CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 16 mai 2019

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 16 mai 2019
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 18/00454
Décision : 19/548
Date : 16/05/2019
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 548
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 7950

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 16 mai 2019 : RG n° 18/00454 ; arrêt n° 19/548 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu, ceci étant précisé, que, sur la demande relative aux clauses abusives, si elle est formée pour la première fois en cause d'appel par Monsieur X. et Monsieur Y., elle tend aux mêmes fins que leurs demandes originaires en déchéance du prêteur de son droit aux intérêts et substitution de l'intérêt au taux légal qui avaient pour but l'exécution du contrat à des conditions différentes de celles stipulées entre les parties par la privation du prêteur de son droit aux intérêts contractuels ; que, partant, elle échappe, en vertu de l'article 565 du code de procédure civile, à la prohibition dont l'article 564 du même code frappe les prétentions nouvelles formées pour la première fois en cause d'appel ; Que la fin de non-recevoir élevée par la société Banque Postale tirée de la présentation d'une demande nouvelle doit donc être rejetée ;

Qu'il sera en tout état de cause rappelé que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu'il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose (CJCE, arrêt du 4 juin 2009, Pannon, C-243/08) en sorte que le juge national a l'obligation d'examiner d'office le caractère abusif d'une telle clause ; Qu'il suit que, quand même Monsieur X. et Monsieur Y. n'ont pas soutenu dans leurs conclusions devant le premier juge le caractère abusif des clauses litigieuses, il incombe en tout état de cause à la cour de céans de rechercher d'office si sont abusives les clauses stipulées au contrat de crédit mentionnant le coût total de la dette et prévoyant l'amortissement par paliers du capital emprunté ;

Attendu, à cet égard, que selon l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que l'appréciation du caractère abusif de ces clauses ne concerne pas celles qui portent sur l'objet principal du contrat, pour autant qu'elles soient rédigées de façon claire et compréhensible ;

Attendu, s'agissant de la clause relative aux modalités d'amortissement du crédit dit « Pactys Sérénité Plus », qu'elle porte sur les conditions de remboursement dudit prêt, lesquelles, loin de revêtir un caractère accessoire, définissent au contraire l'essence même du rapport contractuel et relèvent de la nature même de l'obligation du débiteur ; que la clause liée aux stipulations de l'offre proposant d'adhérer à des modalités d'amortissement à paliers, dont la clause relative au coût de la dette n'est que la conséquence, fixe ainsi une prestation essentielle caractérisant le contrat et porte donc sur l'objet principal du crédit ;

Que cette clause figure dans une offre préalable qui précise que « le prêt Pactys Sérénité Plus, n° 00002 est remboursable à terme échu, le 05 de chaque mois, par prélèvement sur [le] compte n° 19XX026 selon les modalités suivantes » :

 

Palier

Nombre d'échéances

Montant de l'échéance

Montant de la prime ADI

Montant de la prime APE

Montant du prélèvement

1

180

266,77 €

39,16 €

0,00 €

305,93 €

2

119

930,13 €

39,16 €

0,00 €

969,29 €

3

1

73,02 €

0,00 €

0,00 €

73,02 €

Qu'il y est précisé que « ces montants, comme ceux indiqués dans le tableau d'amortissement prévisionnel établi en annexe, correspondent à ceux d'un ou des prêts intégralement versés » ;

Qu'il y a lieu d'en déduire que, contrairement à ce que soutiennent Monsieur X. et Monsieur Y., l'offre de prêt litigieuse expose de manière transparente les conditions de remboursement du crédit « Pactys Sérénité Plus » puisque le fonctionnement par paliers, qui repose sur un mécanisme simple, y est clairement décrit et que les emprunteurs sont expressément informés du nombre de paliers, de leur durée respective, du montant de chacune des échéances et donc de la charge totale du remboursement dudit prêt ;

Qu'à l'offre de prêt est en outre annexé un tableau d'amortissement prévisionnel qui détaille, pour chacune des mensualités de remboursement du crédit litigieux, la part de capital amorti et le montant des intérêts acquittés, d'un montant total de 64.777,09 euros, permettant ainsi aux emprunteurs de se rendre compte en outre de la quasi absence d'amortissement du capital emprunté durant toute la durée du premier palier de remboursement puisque l'amortissement total réalisé durant toute cette période y apparaît comme limité à la seule somme de 766,41 euros pour un capital emprunté de 94.000 euros, ce qui implique nécessairement un surcoût d'intérêts par rapport à un crédit amortissable par mensualités constantes ;

Que Monsieur X. et Monsieur Y. pouvaient d'autant plus aisément se convaincre de l'existence d'un tel surcoût qu'ils ont, aux termes de la même offre, souscrit, concomitamment au crédit litigieux, un second crédit immobilier de 90.000 euros au taux nominal de 3,10 %, et donc pour un montant et à un taux nominal relativement voisins de ceux du crédit critiqué, et d'une durée de cent-quatre-vingt mois, amortissable, quant à lui, par mensualités constantes de 663,36 euros chacune avec assurance, ce qui représentait un total d'intérêts de seulement 22.654,80 euros, près de trois fois moindre ;

Que s'agissant de la clause mentionnant le coût total du financement et le taux effectif global, qui n'est que la conséquence de la clause d'amortissement du capital, la cour observe qu'y sont détaillés, de manière claire et transparente, le montant du capital emprunté de 94.000 euros, le coût total du crédit d'un montant de 77.477,09 euros, le taux de période de 0,34 % et le taux effectif global de 4,05 % l'an de sorte que les emprunteurs, qui étaient ainsi parfaitement informés des conditions de remboursement du crédit, pouvaient prévoir les conséquences économiques qui en découlaient pour eux et ne sauraient valablement désormais prétendre que, privés d'informations adéquates sur les caractéristiques essentielles de l'opération de crédit proposée, ils n'auraient pas valablement consenti au coût global du prêt ni à l'obligation à la dette ;

Qu'il suit de ce qui précède que les clauses stipulées au contrat de crédit mentionnant le coût total de la dette et prévoyant l'amortissement par paliers du capital emprunté étant rédigées de façon claire et compréhensible, l'application du régime des clauses abusives est exclue ; Qu'il échet en ces conditions de rejeter la demande de Monsieur X. et Monsieur Y. tendant à ce que ces clauses soient déclarées abusives ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 16 MAI 2019