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CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 15 mars 2018

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 15 mars 2018
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 11e ch. A
Demande : 16/13092
Décision : 2018/106
Date : 15/03/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/06/2016
Numéro de la décision : 106
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7486

CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 15 mars 2018 : RG n° 16/13092 ; arrêt n° 2018/106

Publication : Jurica

 

Extrait : « L'objectivité commande de constater au regard des textes précités qu'une telle clause compte tenu de l'absence de réciprocité en cas du manquement du bailleur à ses obligations contractuelles, est incontestablement source de déséquilibre contractuel au détriment du locataire. »

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN PROVENCE

ONZIÈME CHAMBRE A

ARRÊT DU 15 MARS 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/13092. Arrêt n° 2018/106. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de TOULON en date du 11 mai 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/000480.

 

APPELANTE :

Madame X. épouse Y.

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par Maître Tahani M'B., avocat au barreau de TOULON

 

INTIMÉS :

Monsieur Z.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par Me Daniel R., avocat au barreau de TOULON substitué par Maître Virginie L., avocat au barreau de TOULON

Monsieur Y.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], assigné à personne le 14 octobre 2016, défaillant

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2018 en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre, Madame Frédérique BRUEL, Conseillère, Madame Sylvie PEREZ, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 mars 2018

ARRÊT : Réputé contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 mars 2018, Signé par Monsieur Yves BENHAMOU, Président de Chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Selon acte sous seing privé en date du 19 décembre 2012, M. Z. a consenti au époux Y. un bail à usage d'habitation concernant des locaux situés [adresse] moyennant un loyer mensuel de 720 euros outre la somme de 70 euros par mois à titre de provision sur charges et taxes.

Saisi par M. Z. qui a délivré un congé pour reprise personnelle, le tribunal d'instance de Toulon, par jugement en date du 11 mai 2016, a :

- constaté la validité du congé délivré le 23 juin 2015 et à effet du 25 décembre 2015,

- dit que les époux Y. étaient déchus de tout titre d'occupation des lieux loués et étaient occupants sans droit ni titre de ces locaux,

- ordonné l'expulsion des époux Y. des lieux en cause ainsi que de tous occupants de leurs chefs,

- condamné les époux Y. au paiement d'une indemnité d'occupation de 1.200 euros par mois à compter de l'échéance de janvier 2016,

- condamné les époux Y. au paiement de 400 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 12 juillet 2016 Mme X. épouse B. a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions en date du 3 janvier 2018, Mme X. épouse B. demande à la cour notamment après réformation du jugement querellé sur ce point de dire que l'indemnité d'occupation sera fixée à hauteur du montant du dernier loyer soit 790 euros par mois.

Elle indique que :

- l'article 19 du contrat de location en cause prévoit que le preneur qui se maintiendra dans les lieux après la cessation de la location versera une indemnité d'occupation mensuelle égale à deux ou trois fois le dernier loyer mensuel,

- or, conformément aux dispositions de l'article 4-i de la loi du 10 juillet 1989 et à la recommandation n° 2000-01 du 17 février 2000 cette clause qui fixe l'indemnité d'occupation à deux ou trois fois le montant du loyer est abusive,

- le jugement querellé sera donc réformé sur ce point et l'indemnité d'occupation devra être fixée à hauteur de 790 euros par mois.

Pour sa part M. Z. dans ses dernières conclusions en date du 13 décembre 2016 demande notamment à la cour de condamner M. et Mme Y. au paiement d'une indemnité d'occupation de 1.500 euros par mois.

Il indique que :

- l'indemnité d'occupation a été contractuellement définie et le juge ne pouvait la modifier,

- à titre subsidiaire la clause relative à l'indemnité d'occupation ne crée pas de déséquilibre entre les obligations réciproques des parties,

- le jugement sera donc réformé en ce qu'il a réduit cette indemnité d'occupation à la somme de 1.200 euros au lieu des 1.500 euros convenus.

Quant à lui M. Y. bien que cité à sa personne devant la cour n'a pas constitué avocat en cause d'appel ni conclu à cette occasion.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 janvier 2018.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA COUR :

SUR LE CARACTÈRE ABUSIF DE LA CLAUSE FIXANT LE MONTANT DE L'INDEMNITÉ D'OCCUPATION :

En application des dispositions de l'article 4-i) de la loi du 6 juillet 1989 est réputée non écrite toute clause qui autorise le bailleur à percevoir des amendes ou des pénalités en cas d'infraction aux clauses d'un contrat de location ou d'un règlement intérieur à l'immeuble.

De plus l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation [disposition à laquelle il convient de se référer au regard de la date des faits du présent litige] prévoit que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Par ailleurs conformément à la recommandation n° 2000-01 du 17 février 2000 complétant la recommandation n° 80-04 concernant les contrats de location de locaux à usage d'habitation, la clause qui consiste à fixer à la charge du locataire une indemnité d'occupation de deux ou trois fois le loyer est abusive dès lors qu'une même clause n'est pas mise à la charge du bailleur pour sanctionner ses manquements, étant entendu qu'une telle clause est source de déséquilibre au détriment du consommateur.

Dans le cas présent le contrat de bail litigieux conclu entre les parties le 19 décembre 2012 comporte une clause prévoyant que « le preneur ou ses ayants droits dans le cas où il se maintiendrait dans les lieux après la cessation de la location, versera au bailleur une indemnité d'occupation mensuelle fixée de convention expresse entre les parties, égale à deux fois le dernier mensuel dû en vertu du présent bail » (article 19 du dit contrat de bail).

L'objectivité commande de constater au regard des textes précités qu'une telle clause compte tenu de l'absence de réciprocité en cas du manquement du bailleur à ses obligations contractuelles, est incontestablement source de déséquilibre contractuel au détriment du locataire.

Il convient en conséquence de réformer le jugement querellé en ce qu'il a fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par les époux Y. à la somme de 1.200 euros par mois soit un peu moins du double du dernier loyer mensuel et de dire que l'indemnité d'occupation due par les époux Y. sera fixé au montant du dernier loyer soit 790 euros.

 

SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE :

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme Y. les frais irrépétibles exposés par elle et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de condamner M. Z. à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de M. Z. les frais irrépétibles exposés par lui et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de le débouter de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

SUR LES DÉPENS :

Il convient de condamner M. Z. qui succombe aux entiers dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

- INFIRME le jugement querellé en ce qu'il a condamné les époux Y. au paiement d'une indemnité d'occupation de 1.200 euros par mois à compter de l'échéance de janvier 2016,

Statuant à nouveau sur ce seul point :

- DIT que l'indemnité d'occupation due par les époux Y. sera fixé à hauteur du montant du dernier loyer soit 790 euros par mois à compter de l'échéance de janvier 2016,

- CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y ajoutant :

- CONDAMNE M. Z. à payer à Mme Y. la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- LE DEBOUTE de sa demande au titre des frais irrépétibles,

- LE CONDAMNE aux entiers dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE,                LE PRÉSIDENT,