CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 5 juin 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7956
CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 5 juin 2018 : RG n° 16/02868
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2018-014208
Extrait : « M. X. soutient que la clause 2c du contrat de prêt « Avertissement en cas de défaillance due l'emprunteur » stipulant une exigibilité par anticipation de droit est abusive en ce qu'elle est de nature à créer un déséquilibre entre les droits des parties. Mais, ainsi que l'a retenu le tribunal, cette clause est la reprise des dispositions de l'article L 311-24 du code de la consommation et ne revêt, par conséquent, aucun caractère abusif. »
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 5 JUIN 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/02868. Appel d'un jugement (R.G. n° 11-14-0021) rendu par le Tribunal d'Instance de GRENOBLE, en date du 28 avril 2016, suivant déclaration d'appel du 14 juin 2016.
APPELANT :
Monsieur X.
de nationalité Française, Représenté par Maître Julie B., avocat au barreau de GRENOBLE (bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2016/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)
INTIMÉE :
La SA DIAC
immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro XXX, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Gisèle B., avocat au barreau de GRENOBLE, plaidant par Maître L., avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame Hélène COMBES, Président de chambre, Madame Dominique JACOB, Conseiller, Madame Joëlle BLATRY, Conseiller,
Assistées lors des débats de Madame Lætitia Gatti, greffier
DÉBATS : A l'audience publique du 7 mai 2018, Madame JACOB a été entendue en son rapport. Maître L. a été entendu en ses observations. Puis l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant offre préalable acceptée le 12 septembre 2012, la société Diac a consenti à M. X. un crédit de 10.763,55 euros remboursable en 60 mensualités de 228,07 euros, assurance comprise, avec intérêts au taux nominal de 4,75 % pour l'achat d'un véhicule Renault.
Des échéances étant demeurées impayées, la société Diac a prononcé la déchéance du terme le 25 octobre 2013.
Le véhicule a été restitué par M. X. et vendu aux enchères, le 17 avril 2014, au prix de 3.800 euros.
Par acte du 8 octobre 2014, la société Diac a assigné M. X. devant le tribunal d'instance de Grenoble en paiement de la somme de 7.400,02 euros.
Par jugement du 28 avril 2016, le tribunal a :
- condamné M. X. à payer à la société Diac la somme de 6.051,26 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,75 % à compter du 21 juillet 2014 et celle de 10 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. aux dépens.
M. X. a interjeté appel de cette décision le 14 juin 2016.
Dans ses dernières conclusions du 2 août 2016, il demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a écarté le décompte des intérêts de retard, ainsi que les frais et indemnités, et a rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
- l'infirmer en ce qu'il a limité l'indemnité à 10 euros et, statuant à nouveau de ce chef, réduire l'indemnité à de plus justes proportions,
- infirmer les autres dispositions du jugement,
- débouter la société Diac de l'ensemble de ses demandes,
- constater le caractère abusif de la clause 2c : « avertissement en cas de défaillance de l'emprunteur » et dire qu'elle est réputée non écrite,
- constater l'absence de mention de la durée de la période et la déchéance du droit aux intérêts,
- subsidiairement, condamner la société Diac à lui verser la somme de 7.400,02 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation d'information et de conseil, non-respect de l'article L 311-9 du code de la consommation et manquement à l'obligation de mise en garde,
- dire que cette somme se compensera avec la créance de la société Diac,
- très subsidiairement, constater que la commission de surendettement a suspendu, le 24 mars 2015, l'exigibilité de ses dettes pour une durée de 24 mois, et que sa situation financière est obérée,
- lui accorder 24 mois de délai de paiement et dire que les échéances reportées produiront intérêts à un taux réduit,
- en tout état de cause, condamner la société Diac à lui verser la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Par conclusions du 19 septembre 2016, la société Diac demande à la cour de :
- confirmer le jugement, sauf en ce qu'il a réduit l'indemnité de résiliation et le montant de sa créance et a rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
- condamner M. X. à lui payer la somme de 7.400,02 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 21 juillet 2014,
- ordonner la capitalisation des intérêts par année entière d'ancienneté,
- débouter M. X. de ses demandes,
- le condamner à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées.
Sur la demande en paiement :
La société Diac sollicite le paiement des sommes dues au titre du contrat de crédit du 12 septembre 2012 par suite de la défaillance de l'emprunteur malgré mise en demeure du 25 octobre 2013.
M. X. soutient que la clause 2c du contrat de prêt « Avertissement en cas de défaillance due l'emprunteur » stipulant une exigibilité par anticipation de droit est abusive en ce qu'elle est de nature à créer un déséquilibre entre les droits des parties.
Mais, ainsi que l'a retenu le tribunal, cette clause est la reprise des dispositions de l'article L 311-24 du code de la consommation et ne revêt, par conséquent, aucun caractère abusif.
Il ressort des pièces justificatives produites par la société Diac « offre de prêt, tableau d'amortissement du capital, mise en demeure de payer par lettre recommandée du 25 octobre 2013, accord de restitution amiable du véhicule en date du 17 mars 2014, décompte de vente du véhicule du 17 avril 2014, décompte de la créance et mise en demeure du 10 juillet 2014 » que la créance s'établit comme suit :
- échéances impayées : 1.079,04 euros
- capital restant dû : 8.772,22 euros
- à déduire le prix de vente : 3.800,00 euros
soit un solde de : 6.051,26 euros.
M. X. sollicite la déchéance du prêteur aux intérêts contractuels, motif pris de l'absence de mention de la durée de la période, ce qui, à la lecture du contrat, n'est aucunement le cas, le contrat mentionnant de façon explicite : « périodicité : mensuelle ».
Il soutient par ailleurs que la société Diac n'a pas interrogé le Fichier national des Incidents de remboursement des Crédits des Particuliers, ce qui est inexact, le justificatif de cette consultation étant versé aux débats.
Le jugement doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a condamné M. X. à payer la somme de 6.051,26 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,75 % à compter du 21 juillet 2014.
En vertu de l'article L. 311-23 du code de la consommation, aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévue par ces articles.
La société Diac n'est donc pas fondée à solliciter la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1154 du Code civil.
Le contrat prévoit le versement d'une indemnité de 8 % du capital restant dû. Ainsi que l'a justement apprécié le tribunal, cette indemnité constitue une clause pénale dont le montant s'avère manifestement excessif par rapport au préjudice réellement subi par le prêteur compte-tenu du taux d'intérêt appliqué et des sommes déjà versées.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a réduit l'indemnité à la somme de 10 euros dont le paiement sera assorti des intérêts au taux légal à compter du jugement.
Sur la demande de dommages et intérêts présentée par M. X. :
M. X. soutient que la société Diac a manqué à son obligation de mise en garde.
L'établissement bancaire est tenu, à l'égard d'un emprunteur non averti, d'un devoir de mise en garde contre les risques d'endettement nés de l'octroi du crédit.
Ainsi, avant d'accorder son concours, il doit vérifier les capacités financières de son client et, lorsque celles-ci peuvent sembler insuffisantes au regard des charges du prêt, l'alerter sur l'importance du risque d'endettement encouru.
En l'occurrence il n'est pas démontré, ni même soutenu, que M. X. était un emprunteur averti.
Il ressort de la « demande de renseignements » qu'il a signée le 12 septembre 2012, que la société Diac a pris en compte sa situation personnelle (divorcé sans aucune personne à charge), professionnelle (commerçant) et financière (2.083 euros de revenus mensuels et 400 euros de charges de loyer) et qu'au regard de ces éléments, l'octroi du crédit générant une charge mensuelle supplémentaire de 228,07 euros ne créait pas un risque d'endettement justifiant une mise en garde.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée de ce chef.
Sur la demande de délai de paiement :
M. X. fait valoir qu'il est de bonne foi, qu'il vit seul avec le revenu de solidarité active et qu'il bénéficie d'un plan de surendettement en date du 24 mars 2015.
Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, compte-tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
En l'espèce, il s'avère que M. X. bénéficie d'une suspension pour une durée de 24 mois de l'exigibilité des créances, dont celle de la société Diac, et qu'il n'y a dès lors pas lieu de lui accorder des délais supplémentaires.
Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Diac.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement,
- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- Rejette la demande de délai de paiement,
- Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. X. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame COMBES, Président, et par Madame GATTI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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