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CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 21 décembre 2017

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 21 décembre 2017
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 1re ch.
Demande : 16/05843
Date : 21/12/2017
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 28/09/2016
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7294

CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 21 décembre 2017 : RG n° 16/05843

Publication : Jurica

 

Extrait : « C'est à tort que la banque soutient que le juge n'aurait pas la possibilité de soulever d'office les causes de déchéance du droit aux intérêts en invoquant un état du droit ancien et en tout état de cause antérieur aux dispositions de l'ancien article L. 141-4 du code de la consommation, tel qu'issu de la loi du 3 janvier 2008 et qui était d'application immédiate.

La question des clauses abusives est en l'espèce sans portée dans la mesure où à les supposer constituées, la sanction de ces clauses est leur caractère non écrit par application des dispositions désormais codifiées à l'article L. 241-1 du code de la consommation. Or, ce n'est pas en application des éléments retenus comme abusifs par le premier juge que la déchéance du terme a été prononcée de sorte que le caractère non écrit des causes de déchéance du terme autre que celle procédant de la défaillance de l'emprunteur n'aurait pas d'incidence sur la solution du litige. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 21 DÉCEMBRE 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/05843 (Rédacteur : Catherine BRISSET, conseiller). Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 mai 2016 par le Tribunal d'Instance d'ANGOULEME (R.G. n° 11-16-000050) suivant déclaration d'appel du 28 septembre 2016.

 

APPELANTE :

SA BANQUE FRANCAISE MUTUALISTE, anciennement dénommée BANQUE FEDERALE MUTUALISTE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis [adresse], représentée par Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX et assistée de Maître Ingrid BOILEAU, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

INTIMÉ :

M. X.

demeurant [adresse], non représenté, assigné selon dépôt de l'acte à l'étude d'huissier

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 novembre 2017 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Catherine BRISSET, conseiller, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Michèle ESARTE, présidente, Catherine COUDY, conseiller, Catherine BRISSET, conseiller.

Greffier lors des débats : Mélody VIGNOLLE DELTI

ARRÊT : - par défaut - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La SA Banque Fédérale Mutualiste a consenti à M. X. un prêt d'un montant de 15.000 euros stipulé remboursable en 96 mensualités au taux nominal de 6,74 % selon offre acceptée le 19 juillet 2007 et un prêt personnel d'un montant de 13.500 euros stipulé remboursable en 96 mensualités au taux nominal de 7,11 % selon offre du 3 avril 2008.

M. X. a bénéficié d'un plan conventionnel de surendettement le 31 mars 2012.

Invoquant une caducité de ce plan, la SA Banque Française Mutualite (BFM) nouveau nom de la Banque Fédérale Mutualiste a, selon acte du 15 décembre 2015, fait assigner M. X. devant le tribunal d'instance d'Angoulême en paiement des sommes dues au titre des deux prêts.

Par jugement du 25 mai 2016, le tribunal a condamné M. X. au paiement des sommes de :

- 3.493,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015,

- 4.713,46 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015.

Le tribunal a en outre accordé à M. X. des délais de paiement et rejeté toutes les autres demandes, laissant à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés.

Le tribunal a considéré que pour les deux prêts la banque ne justifiait pas de la délivrance de la notice d'assurance alors en outre que le premier prêt contenait des clauses abusives.

La BFM a relevé appel le 28 septembre 2016.

Dans ses dernières écritures en date du 13 décembre 2016, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, la BFM conclut à la réformation du jugement et à la condamnation de M. X. au paiement des sommes suivantes :

- 7.907,59 euros avec intérêts au taux de 6,74 % sur 7.365,60 euros et légal pour le surplus à compter du 25 mars 2014 sous la déduction de la somme de 200 euros versée postérieurement à la caducité du plan,

- 8.282,52 euros avec intérêts au taux de 7,11 % sur 7.715,57 et légal pour le surplus à compter du 25 mars 2014

- 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sollicite en outre la capitalisation des intérêts.

Elle indique qu'il n'est pas justifié d'une nouvelle saisine de la commission de surendettement, ce qui ne la priverait pas de la possibilité d'obtenir un titre. Elle soutient que la déchéance du droit aux intérêts ne peut être relevée d'office. Elle fait valoir que le contrat ne comprend pas de clause abusive alors que la sanction en serait uniquement le caractère non écrit. Elle soutient que la notice d'assurance a bien été remise et qu'il n'y a pas lieu à déchéance du droit aux intérêts. Elle se prévaut d'une réception effective de la mise en demeure pour le point de départ des intérêts et de l'indemnité contractuelle. Elle indique ne pas être opposée à des délais de paiement mais fait valoir que l'intimé n'a procédé à aucun règlement depuis l'assignation.

M. X. n'a pas constitué avocat. L'appelante lui a fait signifier sa déclaration d'appel par acte d'huissier du 17 novembre 2016 et ses conclusions par acte d'huissier du 29 décembre 2016.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Devant le premier juge, M. X. qui avait comparu invoquait la saisine à nouveau de la commission de surendettement. Il n'en est toutefois pas justifié alors en outre que ceci ne prive pas le créancier de la possibilité de se faire délivrer un titre.

Il apparaît que suite à l'adoption d'un plan conventionnel de redressement le 1er février 2012, il lui a été conféré force exécutoire le 31 mars 2012 mais que le plan est devenu caduque suite au non-paiement des échéances du 5 janvier 2014, constituant le premier incident de paiement non régularisé après le plan.

C'est à tort que la banque soutient que le juge n'aurait pas la possibilité de soulever d'office les causes de déchéance du droit aux intérêts en invoquant un état du droit ancien et en tout état de cause antérieur aux dispositions de l'ancien article L. 141-4 du code de la consommation, tel qu'issu de la loi du 3 janvier 2008 et qui était d'application immédiate.

La question des clauses abusives est en l'espèce sans portée dans la mesure où à les supposer constituées, la sanction de ces clauses est leur caractère non écrit par application des dispositions désormais codifiées à l'article L. 241-1 du code de la consommation. Or, ce n'est pas en application des éléments retenus comme abusifs par le premier juge que la déchéance du terme a été prononcée de sorte que le caractère non écrit des causes de déchéance du terme autre que celle procédant de la défaillance de l'emprunteur n'aurait pas d'incidence sur la solution du litige.

Pour le surplus, le tribunal a considéré que dans les deux cas il y avait lieu à déchéance du droit aux intérêts faute pour la banque de justifier de la remise à l'emprunteur d'une notice d'assurance conforme aux dispositions de l'article L. 311-12 du code de la consommation tel qu'applicable aux faits de l'espèce.

Or, il est exact qu'il résulte dans les deux cas du bulletin d'adhésion au contrat d'assurance groupe dont les références sont rappelées dans le contrat de prêt, que la notice a bien été remise. En effet, dans les deux cas M. X. a signé le bulletin d'adhésion juste au-dessous de la mention en caractère gras je déclare avoir reçu un exemplaire de la notice d'information, en avoir pris connaissance et en avoir accepté les termes. (Pièces 1bis et 7bis).

C'est donc à tort que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et il y a lieu à réformation de ce chef.

Au titre du prêt du 19 juillet 2007, la banque peut en conséquence prétendre aux sommes suivantes :

- 6.774,90 euros au titre du capital restant dû à la caducité du plan,

- 590,70 euros au titre des trois échéances impayées, 1 euro au titre de l'indemnité contractuelle après réduction de la clause pénale manifestement excessive au regard du taux d'intérêt stipulé.

De cette somme de 7.366,60 euros, il convient de déduire celle de 200 euros versée le 30 juillet 2014 de sorte que M. X. sera condamné à payer à la banque la somme de 7.166,60 euros avec intérêts au taux de 6,74 % sur 6.774,90 euros et légal pour le surplus à compter du 25 mars 2014, sans qu'il y ait lieu de faire courir les intérêts au taux contractuel sur les échéances comprenant déjà une part d'intérêt.

Au titre du prêt du 3 avril 2008, la banque peut en conséquence prétendre aux sommes suivantes :

- 7.086,92 euros au titre du capital restant dû à la caducité du plan,

- 628,65 euros au titre des trois échéances impayées, 1 euros au titre de l'indemnité contractuelle après réduction de la clause pénale manifestement excessive au regard du taux d'intérêt stipulé.

M. X. sera condamné à payer à la banque la somme de 7.716,57 euros avec intérêts au taux de 7,11 % sur 7.086,92 euros et légal pour le surplus à compter du 25 mars 2014, sans qu'il y ait lieu de faire courir les intérêts au taux contractuel sur les échéances comprenant déjà une part d'intérêt.

Il y aura lieu à capitalisation des intérêts dus par année entière à compter du 5 décembre 2015, date de la demande en justice.

La banque avait indiqué ne pas être opposée au principe des délais de paiement. Toutefois, la cour ne peut qu'observer qu'elle ne dispose pas d'éléments sur la situation actuelle du débiteur alors que celui-ci, qui ne contestait pas le principe de la dette, n'a procédé à aucun versement depuis juillet 2014. Il n'est pas possible, compte tenu des éléments dont la cour dispose et de la résolution du premier plan, d'envisager un échéancier aboutissant à un apurement de la dette en 24 mois de sorte que le jugement sera réformé en ce qu'il a octroyé des délais de paiement.

Si l'appel de la banque est bien fondé, il n'apparaît pas inéquitable au regard de la disparité manifeste de situation des parties de ne pas faire application à son profit des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. X. étant condamné au paiement, il sera condamné aux dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Condamne M. X. à payer à la SA Banque Française Mutualiste les sommes de :

- 7.166,60 euros avec intérêts au taux de 6,74 % sur 6.774,90 euros et légal pour le surplus à compter du 25 mars 2014,

- 7.716,57 euros avec intérêts au taux de 7,11 % sur 7.086,92 euros et légal pour le surplus à compter du 25 mars 2014,

Ordonne la capitalisation des intérêts par année entière à compter du 5 décembre 2015,

Rejette les plus amples demandes,

Condamne M. X. aux dépens et dit qu'il pourra être fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SELARL Lexavoué qui le demande.

Le présent arrêt a été signé par Madame Michèle ESARTE, présidente, et par Madame Mélody VIGNOLLE DELTI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,                           La Présidente,