CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 28 avril 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6845
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 28 avril 2017 : RG n° 13/20852
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Considérant que VINTAGE soutient que la demande de FRANFINANCE à son encontre est irrecevable au motif qu'elle n'a pas signé le contrat de cession conclu entre ASSETS et FRANFINANCE ; Mais considérant que la société VINTAGE a bien signé le contrat de financement et de bail le 1er juin 2010 ; qu'en application de l’article 8.3 des conditions générales, ASSETS se réserve la faculté de céder le matériel et de déléguer le contrat de location à un tiers cessionnaire ; que s'agissant d'un contrat conclu entre professionnels, cette clause, comme celle de l'article 3 des conditions générales, ne peut être qualifiée d'abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui s'applique aux seuls contrats conclus entre professionnels et non- professionnels ou consommateurs ; Qu'en outre, l'assignation vaut signification de la cession de créance du moment qu'elle contient, les éléments nécessaires à l'information du débiteur rendant le transport certain ; qu'il convient donc de déclarer recevables les demandes de FRANFINANCE dirigée contre VINTAGE ».
2/ « Considérant que les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance ; Considérant que sont interdépendantes les conventions conclues entre d'une part VINTAGE et CONVERTEL NEXTCOMS, d'autre part VINTAGE et FRANFINANCE dès lors qu'elles ont été signées pour une durée identique et à la même date, qu'elles participent d'une seule et même opération économique consistant à fournir à VINTAGE un matériel ainsi que la maintenance nécessaire, moyennant le paiement d'un loyer unique versé à FRANFINANCE, et que l'ensemble révèle que l'un des contrats n'a aucun sens sans l'autre ;
Considérant que la résolution du contrat de fourniture entraîne la caducité, pour absence de cause, du contrat de location entre VINTAGE et FRANFINANCE bailleresse cessionnaire de ALL ASSSETS LEASE qui avait financé le matériel ; qu'il importe peu que l'article 3 des conditions générales stipule que le locataire n'a aucun recours à l'encontre du bailleur concernant les dysfonctionnements du matériel loué ou ses défauts, cette clause étant réputée non écrite ; Qu'en conséquence, le jugement entrepris en ce qu'il a débouté FRANFINANCE de sa demande tendant principalement au paiement des loyers, sera confirmé par substitution des motifs ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU 28 AVRIL 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/20852 (10 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 septembre 2013 -Tribunal de Commerce de PARIS - R.G. n° 2013000462.
APPELANTE :
SA FRANFINANCE LOCATION
agissant en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège, N° SIRET : XXX (Nanterre), Représentée par Maître Nicolas D. de la SCP N. D., avocat au barreau de PARIS, toque : P0493, Représentée par Maître Marion H., avocat au barreau de VERSAILLES
INTIMÉES :
SARL VINTAGE LOGISTIQUE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au dit siège, N° SIRET : B YYY (Paris), Représentée par Maître François P., avocat au barreau de PARIS, toque : D1618
SAS ALL ASSETS LEASE
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, N° SIRET : WWW (Chartres), Représentée par Maître Alain F. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, Représentée par Maître Hubert V. de la SCP RMP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque C1577
SCP O.-DE K., en la personne de Maître Patrick O., es qualité de mandataire liquidateur de la société CONVERTEL NEXTCOM SARL
le siège est sis [adresse] RCS NANTERRE N° ZZZ, Non représentée
PARTIE INTERVENANTE :
SELARL C. B., représentée en la personne de Maître Christophe B., agissant en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la SAS ASSETS LEASE
Représentée par Maître Alain F. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, Représentée par Maître Hubert V. de la SCP RMP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque C1577
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er février 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Patrick BIROLLEAU, Président de la chambre, Mme Michèle LIS SCHAAL, Présidente de chambre, M. François THOMAS, Conseiller, désigné par Ordonnance du Premier Président pour compléter la Cour.
Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS
ARRÊT :- réputé contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Patrick BIROLLEAU, président et par Mme Patricia DARDAS, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
La société CHRTL VINTAGE LOGISTIC (VINTAGE) a souscrit auprès de la société CONVERTEL (dénomination commerciale NEXTCOMS) un contrat d'achat de matériel téléphonique. La société VINTAGE, dans le cadre de son activité professionnelle, désirait acquérir un matériel téléphonique plus performant et bénéficier d'une offre commerciale moins onéreuse, ce que lui avait garanti la société CONVERTEL.
Afin de financer cette opération, ledit contrat prévoyait la location du matériel par le biais de la société ALL ASSETS LEASE (ASSETS) qui a acquis et loué le matériel à VINTAGE par contrat du 1er juin 2010, moyennant un loyer trimestriel de 599,70 euros s'échelonnant sur une durée de 21 trimestres. Par ce même contrat, la société ASSETS a cédé les matériels loués et le contrat de location y afférent à la société FRANFINANCE LOCATION, devenue bailleresse substituée.
Le 1er juin 2010 VINTAGE a accusé réception du matériel en signant un procès-verbal de mise en service. Le 3 juin 2010, un installateur est venu mettre en fonctionnement le matériel.
Par courriers en date des 10 juin et 8 juillet 2010, VINTAGE a informé ASSETS du dysfonctionnement du matériel, rappelant ses réserves faîtes à l'installateur le 4 juin 2010 ainsi que ses difficultés dans la mise en service des équipements.
Le 14 juin 2010, VINTAGE a réexpédié une partie du matériel à CONVERTEL en raison de son dysfonctionnement.
Par courrier du 31 août 2010, VINTAGE a informé FRANFINANCE de sa volonté de résilier le contrat en raison d'importants problèmes ainsi que de la perte d’exploitation depuis cette installation et de son opposition à payer la facture du 20 août 2010 d’un montant de 712,24 euros TTC et de toute facture ultérieure.
FRANFINANCE a mis en demeure VINTAGE, par courriers des 23 septembre et 4 mars 2011, de régler les loyers échus et à venir et de lui restituer le matériel. Ces mises en demeure étant demeurées vaines, FRANFINANCE a résilié unilatéralement le contrat de location et en a informé VINTAGE par courrier du 12 juillet 2011.
La société FRANFINANCE a assigné la société VINTAGE devant le tribunal de commerce de Paris en paiement de la somme de 15.779,78 euros en principal, en condamnation à restituer le matériel sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en condamnation à lui payer une somme de 1.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 10 septembre 2013, le tribunal de commerce de Paris a :
- dit que les articles 3 et 8 des conditions particulières du contrat de location financière ne peuvent recevoir la qualification de clauses abusives ;
- déclaré nuls les contrats de cession et de location financière du 1er juin 2010 pour absence de cause ;
- débouté FRANFINANCE et ASSETS de toutes leurs demandes ;
- débouté VINTAGE de ses demandes ;
- dit n'y avoir lieu à l’application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné FRANFINANCE aux dépens.
Le tribunal a retenu que le procès-verbal de mise en service du matériel, daté du 1er juin 2010, est dépourvu de force probante dans la mesure où il a été antidaté, que le matériel n'a jamais fonctionné de manière satisfaisante, que les contrats étaient interdépendants et que la non-conformité du matériel vicie tant le contrat de cession de matériel que le contrat de location y afférent et a prononcé leur nullité.
La société FRANFINANCE LOCATION a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Prétentions des parties
La société FRANFINANCE LOCATION, par conclusions notifiées par le RPVA le 5 avril 2016, demande à la Cour de :
A titre principal,
- rejeter des débats, en application de l'article 16 du code de procédure civile, les conclusions de la société VINTAGE LOGISTIQUE du 23 mars 2016 à 23 h 40 de la société VINTAGE, la clôture étant intervenue le 24 mars 2016 ;
A titre subsidiaire,
- révoquer l'ordonnance de clôture de l'instruction et admettre les conclusions de FRANFINANCE LOCATION ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l'a déboutée de toutes ses demandes ;
- le cas échéant statuer sur la demande en garantie contre ALL ASSETS LEASE ;
Statuant à nouveau,
- constater l'aveu judiciaire de la société VINTAGE LOGISTIQUE ;
- condamner la société VINTAGE à lui payer la somme de 15.779,28 euros en principal, avec intérêts au taux d'intérêts appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter du 4 mars 2011, date de la première mise ne demeure avec anatocisme ;
- condamner la société VINTAGE à lui restituer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, les matériels objets de la location, à savoir :
- un standard de communication ALCATEL X ;
- un poste de communication ALCATEL 4039 ;
- deux postes de communication ALCATEL 40 ;
- deux postes sans fil DELT 400 ;
- condamner la société VINTAGE LOGISTIQUE à lui payer la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée ;
A titre subsidiaire,
Vu la convention de coopération liant la société FRANFINANCE LOCATION et la société ALL ASSETS LEASE et l'article 564 du code de procédure civile,
- fixer la créance de la société FRANFINANCE LOCATION au passif de la société ALL ASSETS LEASE à hauteur de 15.779,28 euros en principal, assortie des intérêts au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 4 mars 2011, date de la première mise en demeure ;
En tout état de cause,
- condamner tout succombant au paiement d'une somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître D. en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient que ses demandes sont recevables aux termes de l'article 8.3 des conditions générales qui stipule que ALL ASSETS se réserve expressément la faculté de céder le matériel et de déléguer le contrat de location à un tiers cessionnaire et qu’il importe peu que VINTAGE ait signé le contrat de cession, l’accomplissement de la formalité pouvant résulter de l'assignation qui vaut signification dès lors qu’elle comporte des extraits de l’acte rendant le transport certain.
FRANFINANCE conteste le défaut de délivrance du matériel conforme et l'absence de cause retenue par les premiers juges, alors que VINTAGE a elle-même reconnu que le matériel avait été installé le 1er juin 2010 et qu'elle avait reçu les appels téléphoniques depuis le nouveau standard téléphonique mis en place, aveu judiciaire de la parfaite livraison. Elle précise que les dysfonctionnements dont VINTAGE se plaint ne peuvent être opposés à ALL ASSETS LEASE en application de l'article 3 des conditions générales.
Elle rappelle qu'elle n'est que l'organisme de financement et non le louer du matériel et que l'obligation de délivrance de l'article 1741 du code civil ne s'applique pas à elle. VINTAGE ne peut pas évoquer le caractère abusif des clauses des conditions générales s'agissant d’un contrat entre professionnels. Elle estime donc que la somme de 15.779,28 euros en principal lui est due par VINTAGE qui devra restituer le matériel sous astreinte.
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où serait retenue l'interdépendance des contrats, elle sollicite la garantie de ALL ASSETS LEASE (assignée en intervention forcée par VINTAGE) sur les sommes qu'elle réclame en application de l'article 564 et 565 du code de procédure civile et sur le fondement de la convention de coopération qui les liait.
La société ALL ASSETS LEASE et la SELARL C. B., représentée par Maître Christophe B., ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société ALL ASSETS LEASE, par conclusions signifiées par le RPVA le 1er mars 2016, demandent, au visa des articles 1134 ancien du code civil et 564 du code de procédure civile, de :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé quel le contrat de location et l'acte de cession des matériels seraient nuls pour absence de cause,
- juger que la société VINTAGE LOGISTIQUE a signé le procès-verbal attestant de la réception et de la mise en service des matériels loués ;
- juger que la société CHRTL VINTAGE LOGISTIQUE n'a pas restitué les matériels à leur propriétaire mais à la société CONVERTEL qui n'en est pas propriétaire ;
- débouter la société CHRTL VINTAGE LOGISTIQUE de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions à son encontre,
- juger que la société ALL ASSETS LEASE était partie en première instance ;
- juger que la société FRANFINANCE LOCATION n'a présenté aucune demande de condamnation en première instance à l'encontre de la société ALL ASSETS LEASE ;
- juger que la demande de garantie et de condamnation de la société FRANFINANCE LOCATION à l'encontre de la société ALL ASSETS LEASE est une prétention nouvelle irrecevable en cause d’appel ;
- débouter la société FRANFINANCE LOCATION de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre ;
- condamner tout succombant à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP AFG conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient que l'obligation de conseil et d'information a été respectée par la proposition commerciale et le bon de commande communiqués par VINTAGE, ces documents indiquant les loyers mensuels et trimestriels et que le contrat de location du 1er juin 2010 comprenait la durée du contrat et le montant des loyers.
S'agissant d’un contrat conclu entre deux professionnels, aucun délai de rétractation n'est prévu.
Elle soutient également qu'il y a bien eu délivrance de la chose louée comme le démontre le procès-verbal de mise en service (signé) par lequel VINTAGE a reconnu que les matériels avaient été réceptionnés sans aucune réserve, conformément à la commande passée auprès du fournisseur, et mis en service. Le locataire ayant signé le procès-verbal de réception qui a provoqué la mise en exécution du contrat de location ne peut invoquer sa propre faute à l'encontre du bailleur pour éluder sa responsabilité.
ALL ASSETS ajoute que les dysfonctionnements dont VINTAGE fait état ne sont pas établis et ne peuvent être opposés au bailleur en application des clauses contractuelles - VINTAGE ayant renoncé à tout recours contre le bailleur en raison d'un litige technique - clauses qui ne sauraient être qualifiées d'abusives entre professionnels.
ALL ASSETS estime que la restitution du matériel le 14 octobre 2010 à CONVERTEL, qui n'en était plus propriétaire, ce que VINTAGE ne pouvait ignorer, n'est pas valable.
Sur la demande de garantie de FRANFINANCE à son encontre, ALL ASSETS soutient qu'il s'agit d'une demande nouvelle qui devra être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile, alors que FRANFINANCE n'avait formulé aucune demande à son encontre en première instance devant laquelle VINTAGE contestait déjà la validité du contrat de location.
La société VINTAGE LOGISTIQUE, par conclusions signifiées par le RPVA le 4 janvier 2017,
- confirmer le jugement entrepris et y ajoutant :
- dire que la société FRANFINANCE LOCATION est irrecevable en ses demandes fins et conclusions formées à son encontre ;
- condamner la société FRANFINANCE LOCATION à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de procédure abusive ;
Subsidiairement, vu les articles 3 et 8 du contrat précité,
- qualifier les deux clauses d'abusives comme privant l'acquéreur de ses droits à invoquer un vice de conformité ou un défaut de délivrance ;
- prononcer la résolution du contrat précité à défaut pour le vendeur d'avoir livré un matériel en état de fonctionnement ;
- dire que la résolution du contrat de vente est opposable à ALL ASSETS LEASE et à FRANFINANCE LOCATION avec toutes conséquences de droit ;
- condamner solidairement ALL ASSETS et FRANFINANCE à prendre à leur charge exclusive les loyers à titre d'indemnisation du préjudice souffert ;
- débouter la société FRANFINANCE LOCATION de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société FRANFINANCE LOCATION à lui payer une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure.
VINTAGE soutient que les demandes de FRANFINANCE à son encontre sont irrecevables car elle n'a pas signé le contrat de cession du contrat de location entre ALL ASSETS et FRANFINANCE sur lequel FRANFINANCE s'appuie. Elle explique avoir été victime d'un montage et n'avoir jamais négocié ni avec FRANFINANCE ni avec ALL ASSETS LEASE.
Elle rappelle avoir eu affaire à un préposé de Nextcom qui s'est présenté comme le représentant de BOUYGUES TELECOM, que le bon de commande à l'en-tête de BOUYGUES n'est pas signé, qu'elle a apposé une signature lors de l'installation du matériel sur un contrat à en-tête de ALL ASSETS et qu'elle n'a reçu le contrat de location que le 15 juin 2010 sur lequel apparaissent les tampons et signatures d'ALL ASSETS ET FRANFINACE avec lesquelles elle n'a jamais eu le moindre contact.
Elle soutient que le contrat de location avec sa délégation (article 8), ses conditions générales et ses conditions particulières ne peut lui être opposé. Elle précise avoir d'ailleurs immédiatement protesté dès le 10 juin 2010.
A titre subsidiaire, elle explique le déroulement des faits : le démarchage par des commerciaux se prévalant de BOUYGUES TELECOM, ses exigences et les promesses desdits commerciaux, l'installation du matériel le 3 juin 2010, la signature du contrat de bail sous l'enseigne de ALL ASSETS LEASE, les premiers appels téléphoniques depuis le nouveau standard à partir du 3 juin 2010, les dysfonctionnements apparus dans les premiers jours de l'utilisation, le renvoi du matériel livré le 14 juin 2010 (unité centrale) à NEXTCOM et du reste du matériel en octobre 2010. Ces éléments établissent qu'il n'y a pas eu de délivrance conforme de la chose et, en application de l'article 1741 du code civil, le contrat a été résolu le 14 juin 2010 avec renvoi du matériel.
Elle estime que les articles 3 et 8 du contrat de bail sont des clauses abusives car elles aboutissent à la priver de toute action.
La SCP O. DE K. ès qualités de mandataire liquidateur de la société CONVERTEL NEXTCOM, régulièrement assignée par acte d'huissier de justice du 20 décembre 2013 à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.
Les sociétés FRANFINANCE et ASSETS ont sollicité par le RPVA le 4 janvier 2017 le report de l'ordonnance de clôture du 5 janvier 2017 au vu des conclusions de VINTAGE signifiées par RPVA le 4 janvier 2017.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 janvier 2017.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur la recevabilité de la demande de FRANFINANCE dirigée contre VINTAGE :
Considérant que VINTAGE soutient que la demande de FRANFINANCE à son encontre est irrecevable au motif qu'elle n'a pas signé le contrat de cession conclu entre ASSETS et FRANFINANCE ;
Mais considérant que la société VINTAGE a bien signé le contrat de financement et de bail le 1er juin 2010 ; qu'en application de l’article 8.3 des conditions générales, ASSETS se réserve la faculté de céder le matériel et de déléguer le contrat de location à un tiers cessionnaire ; que s'agissant d'un contrat conclu entre professionnels, cette clause, comme celle de l'article 3 des conditions générales, ne peut être qualifiée d'abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui s'applique aux seuls contrats conclus entre professionnels et non- professionnels ou consommateurs ;
Qu'en outre, l'assignation vaut signification de la cession de créance du moment qu'elle contient, les éléments nécessaires à l'information du débiteur rendant le transport certain ; qu'il convient donc de déclarer recevables les demandes de FRANFINANCE dirigée contre VINTAGE ;
Sur la demande principale :
Considérant qu'aux termes de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ;
Considérant que la société FRANFINANCE soutient, à l'appui de sa demande de paiement des loyers en vertu du contrat de location en date du 1er juin 2010, que l'article 2 des conditions générales du contrat stipule que le contrat prend effet « dès la livraison de tout ou partie des équipements dans les locaux désignés par le locataire. L'installation des produits est attestée par la signature d'un procès-verbal d’installation que le locataire s'engage à signer au moment de la livraison conforme. » ;
Que la société VINTAGE réplique qu'il n'y a eu ni livraison, ni installation d'un matériel conforme et que l'équipement livré n'a jamais fonctionné ;
Considérant qu'il résulte des pièces communiquées les éléments suivants :
- le bon de commande du matériel à CONVERTEL NEXTCOM n'est pas signé ;
- le procès-verbal de mise en service du 1er juin 2010 est signé par VINTAGE ainsi que le contrat de bail et de financement daté du même jour ;
- le 3 juin 2010, l'installateur technique de BOUYGUES TELECOM est venu installer le matériel (courriel de BOUYGUES du 27 mai 2010) ;
- la société VINTAGE a reçu des appels téléphoniques sur le nouveau standard dès le 1er juin 2010, date à laquelle le matériel a été installé (ainsi que cela résulte des conclusions de VINTAGE déposées devant le tribunal de commerce) ;
- le 10 juin 2010, VINTAGE a signalé des dysfonctionnements ;
- le 14 juin 2010, elle a renvoyé à NEXTCOM une partie du matériel (l'unité centrale) rendant le standard inexploitable ;
- le 31 août 2010, VINTAGE a confirmé la résiliation par lettre recommandée avec accusé de réception ;
- le 14 octobre 2010, elle a renvoyé le reste du matériel à NEXTCOMS ;
Que l'ensemble de ces éléments, s'ils n'établissent pas que le contrat de bail du 1er juin 2010 a été antidaté et ne peuvent donc entraîner la nullité pour absence de cause du contrat de cession et du contrat de bail, démontrent que la mise en service du matériel n'a pas été réalisée le 1er juin 2010 en dépit du procès-verbal de mise en service signé par VINTAGE qui stipule que « Le locataire déclare avoir ce jour réceptionné ces équipements sans aucune réserve, conformément à la commande passé auprès du fournisseur et déclare que les équipements ci-dessus désignés ont bien été mis en service... Cette acceptation vaut aussi pour la date de départ de la location du contrat ci-dessus référencé, tant en son nom personnel qu'en qualité de mandataire du bailleur, le Locataire donne son accord pour un règlement du prix, toutes taxes comprises, des équipements. » ; qu'en réalité, le standard présentait dès le départ de graves dysfonctionnements le rendant inutilisable ; que ces dysfonctionnements, en raison de leur gravité, justifie la résolution du contrat de fourniture entre VINTAGE et CONVERTEL NEXTCOMS ;
Considérant que les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance ;
Considérant que sont interdépendantes les conventions conclues entre d'une part VINTAGE et CONVERTEL NEXTCOMS, d'autre part VINTAGE et FRANFINANCE dès lors qu'elles ont été signées pour une durée identique et à la même date, qu'elles participent d'une seule et même opération économique consistant à fournir à VINTAGE un matériel ainsi que la maintenance nécessaire, moyennant le paiement d'un loyer unique versé à FRANFINANCE, et que l'ensemble révèle que l'un des contrats n'a aucun sens sans l'autre ;
Considérant que la résolution du contrat de fourniture entraîne la caducité, pour absence de cause, du contrat de location entre VINTAGE et FRANFINANCE bailleresse cessionnaire de ALL ASSSETS LEASE qui avait financé le matériel ; qu'il importe peu que l'article 3 des conditions générales stipule que le locataire n'a aucun recours à l'encontre du bailleur concernant les dysfonctionnements du matériel loué ou ses défauts, cette clause étant réputée non écrite ;
Qu'en conséquence, le jugement entrepris en ce qu'il a débouté FRANFINANCE de sa demande tendant principalement au paiement des loyers, sera confirmé par substitution des motifs ;
Sur la restitution du matériel :
Considérant que VINTAGE justifie avoir restitué l'ensemble du matériel à la société NEXTCOM venderesse, seule société avec laquelle elle avait contracté ; que FRANFINANCE n'établit pas que VINTAGE se trouve toujours en possession du matériel qu'elle réclame ; qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté FRANFINANCE de sa demande de restitution du matériel sous astreinte ;
Sur la demande de FRANFINANCE tendant à obtenir la garantie d'ALL ASSETS LEASE :
Considérant que ALL ASSETS LEASE invoque l'irrecevabilité comme nouvelle en cause d'appel de la demande de FRANFINANCE à son encontre en application des articles 564 et 565 du code de procédure civile ;
Considérant qu'aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, « les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. » ;
Que l'intervention d'un tiers s'entend d'une intervention à hauteur d'appel, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, ALL ASSETS étant déjà partie en première instance ; que le droit d'intimer en appel tous ceux qui ont été parties en première instance n'emporte pas celui de présenter des prétentions à l'encontre des parties contre lesquels l'appelant n'avait pas conclu en première instance ; qu'en outre, l'appréciation des premiers juges sur le fait que le contrat de location avait été antidaté ne constitue pas la révélation d'un fait nouveau, mais une appréciation faite par les premiers juges qui résulte des éléments discutés par les parties tels que la non-réception du matériel conforme et sa restitution à CONVERTEL, la date de signature et l'absence de signatures ; que les relations entre FRANFINANCE et ALL ASSETS LEASE étaient connues de FRANFINANCE, le contrat de coopération étant daté du 12 février 2007 ;
Que l'article 565 du code de procédure civile prévoit que « les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. » ;
Que la faculté de soumettre aux juges d'appel des demandes tendant aux mêmes fins que celles portées devant les premiers juges implique qu'une demande ait été formée devant ces derniers ; que la société FRANFINANCE n'a formé aucune demande, aucun appel en garantie à l'encontre de la société ALL ASSETS LEASE devant les premiers juges ; que sa demande à l'encontre de VINTAGE et celle à l'encontre d'ASSETS sont différentes et reposent sur des fondements juridiques différents ; qu'il convient de déclarer irrecevable la demande de FRANFINANCE LOCATION à l'encontre de ALL ASSETS LEASE à hauteur d'appel ;
Considérant que la société VINTAGE n'établit pas l'exercice fautif de FRANFINANCE de son droit d'ester en justice et de faire appel ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté VINTAGE de sa demande de dommages et intérêts ;
Considérant que l'équité commande de condamner FRANFINANCE à payer à la société VINTAGE la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire à l'encontre de la SCP O. DE K. ès qualités de mandataire judiciaire de la société CONVERTEL NEXTCOMS et contradictoirement à l'égard des autres parties,
DÉCLARE recevables les demandes de la société FRANFINANCE LOCATION dirigée contre la société VINTAGE LOGISTIQUE,
CONFIRME le jugement entrepris sauf à dire, par substitution de motifs, que le contrat de location est déclaré caduc pour absence de cause,
DÉCLARE irrecevable la demande de la société FRANFINANCE LOCATION dirigée contre la société ALL ASSETS LEASE,
CONDAMNE la société FRANFINANCE LOCATION à payer à la société VINTAGE LOGISTIQUE la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE les parties de leurs plus amples prétentions,
CONDAMNE la société FRANFINANCE LOCATION aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP AFG concernant ALL ASSETS LEASE.
Le greffier Le président
- 5877 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : conclusion entre professionnels ou commerçants
- 5945 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Téléphonie et télécopie
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte