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CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 23 mars 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 23 mars 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 8
Demande : 16/14662
Décision : 215/17
Date : 23/03/2017
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 5/07/2016
Numéro de la décision : 215
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6792

CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 23 mars 2017 : RG n° 16/14662 ; arrêt n° n° 215/17

Publication : Jurica

 

Extrait : « La clause litigieuse, article 5 des conditions générales de l'offre de prêt immobilier, est ainsi rédigée : Sans préjudice des dispositions légales relatives à la déchéance du terme, toutes les sommes dues au titre d'un prêt, tant en principal qu'en intérêts et accessoires, deviendraient exigibles par anticipation de plein droit, dans l'un des cas énumérés ci-après, sans que notre établissement ait à faire prononcer en justice la déchéance du terme, ni à procéder à une mise en demeure à savoir : - inexécution d'une obligation contractée au titre du prêt, notamment en cas de non-paiement d'une échéance, étant précisé que les régularisations postérieures ne feraient pas obstacle à cette exigibilité (…). […]

Le nouvel article R. 212-2 reprend en son 4° la même formule selon laquelle sont présumées abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d'une durée raisonnable. C'est à bon droit que l'appelant fait remarquer que ces dispositions qui concernent la résiliation des contrats ne sont pas applicables à la clause litigieuse qui tend à la résolution et non à la résiliation du contrat. La présomption d'abus n'est donc pas applicable.[…]

Cependant, c'est là encore à bon droit que l'appelant fait valoir que le fait que le contrat permette au créancier de se prévaloir de la déchéance du terme sans adresser au préalable une mise en demeure au débiteur n'est pas constitutif d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, dès lors que le créancier, nonobstant ladite clause, est tenu, pour la validité du prononcé de la déchéance, d'adresser une mise en demeure préalable, ce qui a été fait ; de même, les débiteurs ne démontrent pas en quoi le fait qu'il soit stipulé que l'inexécution d'une des obligations contractées, en particulier le non-paiement d'une échéance, pourra entraîner la déchéance du terme, aurait pour effet d'entraîner un tel déséquilibre, d'autant qu'il ne ressort de la lecture de cette clause aucun « pouvoir discrétionnaire » du créancier ni aucun empêchement pour le débiteur d'avoir recours au juge.

C'est donc à tort que le premier juge a déclaré non écrite ladite clause et nul le commandement de payer. Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions, l'examen de la recevabilité des demandes de l'appelante fondées sur l'article 1184 du code civil devenant ainsi sans objet. »

2/ « Cependant, si l'acte prévoit que le Teg est calculé sur 365 jours conformément aux prescriptions réglementaires, la stipulation concernant le taux conventionnel vise une période de 360 jours, et se trouve ainsi frappée de nullité, peu important que la banque poursuivante soutienne l'absence de surcoût d'intérêts ou « l'équivalence des calculs », les intérêts contractuels étant, selon elle, dans les deux cas, 360 ou 365 jours, calculés sur une base de 1/12ème. En effet, c'est la clause elle-même qui doit être déclarée nulle, emportant substitution de l'intérêt légal, dès lors qu'en présence d'une telle clause, aucun taux d'intérêt n'a été valablement stipulé, l'emprunteur n'ayant pas été mis en mesure au moment de la conclusion du contrat d'évaluer le surcoût susceptible d'en résulter.

A ce titre, c'est vainement que la banque soutient que ladite clause serait « transparente et explicite », correspondrait à la réalité du calcul des intérêts des prêts, à savoir que « les intérêts courus entre deux échéances sont effectivement calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an », et qu'ainsi les emprunteurs auraient « pleinement et valablement donné leur consentement parfaitement éclairé » à ces stipulations. En effet, outre le fait que ladite clause n'est nullement claire et explicite contrairement à ce qu'affirme le créancier, qui consacre de nombreuses pages de ses écritures à divers calculs et explications pour y parvenir, cette analyse demeure fondée sur un éventuel consentement à l'application d'une clause illicite formellement exclue par les dispositions précitées. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 8

ARRÊT DU 23 MARS 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/14662. Arrêt n° 215/17 (7 pages). Décision déférée à la cour : jugement du 19 mai 2016 - Juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil – R.G. n° 15/00099.

 

APPELANTE :

SA Crédit lyonnais

représentée par son directeur général, Monsieur M. M. J., né le [date] à [ville], N° SIRET : XXX,  représentée et assistée de Maître Marco P. du LLP K.L.N. & F., avocat au barreau de Paris, toque : J008

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville]

Madame Y.

née le [date] à [ville]

représentés par Maître Fiona B., avocat au barreau de Paris, toque : G0169 : substituée par Maître Alexandre B., avocat au barreau de Paris

SA Bouygues Immobilier

prise en sa qualité de créancier inscrit, domiciliée chez Maître Sophie D., notaire, dont le siège social est sis [...]. N° SIRET : ZZ, défaillante

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 janvier 2017, en audience publique, devant la cour composée de : Mme Marie Hirigoyen, présidente de chambre, Mme Anne Lacquemant, conseillère, M. Gilles Malfre, conseiller, qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Sébastien Sabathé

ARRÊT : - réputé contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Marie Hirigoyen, présidente et par M. Sébastien Sabathé, greffier stagiaire en période de pré-affectation auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits, procédure et prétentions des parties :

Aux termes d'un acte reçu le 10 février 2011 par Maître D., notaire associé à [ville V.], M. X. et Mme Y. ont contracté auprès de la société le Crédit lyonnais deux emprunts de 37'500 euros et 148 000 euros.

A la suite d'impayés, la banque leur a fait délivrer le 13 mars 2015 un commandement de payer valant saisie immobilière puis les a attraits devant le juge de l'exécution.

Par jugement d'orientation du 19 mai 2016, le juge de l'exécution de Créteil a déclaré non écrite la clause de l'article 5 des conditions générales du contrat de prêt signé le 17 janvier 2011 relative à l'exigibilité anticipée en cas d'inexécution d'une obligation contractée au titre du prêt, notamment en cas de non-paiement d'une échéance, faute de prévoir l'envoi d'une mise en demeure préalable, déclaré nul le commandement de payer délivré le 13 mars 2015, publié au 3ème bureau du service de la publicité foncière de Créteil le 10 avril 2015, volume 2015 S n° 34, ainsi que les actes de procédure subséquents, ordonné la radiation du commandement de payer, rejeté l'ensemble des demandes présentées par le Crédit lyonnais, condamné la société Crédit lyonnais aux dépens et à payer à M. X. et Mme Y. la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et débouté M. X. et Mme Y. de leurs autres demandes.

La société le Crédit lyonnais a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe le 5 juillet 2016.

Ayant été autorisée, par ordonnance du 12 juillet 2016, à assigner en vue de l'audience du 31 août 2016, elle a fait citer, par actes du 18 juillet 2016, M. X. et Mme Y., ainsi que la société Bouygues Immobilier. Sur l'assignation remise à une personne se déclarant habilitée à la recevoir, cette société n'a pas constitué avocat.

 

Par dernières conclusions du 17 janvier 2017, le Crédit lyonnais demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de :

- à titre principal, déclarer irrecevables M. X. et Mme Y. en leur demande principale visant à voir prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts ; le dire et juger bien fondé à prononcer la déchéance du terme des deux prêts immobiliers à eux consentis au titre de l'offre de prêt immobilier signée le 17 janvier 2011, en raison de la défaillance des emprunteurs dans le remboursement des échéances des prêts, dire et juger que le calcul du Teg du prêt de 148.500 euros est régulier, fixer sa créance au titre des prêts de 37.500 euros et 148.500 euros à la somme totale de 210.187,58 euros, sauf à parfaire, selon commandement de payer valant saisie immobilière du 13 mars 2015,

- à titre subsidiaire, fixer sa créance au 13 mars 2015 au montant des échéances échues impayées, augmentées des majorations de retard, soit la somme de 28.996,03 euros, sauf à parfaire, et dire et juger le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 13 mars 2015 valable pour le montant de 28.996,03 euros,

- en tout état de cause, ordonner la vente forcée des biens immobiliers saisis, déterminer les modalités de visite et condamner solidairement M. X. et Mme Y. aux entiers dépens et à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

Par dernières conclusions du 23 janvier 2017, M. X. et Mme Y., intimés, souhaitent voir la cour « constater » que la déchéance du terme n'a pas été prononcée par la banque, que l'article 5 des conditions générales du prêt litigieux ne prévoit pas de mise en demeure préalable et qu'elle créée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, que M. X. et Mme Y. avaient versé une somme supérieure à celle du montant du capital exigible au jour du prononcé de la déchéance du terme, qu'il existe une erreur de calcul du Teg et du coût total du crédit du prêt litigieux, que les demandes de la banque sur le fondement de l'article 1184 du code civil sont nouvelles. En conséquence de quoi ils demandent à la cour tant à titre principal, qu'à titre subsidiaire et en tout état de cause, de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés « sans même statuer » des demandes tendant à constater les erreurs de calculs du Teg,

- prononcer la nullité de la stipulation relative aux intérêts conventionnels du prêt litigieux,

- prononcer la substitution du taux légal au taux d'intérêt conventionnel, soit 0,65 % et ordonner l'imputation des intérêts indûment perçus jusqu'à la date du jugement à intervenir, déduction faite des intérêts légaux alors échus, sur le capital restant dû,

- enjoindre, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement à intervenir, le Crédit lyonnais LCL de produire un nouveau décompte de sa créance, prenant en compte la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel et cette imputation sur le capital restant dû,

- prononcer l'irrecevabilité des demandes du Crédit lyonnais sur le fondement de l'article 1184 du code civil,

Par ailleurs, en tout état de cause, de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que l'article 5 des conditions générales du prêt constitue une clause abusive, en ce qu'il a déclaré que cette clause doit être réputée non écrite et en ce qu'il a constaté l'absence de créance exigible,

- constater qu'au jour du prononcé de la déchéance du terme, ils étaient à jour de leurs échéances en capital, seules exigibles,

- débouter le Crédit lyonnais de l'intégralité de ses demandes,

- dire et juger que le contrat de prêt litigieux devra continuer à être exécuté selon ses termes initiaux,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé le commandement aux fins de saisie immobilière et la mainlevée de la saisie-immobilière aux frais du créancier poursuivant, en ce qu'il a annulé tous les actes de procédure subséquents à ce commandement de payer, en ce qu'il a ordonné la radiation du commandement et la mainlevée de la saisie-immobilière aux frais du créancier poursuivant,

- l'infirmer en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes tendant à voir le Crédit lyonnais leur verser la somme de 5.000 euros au titre de préjudice subséquent à la présente procédure de saisie immobilière,

A titre subsidiaire, de constater qu'ils apportent les preuves suffisantes pour que le juge de l'exécution puisse être assuré qu'une vente amiable peut être conclue dans des conditions satisfaisantes, fixer le prix minimal de vente à la somme de 150.000 euros, suspendre la procédure et les autoriser à vendre amiablement le bien immobilier qui en est l'objet,

- condamner le Crédit lyonnais à leur payer à la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur la validité de la clause relative à l'exigibilité anticipée :

La clause litigieuse, article 5 des conditions générales de l'offre de prêt immobilier, est ainsi rédigée : Sans préjudice des dispositions légales relatives à la déchéance du terme, toutes les sommes dues au titre d'un prêt, tant en principal qu'en intérêts et accessoires, deviendraient exigibles par anticipation de plein droit, dans l'un des cas énumérés ci-après, sans que notre établissement ait à faire prononcer en justice la déchéance du terme, ni à procéder à une mise en demeure à savoir : - inexécution d'une obligation contractée au titre du prêt, notamment en cas de non-paiement d'une échéance, étant précisé que les régularisations postérieures ne feraient pas obstacle à cette exigibilité (…).

Le premier juge a estimé que cette clause revêtait un caractère abusif au regard des articles L. 123-1, 4° et R. 132-4° du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à l'époque de la conclusion du contrat, ce dernier article présumant abusives, sauf au professionnel à apporter la preuve contraire, les clauses « ayant pour objet de reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d'une durée raisonnable », en ce qu'elle n'aménageait au profit des emprunteurs aucun délai de préavis particulier pour le débiteur.

L'article L. 132-1 est devenu article L. 212-1 du code de la consommation, dans une rédaction similaire : « Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Le nouvel article R. 212-2 reprend en son 4° la même formule selon laquelle sont présumées abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de reconnaître au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis d'une durée raisonnable.

C'est à bon droit que l'appelant fait remarquer que ces dispositions qui concernent la résiliation des contrats ne sont pas applicables à la clause litigieuse qui tend à la résolution et non à la résiliation du contrat. La présomption d'abus n'est donc pas applicable.

Les intimés reprennent cependant les éléments également admis par le premier juge pour retenir le caractère abusif de ladite clause selon lesquels les stipulations précitées auraient pour effet de créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dans la mesure où elles pouvaient laisser penser que l'établissement de crédit disposait d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier l'existence d'une inobservation commise par l'emprunteur et qu'en outre elles permettaient au professionnel de se dispenser de mise en demeure préalable à la déchéance du terme en laissant croire au consommateur qu'il ne pouvait recourir au juge.

Cependant, c'est là encore à bon droit que l'appelant fait valoir que le fait que le contrat permette au créancier de se prévaloir de la déchéance du terme sans adresser au préalable une mise en demeure au débiteur n'est pas constitutif d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, dès lors que le créancier, nonobstant ladite clause, est tenu, pour la validité du prononcé de la déchéance, d'adresser une mise en demeure préalable, ce qui a été fait ; de même, les débiteurs ne démontrent pas en quoi le fait qu'il soit stipulé que l'inexécution d'une des obligations contractées, en particulier le non-paiement d'une échéance, pourra entraîner la déchéance du terme, aurait pour effet d'entraîner un tel déséquilibre, d'autant qu'il ne ressort de la lecture de cette clause aucun « pouvoir discrétionnaire » du créancier ni aucun empêchement pour le débiteur d'avoir recours au juge.

C'est donc à tort que le premier juge a déclaré non écrite ladite clause et nul le commandement de payer. Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions, l'examen de la recevabilité des demandes de l'appelante fondées sur l'article 1184 du code civil devenant ainsi sans objet.

 

Sur le prononcé de la déchéance du terme :

Les intimés soutiennent que la déchéance du terme n'a pas été valablement prononcée, dès lors qu'elle ne l'a pas été par le Crédit lyonnais, mais par la société Crédit logement laquelle n'aurait pas été mandatée pour « intervenir dans l'exécution du contrat ». C'est cependant à bon droit que le premier juge a relevé que la généralité des termes du mandat donné par le Crédit lyonnais au Crédit logement le 12 décembre 2012, stipulant que, « dans le cadre du recouvrement des créances » il était mandaté notamment pour « recevoir paiement de toutes sommes » et à cet effet, pour « passer et signer tous actes, remplir toutes formalités et généralement faire tout ce qui sera utile ou nécessaire », incluait le pouvoir de notifier la déchéance du terme.

 

Sur la créance du poursuivant :

Afin de déterminer le montant à retenir pour la créance du poursuivant, il convient de statuer sur les contestations des débiteurs formées à l'audience d'orientation. Ceux-ci, qui ne critiquent pas le montant de la créance relative au prêt de 37.000 euros, poursuivent la nullité de la stipulation d'intérêts du prêt de 148.500 euros, faisant valoir que le taux serait calculé sur la base d'une année de 360 jours et non de 365 jours, ainsi qu'indiqué dans l'acte de prêt, et ce, en contravention aux dispositions de l'article R. 313-1 du code de la consommation ; ils critiquent également le calcul du Teg ; dans les deux cas ils demandent que le taux légal soit substitué au taux conventionnel.

II apparaît qu'en pages 6 et 7 des conditions générales dudit prêt il est stipulé que « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. […] Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an ».

Il résulte de l'application combinée des articles 1907, alinéa 2, du code civil, et L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation dans leur ancienne rédaction que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile.

Le Crédit lyonnais fait valoir qu'il ressort de ces stipulations que chaque mois est compté pour 1/12ème d'année, qu'il est appliqué pour le calcul des intérêts mensuels le 1/12ème du taux d'intérêt annuel et qu'ainsi il n'y aurait pas de surcoût en intérêts et par ailleurs que les emprunteurs ont accepté cette clause en toute connaissance de cause.

Cependant, si l'acte prévoit que le Teg est calculé sur 365 jours conformément aux prescriptions réglementaires, la stipulation concernant le taux conventionnel vise une période de 360 jours, et se trouve ainsi frappée de nullité, peu important que la banque poursuivante soutienne l'absence de surcoût d'intérêts ou « l'équivalence des calculs », les intérêts contractuels étant, selon elle, dans les deux cas, 360 ou 365 jours, calculés sur une base de 1/12ème. En effet, c'est la clause elle-même qui doit être déclarée nulle, emportant substitution de l'intérêt légal, dès lors qu'en présence d'une telle clause, aucun taux d'intérêt n'a été valablement stipulé, l'emprunteur n'ayant pas été mis en mesure au moment de la conclusion du contrat d'évaluer le surcoût susceptible d'en résulter.

A ce titre, c'est vainement que la banque soutient que ladite clause serait « transparente et explicite », correspondrait à la réalité du calcul des intérêts des prêts, à savoir que « les intérêts courus entre deux échéances sont effectivement calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an », et qu'ainsi les emprunteurs auraient « pleinement et valablement donné leur consentement parfaitement éclairé » à ces stipulations. En effet, outre le fait que ladite clause n'est nullement claire et explicite contrairement à ce qu'affirme le créancier, qui consacre de nombreuses pages de ses écritures à divers calculs et explications pour y parvenir, cette analyse demeure fondée sur un éventuel consentement à l'application d'une clause illicite formellement exclue par les dispositions précitées.

La stipulation d'intérêts conventionnels sera donc annulée et le taux légal en vigueur à la date de souscription du contrat, soit l'année 2011, y sera substitué, sans qu'il soit utile d'examiner la contestation du Teg qui tend aux mêmes fins, l'examen de demandes au fond par le juge de l'exécution et la cour statuant avec les mêmes pouvoirs n'étant justifié que par leur incidence sur la mesure d'exécution.

Si les intimés affirment que la déchéance du terme a été prononcée abusivement dès lors qu'eu égard à la substitution du taux légal au taux contractuel, l'ensemble des versements qu'ils avaient effectués les mettait « à jour de leurs règlements » au mois de juillet 2014, une telle argumentation qui suppose une application rétroactive de la décision ne peut être retenue alors même qu'à cette époque les débiteurs n'avaient nullement contesté la stipulation d'intérêts et s'abstenaient d'honorer les échéances de l'emprunt depuis plusieurs mois.

La créance devra donc être recalculée, les débats étant rouverts pour permettre à la banque de produire un nouveau calcul de sa créance.

Eu égard à la réouverture des débats, il sera sursis à statuer sur la mention de la créance du Crédit lyonnais et sur l'orientation de la procédure, ainsi que sur toutes autres demandes.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare valable la clause d'exigibilité,

Déclare nulle la stipulation d'intérêts conventionnels pour le prêt de 148.000 euros et dit que le taux légal pour l'année 2011 y sera substitué,

Ordonne la réouverture des débats à l'audience du 31 mai 2017 à 9 h 30 (Salle Montesquieu - 3R04) et invite le Crédit lyonnais à produire un nouveau calcul de sa créance avec application dudit taux légal, substitué au taux conventionnel,

Sursoit à statuer sur la mention de la créance du Crédit lyonnais, sur l'orientation de la procédure et sur toutes autres demandes ainsi que sur la charge des dépens.

LE GREFFIER                    LA PRÉSIDENTE