CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 10 janvier 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7354
CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 10 janvier 2018 : RG n° 16/02501
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Attendu que par principe les conventions sont d'effet relatif ; qu'il en résulte que deux contrats ne peuvent être rattachés par un lien d'indivisibilité que s'il ressort de la commune intention des parties que l'un est la cause de l'autre ».
2/ « Attendu que pour réclamer l'allocation de dommages intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 (2°) du code de commerce, la SARL SRH prétend que son adversaire a engagé sa responsabilité en la soumettant à une clause de dédit qui a créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au contrat ; Attendu que dans la mesure où le contrat de maintenance litigieux ne s'inscrit pas dans des rapports de partenariat au sens des dispositions sus-citées du code de commerce, celles-ci ne s'appliquent pas et ne peuvent pas être le fondement d'une demande de dommages et intérêts de la part de la SARL SRH ; que le jugement sera également confirmé sur ce point ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 –
PREMIÈME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 10 JANVIER 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/02501. Contradictoire. Sur appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE VESOUL, en date du 27 octobre 2016 [RG n° 2016002025]. Code affaire : 50B : Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix.
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE :
SARL SOCIÉTÉ DE RESTAURATION ET D'HOTELLERIE SAINTE ANNE
dont le siège est sis [adresse], Représentée par Maître Emilie B. de la SELARL B. - B., avocat au barreau de HAUTE-SAÔNE
ET :
INTIMÉE
SAS COPIAFAX
prise en la personne de ses représentants légaux demeurant pour ce audit siège, dont le siège est sis [adresse], Représentée par Maître EL M. de la SCP C.- C.- A., avocat au barreau de DIJON et Maître Jean-Michel E., avocat au barreau de BESANÇON
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.
ASSESSEURS : Madame H. BITTARD et Monsieur L. MARCEL (magistrat rapporteur), Conseillers.
GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.
lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre
ASSESSEURS : Madame H. BITTARD et Monsieur L. MARCEL, Conseillers, Conseillers.
L'affaire, plaidée à l'audience du 22 novembre 2017 a été mise en délibéré au 10 janvier 2018. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits, procédure et prétentions des parties :
Suivant contrat en date du 27 novembre 2009, la SARL CBDO, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la SARL de Restauration et d'Hôtellerie Sainte Anne (ci-après la SARL SRH) a confié à la SAS Copiafax la maintenance d'un photocopieur de marque Toshiba qui avait fait l'objet d'un contrat de location-vente auprès de la SA Bnp Paribas Lease Group.
Suivant courrier du 27 mars 2013, la SARL SRH a informé la SA Bnp Paribas Lease Group de sa décision de mettre un terme au contrat de leasing à compter du 30 novembre 2014. Lors d'une prestation effectuée le 22 avril 2013 sur le photocopieur pour le relevé du compteur des copies, le technicien de la SAS Copiafax a été informé que l'appareil avait cessé d'être utilisé.
Le 31 janvier 2014 la SAS Copiafax a émis une facture d'un montant de 5.478,67 euros ttc laquelle incluait une indemnité de résiliation.
A défaut d'en obtenir le paiement malgré mise en demeure du 1er avril 2014, la SAS Copiafax a saisi le tribunal de commerce de Dijon lequel, faisant application de l'article 47 du code de procédure civile, a par jugement rendu le 28 avril 2016, renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Vesoul qui a fait droit à la prétention de la SAS Copiafax par décision contradictoire en date du 27 octobre 2016.
Par déclaration parvenue au greffe de la cour le 9 décembre 2016, la SARL SRH a relevé appel de cette décision et, dans ses dernières écritures transmises le 10 novembre 2017, elle en poursuit la réformation, demandant à la cour de :
- à titre principal, débouter la SAS Copiafax, la résiliation du contrat intervenue le 27 mars 2013 avec effet au 30 novembre 2014 ne pouvant donner lieu à paiement d'une indemnité de résiliation,
- à titre subsidiaire, dire que la clause de résiliation crée un déséquilibre dans les droits et obligations des parties, condamner la SAS Copiafax à lui verser 5.478,67 euros à titre de dommages intérêts et ordonner la compensation des créances réciproques,
- en tout état de cause, condamner la SAS Copiafax à lui payer 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec droit pour la SELARL d'avocats B.-B. de se prévaloir de l'article 699 du même code.
Dans ses dernières conclusions, déposées le 17 novembre 2017, la SAS Copiafax, réclame :
- à titre principal, la confirmation du jugement critiqué sauf en sa disposition relative au taux d'intérêts et la fixation de ce dernier au taux contractuel,
- à titre subsidiaire, si la cour retenait l'interdépendance des contrats de maintenance et de leasing, de condamner la SARL SRH à lui payer 5.518,67 euros à titre de dommages intérêts en raison de la rupture brutale de la relation contractuelle,
- en tout état de cause, condamner la SARL SRH à lui payer 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître E., avocat, conformément à l'article 699 du code précité.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la Cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 novembre 2017.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
Sur la demande en paiement formée par la SAS Copiafax :
Attendu que l'article 1134 du code civil, pris dans sa rédaction antérieure, applicable à la présente espèce disposait : les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ;
Attendu que pour combattre la demande de paiement de l'indemnité de résiliation conventionnelle formée par la SAS Copiafax, la SARL SRH, invoquant l'interdépendance des contrats, soutient que le contrat de maintenance litigieux a été régulièrement résilié le 27 mars 2013 avec effet au 30 novembre 2014 concomitamment à la résiliation du contrat de leasing ;
Attendu que par principe les conventions sont d'effet relatif ; qu'il en résulte que deux contrats ne peuvent être rattachés par un lien d'indivisibilité que s'il ressort de la commune intention des parties que l'un est la cause de l'autre ;
Attendu que l'article 10 paragraphe (c) du contrat de leasing souscrit auprès de la SA Bnp Paribas Lease Group affirme clairement le principe de l'inopposabilité au bailleur des modifications intervenues dans les autres contrats de prestation intéressant le matériel dont s'agit ; que les conditions de résiliation prévues pour chacune des conventions obéissent à des règles de mise en œuvre totalement distinctes, sans qu'il soit fait de renvoi express d'un contrat à l'autre ; qu'il y a lieu enfin de relever que la SARL SRH ne produit aucune pièce venant contredire les constatations qui précèdent ; qu'il en résulte que le moyen pris de l'interdépendance des contrats est inopérant ;
Attendu qu'aux termes du contrat de maintenance lorsque le client cesse d'utiliser le photocopieur, celui est tenu de s'acquitter du paiement d'une indemnité de résiliation égale à la facturation moyenne mensuelle depuis le début du contrat, multiplié par le nombre de mois restant à courir jusqu'à l'expiration du contrat ;
Attendu que la SARL SRH soutient à tort que la clause dont s'agit constitue une clause pénale soumise au pouvoir modérateur du juge dès lors qu'elle ne sanctionne pas une inexécution par elle du contrat mais aménage les conditions financières de la rupture de celui-ci ; qu'il s'ensuit qu'il s'agit d'une clause de dédit ;
Attendu que lors d'une prestation effectuée le 22 avril 2013, le technicien de la société Copiafax a été informé de ce que le photocopieur n'était plus utilisé ; qu'en exécution du contrat, conclu pour une durée de cinq années à compter du 27 novembre 2009, la SARL SRH se trouvait débitrice d'une indemnité de résiliation calculée sur la période du 22 avril 2013 au 27 novembre 2014 ;
Attendu que la SAS Copiafax justifie avoir respecté la clause du contrat fixant les modalités de calcul de l'indemnité de résiliation ; qu'il est en effet démontré, contrairement à ce que soutient la SARL SRH, que ladite indemnité a été calculée sur la base de la moyenne des consommations relevées lors de la période du 27 novembre 2009 au 30 mars 2013 ; qu'il s'ensuit que le jugement déféré mérite confirmation en ce qu'il a condamné la SARL SRH à payer à la SAS Copiafax la somme de 5.478,67 euros ;
Attendu que s'agissant du taux d'intérêt applicable à la condamnation prononcée, il y a lieu d'approuver la solution adoptée par les premiers juges, l'article L. 441-6 alinéa 8 du code de commerce n'ayant pas vocation à s'appliquer en l'espèce ; que la condamnation concerne en effet le versement d'une indemnité de résiliation et non pas le paiement de pénalités de retard ; que c'est dès lors à juste titre que la condamnation a été assortie du taux légal à compter de la mise en demeure du 21 mars 2014 ;
Sur la demande de dommages intérêts formée par la SARL SRH :
Attendu que pour réclamer l'allocation de dommages intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 (2°) du code de commerce, la SARL SRH prétend que son adversaire a engagé sa responsabilité en la soumettant à une clause de dédit qui a créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu que dans la mesure où le contrat de maintenance litigieux ne s'inscrit pas dans des rapports de partenariat au sens des dispositions sus-citées du code de commerce, celles-ci ne s'appliquent pas et ne peuvent pas être le fondement d'une demande de dommages et intérêts de la part de la SARL SRH ; que le jugement sera également confirmé sur ce point ;
Sur les demandes accessoires :
Attendu que le jugement critiqué sera encore confirmé dans ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ; que la SARL SRH qui succombe à hauteur de cour sera condamnée à payer à la SAS Copiafax la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel, lesdites condamnations emportant nécessairement rejet de ses prétentions formées à ces titres ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 octobre 2016 par le tribunal de commerce de Vesoul.
Déboute la SARL SRH Sainte Anne de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne sur ce fondement à payer, à la SAS Copiafax la somme de mille cinq cents euros (1.500 euros).
Condamne la SARL SRH Sainte Anne aux dépens d'appel avec droit pour Me E., avocat de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été signé par M. Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Dominique Borowski, greffier.
Le Greffier, le Président de chambre
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