le tribunal d'instance de Dijon : R.G. n° 11-12-000809.
APPELANTE :
SCP X.
inscrite au RCS de DIJON sous le n° D XX, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié au siège social sis : Représentée par Maître Alexandre M., avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 86
INTIMÉE :
SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
inscrite au RCS de ST ETIENNE sous le n° B XX, agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié en cette qualité au siège sis : Représentée par Maître Florent S., avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 127, Assistée de la SELARL LEXI Conseil & Défense, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 23 juin 2016 en audience publique devant la cour composée de : Renée-Michèle OTT, Président de chambre, président, Michèle BRUGERE, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du président, Sophie DUMURGIER, Conseiller, qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Elisabeth GUEDON,
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 22 septembre 2016 pour être prorogée au 29 Septembre 2016
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Michèle BRUGERE Conseiller, en remplacement du Président empêché, et par Elisabeth GUEDON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La SCP X. a conclu le 23 septembre 2010 avec la société Locam un contrat de location portant sur un matériel « une passerelle IP Patton et un modem ADSL 2 + WIFI Thomson » fourni par la société JB services, qui a été livré le 30 septembre 2010.
Aux termes de ce contrat, la SCP X. s'est engagée à régler à la société Locam 48 mensualités de 203,32 euros TTC, le premier loyer en terme à échoir, étant fixé en fonction de la date du procès-verbal de livraison du matériel.
Le 29 septembre 2010, la SCP X. a souscrit auprès de la société Ubi Vox un contrat d'abonnement téléphonie et fourniture d'accès à Internet d'une durée de 48 mois comprenant un forfait mobile de 12 heures, la mise à disposition d'un matériel « passerelle Numéris » et un transfert d'appel.
Prétendant que la société Ubi Vox, placée en liquidation judiciaire depuis le 16 novembre 2010 n'avait pas rempli ses obligations contractuelles à son égard en installant les solutions de téléphonie Internet vendues, la société X. a cessé de payer les loyers dûs à la société Locam à compter du 30 novembre 2010.
Se prévalant de la clause de déchéance du terme insérée dans les conditions générales du contrat de location à l'article 12, la société Locam, après avoir adressé une mise en demeure le 10 février 2012 à la SCP X., restée infructueuse, a fait citer cette dernière par acte d’huissier du 16 mai 2012 devant le tribunal d'instance de Dijon aux fins d'obtenir avec le bénéfice de l'exécution provisoire, sa condamnation au paiement d'une somme de 8.106,56 euros avec intérêts au taux légal, et de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par un jugement rendu le 15 avril 2014, le tribunal d'instance de Dijon a déclaré irrecevable la demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat Ubi vox au motif que cette société n'était pas partie à l'instance.
Le tribunal a par ailleurs condamné la société X. à payer à la société Locam la somme de 7371,60 euros avec intérêts au taux légal correspondant :
- à concurrence de la somme de 2.210,88 euros, à 12 loyers impayés,
- à concurrence de 5.158,72 euros au montant des 28 loyers à échoir,
- à concurrence de deux euros, aux clauses pénales réduites à cette somme en application de l'article 1152 du code civil.
Le tribunal a, en outre, dit n'y avoir lieu exécution provisoire de la présente décision, rejeté la demande tendant à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la SCP X. aux dépens.
Pour rejeter la demande tendant à voir prononcer la résolution du contrat Locam, le tribunal a relevé que la société X. avait signé le 30 septembre 2010 le procès-verbal de livraison et de conformité, confirmant ainsi son acceptation du matériel livré et s'engageant par la même à s'acquitter des loyers auprès de la société Locam.
Il a par ailleurs retenu qu'en application de l'article premier des conditions générales du contrat de location, le locataire ne pouvait opposer au bailleur un défaut d'exécution du fournisseur.
Par déclaration enregistrée au greffe le 21 juillet 2014 la SCP X. a relevé appel de cette décision.
Par conclusions transmises le 16 mars 2016, la SCP X. demande à la cour :
Vu les articles 1131 et suivants du Code civil, L. 132-1 et suivants du code de la consommation,
- de la recevoir en son appel, de le dire bien fondé,
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris du 15 avril 2014 rendu par le tribunal d'instance de Dijon,
- de constater que le contrat conclu avec la société Locam le 23 septembre 2010 est interdépendant du contrat Ubi Vox conclu le 29 septembre 2010, et passé pour réaliser une opération unique,
- de constater que le contrat Ubi Vox n'a jamais été exécuté,
- en conséquence de condamner la société Locam à lui rembourser l'intégralité des loyers perçus assortis de l'intérêt légal,
- subsidiairement de constater que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de consommation n'ont pas été respectées en ce que l'article 12 du contrat crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et que la clause relative à la sanction applicable consécutivement au non-paiement des loyers, doit être réputée non écrite,
- dès lors de débouter la société Locam de l'ensemble de ses demandes en paiement pour les loyers impayés à compter du 30 novembre 2010, ainsi que les loyers à échoir à compter du 30 mai 2012 et l'indemnité de clauses pénales de 10 %,
- enfin de dire qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits,
- de condamner la société Locam à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d'instance.
Par ses conclusions transmises le 15 février 2016 la société Locam demande à la cour :
Vu les articles 1134 et suivants, 1149 et 1131 du Code civil,
- de rejeter comme non fondé le recours de la SCP X.,
- de la débouter entièrement de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- de confirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Dijon en date du 15 avril 2014 en ce qu'il a condamné la SCP X. à lui payer la somme de 7.371,60 euros,
- de l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau,
- de condamner la SCP M. à lui régler la somme complémentaire de 736,96 euros,
- de dire que les intérêts sont dus sur la somme principale de 8.106,56 euros à compter de la mise en demeure du 10 février 2012,
- d'ordonner la capitalisation des intérêts par année entière à compter de la date de notification des premières écritures contenant ladite demande,
- de condamner la société X. à lui régler une nouvelle indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la même aux entiers dépens d'instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Me Florent S., avocat, sur son affirmation de droit.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 avril 2016.
En application de l'article 455 du code de procédure civile la cour se réfère aux dernières écritures des parties visées ci-dessus et aux pièces échangées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Il ressort des pièces produites que la SCP X. a signé le 23 septembre 2010 avec la SAS Locam un contrat de location portant sur un matériel « une passerelle IP Patton » et « un modem ADSL 2 + wi-fi Thomson » fournis par la société JB services ; que ce matériel a été livré le 30 septembre 2010 ainsi qu'en atteste le procès-verbal de livraison et de conformité sur lequel figurent la signature de Maître X. et celle du représentant du fournisseur ;
qu’aux termes de ce contrat la société X. s'est engagée à régler à la société LOCAM 48 mensualités de 203,32 euros TTC, le premier loyer devant intervenir en fonction de la date du procès-verbal de livraison du matériel ;
Que le 29 septembre 2010 la SCP ARNAULT M. a signé un contrat de prestation de services avec la société Ubi Vox portant sur la souscription à l'offre téléphonie d'Ubi vox comprenant un forfait mobile de 12 heures, la mise à disposition d'un matériel « passerelle Numéris » avec transfert d'appel pour un forfait mensuel de 170 euros hors-taxes.
La SCP X. reproche au premier juge de ne pas avoir prononcé la nullité du contrat UBIVOX pour absence de cause, et consécutivement la résolution du contrat LOCAM, à raison de l'interdépendance existant entre les deux contrats précités.
Or, En application de l'article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans savoir été entendue ou appelée. En l'espèce, ni la société JB Services, en sa qualité de fournisseur du matériel, ni la société UBIVOX, en sa qualité de prestataire de service n'ont été attraits à la procédure, de sorte que l'éventuelle inexécution des obligations contractuelles de la société Ubi Vox, seule invoquée par l'appelante, ne peut être débattue dans l'instance qui l'oppose à la seule à la société Locam.
La SCP ARNAUD M. ne peut donc solliciter l'annulation du contrat de prestation de services et par voie de conséquence celle du contrat location dès lors qu'elle n'a pas appelé en la cause la société Ubi Vox.
Le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable toute demande formée contre la société Ubivox doit être confirmé.
Conformément aux dispositions de l'article premier des conditions générales du contrat de location daté du 23 septembre 2010, la signature par le locataire (la SCP X.) et le fournisseur du matériel (la société JB services) du procès-verbal de livraison consacre la bonne exécution de la transaction et autorise la société Locam à régler la facture du fournisseur, le paiement emportant date du contrat et engagement définitif du locataire à l'exécuter. L'obligation pour la SCP X. de régler les loyers à la société Local trouve sa cause dans l'obligation de fourniture du matériel dont elle a reconnu qu'elle était exécutée.
Il sera relevé que la SCP X. ne prétend en effet à aucun moment que la société JB services a manqué à ses obligations contractuelles et en tout état de cause, en application de l'article premier des conditions générales du contrat de location, le locataire ne peut opposer au bailleur un défaut d'exécution du fournisseur.
Il s'ensuit que la première échéance du contrat est devenue exigible à la date du 30 septembre 2010.
Conformément aux dispositions de l'article 12 du contrat de location, en cas de résiliation contractuelle du contrat par défaut de respect dudit contrat par le locataire, ce dernier sera tenu, outre à la restitution du matériel, de verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation, majorées d'une clause pénale de 10 % ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorée d'une clause pénale de 10 %.
Il est acquis que le contrat de location a été conclu entre 2 sociétés commerciales, d'une part la SAS Locam, d'autre part la SCP X. et que l'objet du contrat était directement lié à l'activité professionnelle de cette dernière.
Il est donc inopérant pour la SCP X. d'invoquer les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives aux clauses abusives, qui ne trouvent pas à s'appliquer entre professionnels, pour se voir exonérer du paiement des loyers échus à compter du 30 novembre 2010 et postérieurement à la résiliation du contrat au motif que la clause fixant la sanction du non-paiement des loyers, insérée à l'article 2 précité, serait abusive.
La société Locam, qui, sans résultat, a mis en demeure le 10 février 2012 la SCP X. par lettre recommandée avec accusé de réception, de s'acquitter des loyers échus impayés au 30 janvier 2012, sous peine de déchéance du terme, est fondée à réclamer à celle-ci, qui a manqué à son obligation contractuelle, le paiement des loyers échus ainsi que des loyers à échoir pour un total de 7.369,60 euros, ainsi que l'a retenu à bon droit le premier juge. Cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 10 février 2012.
La clause pénale fixée par l'article 12 n'étant pas manifestement excessive, il n'y a pas lieu de réduire les indemnités sollicitées par la société Locam. Le jugement sera donc réformé de ce chef, s'agissant de la fixation du montant de la clause pénale, la SCP X. étant condamnée de ce chef à payer à la société Locam la somme de 736,96 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2012.
Il y a lieu par ailleurs d'ordonner la capitalisation des intérêts par année entière à compter de la date de notification des premières écritures de la société Locam contenant ladite demande.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement mérite de ce fait confirmation en ce qu'il a rejeté cette demande, la cour n'estimant pas devoir allouer à hauteur d'appel, à l'intimé une indemnité de ce chef.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Déclare les appels principal et incident recevables
Confirme le jugement dans toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la fixation du montant de la clause pénale contractuelle ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
Fixe le montant de la clause pénale à 736,96 euros,
Condamne la SCP X. à payer à la SAS Locam la somme de 736,96 euros avec intérêt au taux légal à compter du 10 février 2012.
y ajoutant,
Dit que la somme de 7.369,60 euros produira intérêts au taux légal à compter du 10 février 2012.
Ordonne la capitalisation des intérêts à compter de la date de notification des premières écritures de la société Locam contenant ladite demande.
Déboute la SAS Locam de sa demande en paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SCP X. aux dépens d'appel, distraits au profit de Maître S. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le conseiller pour le président empêché
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