CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 24 janvier 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6694
CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 24 janvier 2017 : RG n° 15/06048
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Contrairement à ce que le tribunal a retenu, aucune disposition de l'article 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, pris pour l'application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 n'interdit à un agent immobilier de détenir, pour un même bien et la même opération, un mandat délivré par un vendeur et un autre délivré par des acquéreurs, avec un droit à commission pour chacun des mandats dès lors que les conditions prescrites par l'article 6 de la loi et par l'article 73 du décret étaient réunies. »
2/ « Il en résulte que pendant une période de 19 mois à compter du 12 aout 2007 soit jusqu'au 12 mars 2009, M. Z. ne pouvait traiter directement avec les époux X. qui lui avaient été présentés par l'agence ELI le 5 juillet 2007.
Contrairement à ce que soutient M. Z., une telle clause ne peut être considérée comme abusive et non écrite en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu article L. 212-1 du même code. En effet, la durée de 19 mois après l'expiration du mandat, durant laquelle le mandant s'interdit de traiter directement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui ne peut être qualifiée d'excessive, puisque le droit légitime du propriétaire de remettre son bien en vente après échec d'un premier compromis ne se trouve temporairement limité qu'à l'égard des personnes qui ont été présentées par le mandataire et que cette restriction est justifiée par le risque de fraude. Elle n'était donc pas de nature à créer un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur mandant. »
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 24 JANVIER 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de rôle : 15/06048 (Rédacteur : Jean-Pierre FRANCO, conseiller). Nature de la décision : AU FOND. SUR RENVOI DE CASSATION. Décisions déférées à la Cour : sur renvoi de cassation d'un arrêt rendu le 9 avril 2015 (pourvoi n° Q 14-13.501) par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation sur un arrêt rendu le 25 juillet 2013 (R.G. n° 12/03007) par la Première Chambre Civile de la Cour d'Appel de PAU en suite d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de MONT DE MARSAN du 20 juin 2012 (R.G. n° 10/01560), suivant déclaration de saisine en date du 2 octobre 2015.
DEMANDERESSE :
SAS ESPACE LANDES IMMOBILIER
agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [adresse], représentée par Maître Pierre F. de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Sonia T.-L., avocat plaidant au barreau de PARIS
DÉFENDEURS :
M. X.
né le [date], de nationalité Française, demeurant [adresse]
Mme Y. épouse X.
née le [date], de nationalité Française, demeurant [adresse]
représentés par Maître C. substituant Maître Bertrand L. de la SCP KPDB, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistés de Maître J.B. P. de la SCP P.-D. - P. - D.-D., avocat plaidant au barreau de MONT-DE-MARSAN
M. Z.
né le [date], de nationalité Française, demeurant [adresse], représenté par Maître Julie J. de la SCP D.- G. - J., avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 6 décembre 2016 en audience publique, devant la Cour composée de : Elisabeth LARSABAL, président, Jean-Pierre FRANCO, conseiller, Catherine COUDY, conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 6 avril 2007, M. Z. a confié un mandat exclusif de vente à la société Espace Landes immobilier (ci-après désignée société ELI), concernant sa maison d'habitation située à [ville M.], pour un prix de 310.000 euros. Le mandat prévoyait une rémunération de 20.000 euros à la charge du mandant.
La société ELI a trouvé des acquéreurs potentiels en la personne des époux X., auxquels elle a fait signer un mandat de recherche le 5 juillet 2007, prévoyant à leur charge une rémunération de 20.000 euros.
Suivant acte sous-seing privé en date du 5 juillet 2007, conclu par l'intermédiaire de la société ELI, M. Z. a vendu sa maison de [ville M.] aux époux X., pour un prix de 270.000 euros outre une rémunération du mandataire de 20.000 euros à la charge des acquéreurs.
Ainsi qu'il s'en était réservé la faculté, M. Z. a renoncé à la vente le 12 août 2007 en indiquant qu'il n'avait pu obtenir sa mutation professionnelle.
Par acte sous-seing privé en date du 8 août 2008, un nouveau compromis de vente a été signé pour le même bien entre les mêmes parties. Cette vente a été ensuite réitérée par acte authentique des 20 et 22 octobre 2008.
Par acte d'huissier en date du 18 novembre 2010, la société ELI a fait assigner Monsieur Z. et les époux X. devant le tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan sur le fondement des articles 1134, 1142 et 1152 (anciens) du Code civil pour les voir condamner in solidum à lui payer la somme de 20.000 euros, outre celle de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 20 juin 2012, le tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan a débouté la société Espace Landes immobiliers de ses demandes et l'a condamnée à payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile à M. Z. et aux époux X.
Se fondant sur les dispositions de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972, le tribunal a considéré comme déloyale et de nature à permettre une double rémunération la pratique consistant pour l'agent immobilier à établir à la fois un mandat de vente comportant un honoraire à la charge du vendeur, et un mandat de recherche portant précisément sur le bien proposé à la vente et fixant une rémunération de même montant.
Le jugement a été confirmé par la cour d'appel de Pau suivant arrêt en date du 25 juillet 2013.
À la suite du pourvoi interjeté par la société ELI, la Cour de cassation a, par arrêt en date du 9 avril 2015, cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 25 juillet 2013 par la cour d'appel de Pau et a renvoyé les parties devant la cour d'appel de Bordeaux.
La Cour de cassation a considéré qu'aucune disposition ne faisait obstacle à ce qu'un agent immobilier détienne un mandat d'un vendeur et un mandat d'un acquéreur pour une même opération, que le droit à commission existait pour chacun des mandats dès lors que sont satisfaites les exigences prescrites par l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et par l'article 73 du décret numéro 72-678 du 20 juillet 1972.
Suivant déclaration enregistrée le 2 octobre 2015, la société ELI a saisi la cour d'appel de Bordeaux comme juridiction de renvoi.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 24 octobre 2016, elle demande à la cour :
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 juin 2012 par le tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan,
- statuant à nouveau,
- de condamner les époux X. à lui payer la somme de 20.000 euros sur le fondement du mandat de recherche signé le 5 juillet 2007,
- de condamner M. Z. à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- de les condamner chacun au paiement de la somme de 5.000 euros pour frais irrépétibles.
Elle fait principalement valoir :
- qu'un agent immobilier peut parfaitement mettre en rapport, pour un même bien, un vendeur et un acheteur qui lui ont tous deux donné mandat,
- que contrairement à ce que le tribunal a retenu, elle n'a jamais réclamé de double rémunération,
- que le mandat de vente interdisait au vendeur, pendant la durée du mandat et une période de 19 mois suivant son expiration (qui n'avait selon elle rien d'abusive ou d'excessive) de traiter directement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui,
- que le mandat de recherche interdisait aux époux X. de traiter directement avec le vendeur pour l'achat de la maison avant le 5 octobre 2008, soit dans un délai de 12 mois suivant l'expiration du mandat, lequel avait durée de trois mois, de sorte qu'ils ont manqué à leur obligation contractuelle en contractant directement avec M. Z. le 8 août 2008,
- que la signature de la promesse de vente n'a pas mis un terme aux obligations nées du mandat,
- qu'en réalité, M. Z. et les époux X. ont organisé une opération frauduleuse visant à éluder ses droits au paiement de la commission.
Par dernières conclusions déposées et notifiées le 16 novembre 2016, les époux X. demandent à la cour de débouter la société ELI de l'ensemble de ses demandes, sollicitant ainsi implicitement la confirmation du jugement entrepris.
Subsidiairement, ils demandent la réduction substantielle de l'indemnité sollicitée, et la condamnation de M. Z. à les relever les garantir d'une éventuelle condamnation prononcée à leur encontre.
Ils réclament en toutes hypothèses paiement d'une indemnité de 5.000 euros pour frais irrépétibles, à la charge soit de la société ELI soit de M. Z.
Ils soulignent :
- que le mandat de recherche du 5 juillet 2007 avait un objet très précis, à savoir la recherche d'une maison située [...], et a été exécuté le même jour, date de signature de la promesse de vente de sorte, sans nécessité d'autre mention particulière dans le mandat,
- que le délai de 12 mois a commencé à courir à compter du 5 juillet 2007,
- que le compromis de vente a pu être valablement régularisé le 8 août 2008 entre les parties, treize mois plus tard, hors la présence de l'agent immobilier,
- que dans ces conditions, la société ELI ne peut se prévaloir des dispositions contractuelles pour solliciter leur condamnation au paiement de la somme de 20.000 euros en application de la clause pénale stipulée dans le mandat de recherche,
- qu'ils ont agi de bonne foi le 8 août 2008 en considérant être libérés de tout engagement par l'effet de l'échec de la première vente pour un motif indépendant de leur volonté,
- que subsidiairement, il y aurait lieu à réduction de l'indemnité forfaitaire, constitutive d'une clause pénale,
- que selon les stipulations de l'acte de vente du 22 octobre 2008, le vendeur est tenu de les garantir en cas de recours dirigés contre eux au titre d'une commission d'intermédiaire.
Par conclusions déposées et notifiées le 17 novembre 2016, M. Z. demande à la cour :
- de débouter la société ELI de ses demandes,
- de dire irrecevable et en tous cas mal fondée la demande de garantie formée par les époux X.,
- de condamner toute partie succombante au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il souligne :
- qu'il n'a commis aucune manœuvre dolosive pour réaliser la vente au profit des époux X. en dehors de l'intervention de l'agent immobilier (la première vente ayant échoué du fait de la non réalisation d'une condition suspensive),
- que la société ELI ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui résultant du non-paiement de sa commission par l'acquéreur,
- qu'elle ne peut demander à la fois le paiement de la commission par les époux X. et celui de dommages-intérêts par lui-même,
- qu'elle ne pouvait plus invoquer le mandat exclusif puisqu'il y avait mis fin le 12 août 2007 en l'absence de mutation,
- qu'au surplus il convient de déclarer abusive et non écrite, par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, la clause du mandat prévoyant pour une durée de 19 mois l'interdiction faite au mandant de traiter directement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire et ayant visité les locaux avec lui,
- que la demande de garantie formée par les époux X. doit être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile comme nouvelle en cause d'appel,
- qu'au surplus, cette demande est infondée puisque la garantie du vendeur ne vaut que pour ses propres engagements et non pour ceux qui auraient été souscrits par les acquéreurs.
Pour plus ample exposé des faits, des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère expressément aux dernières conclusions précitées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 novembre 2016.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Contrairement à ce que le tribunal a retenu, aucune disposition de l'article 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, pris pour l'application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 n'interdit à un agent immobilier de détenir, pour un même bien et la même opération, un mandat délivré par un vendeur et un autre délivré par des acquéreurs, avec un droit à commission pour chacun des mandats dès lors que les conditions prescrites par l'article 6 de la loi et par l'article 73 du décret étaient réunies.
C'est donc à tort que le tribunal a débouté la société ELI de l'ensemble de ses demandes, en considérant que l'existence des mandats confiés à la fois par M. Z. et par les époux X. faisait par principe obstacle à une condamnation tant des acquéreurs que du vendeur.
Au demeurant, il convient de souligner que l'agent immobilier, qui n'est finalement pas intervenu dans la vente sous condition suspensive du 8 aout 2008 ensuite réitéré par acte authentique des 20 et 22 octobre 2008, ne sollicite pas de commission (ce qu'il ne pourrait faire au regard des dispositions de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970) mais paiement d'une indemnité compensatrice forfaitaire, en ce qui concerne les époux X. et de dommages-intérêts en ce qui concerne M. Z.
1 - Sur la demande formée à l'encontre de M. Z. :
Le mandat exclusif signé le 4 avril 2007 par M. Z. au profit de la société ELI était conclu pour une durée de trois mois, avec à ce terme, sauf dénonciation 15 jours à l'avance, une prorogation du mandat pour une durée maximale de 12 mois supplémentaires, au cours de laquelle chacune des parties pouvait y mettre fin à tout moment.
Il était en outre stipulé : « le mandant s'interdit pendant la durée du mandat et pendant une période de 19 mois suivant son expiration de traiter directement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui ».
De plus, les conditions générales du mandat exclusif de vente contiennent en leur article 4-c) une clause pénale stipulée comme suit : « le mandant s'interdit pendant la durée du mandat et pendant la durée suivant son expiration indiquée ci-avant (soit 19 mois) et de traiter directement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui.
En cas de non-respect des obligations énoncées ci-avant au paragraphe a- b- ou c- il s'engage expressément à verser au mandataire en vertu des articles 1142 et 1152 du Code civil une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue ci-avant (soit 20.000 euros) ».
En conséquence, le mandat conclu le 4 avril 2007 pour une durée de trois mois s'est renouvelé pour 12 mois supplémentaires à compter du 4 juillet 2007 à défaut de dénonciation donnée 15 jours à l'avance par M. Z.
Par courrier en date du 12 aout 2007, M. Z. a informé l'agent immobilier de l'annulation de la vente de sa maison de [ville M.] en raison de l'invalidation de sa mutation professionnelle vers Anglet, ce qui emportait implicitement mais nécessairement résiliation du mandat de vente à cette date.
Il en résulte que pendant une période de 19 mois à compter du 12 aout 2007 soit jusqu'au 12 mars 2009, M. Z. ne pouvait traiter directement avec les époux X. qui lui avaient été présentés par l'agence ELI le 5 juillet 2007.
Contrairement à ce que soutient M. Z., une telle clause ne peut être considérée comme abusive et non écrite en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu article L. 212-1 du même code.
En effet, la durée de 19 mois après l'expiration du mandat, durant laquelle le mandant s'interdit de traiter directement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui ne peut être qualifiée d'excessive, puisque le droit légitime du propriétaire de remettre son bien en vente après échec d'un premier compromis ne se trouve temporairement limité qu'à l'égard des personnes qui ont été présentées par le mandataire et que cette restriction est justifiée par le risque de fraude. Elle n'était donc pas de nature à créer un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur mandant.
Dans le cadre de l'appréciation de la validité de cette clause, puis de sa méconnaissance, M. Z. ne peut tirer aucune conséquence utile de la modification intervenue dans les conditions financières de la vente. Bien au contraire, il sera relevé que la vente initiale du 5 juillet 2007 mettait à la charge des époux X. le paiement d'un prix de 270.000 euros, outre une somme de 20.000 euros au titre de la commission de l'agent immobilier ; alors que la seconde vente a été conclue le 8 aout 2008 sans l'intermédiaire de la société ELI pour un prix de 280.000 euros.
Il apparaît ainsi que M. Z., qui a connu les époux X. par l'intermédiaire de la société ELI, et qui ne pouvait se méprendre sur les conséquences du mandat ni sur la durée de l'interdiction de traiter directement avec eux, a pu à l'occasion de cette seconde vente bénéficier d'un prix supérieur de 10.000 euros par rapport à celui convenu le 5 juillet 2007 ce qui démontre un concert frauduleux avec les acquéreurs (qui échappaient eux au paiement de toute commission) pour évincer l'agent immobilier et éluder ses droits.
L'agence était fondée à renoncer à l'application pure et simple de la clause pénale qui prévoyait une indemnité forfaitaire de 20.000 euros, en réclamant paiement de dommages-intérêts d'un montant moindre, en réparation du préjudice subi.
Le manquement de M. Z. à ses obligations contractuelles est donc parfaitement établi et il convient de le condamner en conséquence à payer à la société ELI la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, en application des articles 1134 et 1147 du code civil (ancien).
2 - Sur la demande formée à l'encontre de M. et Mme X. :
Selon les stipulations du mandat de recherche signé le 5 juillet 2007, conclu pour une durée de trois mois, les époux X. ont chargé la société ELI de rechercher, en vue de l'acquérir, un bien immobilier précis, à savoir la maison individuelle située [...], pour un prix maximum souhaité de 290.000 euros, rémunération du mandataire incluse.
Ce mandat contenait la clause suivante :
« le mandant reconnaît que les affaires proposées et visitées sont strictement confidentielles, il s'interdit pendant la durée du mandat et dans les 12 mois suivant son expiration à en traiter l'achat éventuel directement avec le vendeur. En cas de non-respect de cette obligation, le mandant s'engage expressément à verser au mandataire en vertu des articles 1142 et 1152 du Code civil une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue ci-après (soit 20.000 euros) ».
Contrairement à ce que soutiennent les époux X., ce mandat de recherche n'a pas pris fin le 5 juillet 2007, date de conclusion de la vente sous conditions suspensives.
En effet, il résulte de l'article 73 dernier alinéa du décret 72-678 du 20 juillet 1972 que l'opération conclue par l'intermédiaire de l'agent immobilier est celle constatée par acte authentique, qui seule lui ouvre le droit de percevoir les honoraires prévus au mandat, ainsi d'ailleurs que cela était stipulé au mandat de recherche au paragraphe Rémunération du mandataire: « Elle ne deviendra exigible qu'après achat effectivement conclu ; levée étant obligatoirement faite de toutes conditions suspensives »).
Au demeurant, les pièces produites au débat confirment que la société était toujours investie d'une mission de mandataire par les époux X. postérieurement au 5 juillet 2007 puisque ces derniers lui ont demandé par message électronique du 28 aout 2007 de leur faire parvenir des documents provenant du service du personnel EDF, démontrant le refus de mutation de M. Z.
Le mandat de recherches n'a donc pris fin qu'au terme contractuellement prévu, à savoir le 5 octobre 2007 et les acquéreurs ne pouvaient donc avant le 5 octobre 2008 conclure directement un achat sur ce même bien.
Ils ont ainsi contrevenu à cette interdiction en signant le 8 aout 2008 l'acte de vente sous conditions suspensives avec M. Z. au prix de 280.000 euros, sans l'intermédiaire de la société.
La somme de 20.000 euros stipulée au mandat de recherche du 5 juillet 2007 à titre d'indemnité compensatrice forfaitaire est donc exigible.
Elle constitue une clause pénale qui présente en l'espèce un caractère manifestement excessif dès lors que l'agence se voit déjà allouer une somme de 10.000 euros de dommages-intérêts de la part de M. Z.
En application de l'article 1152 ancien du code civil (devenu article 1231-5 du code civil), il convient de modérer cette peine et de condamner les époux X. à payer à la société la somme de 10.000 euros.
3 - Sur la demande des époux X. tendant à être relevés et garantis :
Les époux X. sollicitent la condamnation de M. Z. à être relevés et garantis des condamnation prononcés à leur encontre en se fondant sur les stipulations de l'acte de vente du 22 octobre 2008, selon lesquelles «le vendeur déclare n'avoir conféré aucun mandat d'exclusivité à un intermédiaire pour la négociation du bien présentement vendu en s'obligeant à faire son affaire personnelle des conséquences de tout engagement qu'il aurait pu prendre à ce sujet sans recours contre l'acquéreur pour quelque cause que ce soit ».
Il s'agit effectivement d'une demande nouvelle, puisque les époux X. avaient seulement demandé au tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan de rejeter les prétentions de la société ELI et n'avaient formé aucune prétention à l'encontre de M. Z.
Elle doit en conséquence être déclarée irrecevable, puisque selon les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, « à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Enfin, il n'entre pas dans les attributions de la cour de donner acte aux époux X. de réserves (inopérantes et sans incidence dans le cadre de la présente instance), ni de déterminer quelle serait la recevabilité d'une demande de garantie à l'encontre de M. Z. dans le cadre d'une instance distincte, dont elle n'est, par hypothèse, pas saisie.
4 - Sur les demandes accessoires :
Il est équitable de condamner M. Z., d'une part, et les époux X., d'autre part, à payer à la société ELI, chacun, la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les époux X. et M. Z. supporteront leurs propres frais irrépétibles ainsi que les dépens de première instance et d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 9 avril 2015,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan du 20 juin 2012,
Statuant à nouveau,
Condamne M. Z. à payer à la société Espace Landes Immobilier la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamne M. X. et Mme Y. épouse X., ensemble, à payer à la société Espace Landes Immobilier la somme de 10.000 euros au titre de l'indemnité compensatrice forfaitaire, après modération de celle-ci en application de l'article 1152 ancien du Code civil,
Déclare irrecevable la demande de M. X. et de Mme Y. épouse X. tendant à être relevés et garantis par M. Z. des condamnations prononcées à leur encontre aux termes du présent arrêt,
Rejette le surplus des demandes principales,
Y ajoutant,
Condamne M. Z. à payer à la société Espace Landes Immobilier la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. X. et Mme Y. épouse X., ensemble, à payer à la société Espace Landes Immobilier la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par M. Z. et par les époux X.,
Condamne in solidum M. Z. et les époux X. aux dépens de première instance et d'appel et autorise la SELARL LEXAVOUE, avocat, à recouvrer directement ceux dont elle aurait fait l'avance sans recevoir provision, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Elisabeth LARSABAL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
- 6053 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Comportement des parties - Consommateur - Fraudes
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