TI MANTES-LA-JOLIE, 3 janvier 1997
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 80
TI MANTES-LA-JOLIE, 3 janvier 1997 : RG n° 96/00361
(sur appel CA Versailles (1re ch. B), 5 mars 1999 : RG n° 1997/1450)
Extrait : « Attendu que ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-29 du Code de la Consommation les ventes et prestations de service ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation artisanale ; qu'il importe de préciser la notion de rapport direct qui unit le contrat avec l'activité du professionnel l'ayant souscrit ; la législation relative au démarchage à domicile pouvant bénéficier au professionnel « qui ne contracte pas pour tout ce qui permet son activité professionnelle de façon directe » (JCP 1995. II. n° 22592, Obs. G. Paisant) ; qu'ainsi la ligne de partage entre les contrats échappant aux dispositions de la loi précitée et ceux qui lui sont soumis se situe entre les contrats inhérents à l'exercice de l'activité professionnelle spécifique du contractant et les contrats conclus à l'occasion de l'activité professionnelle du contractant mais étrangers à l'objet spécifique de cette activité, de telle sorte que tout professionnel pourrait être amené à les conclure, quelque soit son activité, en vue de l'exercice de sa profession ; Attendu qu'ainsi le contrat publicitaire conclu par un artisan taxi, s'il se trouve conclu en vue de l'exercice de sa profession, est étranger à l'objet spécifique de son activité et se trouve dès lors soumis aux dispositions protectrices des articles L. 121-23 et suivants du Code de la Consommation ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE MANTES-LA-JOLIE
JUGEMENT DU 3 JANVIER 1997
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-96-00361. Jugement n° 2. Le Tribunal D'Instance de MANTES LA JOLIE, Séant au Palais de Justice de MANTES LA JOLIE, a rendu à l'audience en date du 3 janvier 1997 tenue par Madame BAZET, Juge, assistée de Madame EDET, Greffier, le jugement dont la teneur suit :
ENTRE :
DEMANDEUR (S) A L'INJONCTION, DÉFENDEUR (S) A L'OPPOSITION :
SARL GUEREMOND MEDIA PAGE
demeurant [adresse], non comparant, Représenté par MAÎTRE CHAMBONNAUD
ET :
DÉFENDEUR (S) A L'INJONCTION, DEMANDEUR (S) A L'OPPOSITION :
MONSIEUR X.
demeurant [adresse], Comparant assisté de MAÎTRE MOREAU
Débats : Audience publique du 29 novembre 1996. Les parties ont été avisées par le Président de la Juridiction que le jugement serait prononcé à l'audience du 3 janvier 1997.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par ordonnance délivrée le 20 février 1996, M. X. a été condamné à payer à la SARL GUEREMOND la somme de 6.709,56 francs majorée des intérêts au taux légal. L'ordonnance a été signifiée le 12 mars 1996 en mairie et M. X. a formé opposition par lettre parvenue au greffe le 11 avril 1996.
La SARL GUEREMOND rappelle que le 28 juin 1994, M. X. a souscrit un contrat prévoyant une publicité au profit de son activité de chauffeur de taxi, insérée sur un marque-page distribué à des abonnés au téléphone, moyennant le prix de 9.962,40 francs sur lequel M. X. demeure redevable de la somme de 6.709,56 francs. La SARL GUEREMOND sollicite la confirmation de l'ordonnance attaquée, la condamnation de M. X. au paiement de la somme de 805,15 francs représentant les frais de recouvrement contractuellement prévus et de celle de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
M. X. s'oppose à ces demandes et développe les moyens suivants :
- [minute page 2] les circonstances qui ont entouré la conclusion du bail démontrent que M. X. a été victime de manœuvres dolosives ayant vicié son consentement.
- le contrat conclu le 28 juin 1994 ne respecte pas les dispositions de la loi du 22 décembre 1972 applicable en l'espèce et doit être annulé.
M. X. sollicite, outre la rétractation de l'ordonnance attaquée, la condamnation de la SARL GUEREMOND à rembourser la somme déjà versée (3.280,80 Francs) ; à lui payer la somme de 3.000 francs à titre de dommages et intérêts, celle de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, la publication de la présente décision dans les revues « 60 millions de consommateurs » et « Que choisir », le tout avec exécution provisoire.
La SARL GUEREMOND réplique que le contrat n'est pas soumis aux dispositions de la loi invoquée, un contrat de publicité conclu par un commerçant ou un artisan étant souscrit en vue d'étendre le champ de son activité professionnelle.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Attendu que ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-29 du Code de la Consommation les ventes et prestations de service ayant un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation artisanale ; qu'il importe de préciser la notion de rapport direct qui unit le contrat avec l'activité du professionnel l'ayant souscrit ; la législation relative au démarchage à domicile pouvant bénéficier au professionnel « qui ne contracte pas pour tout ce qui permet son activité professionnelle de façon directe » (JCP 1995. II. n° 22592, Obs. G. Paisant) ; qu'ainsi la ligne de partage entre les contrats échappant aux dispositions de la loi précitée et ceux qui lui sont soumis se situe entre les contrats inhérents à l'exercice de l'activité professionnelle spécifique du contractant et les contrats conclus à l'occasion de l'activité professionnelle du contractant mais étrangers à l'objet spécifique de cette activité, de telle sorte que tout professionnel pourrait être amené à les conclure, quelque soit son activité, en vue de l'exercice de sa profession ;
Attendu qu'ainsi le contrat publicitaire conclu par un artisan taxi, s'il se trouve conclu en vue de l'exercice de sa profession, est étranger à l'objet spécifique de son activité et se trouve dès lors soumis aux dispositions protectrices des articles L. 121-23 et suivants du Code de la Consommation ;
Attendu que le contrat conclu le 28 juin 1994 est dépourvu du formulaire détachable permettant l'exercice de la faculté de rétractation dans un délai de 7 jours ; qu'il comporte contrairement aux dispositions de l'article L. 124-24 une clause attributive de compétence ;
Attendu que par application de l'article L. 121-26 le représentant de la SARL GUEREMOND n'était pas fondé à demander à M. X. avant l'expiration du délai de réflexion le paiement d'une quelconque somme d'argent ;
[minute page 3] Attendu que les règles instituées par les articles précités sont d'ordre public et prescrites à peine de nullité ; que le contractant ne peut renoncer à leur bénéfice ;
Attendu dès lors qu'il y a lieu de prononcer la nullité du contrat conclu le 28 juin 1994 ; que la SARL GUEREMOND, par suite de la mise à néant du contrat, est tenue de restituer à M. X. la somme déjà versée par lui (3.320,80 francs) ;
Attendu que M. X. a subi un préjudice direct et certain découlant de la faute commise par la SARL GUEREMOND et qui sera réparé par l'allocation de la somme de 3.000 francs à titre de dommages et intérêts ;
Attendu que M. X. a dû engager des frais dont il est fondé à demander le remboursement à hauteur de 5.000 francs ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la publication demandée ;
Attendu que vu l'urgence, la présente décision sera assortie de l'exécution provisoire, celle-ci étant compatible avec les éléments de la cause ;
Attendu que de ce qui précède il résulte que les demandes accessoires de la SARL GUEREMOND ne sont pas fondées et seront rejetées ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort ;
Reçoit M. X. en son opposition contre l'ordonnance délivrée le 20 février 1996 ;
Substituant le présent jugement à l'ordonnance ci-dessus évoquée ;
Prononce la nullité du contrat conclu le 28 juin 1994 entre la SARL GUEREMOND et M. X. ;
Condamne la SARL GUEREMOND à rembourser à M. X. la somme de trois mille trois cent vingt francs et quatre vingt centimes (3.320,80 Francs) ;
Condamne la SARL GUEREMOND à payer à M. X. la somme de trois mille francs à titre de dommages et intérêts et celle de cinq mille francs (5.000 Francs) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Déboute la SARL GUEREMOND de l'ensemble de ses demandes et M. X. du surplus de ses demandes ;
Ordonne l'exécution provision de la présente décision sauf en ce qui concerne les sommes allouées au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne la SARL GUEREMOND aux dépens.
Le Greffier, Le Président,
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