CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (pôle 2 ch. 6), 16 mai 2019

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 2 ch. 6), 16 mai 2019
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 2 ch. 6
Demande : 16/00207
Date : 16/05/2019
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 8039

CA PARIS (pôle 2 ch. 6), 16 mai 2019 : RG n° 16/00207 

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2019-008046

 

Extrait : « A l'occasion d'un litige les opposant à la personne chargée de réaliser les diagnostiques concernant la maison qu'ils se proposaient d'acquérir les époux X. ont confié la défense de leurs intérêts à Mme C. Les parties ont signé le 2 octobre 2014 une convention prévoyant un honoraire de diligence de 150 euros HT en cas de résolution amiable du conflit et de 500 euros en cas d'action judiciaire, outre un honoraire de résultat égal à 8,4 % du montant total des sommes dues aux clients.

Cette convention a également prévu une clause de dessaisissement ainsi libellée : « En cas de rupture de la présente convention pour quelque clause que ce soit, les parties conviennent d'ors et déjà de renoncer au caractère forfaitaire des honoraires qui seront calculés sur la base horaire au taux figurant ci-dessus » à savoir 100 euros HT.

L'avocate a commencé ses diligences dans le cadre amiable prévu mais s'est dessaisie du dossier le 30 mars 2015. Estimant caduque la convention d'honoraires elle a établi le 30 novembre 2015 une facture d'un montant de 3.850 euros HT en mentionnant 84 heures de travail que les époux X. ont refusé de régler.

Les époux X. concluent au caractère non écrit de la clause de dessaisissement au motif qu'elle instaure en leur défaveur un déséquilibre au sens de l'article R. 132-1-3° du code de la consommation puisqu'elle permet à l'avocate de par sa seule volonté de passer d'un honoraire forfaitaire à un honoraire au temps passé plus rémunérateur. Ils sollicitent l'application des dispositions contractuelles fixant la rémunération revenant à Mme Esa C.

Or contrairement à ce que soutiennent les époux X. la clause litigieuse n'est en rien abusive dans la mesure où elle reconnaît à chacune des parties la possibilité de rompre les relations professionnelles qu'elles ont nouées.

Elle n'a ainsi pas pour effet de permettre au seul professionnel qu'est l'avocate de modifier unilatéralement l'équilibre du contrat et de fixer de façon tout aussi unilatérale le montant de ses honoraires lesquels sont alors fixés sur la base du temps passé dont le client reste libre de contester l'importance au regard des diligences accomplies et en application d'un taux horaire connu, au demeurant dépourvu de tout caractère excessif.

Dès lors que le dessaisissement du dossier par l'avocate a eu lieu avant qu'une décision judiciaire irrévocable ne soit intervenue, c'est donc à juste titre que celle-ci sollicite l'application de la clause prévue à cet effet par la convention du 2 octobre 2014. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 2 CHAMBRE 6

ARRÊT DU 16 MAI 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/00207. (4 pages). N° Portalis 35L7-V-B7A-BYP6R. Décision déférée à la Cour : Décision du 4 mars 2016 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS – R.G. n° 211/274758.

 

DEMANDEURS AU RECOURS :

Monsieur X.

Représenté par Maître Charles-Edouard P., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Madame Y. épouse X.

Représentée par Me Charles-Edouard P., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

 

DÉFENDERESSE AU RECOURS :

Maître C.

Comparante en personne, assistée de Maître Emilie D.-H., avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 février 2019, en audience publique, la demanderesse au recours ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Jacques BICHARD, magistrat honoraire désigné par décret du 7 août 2017 du Président de la République, aux fins d'exercer des fonctions juridictionnelles, entendu en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON-MIRAMON, Présidente, Mme Marie-Claude HERVÉ, Conseillère, M. Jacques BICHARD, Magistrat honoraire, exerçant des fonctions juridictionnelles.

Greffière lors des débats et de la mise à disposition : Mme Sarah-Lisa GILBERT

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente et par Mme Sarah-Lisa GILBERT, greffière présente lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le recours exercé par M. X. et Mme Y. par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 mars 2016 à l'encontre de la décision rendue le 4 mars 2016 par le délégué du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris qui a :

- fixé les honoraires dus par les époux X. à Mme C., avocate, à la somme de 4.000 euros HT sous la déduction de la somme de 150 euros HT versée à titre de provision,

- dit en conséquence que les époux X. devront conjointement verser à Mme C. la somme de 3.850 euros HT augmentée des intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2015 date de la saisine du bâtonnier, avec application de la TVA au taux en vigueur au jour de l'exécution des prestations et les frais d'huissier de justice en cas de signification de la décision,

- rejeté toute autre demande.

Entendues à l'audience du 21 février 2019 les parties en leurs observations en tous points conformes à leurs écritures :

- les époux X. qui concluent :

* à l'infirmation de la décision déférée,

* au rejet de la demande d'honoraires présentée par Mme C.,

* à la condamnation de Mme C. à leur verser une indemnité de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- Mme Elsa C. qui conclut :

* à la confirmation de la décision déférée,

* la condamnation des époux X. à lui payer une indemnité de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI, LA COUR :

A l'occasion d'un litige les opposant à la personne chargée de réaliser les diagnostiques concernant la maison qu'ils se proposaient d'acquérir les époux X. ont confié la défense de leurs intérêts à Mme C.

Les parties ont signé le 2 octobre 2014 une convention prévoyant un honoraire de diligence de 150 euros HT en cas de résolution amiable du conflit et de 500 euros en cas d'action judiciaire, outre un honoraire de résultat égal à 8,4 % du montant total des sommes dues aux clients.

Cette convention a également prévu une clause de dessaisissement ainsi libellée :

« En cas de rupture de la présente convention pour quelque clause que ce soit, les parties conviennent d'ors et déjà de renoncer au caractère forfaitaire des honoraires qui seront calculés sur la base horaire au taux figurant ci-dessus » à savoir 100 euros HT.

L'avocate a commencé ses diligences dans le cadre amiable prévu mais s'est dessaisie du dossier le 30 mars 2015.

Estimant caduque la convention d'honoraires elle a établi le 30 novembre 2015 une facture d'un montant de 3.850 euros HT en mentionnant 84 heures de travail que les époux X. ont refusé de régler.

Les époux X. concluent au caractère non écrit de la clause de dessaisissement au motif qu'elle instaure en leur défaveur un déséquilibre au sens de l'article R. 132-1-3° du code de la consommation puisqu'elle permet à l'avocate de par sa seule volonté de passer d'un honoraire forfaitaire à un honoraire au temps passé plus rémunérateur.

Ils sollicitent l'application des dispositions contractuelles fixant la rémunération revenant à Mme Esa C.

Or contrairement à ce que soutiennent les époux X. la clause litigieuse n'est en rien abusive dans la mesure où elle reconnaît à chacune des parties la possibilité de rompre les relations professionnelles qu'elles ont nouées.

Elle n'a ainsi pas pour effet de permettre au seul professionnel qu'est l'avocate de modifier unilatéralement l'équilibre du contrat et de fixer de façon tout aussi unilatérale le montant de ses honoraires lesquels sont alors fixés sur la base du temps passé dont le client reste libre de contester l'importance au regard des diligences accomplies et en application d'un taux horaire connu, au demeurant dépourvu de tout caractère excessif.

Dès lors que le dessaisissement du dossier par l'avocate a eu lieu avant qu'une décision judiciaire irrévocable ne soit intervenue, c'est donc à juste titre que celle-ci sollicite l'application de la clause prévue à cet effet par la convention du 2 octobre 2014.

L'importance et l'utilité du travail accompli par Mme C. au cours de la phase amiable du litige, ainsi que le temps passé retenu bien que l'avocate n'ait pas facturé les 84 heures initialement mentionnées, ne sont pas remises en cause par les époux X.

Au regard des diligences accomplies qui sont listées avec précision, c'est à juste titre que le délégué du bâtonnier a validé la demande présentée par Mme C. afin d'obtenir la fixation de ses honoraires à la somme de 4.000 euros HT.

La décision déférée sera donc confirmée sauf en ce qui concerne le point de départ de l'intérêt légal qui sera fixé au jour du prononcé de cette décision.

La solution du litige eu égard à l'équité commande d'accorder à la seule Mme C. une indemnité d'un montant de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme la décision déférée sauf en sa disposition relative au point de départ de l'intérêt légal,

L'infirme dans cette limite,

Statuant à nouveau,

Fixe le point de départ de l'intérêt légal au jour du prononcé de cette décision,

Condamne les époux X. à payer à Mme C. une indemnité d'un montant de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Laisse les dépens à la charge des époux X.

Dit qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le Greffe de la cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIÈRE                             LA PRÉSIDENTE