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CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 17 mai 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 17 mai 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 3
Demande : 16/18042
Date : 17/05/2017
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2017-010849
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6864

CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 17 mai 2017 : RG n° 16/18042

Publication : Jurica

 

Extrait : « Mais considérant que la SCI du Bassin Nord réplique à juste raison qu'il incombait au juge de la mise en état, conformément à l'article 77 du code de procédure civile, de se prononcer sur la question de fond relative à l'applicabilité de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce au litige, la détermination de la compétence dépendant de la réponse à cette question ; Que l'article L. 442-6 1 du code de commerce dispose : « […] » ;

Que la SCI du Bassin Nord n'est ni producteur, ni commerçant, ni industriel, ni immatriculée au répertoire des métiers ; Qu'il est constant que le bailleur est propriétaire de l'infrastructure du centre commercial et que le loyer dépend, pour une part minime, du chiffre d'affaires réalisé par le preneur ; mais que ces faits ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un partenariat commercial entre bailleur et preneur ; que si la SCI du Bassin Nord a mis à disposition de la société Byba Tourisme un local moyennant paiement d'un loyer, il n'existe aucun autre élément qui serait de nature à démontrer l'existence d'un tel partenariat ;

Que les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ne s'appliquant pas aux relations entretenues en l'espèce entre les parties, lesquelles sont régies par le statut des baux commerciaux, c'est en vain que les appelants revendiquent la compétence du tribunal de grande instance de Paris ; qu'il convient de confirmer l'ordonnance déférée qui a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Bobigny compétent pour statuer conformément à l'article R. 145-23 du code de commerce ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 3

ARRÊT DU 17 MAI 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/18042 absorbant le dossier 16/18427 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 août 2016 - Juge de la mise en état de Paris - R.G. n° 15/13388.

 

APPELANTS :

Monsieur G. ès qualités de mandataire liquidateur de la société « BYBA TOURISME »

Appelant dans le dossier RG 16/18427 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/18042

SARL BYBA TOURISME

prise en la personne de ses représentants légaux, Immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro XXX, Représentés par Maître David P. de l'ASSOCIATION L. & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R189, avocat postulant, Ayant pour avocat plaidant Maître Céline L., avocat au barreau de PARIS, toque : R189

 

INTIMÉE :

SCI DU BASSIN NORD

prise en la personne de ses représentants légaux, Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro YYY, Intimée dans le dossier RG 16/18427 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/18042, Représentée par Maître Michel G. de la SELARL G. ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020, avocat postulant, Ayant pour avocat plaidant Maître Emmanuel R. de l'ASSOCIATION V. J., avocat au barreau de PARIS, toque : T06

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mars 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre, Madame Agnès THAUNAT, présidente, Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère, qui en ont délibéré

Greffier : lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par Mme Chantal BARTHOLIN, présidente de chambre et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'assignation devant le tribunal de grande instance de Paris délivrée le 7 septembre 2015 à la SCI du Bassin Nord par la société Byba Tourisme au visa des articles L. 442-6-I-2°, D. 442-4 et R. 145-23 du code de commerce ainsi que des articles 1116, 1134, 1382 et 1719 du code civil ;

Vu l'ordonnance rendue le 25 août 2016 par le juge de la mise en état qui a :

- dit n'y avoir lieu de prendre acte de la reprise par Maître G., ès qualités, des demandes formées par la société Byba tourisme,

- dit que l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce n'est pas applicable au présent litige,

- en conséquence, accueilli l'exception d'incompétence soulevée par la SCI du Bassin Nord, déclaré le tribunal de grande instance de Paris incompétent pour connaître du litige et renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Bobigny, en précisant que le dossier de l'affaire sera transmis par le secrétariat avec une copie de la décision en application de l'article 97 du code de procédure civile,

- déclaré irrecevable la demande de dommages-intérêts formée par la SCI du Bassin Nord,

- condamné Maître G., ès qualités, à payer la somme de 1.500 euros à la SCI du Bassin Nord par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- réservé les dépens ;

Vu l'appel relevé par Maître G., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Byba tourisme, et par la société Byba Tourisme ;

 

Vu les dernières conclusions signifiées le 21 octobre 2016 par les appelants qui demandent à la cour, au visa des articles L. 442-6-I-2°, D. 442-4 et R. 145-23 du code de commerce, des articles 1134, 1382 et 1719 du code civil, des articles 101, 367 alinéa 2, 368 et 763 du code de procédure civile ainsi que de l'article R. 211-4 du code de l'organisation judiciaire, de :

- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande en paiement de dommages-intérêts formée par la SCI du Bassin Nord,

- l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau :

* prendre acte de la reprise par Maître G., ès qualités, de l'ensemble des demandes de la société Byba tourisme,

* dire que l'ensemble des prétentions de Byba tourisme sont indivisibles et ne sauraient être disjointes,

* dire que le tribunal de grande instance de Paris est compétent pour connaître de l'entier litige au visa de l'article D. 442-4 du code de commerce à raison de la demande formée par Byba tourisme sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce,

- condamner la SCI du Bassin Nord à payer à Maître G., es qualités, la somme de 4.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

 

Vu les dernières conclusions notifiées les 26 et 28 décembre 2016 par lesquelles la SCI du Bassin Nord demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance en ses dispositions ne lui faisant pas grief,

- débouter Maître G., ès qualités, de son appel,

- le condamner aux entiers dépens et à lui payer la somme de 10.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Considérant que suivant acte sous seing privé du 17 décembre 2010, la SCI du Bassin Nord a donné à bail commercial à la société Byba tourisme un local référencé n° 4 de 84 m² au rez-de-chaussée de la galerie commerciale du [...] pour une durée de dix années entières à compter de la mise à disposition du local prévue le 22 décembre 2010 ;

Que ce bail commercial a été conclu moyennant un loyer binaire se décomposant en un loyer variable annuel de 0,60 % du chiffre d'affaires HT du preneur et un loyer minimum garanti, dit LMG, de 54.600 euros HT/HC, révisable au 1er janvier de chaque année par application de la clause d'indexation assise sur la variation de l'indice INSEE des loyers commerciaux ; qu'il y est toutefois précisé que le preneur bénéficie d'une franchise de loyer à compter de la date de livraison et jusqu'à la date d'ouverture du centre commercial au public et d'une réduction du LMG au titre des trois premières années suivant l'ouverture, le LMG étant acquitté sur la base de 33.600 euros HT/HC par an la première année, de 42.000 euros HC/HT par an la deuxième année et de 50.4000 euros HT/HC par an la troisième année ;

Qu'il est stipulé, à l'article 12-4 du bail, intitulé renonciation à recours, que le preneur déclare avoir apprécié par lui-même et sous sa propre responsabilité la commercialité du centre commercial et que le bailleur ne saurait assumer une quelconque responsabilité sur l'état de commercialité du centre ;

Que suivant protocole d'accord valant avenant au bail, signé le 14 février 2013, afin d'accompagner le preneur dans la poursuite de son exploitation, le bailleur a consenti « à titre exceptionnel strictement personnel et commercial » à ce que le montant du LMG annuel soit ramené à 25.000 euros HT/HC pour la période allant du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013 ;

Que le 12 mars 2015, la SCI du Bassin Nord a fait délivrer à la société Byba Tourisme un commandement de payer la somme de 43.277,45 euros en principal visant la clause résolutoire ; que le 12 mai 2015, elle a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny pour voir constater l'acquisition de la clause résolutoire ; que par ordonnance du 16 octobre 2015, ce magistrat a retenu l'existence d'une contestation sérieuse pour dire n'y avoir lieu à référé ;

Que c'est dans ces circonstances que le 7 septembre 2015 la société Byba Tourisme a fait assigner la SCI du Bassin Nord en dommages-intérêts devant le tribunal de grande instance de Paris pour voir juger, au soutien de ses prétentions :

- que le bailleur a manqué à ses obligations contractuelles en ne s'assurant pas de la présence au sein du centre commercial des commerces locomotives contractuellement convenues,

- qu'il a manqué à son obligation de délivrance en n'assurant pas une commercialité qui soit de nature à permettre au preneur d'exploiter son commerce de manière pérenne dans un environnement adéquat,

- que les clauses de non responsabilité insérées au bail ne sont pas de nature à exonérer le bailleur de sa responsabilité,

- que si par extraordinaire il était jugé que les clauses de non responsabilité ne sont pas dépourvues d'effet, elles traduisent un déséquilibre significatif engageant la responsabilité du bailleur au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,

- que le loyer minimum garanti traduit, au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, un déséquilibre significatif des obligations au détriment de la locataire ;

Que la SCI du Bassin Nord ayant soulevé l'incompétence du tribunal saisi, le juge de la mise en état, par l'ordonnance déférée, a fait droit à son exception en retenant la compétence du tribunal de grande instance de Bobigny et a déclaré irrecevable sa demande de dommages-intérêts ;

Considérant que Maître G., ès qualités, et la société Byba Tourisme, appelants, font valoir pour l'essentiel :

- qu'il résulte de l'article D. 442-4 du code de commerce que le tribunal de grande instance de Paris a compétence exclusive pour connaître des litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, tandis que l'article R. 145-23 du code de commerce prévoit, en son alinéa 3, la compétence du tribunal du lieu de situation de l'immeuble pour les litiges concernant les baux commerciaux, soit en l'espèce le tribunal de grande instance de Bobigny,

- que leurs demandes tendant aux mêmes fins, fondées à la fois sur le statut des baux commerciaux et sur l'article L. 442-6 du code de commerce, sont indissociables et indivisibles,

- que la règle de compétence matérielle de l'article D. 442-4 du code de commerce ayant institué des juridictions spécialisées prime sur la règle de compétence simplement territoriale de l'article R. 145-23 du code de commerce,

- que les dispositions de l'article D. 442-4 du code de commerce procèdent d'un ordre public économique qui prévaut, de jurisprudence constante, sur les règles de compétence purement procédurales,

- que la règle de compétence territoriale de l'article R. 145-23 du code de commerce n'est pas d'ordre public et qu'il peut y être dérogé par une clause contraire ;

Qu'ils ajoutent :

- que Byba Tourisme est demanderesse et que son argumentaire n'est pas dilatoire,

- que le tribunal saisi ne pourra statuer sur la responsabilité du bailleur sans se prononcer sur l'existence d'un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce et sur la portée des clauses de non responsabilité du bail,

- qu'il relève des attributions du juge du fond de se prononcer sur l'applicabilité ou non de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce au cas d'espèce,

- que ce texte ne vise pas seulement les producteurs, mais tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers,

- que les relations bailleur/preneur au titre d'un bail commercial portant sur la mise à disposition d'une cellule dans un centre commercial relèvent d'un véritable partenariat commercial, a fortiori lorsque le bailleur est propriétaire de l'ensemble de l'infrastructure du centre et que le loyer dépend pour partie du chiffre d'affaires généré par le commerçant,

- que par arrêt du 29 décembre 1995, le Conseil d'état a retenu que l'existence d'un loyer proportionnel à l'utilisation de cuves louées par une société civile immobilière conférait un caractère commercial à l'activité de location de celle-ci,

- que l'existence d'un partenariat commercial entre bailleurs de centres commerciaux et locataires a été expressément mise en exergue dans un arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 3 juillet 2013 qui a souligné que le succès du centre commercial et sa pérennité dépendaient de l'attractivité et de la diversité des enseignes, qu'une partie des loyers perçus par le bailleur était proportionnelle au chiffre d'affaires réalisés par chaque enseigne, qu'inversement les preneurs tiraient profit individuellement de l'attractivité du centre et que les deux parties avaient donc 'un intérêt commun à préserver',

- que les décisions isolées citées par la SCI du Bassin Nord en première instance sont sans portée jurisprudentielle, inapplicables au cas d'espèce et qu'elle en travestit la portée ;

 

Mais considérant que la SCI du Bassin Nord réplique à juste raison qu'il incombait au juge de la mise en état, conformément à l'article 77 du code de procédure civile, de se prononcer sur la question de fond relative à l'applicabilité de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce au litige, la détermination de la compétence dépendant de la réponse à cette question ;

Que l'article L. 442-6 1 du code de commerce dispose : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers...

2° de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ' ;

Que la SCI du Bassin Nord n'est ni producteur, ni commerçant, ni industriel, ni immatriculée au répertoire des métiers ;

Qu'il est constant que le bailleur est propriétaire de l'infrastructure du centre commercial et que le loyer dépend, pour une part minime, du chiffre d'affaires réalisé par le preneur ; mais que ces faits ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un partenariat commercial entre bailleur et preneur ; que si la SCI du Bassin Nord a mis à disposition de la société Byba Tourisme un local moyennant paiement d'un loyer, il n'existe aucun autre élément qui serait de nature à démontrer l'existence d'un tel partenariat ;

Que les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ne s'appliquant pas aux relations entretenues en l'espèce entre les parties, lesquelles sont régies par le statut des baux commerciaux, c'est en vain que les appelants revendiquent la compétence du tribunal de grande instance de Paris ; qu'il convient de confirmer l'ordonnance déférée qui a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Bobigny compétent pour statuer conformément à l'article R. 145-23 du code de commerce ;

Considérant que Maître G., ès qualités, qui succombe en son exception d'incompétence, doit supporter les dépens de première instance et d'appel ;

Que vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il y a lieu de rejeter sa demande de ce chef et d'allouer la somme supplémentaire de 2.000 euros à la SCI du Bassin Nord ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a réservé les dépens,

Rejette toutes les demandes de Maître G., ès qualités,

Condamne Maître G., ès qualités, à payer la somme supplémentaire de 2.000 euros à la SCI du Bassin Nord par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Maître G., ès qualités, aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                    LA PRÉSIDENTE