6344 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Présentation générale
- 5803 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (2) - Cass. civ. 1re, 14 mai 1991 - Application directe de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 : illustrations
- 5714 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Moyen manquant en fait
- 6017 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Clauses sur l’objet principal ou le prix - Loi du 1er février 1995 - Notion d’objet principal
- 6020 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Réciprocité - Réciprocité des contreparties : obligations principales
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6344 (8 et 20 août 2023)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT
ASSURANCE - PRÉSENTATION GÉNÉRALE
Caractère limité de la protection. Si les contrats d’assurance suscitent un contentieux abondant, comme en attestent les nombreuses décisions recensées sur le site du Cerclab, un examen d’ensemble montre que l’efficacité de la protection contre les clauses abusives est en la matière relativement limitée, pour plusieurs raisons.
1/ Tout d’abord, avant la loi du 1er février 1995, l’examen des clauses abusives pouvait porter sur l’étendue des risques garantis, ce qui a effectivement permis aux juridictions d’adopter parfois des solutions favorables au consommateur. Néanmoins, la Cour de cassation avait tenté de freiner ce courant en adoptant une conception extrêmement étroite, pour ne pas dire utopique de la condition d’abus de puissance économique (Cerclab n° 5803).
En tout état de cause, sous l’influence de la directive du 5 avril 1993, la loi de 1995 a posé en principe que l’appréciation du caractère abusif ne pouvait porter sur la définition de l’objet principal, sauf si la clause n’est pas stipulée de manière claire et compréhensible. V. notamment pour le considérant n° 19 en préambule à la directive du 5 avril 1993 : « dans le cas de contrats d'assurance, les clauses qui définissent ou délimitent clairement le risque assuré et l'engagement de l'assureur ne font pas l'objet d'une appréciation de leur caractère abusive dès lors que ces limitations sont prises en compte dans le calcul de la prime payée par le consommateur. Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854.
Or, la détermination des risques garantis, du montant des indemnités et des primes sont des clauses définissant l’objet principal de l’obligation de l’assureur et l’adéquation du prix à ses prestations. De nombreuses contestations échouent donc souvent à ce stade, les magistrats ayant au surplus souvent une conception assez restrictive des clauses ni claires, ni compréhensibles. Par ailleurs, si les clauses de déchéance, de délai d’attente ou de carence, ne relèvent pas de l’art. L. 212-1 al. 3 C. consom., la solution n’est pas unanime pour les clauses d’exclusion, même si la tendance générale est plutôt d’étendre cette solution et la possibilité d’un contrôle (Cerclab n° 6017). Il faut noter d’ailleurs qu’en dépit de la prohibition posée par l’art. L. 212-1 al. 3 C. consom. les décisions recensées examinent souvent quand même le caractère abusif de la clause avant de le rejeter.
Certaines décisions semblent tenter de définir des critères précis pour distinguer les clauses relatives à la définition des garanties (qui portent sur l’objet principal) et les clauses d’exclusion qui peuvent être directement contrôlées, sans vérification préalable de leur caractère clair et compréhensible.
V. par exemple : la clause qui prive l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de réalisation du risque s'analyse en une clause d'exclusion de garantie, dont la preuve incombe à l’assureur, l'assuré ne se voyant imposer aux termes de la loi que la preuve des conditions de la garantie. CA Toulouse (3e ch.), 9 avril 2021 : RG n° 20/00544 ; Cerclab n° 8934 (assurance automobile ; qualification de clause d’exclusion de la clause excluant la garantie en cas d’ébriété et jugeant abusive le renversement de la charge de la preuve, dès lors qu’il appartient à l’assuré de prouver que cet est sans lien avec l’accident), confirmant TJ Toulouse, 13 janvier 2020 : RG n° 18/02788 ; Dnd. § V. cep. en sens contraire pour cette clause : les clauses d’un contrat d’assurance de véhicule qui excluent de la garantie du conducteur et de la garantie des dommages subis par le véhicule assuré les sinistres survenus lorsque le conducteur se trouvait sous l'empire d'un état alcoolique, en ce qu’elles délimitent le risque assuré et l'engagement de l'assureur, définissent l'objet principal du contrat ; rédigées de façon claire et compréhensible, elles échappent en conséquence à l'appréciation du caractère abusif des clauses contractuelles, au sens de l’anc. art. L. 132-1, al. 7, devenu L. 212-1, al. 3, C. consom. Cass. civ. 2e, 8 juillet 2021 : pourvoi n° 19-25552 ; arrêt n° 705 ; Bull. civ ; Cerclab n° 9017 (la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche inopérante), rejetant le pourvoi contre CA Pau (1re ch.), 7 août 2019 : Dnd.
V. aussi dans le cadre d’une assurance-crédit : la cour n'est pas tenue par la qualification formellement retenue par le contrat et il lui incombe au contraire de procéder à la requalification d'une condition de garantie en exclusion de garantie, si la forme et la portée de la clause litigieuse permettent de l'analyser comme une clause d'exclusion indirecte de la garantie ; la condition de garantie affecte l'obligation de couverture et suppose une extériorité par rapport au risque couvert, l'exclusion de garantie affecte l'obligation de règlement et est inhérente au sinistre ; la clause qui prive l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de réalisation du risque s'analyse en une clause d'exclusion de garantie ; la clause d'exclusion a pour objet d'exclure un risque particulier de la garantie dans le champ de laquelle il se trouve normalement inclus ; ainsi, pour qu'il y ait risque exclu d'une garantie, il est nécessaire, d'une part, que l'élément visé soit soumis à l'événement aléatoire dont le souscripteur entend se prémunir, d'autre part que cet élément ait vocation à être garanti à défaut de toute précision contraire. CA Douai (3e ch.), 16 septembre 2021 : RG n° 20/03301 ; arrêt n° 21/377 ; Cerclab n° 9121 (garantie incapacité totale de travail d’une assurance-crédit), sur appel de TJ Béthune, 16 juin 2020 : RG n° 17/04352 ; Dnd. § V. aussi : Les clauses d'exclusion de garantie sont celles qui privent l'assuré du bénéfice de la garantie des risques en considération de circonstances particulières de réalisation du risque ; en revanche, la qualification de condition de garantie doit être retenue lorsque l'évènement visé par la clause affecte en permanence le risque couvert ; tel est le cas, en l'espèce, de la clause litigieuse qui définit l'ITT en tant que celle-ci est couverte par la garantie et non pour l'exclure du champ de cette garantie. CA Paris (pôle 4 ch. 8), 8 février 2022 : RG n° 20/06134 ; Cerclab n° 9406 (assurance-crédit), sur appel de TJ Melun, 3 mars 2020 : RG n° 18/02055 ; Dnd.
2/ Par ailleurs, l’exclusion de l’art. L. 212-1 al. 3 C. consom. suppose (depuis la réforme de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. par l’ordonnance de 2001) que la clause soit rédigée de manière claire et compréhensible, exigence qui mérite souvent d’être vérifiée. § V. par exemple, pour un avis de la Commission : n’est pas rédigée de façon claire et compréhensible une clause d’un contrat d’assurance contre les vols de portable excluant la garantie en cas de vol commis sans violence ou sans effraction, alors que la garantie concernait les « vols caractérisés », rédaction qui implique seulement que l’infraction soit caractérisée en tous ses éléments constitutifs tels que ressortant de la définition légale du vol, à savoir la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui. CCA (avis), 17 avril 2008 : avis n° 08-01 ; Cerclab n° 3752 (clause ambiguë, qui de surcroît n’est pas rédigée en caractères très apparents, et abusive selon la Commission dès lors qu’elle exclut ou limite de façon inappropriée les droits légaux du consommateur vis-à-vis du professionnel), sur demande de Jur. prox. Paris (17e arrdt), 20 février 2008 : Dnd.
3/ Enfin, même lorsque les juges exercent leur contrôle, ils semblent plutôt conciliants avec les assureurs, notamment pour des considérations liées à l’adaptation du risque au coût de sa couverture, invoquant ainsi implicitement le respect de l’économie du contrat. Il convient de noter, cependant, que cet argument reste souvent très général et qu’aucune recherche de l’impact réel de l’élimination de la clause n’est produite (seuls les assureurs ont les moyens de la réaliser, ce que bien évidement ils ne font pas). Le contraste est assez saisissant avec la Commission des clauses abusives qui a toujours été plus exigeante. Il faut toutefois noter que la Commission a étudié un nombre infiniment plus élevé de clauses que les juridictions, dont le contentieux se concentrent massivement sur quelques hypothèses précises.
Ceci ne signifie par pour autant que la protection des clauses abusives est en la matière inutile, mais sa portée reste réduite. Il est permis de se demander si la rédaction de l’art. L. 212-1 al. 3 C. consom., ainsi que l’article de la directive qu’il transpose ne sont pas un peu trop généraux.
N.B. Les développements ci-dessous ne visent pas à synthétiser toutes les positions des décisions recensées dans les assurances particulières décrites par ailleurs. Seules quelques problématiques générales, liées notamment aux textes spécifiques du Code des assurances ont été ciblées.
Logique générale. La référence aux seuls désavantages subis par l’assuré, sans les comparer avec les avantages recueillis par l’assureur, ne permet pas de caractériser l’avantage excessif obtenu par celui-ci. Cass. civ. 1re, 12 mars 2002 : pourvoi n° 99-15711 ; arrêt n° 478 ; Bull. civ. I, n° 92 ; Cerclab n° 2033 (rédaction antérieure à la loi du 1er février 1995). § Dans le même sens : l'appréciation du caractère abusif d'une clause suppose la comparaison entre les désavantages subis par l'assuré et les avantages recueillis par l'assureur. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 5 avril 2016 : RG n° 15/00758 ; arrêt n° 2016/146 ; Cerclab n° 5574 ; Juris-Data n° 2016-006275 (assurance de groupe ; clause de cessation de la prise en charge des échéances à compter de la retraite ou de la préretraite de l'assuré, « quelle qu'en soit la cause », jugée abusive), sur appel de TGI Paris, 20 novembre 2014 : RG n° 13/13976 ; Dnd. § V. aussi Cerclab n° 6020.
Régime de la preuve. Il appartient à l'assuré d'une part, de rapporter la preuve du sinistre qu'il invoque, d'autre part, d'établir que les garanties du contrat qu'il a souscrit doivent être mobilisées, alors que c'est à l'assureur qui dénie sa garantie de prouver que le contrat ne peut recevoir application, faute pour l'assuré de remplir les conditions contractuelles. CA Aix-en-Provence (3e ch. B), 18 mai 2017 : RG n° 15/11666 ; arrêt n° 2017/163 ; Cerclab n° 6851 (assurance d’un véhicule loué avec option d'achat), sur appel de TGI Marseille, 21 mai 2015 : RG n° 14/04417 ; Dnd.
La preuve des circonstances de fait d'une exclusion de garantie incombant à l'assureur, il appartient à l’assureur d’un motard, pour les dommages subis par ce dernier ou son véhicule, de rapporter la preuve que les conditions de l’exclusion de garantie des dommages sont remplies, à savoir en l’espèce la conduite sous l'emprise d'un état alcoolique et la preuve que cet état alcoolique est en lien de causalité avec l'accident ; est abusive la clause imposant à l’assuré de rapporter la preuve que ces conditions ne sont pas remplies, dès lors qu’elle institue un renversement de la charge de la preuve qui, sous l'empire de ces anciens textes et avant même leur insertion dans la liste des clauses présumées abusives de manière irréfragable, était considéré par une jurisprudence constante comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, étant relevé que l'acceptation par l’assuré de cette clause est indifférente, dans le cadre de l'ordre public de protection du consommateur ou non-professionnel. CA Amiens (1re ch. civ.), 26 octobre 2017 : RG n° 16/02546 ; Cerclab n° 7066 (absence d’applicabilité de la loi du 4 août 2008 et du décret du 18 mars 2009, en l’espèce l’ancien art. R. 132-1-12° C. consom., à un contrat conclu le 6 avril 2006, le sinistre s’étant produit le 19 juillet 2007), sur renvoi de Cass. civ. 1re, 12 mai 2016 : pourvoi n° 14-24698 ; arrêt n° 516 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 5606 (cassation de l’arrêt n’ayant pas examiné d’office le caractère éventuellement abusif de la stipulation, l’arrêt indiquant explicitement que l’origine du déséquilibre pouvait résulter du renversement de la charge de la preuve), cassant CA Amiens (1re ch. 1re sect.), 23 février 2012 : RG n° 11/01265 ; Cerclab n° 7352, sur appel de TGI Amiens, 11 mars 2011 : Dnd.
Sur la clause réservant la gestion précontentieuse des litiges à l’assureur, rappr. pour un contrat professionnel : CA Grenoble (ch. com.), 9 juin 2004 : RG n° 03/02387 ; arrêt n° 386 ; Cerclab n° 3126 ; Juris-Data n° 252069 (décision estimant que si l’opportunité de ces clauses se discute, notamment quant à l’accès à la justice, cette discussion ne pouvait être examinée en l’espèce, s’agissant d’un contrat conclu par un professionnel et que la clause ne pouvait être déclarée abusive), sur appel de T. com. Gap, 24 janvier 2003 : RG n° 00/00082 ; Dnd.
Langue du contrat. L’assureur n’est pas tenu au titre de son devoir d’information et de conseil d’informer le souscripteur qu’aux termes de l’art. L. 112-3, al. 3, C. assur., lorsque les parties au contrat n’ont pas la possibilité d’appliquer une autre loi que la loi française, le contrat et les informations transmises par l’assureur au souscripteur peuvent, d’un commun accord entre elles et à la demande écrite de ce dernier seulement, être rédigés dans la langue ou dans l’une des langues officielles de l’Etat dont il est ressortissant. Cass. civ. 2e, 14 décembre 2017 : pourvoi n° 16-26709 ; arrêt n° 1589 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 7310 (assurance automobile souscrite par un assuré russe, lequel n’avait pas formulé une telle demande), pourvoi contre CA Orléans, 12 septembre 2016 : Dnd.
Présentation matérielle des contrats. La Commission des clauses abusives a recommandé à plusieurs reprises la modification de la présentation matérielle des contrats d'assurance pour remédier aux difficultés liées à la multiplication des documents remis, à la terminologie utilisée et à la difficulté pour les consommateurs de mesurer clairement l’étendue des garanties souscrites. V. sur ces questions : Recomm. n° 85-04/III : Cerclab n° 3524 (considérants n° 25 à 29) - Recomm. n° 89-01/III : Cerclab n° 2181 (texte de la recommandation sur l’assurance automobile) et Cerclab n° 6370.
Déclaration des facteurs de risques : détermination des manquements. La Commission des clauses abusives a recommandé à plusieurs reprises l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de soumettre le preneur d'assurance aux sanctions prévues pour non-déclaration ou déclaration inexacte du risque assuré lorsqu'il a omis de signaler des circonstances ou des faits autres que ceux sur lesquels l'assureur l'a explicitement interrogé au moyen d'un questionnaire écrit, avant la conclusion du contrat, en cours de contrat ou lors de son renouvellement. Recomm. n° 89-01/I-1 et III-1 : Cerclab n° 2181 (assurance automobile). § Dans le même sens : Recomm. n° 85-04/I-1° : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation).
Pour une illustration implicite : les clauses de déchéance litigieuses permettent à l'assureur de soumettre l'assuré aux sanctions prévues pour non-déclaration ou déclaration inexacte du risque assuré lorsqu'il a omis de signaler des circonstances ou des faits autres que ceux sur lesquels l'assureur l'a explicitement interrogé au moyen d'un questionnaire écrit avant la conclusion du contrat, en cours de contrat ou lors de son renouvellement ; est abusive la clause qui sanctionne l’assuré au motif qu’il n’aurait pas déclaré que l’immeuble était inscrit aux Monuments historiques dès lors qu’elle fait peser sur l'assuré une obligation qui incombait à l'assureur. CA Bourges (ch. civ.), 28 septembre 2017 : RG n° 16/01233 ; Cerclab n° 7068, sur appel de TGI Châteauroux, 26 juillet 2016 et 2 août 2016 : Dnd. § N.B. L’arrêt n’est pas parfaitement clair, mais il semble reprocher à l’assureur d’avoir fait peser sur l’assuré une obligation d’information sur la situation du bien, au regard d’un régime très spécifique, alors que cette information n’a pas été explicitement demandée dans un questionnaire, mais qu’elle a été érigée en obligation noyée au sein des conditions générales.
L'assureur étant en droit de se faire une opinion exacte du risque garanti, n’est pas abusive la « clause » par laquelle l’assureur s'enquiert des pathologies affectant le candidat assuré. CA Metz (1re ch. civ.), 7 février 2023 : RG n° 21/00902 ; arrêt n° 23/00042 ; Cerclab n° 10092 (assurance de groupe), sur appel de TJ Sarreguemines, 9 février 2021 : RG n° 18/00274 ; Dnd. § N'est pas abusive la clause de déchéance excluant la garantie lorsque l’assuré fait « de mauvaise foi, une fausse déclaration sur la nature, les causes, circonstances ou conséquences d'un sinistre », en l’espèce sur le kilométrage du véhicule au moment du vol qui constitue une donnée nécessaire à l'assureur pour lui permettre d'évaluer le véhicule et usuellement demandée lors du sinistre afin d’évaluer le montant de l’indemnité. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 24 octobre 2017 : RG n° 16/23012 ; arrêt n° 2017/308 ; Cerclab n° 7130 (assuré ne pouvant ignorer la minoration du kilométrage lors de sa déclaration), sur appel de TGI Paris, 4 juillet 2016 : RG n° 14/10956 ; Dnd.
Déclaration des facteurs de risques : accroissement des sanctions légales. La Commission des clauses abusives a recommandé à plusieurs reprises l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'assortir la déclaration inexacte ou incomplète du risque, hors les cas de mauvaise foi dûment établie, d'une sanction plus sévère que la réduction de l'indemnité en proportion du montant des primes payées par rapport à celui des primes qui auraient été dues si le risque avait été complètement et exactement déclaré et d'appliquer cette sanction lorsque le risque omis ou dénaturé a été sans influence sur le sinistre. Recomm. n° 89-01/I-2 : Cerclab n° 2181 (v. art. L. 113-9 C. assur.). § Recomm. n° 85-04/I-2° : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation).
Risque garanti : date de survenance du risque. Il résulte de la combinaison des art. 1131 C. civ. [ancien], L. 124-1 et L. 124-3 C. assur., en l’absence d’autorisation législative spécifique qui soit applicable en la cause, que le versement des primes, pour la période qui se situe entre la prise d’effet du contrat d’assurance et son expiration, a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s’est produit pendant cette période ; toute clause qui tend à réduire la durée de la garantie de l’assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l’assuré est génératrice d’une obligation sans cause, comme telle illicite et réputée non écrite. Cass. civ. 1re, 2 juin 2004 : pourvoi n° 01-15760 ; Cerclab n° 5188 (c’est à bon droit et sans conférer d’effet rétroactif à la déclaration d’illégalité, que les juges du second degré ont décidé, hors toute appréciation de son éventuel caractère abusif, que la clause litigieuse était illicite, sans que puissent y faire obstacle les objectifs invoqués de sécurité juridique et de confiance légitime), rejetant le pourvoi contre CA Aix-en-Provence (1re ch. civ. sect. B), 21 juin 2001 : Dnd - Cass. civ. 1re, 2 juin 2004 : pourvoi n° 01-15761 ; Cerclab n° 5189 (idem), rejetant le pourvoi contre CA Aix-en-Provence (1re ch. civ. sect. B), 21 juin 2001 : Dnd. § Dans le même sens, publié au Bulletin civil : Cass. civ. 1re, 12 avril 2005 : pourvoi n° 03-20980 ; Bull. civ. I, n° 185 ; Cerclab n° 1886, rejetant le pourvoi contre CA Agen, 7 octobre 2003 : Dnd. § Toute clause ayant pour effet de réduire la durée de la garantie de l’assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l’assuré est génératrice d’une obligation sans cause et doit être réputée non écrite. Cass. civ. 3e, 26 novembre 2015 : pourvoi n° 14-25761 ; arrêt n° 1332 ; Cerclab n° 5473, cassant CA Paris (pôle 4 ch. 5), 10 septembre 2014 : RG n° 13/00945 ; Cerclab n° 7360, sur appel de TGI Bobigny, 6 décembre 2012 : RG n° 09/13182 ; Dnd. § Sur les décisions écartant ce genre de clauses, sans référence aux clauses abusives (moyen manquant en fait), V. Cerclab n° 5714. § N.B. Il conviendra de déterminer si cette solution se maintiendra après la réforme du Code civil qui a supprimé la cause. Il serait peut-être possible de se fonder sur l’art. 1170 C. civ.
Exclusions de garantie. Sur la notion : la clause qui prive l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de réalisation du risque, constitue une clause d'exclusion de garantie. Cass. civ. 2, 14 octobre 2021 : pourvoi n° 20-14094 ; arrêt n° 942 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9281 (assurance d’une copropriété ; clause excluant l'assurance des dommages ou responsabilités ayant pour origine un défaut d'entretien ou de réparation), cassant, au visa de l’art. L. 113-1 C. assur., CA Paris (pôle 4 ch. 2), 27 novembre 2019 : Dnd (clause analysée non comme une clause d’exclusion, mais comme une clause de non assurance).
Pour un exemple : caractère abusif et illicite, au regard de l’art. L. 113-1 C. assur., qui exige des exclusions « limitées » de clauses d’exclusion rédigées de façon trop large ou imprécise : Recomm. n° 85-04 : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation ; I-35° et considérant n° 47 ; exclusion de « tous les dommages qui résultent de la violation délibérée des lois, règlements et usages » - I-36° et considérant n° 48 ; exclusion de fautes définies en termes généraux et vagues comme par exemple les fautes « lourdes », « inexcusables », « les dommages dont la survenance était inéluctable » ou « les dommages, les inconvénients et les troubles de voisinage ou d'usage qui résultent de façon prévisible ou inévitable de la nature de l'immeuble, objet du contrat » - I-38 et considérant n° 50 : clause restreignant la garantie responsabilité civile à la seule responsabilité délictuelle ou excluant les conséquences de la responsabilité contractuelle).
Cassation, au visa de l’art. L. 112-4 C. assur, qui dispose que les clauses des polices édictant des exclusions de garantie ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents, de l’arrêt jugeant que le texte est respecté aux motifs que la clause est rédigée « en caractères lisibles et gras », sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la clause litigieuse était rédigée en termes très apparents de manière à attirer spécialement l'attention de l'assuré sur la nullité qu'elle édictait. Cass. civ. 2e, 14 octobre 2021 : pourvoi n° 20-11980 ; arrêt n° 945 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9280, cassant CA Fort-de-France (ch. civ.), 12 février 2019 : Dnd.
Conditions de versement de l’indemnité : primes payables par fraction. Est illicite, au regard de l’art. L. 113-5 C. assur., la clause prévoyant qu’au cas où le paiement de la prime annuelle est fractionné, le sinistre rend exigible les fractions de prime non encore échues, même si l'adhérent serait à jour de ses obligations ; ce mécanisme contractuel, qui subordonne l'indemnisation du sinistre au règlement de fractions de prime non encore échues, est d'autant plus paradoxal que ni la procédure de suspension des garanties de l'art. L. 113-3 C. assur., ni la procédure d'exclusion de l'art. 141-3 de ce même code n'ont été mises en œuvre. CA Grenoble (1re ch. civ.), 21 juin 2016 : RG n° 13/01940 ; Cerclab n° 5680 (« en cas de sinistre, il sera demandé le paiement intégral de la cotisation annuelle avant l'indemnisation du sinistre »), sur appel de TGI Grenoble, 8 avril 2013 : RG n° 10/03470 ; Dnd.
Montant de l’indemnité : limitations indirectes de garantie. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'inclure dans les « définitions des termes principaux du contrat » des restrictions équivalant à des exclusions indirectes de risque ou à des limitations indirectes de garantie. Recomm. n° 85-04/I-16° : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation).
Montant de l’indemnité : « règle proportionnelle ». La Commission des clauses abusives recommanda que les contrats comportent des clauses ayant pour objet ou pour effet de constater la renonciation à la « règle proportionnelle » prévue par l'art. L. 121-5 du code des assurances. Recomm. n° 85-04/II-7° : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation ; considérant n° 30 ; lorsque l'assurance de chose est consentie pour une valeur déclarée à l'avance, l'assureur bénéficie en principe, sauf renonciation expresse prévue par l'art. L. 121-5 C. assur., de la « règle proportionnelle » qui lui permet en cas de destruction du bien, de limiter son engagement en fonction du rapport existant entre la somme assurée et la valeur assurable ou somme pour laquelle l'assuré aurait dû se faire garantir pour recevoir une indemnisation intégrale si le bien avait été totalement détruit ; règle jugée incompréhensible par les assurés qui pensent s’être assurés pour une certaine somme).
Délai de paiement. La Commission des clauses abusives recommande que les contrats comportent des clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer à l'assureur un délai d'une durée maximale de quatre mois à partir de la déclaration du sinistre pour présenter une offre d'indemnité à l'assuré ou à la victime. Recomm. n° 85-04/II-6° : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation ; considérant n° 22 ; contrats prévoyant en général selon la Commission un délai maximal de trente jours après l'accord amiable ou la décision judiciaire devenue exécutoire, sans imposer de sanction en cas de non respect de cette obligation).
Frais d’expertise. Aux termes de l’art. 2 CPC, les parties conduisent l'instance sous les charges qui leur incombent ; il ne peut être fait grief au contrat de rappeler que les frais engagés en dehors de la procédure amiable contractuelle sont à la charge de l'assuré. CA Lyon (1re ch. civ. B), 13 mars 2018 : RG n° 16/06054 ; Cerclab n° 7504 (assurance de vol de voiture ; rejet de l’argument des assurés soutenant que que la clause prévue aux conditions générales du contrat d'assurance, stipulant que les honoraires de l'expert judiciaire et des conseils sont supportés par la partie qui prend l'initiative de sa désignation, est abusive en application des art. L. 212-1 et R. 212-2-10° C. consom.), sur appel de TGI Lyon (4e ch.), 7 juin 2016 : RG n° 14/12288 ; Dnd.