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CA VERSAILLES (14e ch.), 8 juin 2017

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (14e ch.), 8 juin 2017
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 14e ch.
Demande : 16/06006
Date : 8/06/2017
Nature de la décision : Appel
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 1/08/2016
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6911

CA VERSAILLES (14e ch.), 8 juin 2017 : RG n° 16/06006

Publication : Jurica

 

Extrait : « L'article 488 du code de procédure civile, qui dispose que l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, s'applique tant à l'ordonnance rendue par le juge en première instance qu'à l'arrêt rendu en pareille matière sur l'appel qui en est relevé. L'arrêt rendu le 22 février 2017 par la cour d'appel de Paris, sur l'appel interjeté par la société Team interim de l'ordonnance du 29 juillet 2016 déférée également devant la cour d'appel de Versailles, a donc autorité de la chose jugée au provisoire.

Or la cour d'appel de Paris, indépendamment du débat élevé par les parties sur la compétence, a annulé l'ordonnance du 29 juillet 2016 en raison du défaut de pouvoir du juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre, privant désormais de tout objet l'appel formé par la société Team interim devant la cour d'appel de Versailles, la décision déférée à la cour n'existant plus.

Il doit être rappelé que l'appel tend à faire réformer par la cour d'appel un jugement rendu par une juridiction de première instance, ce qui suppose à tout le moins que le jugement de première instance, dont il est sollicité la réformation, existe. Partant, la société Vinci n'est pas fondée à soutenir que la cour d'appel de Versailles reste saisie du problème de la compétence au regard des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce, alors qu'au surplus, la cour d'appel de Paris énonce dans les motifs de son arrêt qu'elle est seule compétente pour connaître de l'appel interjeté par la société Team interim, « investie du pouvoir juridictionnel exclusif de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce ».

Il convient donc de constater que l'appel est devenu sans objet. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

QUATORZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 8 JUIN 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/06006. Code nac : 59B. CONTRADICTOIRE. AFFAIRE : Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 29 juillet 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE : R.G. n° 2016R00559.

LE HUIT JUIN DEUX MILLE DIX SEPT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE :

SA TEAM INTERIM

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, N° SIRET : XXX, Représentée par Maître Maya A., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 260, assistée de Maître Patrice G., avocat au barreau de TOULON

 

INTIMÉE :

SA VINCI

agissant poursuites et diligences de son directeur général et président du conseil d'administration domicilié en cette qualité audit siège, N° SIRET : YYY, Représentée par Maître Martine D. de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1656402, assistée de Maître Alain B., avocat au barreau de PARIS

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 avril 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Jean-Michel SOMMER, président, Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller, Madame Florence SOULMAGNON, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Agnès MARIE,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte sous seing privé en date du 17 novembre 2011, la société Vinci a conclu avec la société Team interim un contrat de référencement couvrant la période du 1er novembre 2011 au 31 décembre 2014, permettant à la société Team interim de référencer son groupe de sociétés auprès des filiales de Vinci et de mettre à disposition ses candidats pour du travail temporaire, moyennant le versement annuel d'une prime de volume ainsi que des allégements sur les chiffres d'affaires.

Des différends sont apparus lors de l'exécution de la convention, la société Team interim refusant de continuer à payer les factures de la société Vinci.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 octobre 2015, la société Vinci a mis en demeure la société Team interim de payer les sommes correspondant aux primes de volume et aux allégements sur les chiffres d'affaires des années 2012, 2013 et 2014.

Elle a réitéré sa demande par lettre recommandée du 21 décembre 2015.

Puis elle a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre aux fins d'obtenir le paiement de provisions.

Par une ordonnance du 29 juillet 2016, le juge des référés a :

- condamné la société Team interim à payer à la société Vinci, à titre de provision, la somme de 506.127,93 euros TTC au titre des factures impayées :

* n° 0000008361 du 6 juin 2013 d'un montant de 291.780,51 euros TTC, dont 177.085,53 euros ont été réglés, soit un solde de 114.694,98 euros TTC restant dû,

* n° 00000008362 du 6 juin 2013 d'un montant de 18.236,29 euros TTC,

* n° 00000010111 du 4 juin 2014 d'un montant de 222.908,92 euros TTC,

* n° 00000013592 du 27 juillet 2015 d'un montant de 150.287,74 euros TTC,

- condamné la société Team interim à payer à la société Vinci la somme de 15.207,34 euros à parfaire à la date de l'ordonnance, au titre des pénalités de retard de paiement,

- ordonné la capitalisation des intérêts sur le montant des provisions allouées conformément aux dispositions de l'article 1154 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à astreinte,

- dit que la société Team interim pourra s'acquitter de sa dette en 24 échéances mensuelles égales, payables le 1er de chaque mois et pour la première fois le 1er septembre 2016, et que, faute de payer à bonne date une seule des mensualités prévues, la totalité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible,

- condamné la société Team interim à payer à la société Vinci la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que ce montant ne sera pas exigible si l'échéancier de paiement de la dette au titre de la condamnation au principal est respecté,

- condamné la société Team interim aux dépens.

Le 1er août 2016, la société Team interim a relevé appel de cette décision devant la cour d'appel de Versailles.

Le 26 août 2016, elle a formé également un appel à l'encontre de cette décision devant la cour d'appel de Paris.

Par un arrêt rendu le 22 février 2017, la cour d'appel de Paris a dit recevable l'appel formé le 26 août 2016 par la société Team interim, a annulé l'ordonnance rendue le 29 juillet 2016 par le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre, et statuant en vertu de son pouvoir d'évocation, a dit n'y avoir lieu à statuer en la forme des référés en présence d'une contestation sérieuse, a rejeté la demande en paiement de provisions de la société Vinci, a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la société Vinci aux dépens.

* * *

Dans ses conclusions reçues au greffe le 29 mars 2017, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Team interim demande à la cour de :

- à titre principal, se déclarer incompétente au regard de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris sur les appels formés contre des décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article 442-6 du code de commerce,

- à titre subsidiaire, prononcer la nullité de l'ordonnance rendue le 29 juillet 2016 pour défaut de pouvoir juridictionnel et condamner la société Vinci à restituer les sommes perçues en exécution de l'ordonnance,

- par voie de conséquence, constater l'existence de contestations sérieuses sur les demandes formées par la société Vinci, dont la résolution incombe au seul juge du fond, et dire n'y avoir lieu à référé,

- à titre infiniment subsidiaire, accorder à la société Team interim un délai ferme de deux ans pour payer toute condamnation qui serait prononcée contre elle,

- en tout état de cause, condamner la société Vinci au paiement d'une indemnité de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

* * *

Par conclusions reçues le 14 avril 2017, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Vinci demande à la cour :

- de statuer sur sa compétence pour juger de l'appel de l'ordonnance du 29 juillet 2016 malgré l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 22 février 2017,

- de déclarer la société Vinci recevable en son appel incident et en ses demandes,

- de dire que le tribunal de commerce de Nanterre était compétent puisqu'il a tranché un référé provision, qu'il ne s'est pas prononcé sur le prétendu déséquilibre économique soulevé par la société Team interim et qu'il n'a pas eu à trancher un litige relatif à l'article L. 442-6 du code de commerce,

- de confirmer l'ordonnance sauf en ce qu'elle a soumis la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la condition d'un défaut de paiement d'une seule des mensualités et permis à la société Team interim de s'acquitter de sa dette en 24 échéances mensuelles égales,

- statuant à nouveau, d'ordonner le paiement immédiat et sans délai de toutes les sommes restant dues au titre des factures impayées,

- à défaut, d'assortir l'échéancier de paiement fixé de mesures propres à garantir le paiement de la créance de Vinci, en conséquence, d'autoriser la société Team interim à s'acquitter de sa dette selon les modalités fixées, le 1er de chaque mois, et pour la première fois dès le 1er septembre 2016, en prévoyant une clause de déchéance du terme, et lui ordonner de justifier, dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l'arrêt, avoir obtenu une garantie bancaire en faveur de la société Vinci, ou à tout le moins une garantie personnelle de l'un des dirigeants ou associés, pour le paiement de l'intégralité de la dette, à défaut de quoi la totalité des sommes sera immédiatement et de plein droit exigible, l'échéancier accordé devenant caduc,

- en tout état de cause, de condamner la société Team interim au paiement d'une somme de 20.000 euros en application de l'article 32-1 du code de procédure civile sanctionnant les procédures abusives, outre la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, « avec intérêts au taux légal à compter du présent acte », ainsi qu'aux entiers dépens.

* * *

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 avril 2017.

Les parties ont été invitées à adresser à la cour une note en délibéré sur les conséquences de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 22 février 2017.

Les sociétés Team interim et Vinci ont adressé une note en délibéré respectivement les 28 avril et 5 mai 2017.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ARRÊT :

La société Team interim indique, dans sa note en délibéré du 28 avril 2017, que ses dernières conclusions visent à titre principal à voir constater l'incompétence de la cour d'appel de Versailles, constitutive d'une fin de non-recevoir, au regard de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris ; qu'une autre fin de non-recevoir doit être soulevée tirée de l'autorité de la chose jugée visée à l'article 125 alinéa 2 du code de procédure civile ; que l'ordonnance de référé a une autorité de chose jugée au provisoire et ne peut être modifiée qu'en cas de circonstances nouvelles de fait ; que l'appel formé devant la cour d'appel de Versailles est irrecevable en l'état de l'arrêt rendu par le cour d'appel de Paris, qui bénéficie de l'autorité de la chose jugée au provisoire.

Elle ajoute qu'un désistement d'appel de sa part n'aurait pu prospérer, s'agissant d'un désistement avec réserves, nécessitant l'acceptation de l'intimée.

La société Vinci rappelle que l'arrêt d'appel d'une ordonnance de référé n'a pas autorité de la chose jugée au principal et souligne que la cour d'appel de Paris n'a pas statué dans son dispositif sur sa compétence, qu'en conséquence, il n'y pas autorité de la chose jugée sur cette problématique de compétence ; que la Cour de cassation, dans un arrêt du 29 mars 2017, a précisé les règles procédurales applicables en cas de litige portant sur l'article L. 442-6 du code de commerce, le principe étant désormais que pour les tribunaux non spécialement désignés par l'article D. 442-3 du code de commerce, qui trancheraient une demande relative à l'article L.442-6 du code de commerce, ce sont les cours d'appel dans le ressort desquelles ils se trouvent qui sont compétentes, ces cours d'appel devant déclarer l'appel irrecevable et relever d'office l'excès de pouvoir commis par le tribunal de commerce, puis statuer dans les limites de leur propre pouvoir juridictionnel.

La société Vinci estime donc que la cour d'appel de Versailles doit se prononcer sur sa compétence comme sollicité au principal dans ses conclusions du 14 avril 2017.

 

L'article 488 du code de procédure civile, qui dispose que l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, s'applique tant à l'ordonnance rendue par le juge en première instance qu'à l'arrêt rendu en pareille matière sur l'appel qui en est relevé.

L'arrêt rendu le 22 février 2017 par la cour d'appel de Paris, sur l'appel interjeté par la société Team interim de l'ordonnance du 29 juillet 2016 déférée également devant la cour d'appel de Versailles, a donc autorité de la chose jugée au provisoire.

Or la cour d'appel de Paris, indépendamment du débat élevé par les parties sur la compétence, a annulé l'ordonnance du 29 juillet 2016 en raison du défaut de pouvoir du juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre, privant désormais de tout objet l'appel formé par la société Team interim devant la cour d'appel de Versailles, la décision déférée à la cour n'existant plus.

Il doit être rappelé que l'appel tend à faire réformer par la cour d'appel un jugement rendu par une juridiction de première instance, ce qui suppose à tout le moins que le jugement de première instance, dont il est sollicité la réformation, existe.

Partant, la société Vinci n'est pas fondée à soutenir que la cour d'appel de Versailles reste saisie du problème de la compétence au regard des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce, alors qu'au surplus, la cour d'appel de Paris énonce dans les motifs de son arrêt qu'elle est seule compétente pour connaître de l'appel interjeté par la société Team interim, « investie du pouvoir juridictionnel exclusif de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce ».

Il convient donc de constater que l'appel est devenu sans objet.

Les parties seront déboutées de l'intégralité de leurs prétentions.

Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONSTATE que l'appel est sans objet,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que les dépens seront supportés par la société Team interim et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Jean-Michel SOMMER, président et par Madame Agnès MARIE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,                            Le président,