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CA VERSAILLES (16e ch.), 23 mars 2017

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (16e ch.), 23 mars 2017
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 16e ch.
Demande : 14/07606
Date : 23/03/2017
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 21/10/2014
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6791

CA VERSAILLES (16e ch.), 23 mars 2017 : RG n° 14/07606 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Le recours subrogatoire a pour effet principal de permettre à la caution de se prévaloir des sûretés et garanties dont le créancier lui-même bénéficiait : en contrepartie, le débiteur va pouvoir lui opposer toutes les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier et tirées de leurs rapports.

Le recours personnel, quant à lui, ne permet pas à la caution de bénéficier des accessoires de la créance qu'avait le créancier contre le débiteur principal, mais elle est protégée puisque le débiteur principal ne sera alors pas en mesure de lui opposer les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier et tirées de leurs rapports personnels.

Ces deux recours ne sont pas exclusifs l'un de l'autre. La caution, qui est libre de choisir l'un ou l'autre de ces régimes, peut modifier, y compris en cours d'instance, le fondement du recours exercé, sous réserve d'indiquer le fondement sur lequel elle entend fonder ses prétentions sans pouvoir bénéficier d'un cumul des deux régimes. »

2/ « Il est de jurisprudence désormais constante que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la « déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle » (Cass. 3 juin 2015, n°14-15655) ».

3/ « Si le contrat de prêt envisage la déchéance du terme dans des termes clairs, force est de relever que la clause contractuelle relative à l'exigibilité anticipée des sommes prêtées ne prévoit pas de mise en demeure des emprunteurs, faisant courir un délai entre le constat d'une situation ouvrant droit à exigibilité anticipée du terme du prêt pour le préteur, et prononcé de la déchéance du terme ; le contrat ne prévoit qu'une simple notification.

A cet égard, la cour observe que les conditions générales relatives au prêt évoquent l'exigibilité anticipée des sommes dues « si bon semble à la banque », clause abusive dès lors que l'emprunteur n'est pas, dans une telle hypothèse, en possibilité de remédier à la situation. »

4/ « La cour retient, dans la logique de la jurisprudence susmentionnée que, lorsque la banque, organisme prêteur, tenue à l'écart de la vente amiable, a connaissance de celle-ci, elle doit mettre en demeure, avant d'agir en paiement contre la caution, l'emprunteur, débiteur principal, de respecter les engagements pris. La déchéance du terme opérée étant nulle en conséquence, la Bnp Paribas ne pouvait réclamer au Crédit Logement, caution, la totalité des sommes dues au titre du prêt immobilier. Par suite, la caution, qui agit sur le fondement d'un recours subrogatoire, est irrecevable à réclamer aux emprunteurs, débiteurs principaux, le capital non échu soit la somme de 65.281,63 euros et ce nonobstant le fait qu'elle ait informé les emprunteurs de son paiement. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

SEIZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 23 MARS 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/07606. Code nac : 53J. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 décembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de CHARTRES (1re ch.) : R.G. n° 12/00490.

LE VINGT TROIS MARS DEUX MILLE DIX SEPT, après prorogation, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, Représentant : Maître Laure P. de la SCP C. - P. - B., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000038 (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, Représentant : Maître Laure P. de la SCP C. - P. - B., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000038 (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/YY du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

 

INTIMÉE :

SA CREDIT LOGEMENT

Société Anonyme, au capital social de XXX Euros, immatriculée au Registre du Commerce de PARIS sous le numéro B YYY, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège. N° SIRET : B ZZZ ; Représentant : Maître Gilles-Antoine S. de la SCP S. ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 189 - N° du dossier 1401031

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 1er février 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame odette-Luce BOUVIER, Président, Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller, Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Catherine CHARPENTIER,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Selon offre préalable acceptée le 27 mai 2006, la société anonyme BNP Paribas - la Bnp Paribas - a consenti à M. X. et Mme Y. épouse X. un prêt immobilier d'un montant de 80.500 euros en capital, remboursable par 240 mensualités de 501,69 euros chacune incluant les intérêts au taux effectif global de 4,687 %.

La société anonyme Crédit Logement - le Crédit Logement - s'était portée caution de toutes sommes dues au titre du prêt le 4 mai 2006.

Les échéances n'ont pas été payées et la Bnp Paribas a prononcé la déchéance du terme.

Le Crédit Logement a désintéressé la Bnp Paribas à concurrence de 1.026,17 euros, 3.028,51 euros puis 68.836,49 euros.

Par acte en date du 27 décembre 2011, le Crédit Logement a assigné M. et Mme X. devant le tribunal de grande instance de Chartres aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 71.673,22 euros avec intérêts conventionnels à compter du 9 décembre 2011, outre 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire rendu le 18 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Chartres, retenant que le contrat de prêt mentionnait les conditions dans lesquelles l'exigibilité de la totalité des sommes dues pouvait intervenir, mais aussi que la caution qui a payé - s'agissant d'une subrogation légale - disposait d'un recours à l'encontre des emprunteurs défaillants, a :

- condamné solidairement M. et Mme X. à payer à la SA Crédit Logement la somme de 71.474,57 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2011,

- débouté la SA Crédit Logement du surplus de ses prétentions,

- débouté M. et Mme X. de leur demande de délais de paiement et de leur demande de dommages et intérêts,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. et Mme X. aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le 21 octobre 2014, M. et Mme X. ont formé appel de la décision.

 

Dans leurs conclusions transmises le 7 mars 2016, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. et Mme X., appelants, demandent à la cour de :

- les dire et juger recevables et bien fondés en leur argumentation d'appel,

En conséquence,

A titre principal,

- dire et juger irrecevable l'action en paiement diligentée par le Crédit Logement, et ce pour la somme de 65.327,46 euros, et, par voie de conséquence, le débouter de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner le Crédit Logement à leur payer la somme de 1.500 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Logement aux entiers dépens d'appel,

A titre subsidiaire,

- dire et juger irrecevable l'action en paiement diligentée par le Crédit Logement et, par voie de conséquence, la débouter de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner le Crédit Logement à leur payer la somme de 1.500 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner le Crédit Logement aux entiers dépens d'appel,

A titre infiniment subsidiaire,

- constater la prescription partielle de l'action de le Crédit Logement à leur encontre, à hauteur de la somme de 3.028,51 euros, correspondant aux échéances mensuelles du crédit litigieux non payées pour la période du 7 juin 2009 au 7 décembre 2009,

En conséquence,

- infirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Chartres, en date du 18 décembre 2013,

Et statuant à nouveau :

-  les condamner solidairement à payer au Crédit Logement la somme de 68.426,06 euros, augmentée des intérêts aux taux légal à compter du 29 octobre 2011,

- les autoriser à s'acquitter de la condamnation à intervenir en 23 mensualités de 100 euros par mois, à charge pour eux de s'acquitter du solde à la 24e échéance,

- dire et juger n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

A l'appui de leurs prétentions, M. et Mme X. exposent que le préteur ne les a pas mis en demeure de remplir leurs obligations en leur précisant le délai pour ce faire, de sorte que la totalité des sommes découlant du prêt consenti par la Bnp Paribas n'était pas exigible et ne pouvait ainsi être exigé de la caution de sorte que celle-ci ne peut davantage réclamer aux emprunteurs des sommes non exigibles.

Ils ajoutent que les clauses des conditions générales du contrat de prêt - relatives à l'exigibilité anticipée des sommes dues - ne sont pas expresses et non équivoques de sorte qu'elles doivent être écartées comme abusives.

A titre subsidiaire, ils indiquent que l'action subrogatoire du Crédit Logement est irrecevable faute pour cette dernière d'avoir respecté un délai de 15 jours entre la demande en paiement de Bnp Paribas et le paiement effectif de la créance ; le Crédit Logement ne justifierait alors pas d'un intérêt à agir.

Ils rajoutent que l'action de la caution est prescrite faute d'être intervenue dans les deux années du premier l'incident de paiement.

Ils entendent bénéficier de délais de paiement en précisant ne pas disposer des ressources leur permettant de répondre de leurs dettes.

 

Dans ses conclusions transmises le 23 février 2016, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, le Crédit Logement, intimé, demande à la cour de :

- dire irrecevables ou à tout le moins mal fondés les moyens de défense des appelants tenant à leurs rapports avec la Bnp Paribas,

- dire n'y avoir lieu à prescription,

- réformer le jugement entrepris concernant le montant des condamnations prononcées à l'encontre de M. et Mme X. et, en conséquence,

- condamner solidairement M. et Mme X. au paiement des sommes suivantes :

*  3.028,51 euros outre intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2009

* 1.025,17 euros outre intérêts au taux légal à compter du 23 février 2010

* 68.836,49 euros outre intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2011,

- le confirmer pour le surplus,

- condamner M. et Mme X. au paiement de la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Le Crédit Logement argue de ce que l'emprunteur ne peut opposer à la caution les exceptions tirées de ses rapports avec le créancier s'il a été averti par la caution préalablement au paiement que celle-ci procédait au paiement.

Il rajoute que la preuve du paiement réalisé ressort des quittances subrogatives établies.

Il précise que les conditions générales du prêt n'imposent pas de mise en demeure avant exigibilité de la totalité des sommes dues au titre du prêt ; il rappelle que les emprunteurs ont procédé dès 2010 à la vente amiable du bien financé grâce au prêt sans respecter leurs obligations contractuelles aux termes desquelles ils devaient en aviser le préteur et procéder à un remboursement anticipé du prêt.

Il indique que l'action en paiement n'est pas prescrite tant parce que l'assignation au fond a été délivrée dans les deux ans suivant les échéances impayées que parce que c'est un recours personnel qui est exercé.

Sur le montant de la créance, le Crédit Logement observe que les intérêts et pénalités sont dues par l'emprunteur comme courant sur des montants impayés avant déchéance du terme et rappelle que les sommes ainsi réclamées produisent intérêts dés paiement par la caution.

Il est rajouté que ces sommes figurent aux quittances subrogatives.

* * *

La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 novembre 2016.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 1er février 2017, le délibéré au 16 mars 2017 prorogé au 23 mars suivant.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le fondement du recours de la caution Crédit Logement :

La caution qui a payé des sommes exigibles dispose de deux recours à l'encontre des débiteurs principaux :

- un recours personnel fondé sur l'article 2305 du code civil selon lequel « La caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur.

Ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais ; néanmoins la caution n'a de recours que pour les frais par elle faits depuis qu'elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle »,

- un recours subrogatoire, tiré des obligations nées de la relation préteur/emprunteur et fondé sur l'article 2306 du même code qui dispose que « La caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur ».

Le recours subrogatoire a pour effet principal de permettre à la caution de se prévaloir des sûretés et garanties dont le créancier lui-même bénéficiait : en contrepartie, le débiteur va pouvoir lui opposer toutes les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier et tirées de leurs rapports.

Le recours personnel, quant à lui, ne permet pas à la caution de bénéficier des accessoires de la créance qu'avait le créancier contre le débiteur principal, mais elle est protégée puisque le débiteur principal ne sera alors pas en mesure de lui opposer les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier et tirées de leurs rapports personnels.

Ces deux recours ne sont pas exclusifs l'un de l'autre. La caution, qui est libre de choisir l'un ou l'autre de ces régimes, peut modifier, y compris en cours d'instance, le fondement du recours exercé, sous réserve d'indiquer le fondement sur lequel elle entend fonder ses prétentions sans pouvoir bénéficier d'un cumul des deux régimes.

Au cas présent, il est constant que le Crédit Logement a exercé un recours subrogatoire devant le premier juge.

En cause d'appel, le Crédit Logement oppose aux emprunteurs le cadre contractuel des relations tissées entre la banque, organisme de prêt, et les emprunteurs, ce qui suppose qu'il entend agir sur le fondement de son recours subrogatoire mais se prévaut aussi devant la présente cour de son recours personnel, notamment quant aux sommes qu'il revendique en tant que caution.

En vertu de la règle du non-cumul des recours, seuls les moyens tirés du recours subrogatoire, explicitement soutenus par le Crédit Logement dans ses conclusions en appel, seront examinés par la cour.

 

Sur l'exigibilité du prêt :

Aux termes de l'ancien article 1134 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, l'acte de caution litigieux ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi ».

Il résulte de la lecture des conditions générales du prêt « article VI exigibilité anticipée » que la totalité des sommes dues deviendra immédiatement exigible notamment au cas où « si bon semble à la banque et cela quinze jours après une notification faite aux bénéficiaires par lettre recommandée avec avis de réception sans qu'il soit besoin d'aucune formalité judiciaire dans l'un des cas suivants : [...] en cas d'incident de paiement provoqué par l'un ou l'autre des bénéficiaires et inscrit sur les listes établies par la banque de France » mais aussi « à défaut d'exécution ou de violation d'un seul des engagements pris par le ou les bénéficiaires ou la caution ».

Il ressort encore de l'examen des conditions générales du prêt « article V remboursement anticipé » que l'emprunteur s'engage à procéder au remboursement anticipé de toutes les sommes restant dues sur le crédit en cas de vente amiable du bien financé sauf hypothèse de transfert éventuel de crédit.

Il est de jurisprudence désormais constante que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la « déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle » (Cass. 3 juin 2015, n°14-15655).

Force est de constater que la banque, organisme de prêt, n'a pas adressé une telle mise en demeure aux emprunteurs.

En l'espèce, il n'est pas contesté que d'une part, M. et Mme X. ont procédé à la vente du bien immobilier financé par la Bnp Paribas le 26 février 2010 sans en informer l'organisme de prêt ; et d'autre part, qu'ils n'ont pas payé régulièrement les mensualités du prêt notamment après la vente de leur bien immobilier.

Les emprunteurs ont donc manqué aux obligations figurant aux conditions générales du prêt dont la cour observe qu'elles étaient paraphées par leurs soins.

En l'absence de respect des obligations nées du contrat de prêt, la Bnp Paribas pouvait décider de ne pas poursuivre les relations contractuelles avec M. et Mme X.

La Bnp Paribas, selon courriers recommandés du 13 septembre 2011 adressés tant à M. X. qu'à Mme X., « a constaté que vous n'avez pas régularisé votre situation ; en conséquence, conformément aux dispositions contractuelles de votre contrat de prêt, nous avons prononcé la déchéance du terme et vous mettons en demeure de régler sans délai la totalité des sommes prêtées restant dues ».

Si le contrat de prêt envisage la déchéance du terme dans des termes clairs, force est de relever que la clause contractuelle relative à l'exigibilité anticipée des sommes prêtées ne prévoit pas de mise en demeure des emprunteurs, faisant courir un délai entre le constat d'une situation ouvrant droit à exigibilité anticipée du terme du prêt pour le préteur, et prononcé de la déchéance du terme ; le contrat ne prévoit qu'une simple notification.

A cet égard, la cour observe que les conditions générales relatives au prêt évoquent l'exigibilité anticipée des sommes dues « si bon semble à la banque », clause abusive dès lors que l'emprunteur n'est pas, dans une telle hypothèse, en possibilité de remédier à la situation.

Par ailleurs, la lecture des courriers adressés aux emprunteurs confirme que ces derniers - qui n'ont pas été destinataires d'une mise en demeure et ont été mis devant le fait accompli de la déchéance du terme à effet immédiat - n'ont pas bénéficié d'un délai avant prononcé de la déchéance du terme et n'ont pu alors déterminer de façon expresse et non équivoque la date à laquelle cette dernière se trouvait acquise.

Il apparaît alors, que si, la Bnp Paribas était légitime à prononcer la déchéance du terme faute de paiement à bonne date des échéances, elle ne devait pas pour autant s'exonérer d'une mise en demeure préalable des emprunteurs.

Au demeurant, il ressort des conditions générales de l'acte de prêt que l'emprunteur prend l'engagement de procéder à un remboursement anticipé des sommes dues notamment lorsqu'il vend, à l'amiable, le bien financé à l'aide du prêt.

Au cas d'espèce, M. et Mme X. ont vendu le bien immobilier le 26 février 2010 soit bien avant que la banque n'envisage une déchéance du terme du prêt ; ils n'en ont pas informé le préteur et n'ont pas procédé à un remboursement des sommes prêtées, ce en violation des engagements contractuels.

Or, et conformément aux termes des conditions générales, la vente amiable du bien entraîne le remboursement anticipé du crédit sans qu'aucune formalité ne soit à la charge de l'emprunteur ou du préteur.

La cour retient, dans la logique de la jurisprudence susmentionnée que, lorsque la banque, organisme prêteur, tenue à l'écart de la vente amiable, a connaissance de celle-ci, elle doit mettre en demeure, avant d'agir en paiement contre la caution, l'emprunteur, débiteur principal, de respecter les engagements pris.

La déchéance du terme opérée étant nulle en conséquence, la Bnp Paribas ne pouvait réclamer au Crédit Logement, caution, la totalité des sommes dues au titre du prêt immobilier.

Par suite, la caution, qui agit sur le fondement d'un recours subrogatoire, est irrecevable à réclamer aux emprunteurs, débiteurs principaux, le capital non échu soit la somme de 65.281,63 euros et ce nonobstant le fait qu'elle ait informé les emprunteurs de son paiement.

En effet cette seule information des emprunteurs ne peut avoir pour effet d'annuler les conséquences de l'absence de mise en demeure préalable par le créancier principal.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné M. et Mme X. à la somme de 71.474,57 euros.

 

Sur la prescription des sommes échues et impayées :

Par arrêts de principe du 11 février 2016 la Cour de cassation, opérant un revirement de jurisprudence, a affirmé « A l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité » (Cass 1ère civ, n° 14-28.283 ; n° 14-27143 ; n° 14-22938 ; n° 14-29539).

Cette jurisprudence est applicable aux relations entre l'organisme de prêt et l'emprunteur.

En l'espèce, ce n'est pas la Bnp Paribas, organisme de prêt qui réclame paiement de sa créance mais le Crédit Logement qui a payé en sa qualité de caution les échéances échues et impayées le 30 décembre 2009 puis le 23 février 2010.

En ce qui concerne la prescription applicable, l'action en paiement fondée sur le recours personnel se prescrit par cinq ans à compter de la date à laquelle la caution a payé une dette exigible.

En revanche, l'action subrogatoire que la caution exerce à l'encontre du débiteur principal, particulier qui a contracté un prêt immobilier avec un établissement est soumise à la prescription  biennale prévue par l'ancien article L. 137-2 du code la consommation, applicable à l'espèce, ce prêt constituant un service offert par un professionnel à un consommateur.

En l'espèce et comme indiqué supra, le Crédit Logement exerce un recours subrogatoire de sorte que le délai de prescription est de deux ans.

Le Crédit Logement a procédé au paiement d'échéances échues le 30 décembre 2009, 23 février 2010 et 31 octobre 2011 étant précisé que ce dernier paiement porte sur des échéances impayées et sur le capital non échu selon quittances communiquées aux débats.

Le point de départ de la prescription biennale se situe alors au 30 décembre 2009, au 23 février 2010 et au 31 octobre 2011.

L'exploit introductif d'instance a été délivré par le Crédit Logement aux débiteurs le 27 décembre 2011.

Il s'ensuit qu'aucune prescription n'est encourue par le Crédit Logement quant à son action en paiement relative aux échéances échues impayées en tant que fondée sur son recours subrogatoire

Il convient en conséquence, ajoutant à la décision entreprise, de débouter les appelants de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action du Crédit Logement.

 

Sur le quantum de la créance :

En l'absence pour la caution de possibilité de percevoir le capital non échu, il convient d'évaluer, au regard des éléments versés aux débats, la créance du Crédit Logement à la somme de :

- 3.028,51 (paiement donnant lieu à quittance du 30 décembre 2009)

- 1.026,17 (paiement donnant lieu à quittance du 23 février 2010)

- 3.554,86 (paiement donnant lieu à quittance du 31 octobre 2011)

soit un total de 7.609,54 euros en ce compris les pénalités de retard puisqu'alors la banque BNP Paribas n'exigeait pas encore le paiement immédiat du capital non échu.

Les sommes ainsi payées produisent intérêts au taux légal, pour chacune, à la date du règlement réalisé.

M.et Mme X. sont condamnés solidairement au paiement des sommes ainsi retenues et mentionnées dans tel que mentionné au dans le présent dispositif ci-après.

 

Sur la demande de délais de paiement :

Aux termes de l'ancien article 1244-1 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, «'Toutefois, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital'»,

M.et Mme X. ont vendu l'immeuble financé grâce au prêt, en 2010, sans rembourser le préteur.

Ils ne versent ce jour aux débats aucun justificatif de leurs ressources et de leurs charges.

Force est d'observer qu'ils ont bénéficié de très larges délais de paiement.

C'est à bon droit que le premier juge a écarté tout délai de paiement.

 

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de ne pas faire droit aux demandes réciproques relatives aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Chaque partie supporte la charge des dépens qu'elle aura exposés en cause d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement du 18 décembre 2013 sauf en ce que la demande de délais a été rejetée et en ce qui concerne les dépens,

Statuant à nouveau

DEBOUTE M. X. et Mme Y. épouse X. de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance,

PRONONCE l'irrecevabilité des demandes en paiement du Crédit Logement pour la somme de 65.281,63 euros,

CONDAMNE solidairement M. X. et Mme Y. épouse X. à payer au Crédit Logement la somme de 3.028,51 outre intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2009, la somme de 1.026,17 outre intérêts au taux légal à compter du 23 février 2010, la somme de 3.554,86 euros outre intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2011,

DEBOUTE les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,

DIT que chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle aura exposés en cause d'appel,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Odette-Luce BOUVIER, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,                            Le président,