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CA ROUEN (ch. proxim.), 25 janvier 2018

Nature : Décision
Titre : CA ROUEN (ch. proxim.), 25 janvier 2018
Pays : France
Juridiction : Rouen (CA), ch. proxim.
Demande : 17/01147
Date : 25/01/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7412

CA ROUEN (ch. proxim.), 25 janvier 2018 : RG n° 17/01147

Publication : Jurica

 

Extrait : « Cette indemnité, prévue au contrat et acceptée par la SCI, mise à la charge de l'emprunteur en cas de remboursement anticipé, lequel ne constitue pas de la part de l'emprunteur une inexécution du contrat mais l'exercice d'une faculté convenue entre les parties, cette clause n'a donc pas pour objet d'assurer l'exécution de ses obligations par l'emprunteur, mais de compenser le manque à gagner du prêteur, il ne s'agit pas d'une clause pénale et le juge ne peut mettre en oeuvre le pouvoir modérateur qu'il tient de l'article 1231-5 du code civil. Il convient en outre de noter que s'agissant de prêts professionnels contractés pour les besoins de son activité par une SCI, le code de la consommation n'est pas applicable et les appelants ne démontrent pas en quoi cette clause serait abusive, s'agissant au contraire, comme relevé par le premier juge, d'une clause habituellement stipulée en la matière ».

 

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ

ARRÊT DU 25 JANVIER 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/01147. DÉCISION DÉFÉRÉE : Jugement du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ROUEN du 26 janvier 2017.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], Représenté et assisté de Maître Luc M., avocat au barreau de ROUEN, substitué par Maître P., avocat au barreau de ROUEN

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], Représentée et assistée de Maître Luc M., avocat au barreau de ROUEN, substitué par Maître P., avocat au barreau de ROUEN

Société civile LES PERELLES BLEUES

Représenté et assisté de Maître Luc M., avocat au barreau de ROUEN, substitué par Maître P., avocat au barreau de ROUEN

 

INTIMÉE :

SA CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE NORMANDIE

Représentée et assistée de Maître Hélène D., avocat au barreau de ROUEN

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 13 novembre 2017 sans opposition des avocats devant Mme LEPELTIER-DUREL, Présidente, Madame LABAYE, Conseiller, rapporteur et Madame DELAHAYE, Conseiller.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Madame LEPELTIER-DUREL, Présidente, Madame LABAYE, Conseiller, Madame DELAHAYE, Conseiller.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DUPONT, Greffier

DÉBATS : A l'audience publique du 13 novembre 2017, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Janvier 2018, prorogé pour être rendu ce jour.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé publiquement le 25 janvier 2018, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Mme LEPELTIER-DUREL, Présidente et par Mme DUPONT, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société SCI Les Perelles Bleues a souscrit auprès de la Caisse d’Épargne Normandie, le 23 novembre 2007, trois contrats de prêt de 200.000 euros, 70.000 euros et 60.000 euros remboursables chacun sur une durée de 180 mois pour l'acquisition de locaux à usage commercial et pour des travaux et agencement, et un quatrième prêt, le 6 mai 2008, d'un montant de 30.000 euros pour des travaux d'aménagement et d'agencement, remboursable au taux annuel de 4,40 % (taux effectif global de 4,5496 %) en 180 échéances mensuelles de 227,97 euros, assurances comprises.

M. X. et Mme Y. épouse X. se sont portés cautions solidaires des engagements de la société Les Perelles Bleues au titre de ces prêts.

Le 5 janvier 2013, la société Les Perelles Bleues a sollicité la renégociation des prêts, demande que la banque n'a pas acceptée.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 octobre 2013, la société Les Perelles Bleues a notifié à la Caisse d’Épargne Normandie son souhait de procéder au remboursement anticipé des prêts et lui a demandé un décompte des sommes restant dues et, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 octobre 2013, la société a adressé à la Caisse d’Épargne Normandie un chèque de 248.172,35 euros visant à rembourser par anticipation le capital restant dû au titre de chacun des quatre prêts.

Par courrier du 27 novembre 2013, la Caisse d’Épargne Normandie a adressé à la société Les Perelles Bleues un décompte des sommes dues pour un remboursement anticipé en date de valeur du 20 novembre 2013 représentant au total une somme de 265.594,74 euros et lui a demandé le règlement d`une somme complémentaire de 17.422,39 euros pour solder les prêts, puis elle lui a réclamé le paiement des échéances des prêts pour le mois de décembre.

Par courrier du 19 décembre 2013, la Caisse d’Épargne Normandie a informé les cautions qu'elle avait procédé au remboursement anticipé total des prêts souscrits en 2007 et au remboursement anticipé partiel du quatrième prêt, et par courrier du 19 décembre 2013, elle a adressé à la société Les Perelles Bleues un nouveau tableau d'amortissement suite au remboursement anticipé partiel du 30 octobre 2013 du dernier prêt.

La société Les Perelles Bleues a contesté les montants réclamés et a sollicité une remise de 50 % sur le montant des indemnités de remboursement anticipé, par courrier du 17 avril 2014, la Caisse d’Épargne Normandie proposait une déduction de 1.800 euros du total des indemnités de remboursement anticipé dues (10 %) ce que la débitrice n'a pas accepté.

Par courrier du 25 juin 2014, la Caisse d’Épargne Normandie a mis en demeure la société les Perelles Bleues ainsi que M. et Mme X. en leur qualité de cautions, de lui régler le montant restant dû au titre du prêt 22XX92 souscrit en 2008 puis, faute de paiement, elle a prononcé la déchéance du terme le 5 septembre 2014.

Par exploit d'huissier délivré le 6 novembre 2014, la Caisse d’Épargne Normandie a fait assigner la société les Perelles Bleues, M. et Mme X. devant le tribunal de grande instance de Rouen afin de les voir condamner solidairement à lui régler, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, la somme de 19.411, 82 euros au titre du prêt du 6 mai 2008 outre les intérêts de retard à compter du 18 octobre 2014 au taux de 7,40 % sur la somme de 18.102,58 euros jusqu'à parfait paiement, et celle de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 26 janvier 2017, le tribunal a :

- condamné solidairement la société les Perelles Bleues, M. et Mme X. à payer à la Caisse d’Épargne Normandie la somme de 19.411,82 euros, au titre du prêt du 6 mai 2008, outre les intérêts de retard à compter du 18 octobre 2014 au taux de 7,40 % sur la somme de 18.102,58 euros jusqu'à parfait paiement,

- débouté les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamné solidairement la société les Perelles Bleues, M. et Mme X. aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

* * *

La société les Perelles Bleues, M. et Mme X. ont interjeté appel du jugement par déclaration au greffe le 3 mars 2017.

Dans leurs dernières conclusions du 30 mai 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la société les Perelles Bleues, M. et Mme X. demandent à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- vu les articles 1134, 1253 et suivants du code civil, dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016, déclarer la Caisse d’Épargne Normandie irrecevable et en tout état de cause, mal fondée en ses demandes,

- débouter la Caisse d’Épargne Normandie de toutes ses demandes,

- sur la demande subsidiaire, vu l'article 2292 du code civil, les mettre hors de cause, la demande n'entrant pas dans le champ de la garantie des cautions,

- vu les articles 1108, 1131, 1134 et 1153 du code civil, dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016, constater l'absence de mise en demeure de paiement,

- déclarer nulle et de nul effet la clause relative à l'indemnité due en cas de remboursement anticipé du prêt,

- débouter la Caisse d’Épargne Normandie de toutes ses demandes formées à titre subsidiaire.

- à titre reconventionnel, condamner la Caisse d’Épargne Normandie à payer à la société les Perelles Bleues, une somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- condamner la Caisse d’Épargne Normandie à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2.500 euros à la société les Perelles Bleues, celle de 2.500 euros à M. X. et celle de 2.500 euros à Mme Y. épouse X.,

- condamner la Caisse d’Épargne Normandie aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Luc M., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Les Perelles Bleues soutient qu'elle a remboursé le capital restant dû sur les quatre prêts, or, finalement, la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie a imputé une somme de 5.248,30 euros au titre du remboursement anticipé du prêt de mai 2008, elle a ainsi imputé une partie de la somme affectée au remboursement de ce prêt au règlement d'indemnités de remboursement anticipé contestées qui concernent les autres contrats de prêt, au mépris de ce qui avait été indiqué et en violation des règles d'imputation des paiements prévues aux articles 1253 et suivants du code civil.

La société Les Perelles Bleues et M. et Mme X. estiment que l'indemnité pour remboursement anticipé réclamée par la banque est illicite, cette clause n'est valable selon eux que si elle n'est pas abusive et si elle ne confère pas un avantage déloyal au prêteur, en l'espèce, le taux de cette indemnité est excessif, sans aucune adéquation avec le taux d'intérêt fixé aux conditions particulières des contrats de prêt, il a été fixé de manière arbitraire, dans le but évident de dissuader les emprunteurs de procéder au remboursement anticipé. Ils prétendent également que la banque ne pouvait prononcer la déchéance du terme pour le quatrième prêt, ni réclamer ni des échéances impayées, ni un capital, ni des intérêts ou une indemnité de déchéance, dans la mesure où la société Les Perelles Bleues avait remboursé le capital restant dû sur le prêt. Les appelants avancent que la banque ne peut réclamer des intérêts à compter du 27 novembre 2013, sans justifier d'une sommation de payer ou acte équivalent, en méconnaissance des dispositions de l'article 1153 alinéa 3 du code civil.

M. et Mme X. soutiennent ne pas devoir les indemnités pour remboursement anticipé qui ne sont pas expressément mentionnées dans leurs engagements de caution.

Compte tenu des fautes qu'elle estime avoir été commises par la banque, la société Les Perelles Bleues lui réclame des dommages et intérêts à hauteur de 10.000 euros.

* * *

Dans ses dernières écritures du 20 juin 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, la Caisse d’Épargne Normandie demande à la cour de :

- débouter la société les Perelles Bleues et M. et Mme X. de leurs demandes

- confirmer le jugement du 26 janvier 2017 du tribunal de grande instance de Rouen

- subsidiairement, condamner solidairement la société les Perelles Bleues et M. et Mme X. à lui régler la somme de 17.309,31 euros outre intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 27 novembre 2013,

- condamner in solidum la société les Perelles Bleues et M. et Mme X. à lui régler la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la société les Perelles Bleues et M. et Mme X. aux dépens.

Un débiteur ne peut obliger un créancier à recevoir un paiement partiel de sa créance selon la banque qui soutient que la société Les Perelles Bleues ne pouvait lui imposer de percevoir le règlement partiel de ses quatre créances, en imputant à son gré le dit règlement partiel à tel poste plutôt qu'à tel autre, l'imputation revendiquée par la société était parfaitement illégitime, celle-ci ayant pour but de ne pas acquitter les indemnités de remboursement anticipé dues, au détriment du créancier et du respect des contrats, or, remarque la banque les indemnités pour remboursement anticipé sont prévues contractuellement et elles sont dues par la société qui ne peut lui en imposer la réduction ou la suppression. La banque ajoute avoir affecté les versements aux dettes les plus anciennes respectant l'article 1256 du code civil.

La banque relève que le caractère excessif de l'indemnité de remboursement anticipé n'est pas démontré, de plus, elle affirme que les contrats de prêts sont des contrats professionnels souscrits pour des investissements immobiliers, ils ne dépendent donc pas du droit de la consommation et des clauses abusives.

La banque prétend que l'indemnité de remboursement anticipé est une pénalité et que les cautions en sont tenues s'étant engagées à régler « les pénalités » contractuelles. Selon courriers du 27 novembre 2013, elle a adressé à la société les Perelles Bleues les décomptes des sommes dues au titre des remboursements anticipés des prêts, cette demande valait mise en demeure selon la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie.

Elle s'oppose à la demande de dommages et intérêts, à défaut de démonstration d'une faute de sa part ou d'un préjudice subi par la société les Perelles Bleues.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

La société SCI Les Perelles Bleues a souscrit auprès de la Caisse d’Épargne Normandie, le 23 novembre 2007, trois contrats de prêt, pour l'acquisition de locaux à usage commercial et pour des travaux et agencement :

- de 200.000 euros remboursable en 180 mensualités de 1.549,50 euros, assurance comprise, avec intérêts au taux de 4,20 % et un taux effectif global de 4,7279 %,

- de 70.000 euros remboursable en 180 mensualités de 542,33 euros, assurance comprise, avec intérêts au taux de 4,20 % et un taux effectif global de 4,7279 %,

- de 60.000 euros remboursable en 180 mensualités de 457,35 euros, assurance comprise, avec intérêts au taux de 4,20 % et un taux effectif global de 4,4463 %,

- et le 6 mai 2008, un contrat de prêt d'un montant de 30.000 euros pour des travaux d'aménagement et d'agencement, remboursable en 180 mensualités de 227,97 euros, assurance comprise, avec intérêts au taux de 4,40 % et un taux effectif global de 4,5496 %.

Les quatre contrats étaient qualifiés de « prêts professionnels, entreprises, associations ».

Le 15 octobre 2013, la SCI les Perelles Bleues a indiqué à la banque vouloir procéder au remboursement anticipé des quatre prêts et a demandé un décompte des sommes restant dues et le 29 octobre suivant, elle a adressé un chèque de 248.172,35 euros à la banque.

Le 27 novembre 2013, la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie a adressé un décompte des sommes qu'elle estimait dues au titre des quatre prêts :

- prêt de 200.000 euros :

* capital restant dû : 135.687,10 euros

* indemnité contractuelle : 9.498,10 euros

total : 145.185,20 euros

- prêt de 70.000 euros :

* capital restant dû : 48.912,12 euros

* indemnité contractuelle : 3.423,85 euros

* échéances dues : 542,33 euros

total : 52.878,30 euros

- prêt de 60.000 euros :

* capital restant dû : 41.317,67 euros

* indemnité contractuelle : 2.892,24 euros

* intérêts de retard : 10,00 euros

* échéances dues : 457,35 euros

total : 44.677,26 euros

- prêt de 30.000 euros :

* capital restant dû : 21.358,86 euros

* indemnité contractuelle : 1.495,12 euros

total : 22.853,98 euros

total général : 265.594,74 euros, la banque estimait donc que, compte tenu du versement effectué par la SCI, manquait la somme de 17.422,39 euros.

La SCI Les Perelles Bleues n'avait remboursé que le capital restant dû sur chaque prêt, mais non l'indemnité prévue en cas de remboursement anticipé, dont elle soutient qu'elle est illicite et excessive.

Les quatre prêts stipulent la même clause en leur article 8 :

« l'emprunteur pourra rembourser le prêt par anticipation en partie ou en totalité, à une date normale d 'échéance moyennant un préavis de 30 jours donné par écrit à la Caisse d’Épargne par lettre recommandée avec accusé de réception. (...)

La Caisse d’Épargne exigera à l’occasion de tout remboursement anticipé, total ou partiel volontaire, une indemnité équivalente à 7 % du capital remboursé par anticipation ».

Cette indemnité, prévue au contrat et acceptée par la SCI, mise à la charge de l'emprunteur en cas de remboursement anticipé, lequel ne constitue pas de la part de l'emprunteur une inexécution du contrat mais l'exercice d'une faculté convenue entre les parties, cette clause n'a donc pas pour objet d'assurer l'exécution de ses obligations par l'emprunteur, mais de compenser le manque à gagner du prêteur, il ne s'agit pas d'une clause pénale et le juge ne peut mettre en oeuvre le pouvoir modérateur qu'il tient de l'article 1231-5 du code civil. Il convient en outre de noter que s'agissant de prêts professionnels contractés pour les besoins de son activité par une SCI, le code de la consommation n'est pas applicable et les appelants ne démontrent pas en quoi cette clause serait abusive, s'agissant au contraire, comme relevé par le premier juge, d'une clause habituellement stipulée en la matière.

La clause a donc justement été considérée comme valable par le tribunal et son montant est dû par la SCI emprunteuse.

Il résulte de l'article 1342-4 du code civil que le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement d'une dette, même divisible. Toutefois en l'espèce, la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie a accepté un paiement partiel de sa créance.

Selon l'article 1342-10 du code civil, le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu'il paie, celle qu'il entend acquitter. A défaut d'indication par le débiteur, l'imputation a lieu comme suit : d'abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d'intérêt à acquitter. A égalité d'intérêt, l'imputation se fait sur la plus ancienne ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement.

Les règles particulières concernant l'imputation légale des paiements formulées dans l'article 1342-10 alinéa 2 ont un caractère supplétif. Elles n'ont vocation à s'appliquer que lorsqu'il n'est pas établi que le débiteur a, au moment du paiement, fait part de sa volonté. Contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, les règles d'imputation s'appliquent même en cas de paiement partiel. Elles sont applicables en l'espèce.

La SCI Les Perelles Bleues a réglé la somme de 248.172,35 euros en précisant expressément l'imputation de ce paiement :

- remboursement du prêt d'un montant initial de 200.000 euros : 135.687,10 euros

- remboursement du prêt d'un montant initial de 70.000 euros : 49.264,52 euros

- remboursement du prêt d'un montant initial de 60.000 euros : 41.861,87 euros

- remboursement du prêt d'un montant initial de 30.000 euros : 21.358,86 euros.

La Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie se devait de respecter cette imputation sur la dernière échéance et le capital restant dû pour chaque prêt, dès lors, seules demeurent dues les indemnités de remboursement anticipé pour la somme totale de 17.309,31 euros, d'ailleurs réclamée par la banque à titre subsidiaire.

Le jugement étant réformé, la SCI Les Perelles Bleues sera condamnée au paiement de cette somme.

Selon l'article 1231-6 du code civil : les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

La lettre de la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie du 27 novembre 2013 contient seulement le décompte des sommes dues, elle ne peut pas valoir mise en demeure de payer, seule la lettre du 25 juin 2014 est une mise en demeure (même si elle porte sur des sommes différentes du fait de la mauvaise imputation du versement d'octobre 2013). La somme de de 17.309,31 euros sera assortie d'intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2014.

M. et Mme X. se sont portées cautions solidaires de la SCI les Perelles Bleues pour chacun des prêts, renonçant au bénéfice de division et de discussion, pour une somme plus importante que le montant du principal (260.000 euros, 91.000 euros, 78.000 euros et 39.000 euros) « couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou des intérêts de retard pour la durée de quinze ans » selon la mention manuscrite. Le contrat de prêt, article 3 précise que les cautions sont tenues au « paiement de toutes les sommes que l'emprunteur doit ou devra à la caisse d'épargne, en principal, intérêts, pénalités, intérêts de retard, frais, commissions et accessoires ». (...) « jusqu'au parfait remboursement de toutes les sommes dues au titre du présent prêt ». Il en résulte que l'engagement de caution inclut nécessairement l'indemnité de remboursement anticipé due par la société emprunteuse et les époux X. seront condamnés solidairement avec la SCI à paiement de la somme de 13.309,31 euros avec intérêts au taux légal à compter à compter du 25 juin 2014.

La demande reconventionnelle a été rejetée pour des motifs que la cour adopte outre qu'aucun préjudice n'est démontré.

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux indemnités de procédure et dépens de première instance. En cause d'appel les appelants supporteront les dépens et devront verser à la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie une indemnité de procédure que l'équité commande de fixer à la somme de 1.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement

Confirme le jugement déféré sauf sur le montant de la condamnation prononcée à titre principal,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant,

Condamne solidairement la société SCI les Perelles Bleues, M. X. et Mme Y. épouse X. à payer à la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie la somme de 13.309,31 euros avec intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2014,

Condamne in solidum la société SCI les Perelles Bleues, M. X. et Mme Y. épouse X. à payer à la Caisse d’Épargne et de Prévoyance Normandie la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne in solidum la société SCI les Perelles Bleues, M. X. et Mme Y. épouse X. aux dépens de la procédure d'appel.

Le Greffier                            La Présidente