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CA POITIERS (1re ch. civ.), 9 décembre 2016

Nature : Décision
Titre : CA POITIERS (1re ch. civ.), 9 décembre 2016
Pays : France
Juridiction : Poitiers (CA), 1re ch. civ.
Demande : 15/03955
Décision : 16/530
Date : 9/12/2016
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/09/2015
Numéro de la décision : 530
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6650

CA POITIERS (1re ch. civ.), 9 décembre 2016 : RG n° 15/03955 ; arrêt n° 530

Publication : Jurica

 

Extrait : « La facture établie par la société Alliance automobile centre ouest mentionne : « Véhicule vendu en l'état, sans révision, sans garantie - Prix de vente d'origine comprenant une révision et une garantie : 10.290 euros. - Je reconnais qu'ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST m'a déclaré revendre ce véhicule dans l'état exact où il a été acheté d'occasion, sans que ce véhicule ait bénéficié de la moindre remise en état, en échange de quoi une baisse importante du prix de vente a été consentie. Par suite, je déclare faire mon affaire personnelle et prendre sous ma responsabilité le déplacement de ce véhicule d'Alliance automobile à ma résidence et m'engage avant de l'utiliser à nouveau, à faire procéder au plus tard le lendemain de mon achat au remplacement du kit de distribution. (...) Enfin, ayant acheté le véhicule dans l'état où il se trouve, après examen, je décharge Alliance automobile de toute garantie concernant cette vente ».

Le tribunal a déclaré cette clause abusive par application des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation, au motif que « les mentions, à supposer qu'elles aient une valeur contractuelle, la preuve d'une acceptation par l'acheteuse des stipulations portées unilatéralement par le vendeur n'étant pas rapportée, sont de nature à constituer une clause abusive au sein des dispositions précitées, non opposable à l'acheteuse ».

Sans qu'il soit besoin de recourir à la notion de clause abusive, il est de jurisprudence constante qu'un vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose vendue et ne peut se prévaloir d'une stipulation excluant à l'avance ou limitant sa garantie.

En conséquence la garantie de la société Alliance automobile peut être recherchée sur le fondement de la garantie légale des vices cachés, si les conditions de mise en œuvre de cette garantie sont réunies, à savoir un vice caché, antérieur à la vente et rendant le véhicule impropre à l'usage auquel il est destiné. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE POITIERS

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 9 DÉCEMBRE 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/03955. Arrêt n° 530. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 17 août 2015 rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS.

 

APPELANTE :

SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST

Ayant pour avocat plaidant Maître Gérald F. de la SCP B. F., avocat au barreau de POITIERS.

 

INTIMÉES :

Madame X.

née le [date] à [ville], Ayant pour avocat plaidant Maître Florence D. de la SCP D.-G.-T., avocat au barreau de POITIERS

SAS RENAULT

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Ayant pour avocat plaidant Maître Jérôme C. de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

SAS LITTORAL AUTOMOBILE DISTRIBUTION RENAULT LA ROCHELLE

Ayant pour avocat plaidant Maître Yann M. de la SCP ERIC T. - YANN M., avocat au barreau de POITIERS.

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 2 novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant : Madame Isabelle CHASSARD, Président, Madame Odile CLÉMENT, Conseiller.

Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Isabelle CHASSARD, Président, Madame Odile CLEMENT, Conseiller, Madame Martine ANDRIEUX, Conseiller.

GREFFIER, lors des débats : Madame Marie-Laure MAUCOLIN,

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Madame Isabelle CHASSARD, Président, et par Mme Marie-Laure MAUCOLIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 5 janvier 2011, Mme X. a acquis auprès de la société Alliance automobile centre ouest un véhicule d'occasion Renault Scenic présentant un kilométrage de 87.874 km, au prix de 9.759 euros. Le véhicule a été vendu en l'état avec la précision qu'il n'avait pas fait l'objet de révision, en échange d'une baisse de prix.

Le véhicule est tombé en panne le 2 juillet 2011 après avoir parcouru 8.593 km.

Après une expertise amiable, Mme X. a fait assigner son vendeur en résolution de la vente pour vice caché.

La société Alliance automobile centre ouest a appelé en garantie la SAS Littoral automobile distribution Renault la Rochelle, son vendeur, la SAS Renault, constructeur, et la SARL « Garage N. et Garage de l'Océan ».

Le juge de la mise en état a ordonné une expertise par ordonnance du 20 juin 2013.

Après dépôt du rapport d'expertise de M. C., par jugement en date du 17 août 2015, le Tribunal de Grande Instance de Poitiers a statué comme suit :

« - Prononce la résolution pour vice caché de la vente par la SARL Alliance automobile centre ouest à Mme X. du véhicule Renault Scenic II immatriculé XX (...) ;

- CONDAMNE en conséquence la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. la somme de 9.759 euros en remboursement du prix de vente, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 23 mars 2012, date de l'assignation ;

- DIT que Mme X. devra laisser à la disposition de SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST le véhicule objet de la vente résolue, à charge pour cette société de le récupérer ou le faire récupérer à ses frais sur le lieu de son garage actuel ;

- CONDAMNE la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. la somme de 31.075 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts de retard au taux légal à compter de la date de prononcé du jugement ;

- CONDAMNE la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. la somme de 2.200 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNE la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à la SAS LITTORAL AUTOMOBILE DISTRIBUTION la somme de 1.400 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNE la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à la SAS RENAULT la somme de 1.400 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONSTATE le désistement d'instance et d'action de ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à l'égard de GARAGE N. ET GARAGE DE L'OCEAN ;

MET hors de cause la SARL GARAGE N. ET GARAGE DE L'OCEAN ;

Ordonne l'exécution provisoire ;

Rejette tout autre chef de demande ;

Condamne la SARL Alliance automobile centre ouest aux dépens incluant les frais de l'expertise ordonnée par le juge de la mise en état. »

Le premier juge a notamment retenu :

- que la clause tendant à empêcher l'acquéreur d'intenter une action en résolution de la vente est abusive et ne lui est pas opposable ;

- que le véhicule était affecté d'un vice caché

- qu'aucune faute (défaut d'entretien) ne pouvait être reprochée à l'acquéreur ;

- que le vendeur professionnel est tenu de tous les dommages et intérêts ;

- que la preuve d'une faute dans l'exécution de ses obligations contractuelles par la société Littoral automobile distribution, qui a vendu le véhicule à la société Alliance automobile n'est pas rapportée ;

- que le défaut d'entretien, qui est à l'origine des désordres, ne peut être reproché à la société Renault.

 

LA COUR

Vu l'appel général interjeté par la SARL Alliance automobile Centre Ouest le 15 septembre 2015

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 3 octobre 2016, la société Alliance automobile centre ouest a présenté les demandes suivantes :

« Constater, dire et juger que les mentions de la facture ne constituent pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de parties du contrat de vente du véhicule automobile de Madame L., au sens des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation.

Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil, fondement principal de Mme X. ou des dispositions de l'article L. 211-4 et suivants du Code de la consommation, fondement subsidiaire de Mme X., constater, dire et juger que n'est pas établie l'existence d'un vice caché antérieur à la vente par la SOCIETE ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à Mme X., ni même l'existence d'un défaut de conformité en raison de ce que Mme X. a failli aux obligations d'entretien du véhicule délibérément.

Par conséquent,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente du véhicule au visa de la garantie des vices cachés.

Statuant à nouveau :

Débouter purement et simplement Mme X. de l'ensemble de ses prétentions quel que soit le fondement juridique choisi par elle au regard des éléments factuels du dossier.

Prononcer la mise hors de cause de la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST.

Par voie de conséquence,

Condamner Mme X. à restituer les fonds qui lui ont été adressés au titre de l'exécution provisoire par la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST consécutivement au jugement du Tribunal de Grande Instance de Poitiers du 17 août 2015.

A défaut, dans l'hypothèse d'une condamnation,

Dire et juger que toute condamnation à l'égard de la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST sera prononcée en deniers ou quittance compte tenu des règlements d'ores et déjà effectués.

Réduire à sa très juste proportion les prétentions indemnitaires de Mme X. pour ce qui concerne sa demande au titre du préjudice de jouissance et rejeter la demande nouvelle de Mme X. présentée devant la Cour quant à la demande de prise en charge des intérêts afférents à un emprunt aux fins d'acquisition d'une nouvelle voiture.

Débouter purement et simplement celle-ci de sa demande formulée au titre du préjudice moral.

Vu l'article L. 137-2 du Code de la consommation en vigueur au moment du règlement de la facture de gardiennage

Vu l'article 1382 du Code civil,

Constater, dire et juger que Mme X. a engagé sa responsabilité à l'égard de la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à raison de sa faute dans le règlement de la facture de gardiennage n° 324199 d'un montant de 20.377,20 euros éditée par la SAS Garage D. Frères puisqu'aussi bien elle était en droit d'opposer audit garage la prescription biennale tirée du Code de la consommation.

Débouter par voie de conséquence Mme X. de ses prétentions au titre des frais de gardiennage et la condamner à la restitution de la somme de 20.377,20 euros à la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST.

Par impossible et dans l'hypothèse d'une condamnation de la société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST au profit de Mme X.,

Dire et juger que l'appréciation de la responsabilité de la SOCIETE ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST ne peut que s'effectuer en terme de perte de chance eu égard à la Jurisprudence en considération du comportement de Mme X. qui n'a procédé à aucun entretien après l'acquisition de son véhicule.

Constater, dire et juger que si le vice caché est retenu, ou subsidiairement, le défaut de conformité, il existe également et nécessairement par voie de conséquence dans la relation contractuelle entre la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST et la Société LITTORAL AUTOMOBILES DISTRIBUTION, le véhicule n'ayant parcouru que 31 kilomètres entre l'achat par la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à la LITTORAL AUTOMOBILES DISTRIBUTION et la vente à Mme X.

Par voie de conséquence,

Prononcer la résolution de la vente entre la Société Alliance Automobile Centre Ouest et la SAS Littoral Automobile Distribution au visa principal des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil ou subsidiairement au visa des dispositions des articles 1604 et suivants du Code civil.

Condamner alors la SAS Littoral Automobile Distribution à restituer à la Société Alliance Automobile Centre Ouest la somme de 7.500 euros correspondant aux frais d'acquisition du véhicule RENAULT SCENIC et dire que la Société Alliance Automobile Centre Ouest devra restituer le véhicule.

Condamner la SAS LITTORAL AUTOMOBILE DISTRIBUTION à garantir la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST de toutes les demandes accessoires formulées par Mme X.

Par extrême impossible, dans l'hypothèse d'une condamnation de la Société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST au profit de Mme X., vu notamment les dispositions de l'article L. 211-14 du Code de la Consommation, dire et juger que la SAS RENAULT relèvera indemne la Société Alliance Automobile Centre Ouest de toutes condamnations en principal, frais et accessoire et au visa des dispositions des articles 1604 et suivants du Code civil.

En tout état de cause,

Rejeter les demandes de Mme X. au titre du préjudice de jouissance, du préjudice moral, des frais de gardiennage, des frais de remorquage entre Carcassonne et Migné-Auxances.

Condamner Mme X. ainsi que tout défaillant à payer à la Société Alliance Automobile Centre Ouest la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner Mme X. ainsi que tout défaillant aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire et dont distraction au profit de la SCP B.-F. »

 

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 5 octobre 2016, Mme X. a présenté les demandes suivantes :

« Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,

Vu les articles L. 211-4 et suivants du Code de la consommation,

Vu l'article 1147 du Code civil,

Vu l'article L. 111-1 du Code de la consommation,

Vu l'article 700 du Code de procédure civile,

ORDONNER le rabat de l'ordonnance de clôture,

A titre principal, sur la garantie des vices cachés :

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance le 17 août 2015 en ce qu'il a :

- Prononcé la résolution de la vente pour vice caché,

- Condamné la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. la somme de 9.759 euros en remboursement du prix de vente, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2012, date de l'assignation,

- Dit que Mme X. doit laisser à la disposition de la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST le véhicule, à charge pour cette dernière de le récupérer,

- Dit que la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST était tenue d'indemniser Mme X. pour les préjudices subis,

L'INFIRMER quant au montant des sommes allouées au titre des dommages et intérêts, et ce faisant :

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. à titre de dommages et intérêts la somme de 35.942,40 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2012, date de l'assignation,

A titre surabondant, sur la garantie légale de conformité :

- PRONONCER la résolution de la vente ;

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à restituer à Mme X. la somme de 9.759 euros correspondant au prix de vente du véhicule et Mme X. à restituer le véhicule litigieux ;

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. à titre de dommages et intérêts la somme de 35.942,40 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2012, date de l'assignation,

A titre subsidiaire, sur la responsabilité contractuelle :

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. la somme de 10.000 euros au titre des réparations ;

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer à Mme X. à titre de dommages et intérêts la somme de 35.942,40 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2012, date de l'assignation,

En tout état de cause :

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST à payer 4.000 euros au titre des frais irrépétibles,

- CONDAMNER la SARL ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel. »

 

Aux termes de ses conclusions du 21 décembre 2015, la société Littoral automobile distribution Renault La Rochelle a présenté les demandes suivantes :

« Confirmer le jugement entrepris,

Débouter la société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST de l'ensemble de ses demandes dirigées contre la société LITTORAL AUTOMOBILE DISTRIBUTION,

Débouter la société ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST de toutes ses demandes plus amples ou contraires aux présentes,

La condamner à payer à la société LITTORAL AUTOMOBILE DISTRIBUTION la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens. »

 

Aux termes de ses conclusions du 15 décembre 2015, la société Renault SAS a présenté les demandes suivantes :

- « Statuer ce que de droit sur la recevabilité et le bien-fondé de la demande de réformation du jugement formée à titre principal par la société ALLIANCE AUTO CENTRE OUEST à l'encontre des condamnations prononcées en faveur de Madame X.

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société ALLIANCE AUTO CENTRE OUEST de sa demande de garantie et rejeté toutes demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société RENAULT SAS,

- Déclarer irrecevable toute nouvelle demande dirigée à l'encontre de la société RENAULT SAS,

- Condamner la société ALLIANCE AUTO CENTRE OUEST et/ou toute partie succombante à payer à la société RENAULT S.A.S une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC, et aux entiers dépens. »

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

 

Vu l'ordonnance de clôture en date du 5 octobre 2016.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur le rabat de l'ordonnance de clôture :

L'appelante a conclu le 3 octobre 2016, 2 jours avant la clôture de la procédure. Mme X. a répliqué le 5 octobre 2016, jour de l'ordonnance de clôture. Les conclusions étant recevables jusqu'au jour de l'ordonnance de clôture, il n'y a pas lieu à rabat de celle-ci.

 

Sur la mention figurant sur la facture :

La facture établie par la société Alliance automobile centre ouest mentionne :

« Véhicule vendu en l'état, sans révision, sans garantie

Prix de vente d'origine comprenant une révision et une garantie : 10.290 euros

Je reconnais qu'ALLIANCE AUTOMOBILE CENTRE OUEST m'a déclaré revendre ce véhicule dans l'état exact où il a été acheté d'occasion, sans que ce véhicule ait bénéficié de la moindre remise en état, en échange de quoi une baisse importante du prix de vente a été consentie.

Par suite, je déclare faire mon affaire personnelle et prendre sous ma responsabilité le déplacement de ce véhicule d'Alliance automobile à ma résidence et m'engage avant de l'utiliser à nouveau, à faire procéder au plus tard le lendemain de mon achat au remplacement du kit de distribution. (...) Enfin, ayant acheté le véhicule dans l'état où il se trouve, après examen, je décharge Alliance automobile de toute garantie concernant cette vente ».

Le tribunal a déclaré cette clause abusive par application des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation, au motif que « les mentions, à supposer qu'elles aient une valeur contractuelle, la preuve d'une acceptation par l'acheteuse des stipulations portées unilatéralement par le vendeur n'étant pas rapportée, sont de nature à constituer une clause abusive au sein des dispositions précitées, non opposable à l'acheteuse ».

Sans qu'il soit besoin de recourir à la notion de clause abusive, il est de jurisprudence constante qu'un vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose vendue et ne peut se prévaloir d'une stipulation excluant à l'avance ou limitant sa garantie.

En conséquence la garantie de la société Alliance automobile peut être recherchée sur le fondement de la garantie légale des vices cachés, si les conditions de mise en œuvre de cette garantie sont réunies, à savoir un vice caché, antérieur à la vente et rendant le véhicule impropre à l'usage auquel il est destiné.

 

Sur l'existence d'un vice caché :

Le vice doit être caché et ignoré de l'acheteur.

Il ressort en l'espèce des constatations de l'expert judiciaire que certains coussinets de bielle sont légèrement endommagés et qu'un coussinet est complètement « coulé », que cette anomalie est connue sur ce type de moteur et que le constructeur intervient en garantie sous réserve que l'utilisateur justifie d'un entretien conforme aux normes.

Concernant l'entretien, l'expert relève : « Nous avons un véhicule qui depuis le 1er octobre 2007 où l'entretien des 60.000 km a été réalisé par Renault Marennes (garage N. et de l'Océan), avec un montage de filtre à huile non préconisé, n'a pas été entretenu conformément aux normes constructeur, à savoir : vidange tous les 30.000 km ou tous les 2 ans.

Le véhicule a 96.467 km, soit 36.000 km depuis la dernière vidange et 42 mois. A ce niveau, le vice de conception ne peut pas être engagé. Par contre, le défaut d'entretien est total. De ce fait l'utilisation d'un véhicule non entretenu est à l'origine des désordres ».

- S'agissant du remplacement du kit de distribution fourni à Mme X., celle-ci s'étant engagée à faire cette réparation, l'expert note que la réparation a été effectuée sans respecter les normes constructeur (la courroie d'accessoires n'a pas été remplacée lors du remplacement de la distribution).

- L'expert précise que si lors de la révision des 60.000 km, le filtre à huile, qui n'était pas celui préconisé par le constructeur, est susceptible de constituer un facteur aggravant et ainsi favoriser la survenance de la panne, il n'est pas possible d'avoir des certitudes à ce sujet.

La non-conformité du filtre à huile ne pouvant, en l'état des conclusions de l'expert, être considérée comme étant à l'origine des désordres, ne peut donc constituer un vice caché, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.

- S'agissant de l'indicateur de maintenance, l'expert a constaté qu'il avait été réinitialisé lors de la vente (sans savoir par qui, acheteur, vendeur ou tiers). Il indique que ce système constitue une alerte pour le conducteur visant à faciliter les opérations d'entretien du véhicule, mais qu'il ne doit pas se substituer à l'obtention des factures de révisions d'entretien, lesquelles sont seules à justifier de la réalité d'une intervention.

En d'autres termes, le fait que l'indicateur de maintenance ait été réinitialisé ne décharge pas l'acheteur de son obligation normale d'entretien après achat.

En l'espèce, Mme X. avait été informée par son vendeur et savait que le véhicule n'avait subi aucune intervention d'entretien depuis son achat un an plus tôt par la société Alliance automobile. Cette connaissance résulte de la facture et constitue un fait constant qui doit être pris en compte, indépendamment de la garantie légale des vices cachés qui reste acquise à l'acheteur ainsi que rappelé en début d'arrêt.

Mme X. a acquis un véhicule à 87.874 km en sachant qu'aucun entretien n'avait été fait et qu'elle aurait à l'assumer. Il lui appartenait dès l'achat du véhicule de faire procéder à son entretien, incluant au minimum les niveaux d'huile, ayant été informée que le véhicule était revendu dans l'état dans lequel il avait été acheté d'occasion, sans avoir bénéficié « de la moindre remise en état ». Le tribunal ne pouvait donc retenir que l'affichage du compteur totalisateur d'entretien qui avait à la date de la vente était réinitialisé, n'était pas de nature à attirer l'attention de Mme X. sur la nécessité de vérifier les niveaux d'huile ni que la société Alliance automobile ne justifiait pas avoir attiré l'attention de Mme X. sur le caractère impératif d'une révision à 90.000 km et n'établissait pas avoir procédé à la vérification des divers niveaux, les circonstances de la vente établissant de manière claire que l'acheteur était informé que le véhicule n'était pas entretenu, même a minima.

L'expert impute la panne à un défaut d'entretien total et non à un vice du véhicule. Le défaut d'entretien du véhicule lors de l'achat était connu et ne peut être considéré comme un vice caché. Mme X. ne peut donc soutenir que le défaut de lubrification était un vice caché. Aucun vice caché, indépendant de la notion d’entretien du véhicule, n'a été relevé par l'expert. Le fait pour Mme X. d'avoir utilisé son véhicule pendant 6 mois sur 8.593 km sans faire procéder à un quelconque entretien de celui-ci, sachant au surplus qu'il avait dépassé 90.000 km, ne peut que lui être imputable.

En l'absence d'un vice existant au jour de la vente, caché pour l'acheteur, il y a lieu d'infirmer le jugement et de débouter Mme X. de ses demandes.

 

Sur l'application de l'article L. 211-7 du code de la consommation :

Aux termes de l'article L 211-7 du code de la consommation, les défauts de conformité qui apparaissent dans les 6 mois de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire. Le vendeur peut combattre cette présomption si celle-ci n'est pas compatible avec la nature du bien ou le défaut de conformité invoqué.

Mme X. soutient que la panne étant intervenue moins de 6 mois après la vente, le défaut de lubrification existait au moment de la vente.

Cependant la preuve est rapportée par l'expertise que la panne est due à l'utilisation d'un véhicule non entretenu et non à un vice caché ou à un défaut de conformité. Il s'en suit que la présomption édictée par les dispositions précitées est écartée.

 

Sur le manquement au devoir de conseil :

Aucun manquement au devoir du conseil du vendeur ne peut être retenu dans des circonstances où il a informé l'acquéreur de l'absence d'entretien effectué sur le véhicule, lui a fourni le kit de distribution à remplacer en lui demandant de le faire le lendemain de l'achat, tous éléments impliquant la nécessité d'un entretien sans délai par l'acquéreur, et où l'acheteur a opté pour une diminution du prix de vente en toute connaissance de cause.

Il est rappelé que le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire ordonnée par le jugement infirmé et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la signification du présent arrêt.

Nonobstant l'issue de l'appel, ni l'équité ni les situations économiques des parties ne justifient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en la cause.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Déboute Mme X. de ses demandes ;

Met hors de cause la société Alliance automobile centre ouest, la société Littoral automobile distribution la Rochelle et la SAS Renault ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme X. aux dépens de première instance incluant les frais d'expertise et aux dépens d'appel, dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,                   LE PRÉSIDENT,