CA PARIS (5e ch. sect. B), 24 novembre 2005
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 786
CA PARIS (5e ch. sect. B), 24 novembre 2005 : RG n° 03/15094 ; arrêt n° 05/261
Publication : Juris-Data n° 289982
Extraits : 1/ « - qu'aux termes des dispositions de l'article L. 121-22 (4°) du Code de la consommation, ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-29 de ce Code réglementant le démarchage, les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation commerciale ou de toute autre profession ; - qu'en l'espèce, un tel rapport est amplement établi, le panneau d'affichage en question étant, en effet, selon les propres termes employés par l'appelante dans ses écritures, destiné à faire passer des messages publicitaires pour vendre des produits pharmaceutiques ou faire passer des informations pratiques ; - que, dès lors, même dans l'hypothèse d'un démarchage, lequel ne pourrait d'ailleurs résulter d'une simple attestation d'une employé de Mme Y., celle-ci n'est pas fondée à reprocher aux intimées le défaut de mention sur le contrat de location de la faculté de renonciation dans un délai de sept jours prévu par l'article L. 121-23 du Code de la consommation ».
2/ « Mais considérant que le contrat de location ayant, comme il a été dit, un rapport direct avec l'activité commerciale exercée par Mme Y., celle-ci n'est pas en droit de se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation pour critiquer désormais cette clause, librement acceptée, qui, à l'opposé de l'indivisibilité qu'elle revendique, opère expressément une distinction entre, d'une part, la location du matériel et, d'autre part, la prestation de services auxiliaire revêtant la forme d'une option et faisant l'objet d'une tarification distincte, en lui interdisant précisément se prévaloir d'une interruption du service de programmation pour suspendre le paiement des loyers ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
CINQUIÈME CHAMBRE SECTION B
ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : 03/15094. Arrêt n° 05/261. Décision déférée à la Cour : Jugement du 5 Juin 2003 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 200175183.
APPELANTE :
Madame X. épouse Y.
[adresse], Représentée par la SCP REGNIER - SEVESTRE-REGNIER - REGNIER-AUBERT LAMARCHE-BEQUET, avoués à la Cour, Assistée de Maître Charles MOUTTET, avocat au barreau de PARIS, Toque : R 242
INTIMÉES :
- SOCIÉTÉ EUROLOCATIQUE
prise en la personne de ses représentants légaux [adresse], Représentée par la SCP ROBLIN - CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour, Assistée de Maître ZUIN, avocat au barreau de PARIS, Toque : P 304
- SOCIÉTÉ BNP PARIBAS LEASE GROUP
prise en la personne de ses représentants légaux, [adresse], Représentée par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour, Assistée de Maître Michel ROULOT, avocat au barreau de PARIS, Toque : P 535
- MAÎTRE TADDEI POUR LA SARL CEC ES QUALITÉS DE LIQUIDATEUR JUDICIAIRE
[adresse], Non représenté
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 20 octobre 2005, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Didier PIMOULLE, Président, Monsieur Bernard FAUCHER, Conseiller, Monsieur Christian REMENIERAS, Conseiller, qui en ont délibéré. [minute page 2]
Greffier, lors des débats : Mlle Gina NELHOMME.
ARRÊT : - Contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. - signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Mlle Gina NELHOMME, greffer présent lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La Cour statue sur l'appel interjeté par Mme Y. du jugement rendu le 5 juin 2003 par le tribunal de commerce de Paris :
- qui l’a déboutée de toutes ses demandes,
- qui l'a condamnée à verser à la société EUROLOCATIQUE et à la société BNP PARIBAS LEASE GROUP la somme de 1.500 € chacune au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et qui l'a condamnée aux dépens.
Madame Y., qui exploite une pharmacie à [ville], a, suivant bon de commande du 18 juin 1999, commandé à la société CEC un système d'affichage électronique programmable « PUBLICODEX » destiné à son officine, incluant, notamment, un tableau d'affichage, un lecteur de disquette et un logiciel d'application.
La société EUROLOCATIQUE a ensuite donné en location ce matériel à Mme Y. en vertu d'un contrat de location du 24 juin 1999 qui prévoyait, en outre, la fourniture par CEC d'un service auxiliaire de programmation.
Par courrier daté du 29 juin 1999, EUROLOCATIQUE a informé sa locataire que ce matériel, ayant été cédé à BNP LEASE, celle-ci se substituait à elle, mais qu'elle continuait néanmoins à percevoir les loyers et, plus généralement, resterait son interlocutrice. CEC ayant à la suite de sa liquidation judiciaire cessé d'assurer les prestations de programmation, Madame Y. a alors interrompu le règlement de ses loyers et engagé la présente procédure afin de voir prononcer la nullité du contrat de location.
* * *
Vu les dernières conclusions, signifiées le 19 avril 2004, par lesquelles Madame Y., appelante, demande à la Cour :
- de prononcer la nullité du contrat de prestation de services avec la société CEC ainsi que du contrat de location consenti par la société EUROLOCATIQUE, ou, subsidiairement, de prononcer leur nullité avec effet rétroactif au 1er mars 2001, et de dire que BNP PARIBAS LEASE GROUP ne pourra prétendre qu'au paiement des loyers échus avant cette date,
- enfin, de condamner ces sociétés à lui verser une indemnité de 5.000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions, signifiées le 16 mai 2005, par lesquelles BNP PARIBAS LEASE GROUP, intimée, demande à la Cour :
- de confirmer le jugement entrepris,
- de condamner Madame Y. à lui verser une somme de 2.500 € au titre de ses frais irrépétibles et de la condamner aux dépens.
[minute page 3]
Vu les dernières conclusions, signifiées le 5 février 2004, par lesquelles EUROLOCATIQUE intimée, demande à la Cour :
- de confirmer le jugement entrepris,
- de condamner Madame Y. à lui verser une somme de 3.000 € au titre de ses frais irrépétibles et de la condamner aux dépens ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur la demande de nullité du contrat de location :
Considérant que c'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont rejeté cette demande en relevant, notamment :
- qu'aux termes des dispositions de l'article L. 121-22 (4°) du Code de la consommation, ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-29 de ce Code réglementant le démarchage, les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation commerciale ou de toute autre profession ;
- qu'en l'espèce, un tel rapport est amplement établi, le panneau d'affichage en question étant, en effet, selon les propres termes employés par l'appelante dans ses écritures, destiné à faire passer des messages publicitaires pour vendre des produits pharmaceutiques ou faire passer des informations pratiques ;
- que, dès lors, même dans l'hypothèse d'un démarchage, lequel ne pourrait d'ailleurs résulter d'une simple attestation d'une employé de Mme Y., celle-ci n'est pas fondée à reprocher aux intimées le défaut de mention sur le contrat de location de la faculté de renonciation dans un délai de sept jours prévu par l'article L. 121-23 du Code de la consommation ;
Sur la demande de résolution du contrat de location :
Considérant que ce contrat comporte une clause ainsi rédigée : « Un service auxiliaire de programmation est proposé par le fournisseur en complément des programmations pouvant être réalisées directement par le locataire. Ce service est limité, à une programmation par mois. Cette option a été choisie par le locataire sous son entière responsabilité et en aucun cas le locataire ne pourra se prévaloir d'une imperfection ou d'une interruption de ce service pour suspendre le paiement des loyers. Le prix de ce service est de 50 Francs HT par mensualités et est inclus dans le montant du loyer indiqué ci-dessus » ;
Considérant que l'appelante soutient qu'une telle clause est abusive en ce qu'elle institue une exonération totale de responsabilité et crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties ; qu'elle prétend également que, eu égard à l'indivisibilité du contrat de prestation de services et du contrat de location, l'interruption des prestations de programmation par le fournisseur, CEC, emporte la résiliation du contrat de location du matériel, et que, dans ces conditions, cette clause est nulle comme contraire aux dispositions de l'article 1131 du Code civil ; qu'elle soutient, enfin, à titre subsidiaire qu'elle serait également fondée à réclamer une telle résiliation en application des dispositions de l'article 1722 du même Code, du fait de la perte partielle de la chose louée ;
[minute page 4] Mais considérant que le contrat de location ayant, comme il a été dit. un rapport direct avec l'activité commerciale exercée par Mme Y., celle-ci n'est pas en droit de se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation pour critiquer désormais cette clause, librement acceptée, qui, à l'opposé de l'indivisibilité qu'elle revendique, opère expressément une distinction entre, d'une part, la location du matériel et, d'autre part, la prestation de services auxiliaire revêtant la forme d'une option et faisant l'objet d'une tarification distincte, en lui interdisant précisément se prévaloir d'une interruption du service de programmation pour suspendre le paiement des loyers ; qu'au surplus, s'il est vrai que l'entreprise CEC a, en effet, cessé d'assurer ce service en 2001, force est de constater non seulement que Mme Y. admet qu'elle disposait de la faculté de réaliser elle-même la programmation mais, encore que EUROLOCATIQUE lui avait proposé, à la suite de la défaillance de CEC, un autre fournisseur dont les conditions financières, certes plus élevées que celles qui lui avaient été initialement consenties, n'étaient cependant pas inacceptables ;
Considérant, enfin, qu'en l'absence d'une destruction de la chose louée visée à l'article 1722 du Code civil, Mme Y. n'est pas non plus fondée à solliciter, pour ce motif, une résiliation du bail ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'appelante a été déboutée de toutes ses demandes ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Donne acte à la société BNP PARIBAS LEASE CROUP de ce qu'elle vient aux droits de la société BNP LEASE.
Confirme le jugement déféré,
Déboute Mme Y. de toutes ses demandes,
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne Mme Y. à verser à la société BNP PARIBAS LEASE GROUP ainsi qu'à la société EUROLOCATIQUE la somme de 1.000 € chacune au titre de leurs frais irrépétibles d'appel.
Condamne Madame Y. aux dépens d'appel et admet la SCP VERDUN SEVENO, avoué, ainsi que la SCP ROBLIN CHAIX DE LAVARENE, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
- 5943 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : publicité
- 7287 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit antérieur aux arrêts de Chambre mixte