CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 10 janvier 2018

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 10 janvier 2018
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 15/01717
Date : 10/01/2018
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 7/01/2013
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 7396

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 10 janvier 2018 : RG n° 15/01717

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Rappelant qu'elle a procédé à la signification du jugement le 7 janvier 2013, la société Parfip France soutient que l'appel interjeté le 23 janvier 2015 par la société Impressio devant la cour d'appel de Paris est irrecevable comme étant tardif. La société Impressio réplique que l'acte de notification de jugement indiquait de manière erronée que l'appel pouvait être diligenté devant la cour d'appel d'Aix en Provence de sorte que celui-ci n'a pas fait courir le délai d'appel et qu'elle est en conséquence recevable en son appel devant la cour d'appel de Paris.

Mais, il ressort de la combinaison des articles 771 et 907 du code de procédure civile auquel renvoie l'article 914 du même code, que le conseiller de la mise en état est exclusivement compétent pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel et que les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour cette irrecevabilité après la clôture de l'instruction à moins que sa cause ne survienne postérieurement, ce qui n'est pas en l'espèce. La société Parfip qui s'est désistée de son incident d'irrecevabilité d'appel qu'elle a initié devant le conseiller de la mise en état, n'est pas recevable à invoquer devant la cour l'irrecevabilité de l'appel dirigé à son encontre. Par suite, l'exception d'irrecevabilité de l'appel sera rejetée. »

2/ « Le dernier contrat contenant la clause litigieuse liant les parties a été conclu, par reconduction tacite, le 6 juillet 2008. Par suite, la société Impressio ne peut exciper des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce qui ne sont applicables qu'aux seuls contrats conclus à compter du 1er janvier 2009.

A supposer que la société Parfip n'ait pas résilié régulièrement le contrat par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juillet 2009 et que le contrat ait été donc reconduit tacitement à compter de cette date, comme il sera examiné ci-après, il sera ajouté que le déséquilibre prohibé doit s'apprécier au niveau de l'ensemble des droits et obligations issus du contrat. Or, la prise en charge par la société Impressio du risque d'impayé se limite au seul cas où le premier prélèvement ne peut être encaissé tandis que la société Parfip supporte tous les autres risques d'impayés. Par suite, aucun déséquilibre significatif n'est démontré ; ce moyen d'annulation sera donc rejeté. »

3/ « Or, l'application de l'article 5-3) du protocole d'accord fait échapper la société Parfip au seul risque d'un impayé par le locataire, lors du premier règlement, celle-ci supportant tous les autres risques d'impayés. Par suite, la prise en charge par la société Impressio se limite au seul cas où le premier prélèvement ne peut être encaissé. En conséquence, la clause ne prive pas de toute substance l'obligation essentielle de la société Parfip d'avoir à supporter les risques d'impayés. Ce moyen d'annulation sera donc rejeté. »

4/ « Mais, comme le souligne, à juste titre, la société Parfip, la clause 5-3 n'est pas en contradiction avec l'économie générale du contrat en ce qu'elle ne constitue qu'une limitation de sa prise en charge des impayés dans un cas bien particulier. Par ailleurs, il ne peut être déduit des seuls termes du courriel du 4 juillet 2006 adressé dans le cadre des négociations préalables à la souscription du protocole d'accord et par lequel la société Parfip indique ne pouvoir envisager de modifier la clause en cause mais assurer qu'elle mettra tout en œuvre pour qu'une telle situation ne vienne pas à se produire, une quelconque application de cette clause de mauvaise foi. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré applicable la clause 5.3 du protocole d'accord. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 10 JANVIER 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/01717 (10 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 novembre 2012 -Tribunal de Commerce de MARSEILLE - R.G. n° 2012F01161.

 

APPELANTE :

SAS IMPRESSIO

Ayant son siège social : [adresse], N° SIRET : XXX (MARSEILLE), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Matthieu B. G. de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

 

INTIMÉE :

SASU PARFIP FRANCE

Ayant son siège social : [adresse], n° SIRET : YYY, (PARIS), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Laurent M., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 427

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 22 novembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Irène LUC, Présidente de chambre, Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère, chargée du rapport et rédacteur, Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Irène LUC, président et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

En 2006, la société Impressio, qui est spécialisée dans la commercialisation, l'installation et la maintenance de matériels informatique et bureautique, a souhaité faire financer les contrats de location comprenant la mise à disposition de matériels qu'elle propose à ses clients et s'est rapprochée de la société Parfip France, qui a pour objet la location d'équipements auprès des entreprises, des commerçants et des particuliers.

Le 6 juillet 2006, les parties ont signé un protocole d'accord organisant les conditions et les modalités de leur collaboration pour une durée d'un an, tacitement reconductible par périodes d'un an, permettant à la société Impressio de vendre à la société Parfip les produits que cette dernière aura, au préalable, livrés et installés chez ses clients auxquels elle aura fait signer un contrat de location.

Le 22 avril 2009, par lettre recommandée avec accusé de réception, la société Impressio a mis en demeure la société Parfip France d'avoir à lui régler la somme de 81.391,01 euros correspondant à des dossiers pour lesquels des contrats de location longue durée avaient été conclus et le matériel livré et installé.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2009, la société Parfip a mis en demeure la société Impressio de lui régler la somme de 10.796,38 euros qui serait due en application de l'article 5.3 du protocole d'accord, après compensation. Cette mise en demeure a été réitérée le 20 mai 2009 à hauteur de 10.921,10 euros. Ces mises en demeure sont restées vaines.

Le 7 juillet 2009, la société Parfip a résilié le protocole d'accord conclu entre les parties avec un préavis de 48 heures, en reprochant à la société Impressio de ne pas avoir respecté ses obligations et en sollicitant le paiement d'une somme de 11.625,74 euros au titre du solde restant dû.

Le 4 mai 2010, la société Parfip France a adressé une nouvelle mise en demeure en sollicitant le paiement sous huitaine de la somme de 42.311,93 euros.

Par acte du 17 novembre 2010, la société Parfip France a assigné la société Impressio devant le tribunal de commerce de Marseille en paiement d'une somme de 42.311,93 euros due au titre de l'article 5.3 du protocole d'accord.

À titre reconventionnel, la société Impressio a argué de la nullité de la clause 5.3 du protocole d'accord notamment au visa de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce.

 

Par jugement du 12 novembre 2012, le tribunal de commerce de Marseille a :

- déclaré valable l'article 5-3 du protocole d'accord signé par les parties,

- condamné la société Impressio SAS à payer à la société Parfip France la somme de 42.311,93 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2010, date de la mise en demeure ainsi que la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Impressio de ses demandes reconventionnelles,

- condamné la société Impressio aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance,

- conformément aux dispositions de l'article 515 du code de procédure civile, ordonné pour le tout l'exécution provisoire,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.

Le 7 janvier 2013, la société Parfip a procédé à la signification du jugement.

La société Impressio a interjeté appel du jugement devant la cour d'appel d'Aix en Provence.

Par soit-transmis du 24 décembre 2014, la cour d'appel d'Aix en Provence a invité les parties à conclure sur la recevabilité de l'appel, au regard des dispositions combinées des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce.

Par ordonnance du 20 mai 2015, la cour d'appel d'Aix en Provence a constaté l'existence d'une fin de non-recevoir, rejeté les demandes de sursis à statuer et de disjonction présentées par la société Impressio et déclaré l'appel irrecevable.

Un nouvel appel a alors été régularisé par la société Impressio devant la cour d'appel de Paris par déclaration reçue le 23 janvier 2015.

 

LA COUR

Vu la déclaration d'appel et les dernières conclusions signifiées le 21 août 2015 par lesquelles la société Impressio demande à la cour, au visa des articles L. 442-6-I-2° du code de commerce et 1101 et suivants, 1131 et suivants et 1134 du code civil,

à titre principal,

- réformer le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 12 novembre 2012, en l'ensemble de ses dispositions,

statuant à nouveau,

- prononcer l'annulation de l'article 5-3 du protocole d'accord du 6 juillet 2006,

subsidiairement,

- dire que l'article 5-3 du protocole d'accord du 6 juillet 2006 devra être réputé non écrit et inapplicable,

- débouter la société Parfip de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre très subsidiaire,

- dire que les conditions d'application de l'article 5-3 du protocole d'accord du 6 juillet 2006 ne sont pas réunies,

- dire que la société Parfip n'apporte aucune preuve du bien-fondé de ses demandes,

- débouter la société Parfip de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

en tout état de cause,

- débouter la société Parfip de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Parfip à payer à la société Impressio la somme de 81.398,01 euros TTC correspondant au total de factures impayées, assortie des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 22 avril 2009,

- dire que la société Parfip a résilié le 7 juillet 2009, de façon injustifiée, et sans respecter le préavis, le protocole d'accord liant les parties,

en conséquence,

- condamner la société Parfip à payer à la société Impressio la somme de 152.974,14 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

- condamner la société Parfip à payer à la société Impressio la somme de 5.000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appel étant distraits au profit de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles représentée par Maître Matthieu B.-G., sur son affirmation de droit ;

 

Vu les dernières conclusions signifiées le 22 juin 2015 par lesquelles la société Parfip France, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa de l'article 1134 du code civil,

à titre principal,

- déclarer la société Impressio, irrecevable en son appel,

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit aux demandes de la société Parfip France,

- l'amender quant au quantum,

en conséquence,

- condamner la société Impressio à payer à la société Parfip France, la somme de 76.939,12 euros (sauf à parfaire) augmentée des intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 24 avril 2009,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner la société Impressio au versement de la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamner la société Impressio, au versement de la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépense dont distraction au profit de la société LM Avocats ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur l'exception d'irrecevabilité de l'appel :

Rappelant qu'elle a procédé à la signification du jugement le 7 janvier 2013, la société Parfip France soutient que l'appel interjeté le 23 janvier 2015 par la société Impressio devant la cour d'appel de Paris est irrecevable comme étant tardif.

La société Impressio réplique que l'acte de notification de jugement indiquait de manière erronée que l'appel pouvait être diligenté devant la cour d'appel d'Aix en Provence de sorte que celui-ci n'a pas fait courir le délai d'appel et qu'elle est en conséquence recevable en son appel devant la cour d'appel de Paris.

Mais, il ressort de la combinaison des articles 771 et 907 du code de procédure civile auquel renvoie l'article 914 du même code, que le conseiller de la mise en état est exclusivement compétent pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel et que les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour cette irrecevabilité après la clôture de l'instruction à moins que sa cause ne survienne postérieurement, ce qui n'est pas en l'espèce. La société Parfip qui s'est désistée de son incident d'irrecevabilité d'appel qu'elle a initié devant le conseiller de la mise en état, n'est pas recevable à invoquer devant la cour l'irrecevabilité de l'appel dirigé à son encontre. Par suite, l'exception d'irrecevabilité de l'appel sera rejetée.

 

Sur la nullité de l'article 5-3) du protocole d'accord du 6 juillet 2006 :

L'article 5 - Partage des responsabilités - du protocole d'accord prévoyait notamment que la société Parfip assurait la facturation des loyers, gérait le recouvrement des créances et prenait tous les risques liés à la défaillance financière du client final. Au 3) de l'article il était mentionné que :

« Impressio reconnaît dès à présent que l'encaissement du premier prélèvement effectué par PARFIP France sur les contrats de location valide l'engagement du client final.

En conséquence, si le premier prélèvement ne peut être encaissé par Parfip France, et ce pour quelque raison que ce soit, Impressio accepte dès à présent de prendre à sa charge le préjudice subi par Parfip France correspondant au financement initial majoré des frais engendrés par la mise en service du contrat de location ».

 

Sur la nullité de la clause 5-3) sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce :

La société Impressio soutient que les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sont bien applicables au litige dès lors que la tacite reconduction a donné naissance à de nouveau protocoles conclus aux mêmes conditions. Elle considère donc que, depuis 2008, les nouveaux protocoles d'accord successifs issus de la tacite reconduction sont bien soumis aux respect des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce introduites par la LME de 2008. La société Impressio estime que la société Parfip France a abusé de sa supériorité économique et technique pour imposer, de façon déloyale, la clause litigieuse à son cocontractant en état de dépendance et soutient que l'article 5-3 vise à transférer abusivement à la société Impressio, en l'absence de toute faute de sa part dans l'accomplissement de ses obligations « naturelles », la responsabilité de la gestion financière des contrats de location en l'obligeant à assumer, à la place de la société Parfip France, les risques de défaillance des locataires dans le paiement de la première échéance de loyer. Elle considère que c'est la société Parfip qui doit assurer les risques financiers postérieurement à la sélection des locataires et à l'acceptation des dossiers et non elle-même qui est un tiers au contrat de location. Elle en conclut que la clause litigieuse doit être déclarée nulle en ce qu'elle est constitutive d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

La société Parfip France soutient que les relations contractuelles étant régies par un protocole souscrit le 6 juillet 2006, soit antérieurement aux dispositions de la loi LME, de 2008, l'application de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce modifié par cette loi est donc exclue. Elle ajoute que même si l'on considère que le renouvellement du protocole s'analyse en la conclusion de nouveaux contrats, la LME prévoit que ses nouvelles dispositions s'appliquent aux contrats conclus à compter du 1er janvier 2009 ce qui exclut son application au dernier contrat conclu entre les parties le 6 juillet 2008. Elle ajoute que la clause 5-3 du protocole d'accord a été librement consentie par la société Impressio et que ces stipulations ne constituent pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, la seule obligation de la société Impressio, pour éviter la mise en application de cet article, consistant à s'assurer de la mise en place du contrat de financement par l'émission du 1er règlement, la société Parfip France prenant quant à elle à sa charge les conséquences de la défaillance financière des clients finaux en cours de financement.

* * *

Le dernier contrat contenant la clause litigieuse liant les parties a été conclu, par reconduction tacite, le 6 juillet 2008. Par suite, la société Impressio ne peut exciper des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce qui ne sont applicables qu'aux seuls contrats conclus à compter du 1er janvier 2009.

A supposer que la société Parfip n'ait pas résilié régulièrement le contrat par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juillet 2009 et que le contrat ait été donc reconduit tacitement à compter de cette date, comme il sera examiné ci-après, il sera ajouté que le déséquilibre prohibé doit s'apprécier au niveau de l'ensemble des droits et obligations issus du contrat. Or, la prise en charge par la société Impressio du risque d'impayé se limite au seul cas où le premier prélèvement ne peut être encaissé tandis que la société Parfip supporte tous les autres risques d'impayés. Par suite, aucun déséquilibre significatif n'est démontré ; ce moyen d'annulation sera donc rejeté.

 

Sur la nullité de la clause pour absence de cause :

La société Impressio estime, en référence à la jurisprudence dite « Chronopost », que l'application de l'article 5-3 du protocole d'accord reviendrait à dispenser la société Parfip France de respecter ses obligations essentielles dès lors qu'elle lui permet de s'exonérer du risque lié à la défaillance du client final et de le lui transférer abusivement.

La société Parfip France réplique que l'article 5-3, qui prévoit la prise en charge par la société Impressio du préjudice subi par la société Parfip France dans la seule hypothèse où le premier prélèvement n'a pu être encaissé, ne la dispense pas d'assurer ses obligations essentielles mais constitue une limitation à ce principe.

Selon l'article 1131 ancien du code civil, l'obligation sans cause ou sur une fausse cause ou une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. Dans un contrat synallagmatique la cause de l'obligation d'une partie réside dans l'obligation de l'autre.

Or, l'application de l'article 5-3) du protocole d'accord fait échapper la société Parfip au seul risque d'un impayé par le locataire, lors du premier règlement, celle-ci supportant tous les autres risques d'impayés. Par suite, la prise en charge par la société Impressio se limite au seul cas où le premier prélèvement ne peut être encaissé. En conséquence, la clause ne prive pas de toute substance l'obligation essentielle de la société Parfip d'avoir à supporter les risques d'impayés. Ce moyen d'annulation sera donc rejeté.

 

Sur la nullité de la clause pour violence économique :

La société Impressio estime que la clause 5-3 du protocole doit être déclarée nulle pour violence économique dès lors que celle-ci, manifestement contraire à ses intérêts, lui a été imposée par son cocontractant qui a refusé toute négociation sur ce point et a abusé de sa position de force et de la dépendance économique de son cocontractant.

Selon l'article 1112 du code civil, dans sa version alors en vigueur, « Il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. On a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe et à la condition des personnes ».Seule l'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d'un mal menaçant les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence son consentement.

En l'espèce, comme le relève la société Parfip, la société Impressio ne démontre aucunement la violence économique dont elle prétend avoir été victime. En effet, elle se contente d'affirmer n'avoir consenti à cette clause que sous la contrainte, sans caractériser celle-ci. Ce moyen d'annulation ne peut donc être admis. En conséquence, la société Impressio sera déboutée de sa demande en annulation de la clause et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

 

Sur l'inapplicabilité de la clause :

La société Impressio sollicite de la cour qu'elle écarte l'application de l'article 5-3, celle-ci étant manifestement en contradiction avec l'économie générale du protocole en ce qu'elle vise à lui transférer abusivement, en l'absence de toute faute ou manquement de sa part, les risques liés à la défaillance des locataires de la société Parfip dans le paiement de la première échéance des loyers. Elle ajoute qu'il est déloyal de la part de la société Parfip de vouloir lui faire supporter les risques qu'elle a choisis sciemment de prendre dans la gestion financière des contrats de location, ce d'autant qu'elle dispose de toutes actions utiles à l'encontre des locataires défaillants, et de la possibilité de se faire indemniser de son préjudice par ceux-ci. En outre, elle estime que la clause est invoquée de mauvaise foi dès lors que la société Parfip avait pris l'engagement, dans un courriel du 4 juillet 2006, de ne la mettre en 'uvre qu'en dernier ressort et à défaut d'autres solutions.

Mais, comme le souligne, à juste titre, la société Parfip, la clause 5-3 n'est pas en contradiction avec l'économie générale du contrat en ce qu'elle ne constitue qu'une limitation de sa prise en charge des impayés dans un cas bien particulier. Par ailleurs, il ne peut être déduit des seuls termes du courriel du 4 juillet 2006 adressé dans le cadre des négociations préalables à la souscription du protocole d'accord et par lequel la société Parfip indique ne pouvoir envisager de modifier la clause en cause mais assurer qu'elle mettra tout en œuvre pour qu'une telle situation ne vienne pas à se produire, une quelconque application de cette clause de mauvaise foi.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré applicable la clause 5.3 du protocole d'accord.

 

Sur la demande en paiement d'une somme de 42.311,93 euros portée en appel par la société Parfip à 76.939,12 euros :

La société Impressio soutient qu'aucune des sommes réclamées par la société Parfip France au titre de 9 contrats n'est due. Elle estime en effet que pour les demandes formées au visa de l'article 5-3 du protocole, les premiers loyers des contrats de location ont pu être encaissés, ce qui fait radicalement obstacle à l'application de l'article et que pour les sommes sollicitées, en appel, au visa de l'article 6-2 du protocole, elles sont infondées dès lors que d'une part, la preuve qu'elle ait émis le souhait d'acquérir le matériel loué à l'issue du contrat n'est pas rapportée et d'autre part, que la société Parfip a l'audace de demander la refacturation d'un dossier qu'elle ne lui a jamais réglé.

La société Parfip rétorque qu'elle a légitimement refacturé la société Impressio sur la base des articles 5 et 6 du protocole :

- l'article 5-2, permettant la refacturation dans l'hypothèse d'une défaillance portée à la connaissance du fournisseur non résolue par ses soins, ayant servi de base à la facturation d'un dossier,

- l 'article 5-3 ayant servi de base à la facturation de 4 dossiers,

- l'article 6-1, prévoyant la possibilité pour Parfip de céder à la société Impressio, si elle en émet le souhait, le contrat pour un montant équivalent à 2 % du montant du financement initial en cas de défaillance du client conduisant à terme à la résiliation du contrat, ayant servi de base à la facturation de 4 dossiers,

- l'article 6-2 ayant servi de base à la facturation de 10 dossiers.

Au titre de la clause 5-2, dossier A.

S'agissant du dossier A., la société Parfip sollicite le paiement d'une facture du 19 février 2010 d'un montant de 10.538,89 euros au visa de l'article 5-2 du protocole. Toutefois, elle ne justifie pas avoir réglé précédemment la société Impressio de la facture correspondante du 23 mars 2009 à hauteur de 9.753,21 euros de sorte qu'elle n'est pas fondée à procéder à une refacturation du dossier.

Au titre de la clause 5-3, dossiers M., Icb Import-Export, B. Presse Montaigne et Bta

Il ressort des propres pièces communiquées par la société Parfip (pièces n°7, 3, 8 et 23) que pour ces quatre dossiers, les premières échéances de loyers ont été encaissées de sorte que la société Parfip n'est pas fondée à invoquer les dispositions de l'article 5-3) du protocole. Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Impressio à verser la somme de 42.311,93 euros.

Au titre de la clause 6-2, les dossiers Yo Technologie (2 dossiers), Screen Architecture, Tabac Cadeau F.

L'article 6-2 du protocole disposait que la société Parfip s'engageait à céder exclusivement à la société Impressio ou à toute personne morale qui pourrait se substituer à celle-ci, le matériel faisant l'objet du contrat pour un montant équivalent à 1 % du montant initialement financé, si la société Impressio en émet le souhait.

Or, la société Parfip ne justifie pas de la volonté de la société Impressio d'acquérir le matériel faisant l'objet des contrats sus-énoncés. Par suite, elle sera déboutée de la demande en paiement formée à ce titre.

 

Sur les demandes reconventionnelles de la société Impressio :

La société Impressio sollicite le paiement d'une somme de 81.398,01 euros TTC correspondant au total des factures de dossiers qui ont été acceptés par la société Parfip France et s'oppose à toute demande de compensation de la part de la société Parfip France qui ne justifie d'aucune créance à son encontre. Elle sollicite en outre la condamnation de la société Parfip France au paiement d'une somme de 152.974,14 euros correspondant au résultat qu'elle était en droit d'escompter au titre de la résiliation abusive du protocole d'accord dès lors qu'en ne respectant pas le préavis contractuel, le protocole d'accord aurait dû être tacitement reconduit pour une nouvelle période annuelle qui n'aurait dû expirer que le 6 juillet 2010, et non le 7 juillet 2009.

La société Parfip France estime que la créance dont se prévaut la société Impressio est éteinte dans la mesure où elle-même détenait une créance à son encontre, créance qu'elle a compensée, conformément à l'article 5-4 du contrat, à concurrence de la somme de 81.398,01 euros. Concernant la résiliation du protocole, elle considère qu'elle était fondée à résilier le contrat pour manquement grave de la société Impressio à ses obligations, ladite résiliation étant effective 48 heures après réception du courrier de résiliation, conformément à l'article 10 alinéa 2 du protocole d'accord.

 

Sur la compensation :

La société Parfip ne conteste pas que la société Impressio détenait une créance à son encontre de 81.398,01 euros et invoque la compensation avec sa propre créance qu'elle détenait à hauteur de la même somme en application de l'article 5.4 du protocole, et correspondant aux dossiers SAT 44, Sci Le M., Ag Import-Export et Icb Import-Export. Néanmoins, alors que cette créance est contestée, au soutien de son affirmation elle ne produit qu'une pièce intitulée « Lettrage Impressio au 16 avril 2009 » et qu'elle a elle-même établie, sans produire ni les contrats, ni les factures correspondantes. En outre, il a été vu ci-dessus qu'elle ne justifiait d'aucune créance pour le dossier Icb Import-Export. Par suite, faute de justifier d'une créance venant se compenser avec celle, non contestée, de la société Impressio, la société Parfip sera condamnée à verser la somme de 81.398,01 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2009, date de la première mise en demeure.

 

Sur la rupture du protocole d'accord :

L'article 10 alinéa 2 du protocole prévoyait qu'en cours de période, la société Parfip pourrait en cas de manquement grave de la société Impressio à ses obligations, résilier le contrat par lettre recommandée avec accusé de réception, cette résiliation étant effective 48 heures après réception de la lettre.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juillet 2009, faisant suite à une mise en demeure, demeurée infructueuse, du 20 mai 2009 d'avoir à régler la somme de 10.921,10 euros suivant relevé joint, la société Parfip a résilié le protocole d'accord à effet à 48 heures au motif que le compte restait débiteur d'une somme de 11.925,74 euros. La cour observe, à cet égard, qu'aucun décompte n'est produit concernant les sommes alléguées comme restant dues.

Il a été vu ci-dessus que la société Parfip ne justifiait d'aucune créance à l'encontre de la société Impressio. Par suite, la résiliation est abusive. Le protocole étant tacitement reconductible par période d'un an (article 2), faute d'avoir été résilié régulièrement, il a été reconduit le 6 juillet 2009 jusqu'au 6 juillet 2010. Or, un contrat à durée déterminée doit être exécuté jusqu'à son terme et une partie ne peut y mettre fin de façon unilatérale et anticipée, sauf à engager sa responsabilité. Dès lors, la société Parfip a engagé sa responsabilité en rompant unilatéralement le contrat et elle doit réparation du préjudice qui en est résulté.

La société Impressio sollicite l'allocation de la somme de 152.974,14 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture anticipée des relations contractuelles correspondant à la perte de marge qu'elle était en mesure d'escompter jusqu'à l'extinction du terme.

Il ressort des pièces produites aux débats que la société Impressio a réalisé avec la société Parfip un chiffre d'affaires moyen mensuel de 50.991,38 euros TTC sur les 30 mois (2006 à 2008) d'exécution du contrat. Elle était donc en droit d'escompter un chiffre d'affaires de 611.896,58 euros TTC du 6 juillet 2009 au 6 juillet 2010 (50.991,38 x 12) auquel il convient d'appliquer une marge de 25 %, non sérieusement contestée, soit la somme de 152.974,14 euros au paiement de laquelle la société Parfip sera condamnée.

 

Sur la demande en paiement pour résistance abusive :

Compte tenu du sens de la présente décision, la demande en paiement formée par la société Parfip à hauteur de 15.000 euros pour résistance abusive, sera rejetée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société Parfip qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel et devra verser à la société Impressio la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

REJETTE l'exception d'irrecevabilité de l'appel,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Parfip à verser à la société Impressio la somme de 81.398,01 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2009 au titre des factures impayées ;

CONDAMNE la société Parfip à verser à la société Impressio la somme de 152.974,14 euros à titre de dommages et intérêts pour résiliation abusive du protocole d'accord ;

DÉBOUTE la société Parfip de l'intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE la société Parfip aux dépens de première instance et d'appel ;

AUTORISE la Selarl Lexavoue Paris-Versailles représentée par Maître Matthieu B.- G., avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Parfip à verser à la société Impressio la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier                La Présidente

Cécile PENG             Irène LUC