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CA RENNES (2e ch.), 9 février 2018

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (2e ch.), 9 février 2018
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 2e ch.
Demande : 15/00099
Décision : 18/70
Date : 9/02/2018
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 70
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7477

CA RENNES (2e ch.), 9 février 2018 : RG n° 15/00099 ; arrêt n° 70

Publication : Jurica

 

Extrait : « Concernant l'article 8 relatif à la « cession de l'hébergement », les demandeurs critiquaient également la clause ayant pour objet ou effet de restreindre ou limiter le droit pour les résidents de transmettre à un acquéreur de la résidence mobile les droits attachés aux contrats de location de parcelles en cours ; la clause précise que l'acheteur ou ayant droit ne bénéficie d'aucun droit à rester sur le camping, et prévoit un droit de reprise par le gestionnaire de l'emplacement en cas de vente de la résidence mobile ; le juge des référés a relevé que le contrat de 2011 interdisait déjà « toute cession ou substitution dans le contrat » et que les demandeurs locataires n'indiquaient pas en quoi cette restriction apportée par le propriétaire du terrain loué à leur droit de transmettre à un acquéreur de la résidence mobile les droits attachés aux contrats de location en cours serait de nature à entraîner un déséquilibre significatif entre les parties et partant à constituer une clause abusive. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 9 FÉVRIER 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/00099. Arrêt n° 70.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président,

Assesseur : Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Pascale DOTTE-CHARVY, Conseiller, rédacteur,

GREFFIER : Monsieur C. K., lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 24 novembre 2017, devant Madame Pascale DOTTE- CHARVY, magistrat, rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu, compte au délibéré collégial.

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 9 février 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, après prorogation du délibéré.

[minute page 2]

APPELANTE :

Madame X.

née le [date], à [ville], Représentée par Maître J. G. de la SELARL G., ROUHAUD ET ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Emmanuel MOITIE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

La SARL BILOURIS

dont le siège social est [adresse], Représentée par Maître D. A., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Cyril REPAIN, Plaidant, avocat au barreau de ROCHEFORT

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS et PROCÉDURE :

Mme X. a acquis de M. Y. un mobil-home selon certificat de cession en date du 6 juillet 2011 et moyennant le prix de 33.000 euros.

L'acte précise que la caravane occupe un emplacement sur le camping Bilouris à [ville A.] avec contrat reconductible annuellement, et que le vendeur déclare agir dans la vente avec l'agrément des propriétaires du camping dans la continuité du contrat de location annuelle 2011, pour un montant total de 1.840 euros, qui sera réparti au prorata temporis de la période d'occupation du 1er avril au 6 novembre 2011 par chacune des parties.

Le camping Bilouris a adressé aux locataires le 13 décembre 2011 le nouveau contrat de location annuelle 2012 ainsi que le nouveau règlement intérieur.

La Fédération nationale des propriétaires de résidences de loisirs et seize particuliers dont Mme Y. ont fait assigner la SARL Bilouris, et par ordonnance de référé en date du 5 juillet 2012, le président du tribunal de grande instance de Vannes a principalement :

- déclaré irrecevable l'action de la Fédération précitée,

- rejeté la demande des propriétaires tendant à voir déclarer illicite la résiliation implicite du contrat 2011,

- constaté le caractère illicite de la clause emportant obligation pour le locataire de confier au gestionnaire la revente de son hébergement vendu sur place et prévoyant le versement au gestionnaire d'une commission,

- donné acte à la société Bilouris de son engagement de ne pas invoquer cette clause et lui a fait, en tant que de besoin, interdiction de l'inclure dans les contrats [minute page 3] proposés à la signature des demandeurs et déclaré en tant que de besoin la clause inopposable aux demandeurs ayant signé le contrat proposé,

- dit n'y avoir lieu à référé concernant les autres clauses et rejeté l'ensemble des demandes y afférentes.

Mme X. n'ayant pas signé le contrat de location annuelle 2012, la société Bilouris lui a adressé le 11 octobre 2012 une facture d'indemnités d'occupation pour un montant total de 1.957,50 euros, que Mme X. a refusé de payer.

Par acte du 18 février 2013, elle a fait assigner la société Bilouris aux fins de voir dire que le nouveau contrat imposé lui est inopposable, enjoindre la société sous astreinte de signer un avenant de renouvellement, fixer à 1.840 euros la redevance due au titre de la location de l'emplacement pour l'exercice 2012, en tout état de cause dire abusifs quatorze articles du projet de nouveau contrat et en ordonner la suppression, et enjoindre la société Bilouris sous astreinte de lui remettre un contrat signé et expurgé desdites clauses ; Mme X. a en cours de procédure rajouté une demande de dommages et intérêts.

 

Par jugement en date du 20 novembre 2014 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance de Vannes a :

- jugé irrecevables les demandes formées par Mme X. au titre des clauses abusives, et recevable son action du chef de refus de vente et demandes subséquentes,

- débouté Mme X. de ses demandes tendant à enjoindre à la société Bilouris de signer un avenant de renouvellement du précédent contrat de location de 2011 avec une redevance de 1.840 euros ainsi que de sa demande de dommages et intérêts,

- ordonné à Mme X. de déménager son mobil-home et de libérer l'emplacement occupé dans le camping Bilouris le 31 décembre 2014, à peine d'en être expulsée, elle et tout occupant de son chef, avec le concours et l'assistance de la force publique, sans astreinte,

- condamné Mme X. à payer à la société Bilouris les sommes de 6.696 euros à titre d'indemnités d'occupation pour les ans 2012 à 2014, et de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

 

Mme X., appelante, demande à la cour de réformer le jugement entrepris et de :

- dire fautif le comportement de la société Bilouris visant à empêcher les cessions de résidences mobiles, et la condamner à lui payer la somme de 33.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner la société Bilouris à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

 

La société Bilouris demande à la cour de confirmer le jugement, dire l'appelante mal fondée en l'ensemble de ses demandes et l'en débouter, condamner Mme X. à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux conclusions déposées pour Mme X. le 3 avril 2015 et pour la société Bilouris le 3 juin 2015.

 

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2017.

[minute page 4]

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Il sera rappelé que la Fédération nationale des propriétaires de résidences de loisirs et seize particuliers dont Mme X. avaient saisi le juge des référés aux fins de voir déclarer illicite la résiliation implicite du contrat de 2011 et constater le caractère manifestement illicite de diverses clauses incluses dans la proposition de renouvellement adressée aux demandeurs le 13 décembre 2011 ; l'ordonnance précitée en date du 5 juillet 2012 a notamment :

- rejeté la demande tendant à voir déclarer illicite la résiliation implicite, aux motifs que les contrats 2011 prévoient expressément qu'ils ne peuvent être reconduits tacitement, tout nouveau contrat impliquant l'établissement d'un document écrit et signé entre les parties, distinct du premier contrat,

- constaté le caractère illicite de la clause prévue par l'article 8 du contrat 2012 emportant obligation pour le locataire de confier au gestionnaire la revente de son hébergement vendu sur place et prévoyant le versement au gestionnaire d'une commission de 10 %,

- dit n'y avoir lieu à référé concernant les autres clauses et rejeté l'ensemble des demandes y afférentes.

Concernant l'article 8 relatif à la « cession de l'hébergement », les demandeurs critiquaient également la clause ayant pour objet ou effet de restreindre ou limiter le droit pour les résidents de transmettre à un acquéreur de la résidence mobile les droits attachés aux contrats de location de parcelles en cours ; la clause précise que l'acheteur ou ayant droit ne bénéficie d'aucun droit à rester sur le camping, et prévoit un droit de reprise par le gestionnaire de l'emplacement en cas de vente de la résidence mobile ; le juge des référés a relevé que le contrat de 2011 interdisait déjà « toute cession ou substitution dans le contrat » et que les demandeurs locataires n'indiquaient pas en quoi cette restriction apportée par le propriétaire du terrain loué à leur droit de transmettre à un acquéreur de la résidence mobile les droits attachés aux contrats de location en cours serait de nature à entraîner un déséquilibre significatif entre les parties et partant à constituer une clause abusive.

Dans la présente instance au fond, Mme X. aux termes de son assignation délivrée le 18 février 2013 demandait notamment au tribunal d'instance de dire abusifs quatorze articles du projet de nouveau contrat, dont l'article 8, en ordonner la suppression, et enjoindre la société Bilouris sous astreinte de lui remettre un contrat signé et expurgé desdites clauses.

Le premier juge a dit irrecevables ces demandes aux motifs que Mme X. a refusé de signer la convention de 2012, qu'elle se trouve sans intérêt à agir, que la société Bilouris sollicite son expulsion et n'offre donc plus de signer un nouveau contrat.

Mme X. a formé appel total mais en limite expressément les effets dans ses uniques conclusions d'appelante au débouté de sa demande de dommages et intérêts ; par conséquent les autres dispositions du jugement seront confirmées.

Pour d'abord débouter Mme X. de sa demande au titre du refus de vente, en l'espèce de lui renouveler le contrat de location, le premier juge a notamment considéré que :

- la société Bilouris n'a pas refusé de renouveler le contrat de 2011, elle a proposé un nouveau contrat avec de nouvelles conditions notamment tarifaires ce qui est un motif légitime,

- Mme X. a refusé de signer le contrat 2012 et ne détient aucun droit au renouvellement de son contrat aux conditions de l'année précédente, quand bien même la valeur de son mobil-home est mesurée sur le droit d'occuper l'emplacement considéré et qu'elle sait que sans droit d'occupation la valeur est diminuée.

[minute page 5] Pour ensuite débouter Mme X. de sa demande de dommages et intérêts, le premier juge a considéré qu'au moment de la vente envisagée à Mme X., le 13 septembre 2013, le mobil-home se trouvait sur un emplacement, sans contrat pour légitimer sa présence sur les lieux, que dès lors Mme X. ne saurait invoquer un quelconque préjudice né du refus de la société Bilouris de louer l'emplacement à Mme X., ayant déjà perdu de son seul fait le droit d'occuper l'emplacement.

Devant la cour, l'appelante fait valoir, au visa de l'article 1382 du code civil, que la société Bilouris a modifié unilatéralement et de fond en comble le rapport de droit qui l'unissait à ses clients et qu'elle les a empêchés de céder leurs résidences mobiles en refusant d'établir des contrats de location en faveur des acquéreurs afin de pouvoir contraindre les vendeurs à lui céder leurs résidences mobiles à des prix dérisoires ; elle souligne que bien qu'incessible, la situation de l'emplacement en bord de mer entre pour une part déterminante dans le choix des acquéreurs et donc dans le prix d'acquisition.

Il est constant que Mme X. n'a jamais signé de contrat annuel de location pour les années postérieures à 2011 ; elle produit des échanges de courriels avec un acquéreur potentiel courant mars 2013, lequel n'a pas donné suite en raison de l'orientation du nouveau gérant du camping vers le locatif au détriment du résidentiel mais également de son souhait de s'installer dans un mobil-home plus récent que celui de Mme X. ; elle produit ensuite une attestation de Mme Z. aux termes de laquelle celle-ci a renoncé à sa proposition d'achat du mobil-home de l'appelante acceptée le 12 septembre 2013 lorsqu'elle a appris par les gérants qu'elle ne bénéficierait d'aucun contrat ; le prix de vente convenu avec ces deux personnes n'est pas précisé.

L'appelante a acquis en juillet 2011 le mobil-home (année 2005) au prix de 33.000 euros ; pour limiter son appel au débouté de sa demande de dommages et intérêts, demande qu'elle reprend devant la cour à hauteur de 33.000 euros, soit le prix d'acquisition sans autre explication, Mme I. indique avoir cédé sa résidence mobile mais sans préciser quand ni à quel prix et ne fournit aucune pièce.

Pour l'ensemble de ces motifs la décision dont appel sera confirmée en toutes ces dispositions.

Appelante qui succombe, Mme X. sera tenue aux dépens de la procédure, déboutée de sa demande de frais irrépétibles, et sera condamnée à indemniser la société Bilouris de ses propres frais.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Condamne Mme X. aux dépens d'appel et à verser à la SARL Bilouris la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de toutes autres demandes.

LE GREFFIER,                               LE PRÉSIDENT,