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CA ROUEN (ch. proxim. sect. surend.), 16 mars 2017

Nature : Décision
Titre : CA ROUEN (ch. proxim. sect. surend.), 16 mars 2017
Pays : France
Juridiction : Rouen (CA), ch. proxim.
Demande : 16/01849
Date : 16/03/2017
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/04/2016
Décision antérieure : CA ROUEN (ch. proxim. sect. surend.), 16 février 2017
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6782

CA ROUEN (ch. proxim. sect. surend.), 16 mars 2017 : RG n° 16/01849

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que le juge du surendettement n'a pas le pourvoir de statuer sur la demande de Crédipar, tendant à la restitution du véhicule financé par le prêt qu'il a consenti à M. X telle qu'exclusivement fondée sur l'exécution d'une clause de réserve de propriété dont elle revendique le bénéfice et l'application à son profit ; en revanche, par application de l'article L. 733-8, il lui est possible de prévoir la vente du véhicule, mais seulement en considération de ce qu'elle serait de nature à faciliter le paiement d'une dette ou à favoriser le redressement du débiteur en diminuant en endettement ;

En présence d'une clause de réserve de propriété, la vente pourrait alors être prévue confiée à l'organisme prêteur qui bénéficierait seul du prix en déduction de sa créance, alors qu'en l'absence d'une telle clause valable, la vente serait ordonnée dont le prix viendrait en réduction de l'ensemble du passif ;

Que le juge du surendettement devra donc, même s'il se prononce dans le cadre des mesures prévues par l'article L. 733-8 précité, vérifier l'existence d'une telle clause ;

Que sur ce point, par un avis du 28 novembre 2016, la cour de cassation (16011P), a dit notamment que : 1°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, prévoyant la subrogation du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur en application des dispositions de l'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, ne prévoyant pas, en cas de revente par le prêteur du bien financé grevé d'une réserve de propriété, la possibilité pour l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre.

Attendu que la clause de réserve de propriété avec subrogation au profit du prêteur telle que libellée dans le contrat de crédit du 4 décembre 2013 est en contradiction avec [cet] avis, et doit en application des dispositions de de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation être considérée comme une clause abusive et écartée d'office ».

 

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ

SECTION SURENDETTEMENT

ARRÊT DU 16 MARS 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/01849. DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du TRIBUNAL D'INSTANCE D’EVREUX du 4 avril 2016.

 

APPELANTE :

SA CREDIPAR

Représentée par Maître S. de la SELARL G. S., avocat au barreau de ROUEN

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

Né le [date] à [ville], Comparant en personne

et

Société BNP PARIBAS

CA CONSUMER FINANCE ANAP

Monsieur F.

ORANGE MOBILES FRANCE CONTENTIEUX

Société ECB

Société L. M. & ASSOCIES

SIP EVREUX NORD

TRESORERIE EVREUX MUNICIPALE

Non comparants ni représentés bien que régulièrement convoqués par lettre recommandée

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 8 décembre 2016 sans opposition des parties devant Madame DELAHAYE, Conseiller, magistrat chargé d'instruire l'affaire,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Madame BRYLINSKI, Président, Madame LABAYE, Conseiller, Madame DELAHAYE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme VERBEKE, Greffier

DÉBATS : A l'audience publique du 8 décembre 2016, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 février 2017, puis au 16 mars par décision avant dire droit

ARRÊT : Réputé contradictoire ; Prononcé publiquement le 16 mars 2017, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Madame BRYLINSKI, Président, et par Mme NOEL DAZY, Greffier présent à cette audience.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par déclaration en date du 30 septembre 2014, M. X a saisi la commission de surendettement de l'Eure d'une demande tendant au traitement de sa situation de surendettement.

Lors de sa séance du 4 novembre 2014, la commission a déclaré cette demande recevable.

La commission a formulé des recommandations le 17 février 2015 tendant à un rééchelonnement des dettes sur 96 mois, avec une capacité de remboursement mensuel de 36.50euros, passant de 256.50 euros après un délai de 12 mois, avec un effacement partiel à l'issue, le délai de 12 mois devant permettre à M. X. de trouver un logement moins onéreux.

La commission a également recommandé la restitution du véhicule à la société Crédipar qui l'a financé.

M. X. a contesté les mesures recommandées notamment concernant la restitution du véhicule C3 qui lui est nécessaire pour des motifs professionnels.

Par jugement du 4 avril 2016, le tribunal d'instance d'Evreux statuant en matière de surendettement a :

- déclaré le recours de M. X. recevable en la forme et bien fondé

- infirmé les mesures recommandées par la commission de surendettement des particuliers de l'Eure

- dit que la créance de M. et Mme F. au titre des réparations locatives sera écartée de la procédure de surendettement ouverte au bénéfice de M. X. ;

- fixé le montant total des dettes de M. X. à la somme de 28 275.42 euros

- dit que ces dettes ne produiront pas intérêts

- dit que M. X. s'acquittera de ses dettes selon le tableau en annexe

- recommandé la vente de la moto de marque Honda, le prix de la vente devant être affecté au paiement partiel de la créance de la société Crédipar

- dit que les premiers versements devront intervenir au plus tard le 15ème jour du mois suivant la notification du jugement puis au plus tard le 15 de chaque mois

- dit qu'à défaut de respect de la décision, les sommes dues deviendront immédiatement exigibles et que les créanciers pourront exercer des poursuites individuelles

- dit que pendant l'exécution des mesures de redressement, M. X. ne pourra pas contracter de nouvelles dettes, ni de manière générale aggraver leur endettement, sous peine de déchéance du bénéfice des dispositions du jugement

- rappelé que la décision s'impose tant aux créanciers qu'aux débiteurs et que toutes autres modalités de paiement, tant amiables que forcées, sont suspendues pendant l'exécution de ce plan

- rappelé qu'en application des dispositions de l'article L. 333-4 du code de la consommation, les débiteurs sont inscrits au fichier national des incidents de remboursements des crédits aux particuliers pour une durée de cinq ans

- rappelé que la décision était exécutoire de plein droit

- laissé les dépens à la charge du Trésor Public.

La décision a été notifiée à la société Crédipar le 5 avril 2016, elle a formé appel par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 14 avril 2016, dans le délai de quinze jours de l'article R. 331-9-3 du code de la consommation, l'appel est recevable.

Invoquant la méconnaissance de la clause de réserve de propriété avec subrogation au prêteur, dont la conséquence est qu'elle est propriétaire du véhicule et que la défaillance de M. X. fait que le transfert de propriété du véhicule à son profit n'a jamais eu lieu, elle demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et bien fondé

- réformer le jugement prononcé

- ordonner à M. X. la restitution du véhicule de marque Citroën de type C3 - II A.4 HDI 70 FAP BUSINESS, portant le numéro de série XX, immatriculée YY à la société Crédipar dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir

- dit qu'en contrepartie de la réalisation du véhicule par la société Crédipar les capitaux restant dus par M. X. à celle-ci seront effacés

- condamner M. X. à lui payer une somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

M. X. indique qu'il a besoin du véhicule pour ses déplacements professionnels puisqu'il est engagé en qualité de professeur contractuel impliquant qu'il puisse être chaque année dans un établissement différent au sein de l'académie de Rouen, qu'il est nommé pour 2016-2017 au collège C. de [ville V.] et que le trajet en transports en commun est impossible à concilier avec ses horaires de travail ;

Il précise que les mesures fixées par le tribunal lui conviennent, et qu'il a commencé ses recherches pour avoir un logement moins cher ;

Il indique enfin qu'il est d'accord pour vendre la moto puisqu'il n'est pas titulaire du permis moto et ne peut donc la conduire ;

 

Par courrier transmis le 26 janvier 2017 avec copie à Maître S. avocat de la société Crédipar, il a adressé une attestation du directeur adjoint de la SEGPA sur ses contraintes professionnelles, ainsi que la copie de ses bulletins de salaire récents.

Par lettre, le centre des finances publiques d'Évreux Nord fait état d'une créance de 1.687 euros ; les autres créanciers, régulièrement convoqués, ne se présentent pas à l'audience et n'ont pas fait parvenir d'observations écrites.

Le 16 février 2017, la cour a ordonné la prolongation de son délibéré au 16 mars suivant pour permettre à la société Crédipar et à M. X. de fournir, par une note écrite adressée avant le 13 mars, toutes observations utiles sur la possibilité pour la société Crédipar de se prévaloir de la clause de réserve de propriété avec subrogation stipulée au contrat, au vu de l'avis rendu par la Cour de cassation le 28 novembre 2016.

La société Crédipar, par une note réceptionnée le 6 mars 2017, demande à la cour, après avoir constaté au vu notamment des justificatifs apportés par M. X., « le caractère indispensable du véhicule financé par le prêt souscrit par M. X. certes objet d'une clause de réserve de propriété qui ne peut recevoir application en l'espèce », de confirmer les modalités d'apurement de sa créance telles que retenues par la commission.

M. X n'a fait parvenir aucune note à la cour postérieurement au 16 février 2017.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Attendu que selon l'article L. 711-1 du code de la consommation, le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi. La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l'ensemble des dettes non-professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.

Lorsqu'il ressort de l'examen de la demande de traitement de la situation de surendettement que les ressources ou l'actif réalisable du débiteur le permettent, la commission prescrit des mesures de traitement dans les conditions prévues aux articles L. 733-1, L. 733-7 et L. 733-8.

Que selon l'article L. 733-1, en cas d'échec de sa mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :

1° « rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement ne puisse excéder 7 ans » ;

Que selon l'article L. 733-7-2° du code de la consommation, la commission peut recommander, par proposition spéciale et motivée, « L'effacement partiel des créances combiné avec les mesures mentionnées à l'article L. 733-1. Celles de ces créances dont le montant a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé, personnes physiques, ne peuvent faire l'objet d'un effacement. Les dettes fiscales font l'objet de remises totales ou partielles dans les mêmes conditions que les autres dettes. »

Que la durée de 7 ans qui était de 8 ans auparavant, introduite par la loi du 17 mars 2014 est entrée en vigueur à compter du 1er juillet 2016 ;

Que toutefois compte tenu des dispositions transitoires prévues par l'article 43 de la loi du 17 mars 2014, la situation de M. X. est régie par les dispositions antérieures prévoyant un délai de 8 ans ;

Attendu que la durée des mesures pouvant être accordées est de huit années ;

Attendu que M. X. ne remet pas en cause l'analyse de sa situation financière tel que faite par le premier juge ;

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article L. 733-8 du code de la consommation, la commission peut recommander que les mesures prévues aux articles L. 733-1 et L. 733-7 soient subordonnées à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette ;

Attendu que le juge du surendettement n'a pas le pourvoir de statuer sur la demande de Crédipar, tendant à la restitution du véhicule financé par le prêt qu'il a consenti à M. X telle qu'exclusivement fondée sur l'exécution d'une clause de réserve de propriété dont elle revendique le bénéfice et l'application à son profit ; en revanche, par application de l'article L. 733-8, il lui est possible de prévoir la vente du véhicule, mais seulement en considération de ce qu'elle serait de nature à faciliter le paiement d'une dette ou à favoriser le redressement du débiteur en diminuant en endettement ;

En présence d'une clause de réserve de propriété, la vente pourrait alors être prévue confiée à l'organisme prêteur qui bénéficierait seul du prix en déduction de sa créance, alors qu'en l'absence d'une telle clause valable, la vente serait ordonnée dont le prix viendrait en réduction de l'ensemble du passif ;

Que le juge du surendettement devra donc, même s'il se prononce dans le cadre des mesures prévues par l'article L. 733-8 précité, vérifier l'existence d'une telle clause ;

Que sur ce point, par un avis du 28 novembre 2016, la cour de cassation (16011P), a dit notamment que :

1°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, prévoyant la subrogation du prêteur dans la réserve de propriété du vendeur en application des dispositions de l'article 1250, 1°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3°/ Doit être réputée non écrite comme abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, la clause, telle qu'interprétée par le juge, ne prévoyant pas, en cas de revente par le prêteur du bien financé grevé d'une réserve de propriété, la possibilité pour l'emprunteur de présenter lui-même un acheteur faisant une offre.

Attendu que la clause de réserve de propriété avec subrogation au profit du prêteur telle que libellée dans le contrat de crédit du 4 décembre 2013 est en contradiction avec [cet] avis, et doit en application des dispositions de de l'article L.141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation être considérée comme une clause abusive et écartée d'office ;

Attendu par ailleurs qu'il résulte des pièces produites que M. X. est enseignant contractuel en CDI au collège Cervantès de Vernon et que selon attestation de M. A., directeur adjoint, que son statut implique une possibilité chaque année de changement de poste au sein de l'académie de Rouen ; que concernant son poste au sein du collège C. de [ville V.] pour l'année 2016-2017, il doit assurer ses cours mais également effectuer des tâches dans d'autres lieux, notamment visiter les élèves en entreprise, se déplacer chez des fournisseurs, assister à des conseils d'administrations ; qu'au vu des horaires et des modalités de déplacement en transport en commun, M. X., domicilié à [ville S.] devrait se déplacer en bus et en train, en passant par Evreux pour rejoindre |[ville V.] ;

Qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, la possibilité pour M. X. de conserver son véhicule est indispensable pour son activité professionnelle et donc pour l'exécution des mesures de désentettement prises pour traiter sa situation de surendettement ;

Que le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a estimé que M. X. ne devait pas restituer son véhicule de marque Citroën de type C3 ;

Qu'il sera également confirmé dans ses autres dispositions non contestées par ailleurs, ni par le débiteur, ni par l'un ou l'autre des créanciers, notamment en ce qui concerne la vente de la moto de marque Honda avec affectation du prix au paiement de la créance de la société Crédipar ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 4 avril 2016 par le tribunal d'instance d'Evreux concernant M. X en toutes ses dispositions ;

Laisse les dépens de la procédure d'appel à la charge du Trésor Public.

Le Greffier                            Le Président