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CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 9 mars 2004

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 9 mars 2004
Pays : France
Juridiction : Aix-en-Provence (CA), 2e ch.
Demande : 00/13128
Décision : 2004/192
Date : 9/03/2004
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : TGI DRAGUIGNAN (1re ch. civ.), 29 juin 2000
Numéro de la décision : 192
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 742

CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 9 mars 2004 : RG n° 00/13128 ; arrêt n° 2004/192

Publication : Juris-Data n° 248459 ; Bull. transports

 

Extrait : « …qui prévoient, en visant d'ailleurs les dispositions de l'article 105 du code de commerce, qu'à défaut de réserves par lettre recommandée dans les trois jours le client est privé du droit d'agir contre l'entreprise ; cette clause ne saurait être déclarée abusive comme créant, au profit du déménageur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations réciproques des parties au préjudice du consommateur qui verrait limiter son droit à réparation ; en effet, elle permet toujours au consommateur, qui est informé des limites de ses droits, d'agir contre l'entrepreneur pour obtenir réparation de son préjudice qui résulterait des mauvaises prestations de cet entrepreneur, dont la responsabilité est toujours engagée ».

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 9 MARS 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 00/13128. Arrêt n° 2004/192.

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 29 juin 2000 enregistré au répertoire général sous le n° 99/2276.

 

APPELANTES :

- SA AXA GLOBAL RISKS

demeurant [adresse], représentée par la SCP COHEN - GUEDJ, avoués à la Cour,

- SA DEMENAGEMENTS LECLERCQ

demeurant [adresse], représentée par la SCP COHEN - GUEDJ, avoués à la Cour,

 

INTIMÉS :

- Madame X. épouse Y.

née le […] à […] demeurant [adresse], représentée par la SCP PRIMOUT - FAIVRE, avoués à la Cour, ayant pour avocat Maître Caroline KUBIAK, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

- Monsieur Y.

né le […] à […] demeurant [adresse], représenté par la SCP PRIMOUT - FAIVRE, avoués à la Cour, ayant pour avocat Maître Caroline KUBIAK, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 3 février 2004 en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Jean-Louis THIOLET, Président ; Monsieur Michel BLIN, Conseiller ; Monsieur André JACQUOT, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Véronique DEVOGELAERE.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé publiquement le 9 mars 2004 par Monsieur BLIN, Conseiller.

Signé par Monsieur Jean-Louis THIOLET, Président et Madame Patricia BOUILLET, greffier présent lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] FAITS, PROCÉDURE ET ARGUMENTS DES PARTIES :

La SA AXA GLOBAL RISK et la SA DEMENAGEMENTS LECLERCQ ont relevé appel d'un jugement, rendu par le Tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN le 29 juin 2000, et les ayant condamnés à payer aux époux Y., qui invoquaient des dommages subis à l'occasion d'un déménagement, les sommes de 70.000 Francs à titre de préjudice matériel, 25.000 Francs au titre du préjudice moral et 5.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ils critiquent le jugement déféré qui a cru pouvoir, au mépris des dispositions de l'article 105 du code de commerce et de l'article 16 de la convention de déménagement, ordonner l'indemnisation des époux Y. en dépit de l'absence de réserves motivées parvenues dans les trois jours au déménageur, et alors qu'il était clairement indiqué sur la lettre de voiture que la mention « sous réserves de déballages » ne pouvait avoir valeur de preuve.

Ils font valoir encore que la désignation d'un expert ne peut suffire à emporter toute renonciation de l'assureur ou de son client aux moyens de défense qu'il pourrait invoquer ultérieurement.

Ils demandent qu'il soit constaté que le règlement de la somme de 2.912 Francs correspondant aux désordres signalés lors de la livraison est satisfactoire, et le déboutement pour le surplus.

Ils demandent enfin la condamnation des époux Y. à leur payer la somme de 6.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

M. Y. et Mme Y. concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il requalifié le contrat en louage d'ouvrage et d'industrie et écarté l'application de l'article 105 du code de commerce et en tant que de besoin à ce que la clause invoquée soit considérée comme abusive en l'état du déséquilibre créé au profit du professionnel et alors qu'elle ne figure qu'au verso de la lettre de voiture.

Ils invoquent encore la faute lourde du déménageur qui n'a déballé que 1 m3 sur les 85 m3 alors qu'il s'était engagé à déballer et ranger les marchandises, et font valoir que ce n'est qu'au fur et à mesure de l'ouverture des cartons qu'ont été découverts les bris, détériorations, coups et la perte de trois cartons, ce qui a été reconnu par une lettre du 15 septembre 1998 dans laquelle la société LECLERCQ s'est déclarée navrée de la survenance des dommages, a annoncé une transmission de la réclamation à son assureur et a fait livrer des fleurs, ce qui emporte reconnaissance de responsabilité.

Ils forment appel incident et demandent la condamnation solidaire des appelantes à leur [minute page 4] payer les sommes de 120.000 Francs en réparation du préjudice matériel, 50.000 Francs à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral et 20.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La recevabilité des appels n'est pas contestée ; en l'absence de moyen constitutif susceptible d'être relevé d'office, il convient de les déclarer recevables.

Le contrat de déménagement, qui inclut des prestations multiples au-delà du transport, étant un contrat d'entreprise, c'est en vain que les appelants invoquent les dispositions de l'article L. 133-3 du code de commerce (ancien article 105) pour voir déclarer éteinte l'action des intimés.

Ils peuvent cependant invoquer les dispositions de la lettre de voiture (article 16), dont les intimés ont eu connaissance, dans la mesure où ils produisent eux-mêmes un exemplaire signé par eux de ce document faisant référence aux « conditions générales de vente approuvées par le client et figurant au dos », et qui prévoient, en visant d'ailleurs les dispositions de l'article 105 du code de commerce, qu'à défaut de réserves par lettre recommandée dans les trois jours le client est privé du droit d'agir contre l'entreprise ; cette clause ne saurait être déclarée abusive comme créant, au profit du déménageur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations réciproques des parties au préjudice du consommateur qui verrait limiter son droit à réparation ; en effet, elle permet toujours au consommateur, qui est informé des limites de ses droits, d'agir contre l'entrepreneur pour obtenir réparation de son préjudice qui résulterait des mauvaises prestations de cet entrepreneur, dont la responsabilité est toujours engagée.

Mais les intimés font valoir que, répondant à leur lettre, certes hors délai au regard des dispositions contractuelle susvisées, puisque datée du 4 septembre 1998 alors que le déménagement a été effectué le 28 août 1998, le responsable du service après vente de la société LECLERCQ a, accusant réception de ce courrier, « confirmant vos réserves portées sur la lettre de voiture lors de la livraison », déclaré être « navré de la survenance de ces dommages et de la prestation inadmissible de notre personnel », « avoir pris des mesures disciplinaires à l'encontre de ces déménageurs » et « transmis votre réclamation à notre compagnie d'assurances afin que la procédure d'indemnisation soit diligentée » ; ils en déduisent qu'il s'agit d'une reconnaissance expresse de responsabilité.

Ils ne pourront cependant être suivis dans cette voie, la seule mention d'excuses et la promesses de sanctions à l'égard des préposés ne pouvant suffire à caractériser des aveux, et la transmission du dossier à l'assureur afin d'engager une procédure ne pouvant être considérée comme une reconnaissance de responsabilité alors que la société LECLERCQ mentionnait qu'elle ne manquerait pas de les « tenir informés du suivi de votre dossier, directement ou par l'intermédiaire de notre assureur ».

Ils ne pourront être suivis de même alors qu'ils invoquent l'existence d'une faute lourde [minute page 5] du fait du non déballage de l'intégralité des colis, cette prestation n'étant pas contractuelle, puisque, selon l'employeur de M. Y., qui a supporté le coût des opérations, son choix s'était porté sur la société LECLERCQ, « qui avait prévu de démonter et remonter le mobilier », et qu'il n'est fait nulle allusion au déballage de l'intégralité des colis.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé.

Aucune considération d'équité ou de nature économique ne justifiant l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la partie qui succombe devant supporter les dépens,

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels

Infirme le jugement déféré

Dit que les époux Y. devront restituer les sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement déféré

Rejette toutes autres demandes

Condamne les époux Y. aux dépens, avec distraction, pour ceux d'appel, au profit de la SCP COHEN GUEDJ, avoué, sur son affirmation qu'elle en a fait l'avance sans avoir reçu provision.