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CA PARIS (pôle 2 ch. 2), 23 mai 2019

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 2 ch. 2), 23 mai 2019
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 2 ch. 2
Demande : 16/02277
Décision : 2019-172
Date : 23/05/2019
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/01/2016
Numéro de la décision : 172
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8084

CA PARIS (pôle 2 ch. 2), 23 mai 2019 : RG n° 16/02277 ; arrêt n° 2019-172 

Publication : Jurica

 

Extrait (rappel des faits) : « La société Manage & Co exerce, conformément aux dispositions de l'article L. 222-7 du code du sport, une activité consistant à mettre en rapport, contre rémunération, les parties intéressées à la conclusion d'un contrat soit relatif à l'exercice rémunéré d'une activité sportive ou d'entraînement, soit qui prévoit la conclusion d'un contrat de travail ayant pour objet l'exercice rémunéré d'une activité sportive ou d'entraînement. Son gérant M. Y. est titulaire de la licence d'agent sportif délivrée par la Fédération française de basketball.

Cette société a conclu, le 8 avril 2010, avec M. X., un contrat de mandat pour la prospection et la négociation auprès de clubs professionnels de basketball, en vue de la conclusion d'un engagement en qualité de joueur professionnel. Ce mandat était exclusif, à durée indéterminée et pouvait être dénoncé à tout moment par le joueur sous réserve du respect d'un préavis d'un mois. Il a été enregistré auprès de la Commission des agents sportifs de la Fédération française de basketball conformément à la réglementation en vigueur.

Il était convenu que la société percevrait, en contrepartie de ses missions, une rémunération égale à 10 % HT de la somme totale des contrats conclus à l'occasion de l'activité sportive professionnelle du joueur. Il était également prévu la possibilité de réduire occasionnellement et par accord ultérieur, ce pourcentage en raison de circonstances particulières.

Le 30 juin 2010, M. X., assisté de la société Manage & Co, a conclu un contrat de travail de joueur professionnel avec la SEM Elan Sportif Chalonnais pour une période déterminée de trois saisons sportives, soit du 1er juillet 2010 au 30 juin 2013, contrat homologué par la Ligue nationale de basketball, le 16 septembre 2010.

Il a été mis fin à ce contrat, à la demande du joueur et sans que celui-ci ne verse d'indemnité, par un acte du 25 novembre 2012. Le 28 novembre 2012, M. X. était engagé pour un mois, en remplacement d'un joueur blessé, par le club espagnol de Valence. Les négociations, tant pour la rupture du contrat que pour la signature d'un nouvel engagement, ont été menées par la société Manage & Co.

Selon facture en date du 22 décembre 2012, la société Manage & Co a réclamé à M. X. la somme, toutes charges comprises, de 20 196 euros, correspondant à 10 % de l'ensemble des rémunérations nettes qu'il a perçues à l'occasion de l'exécution de son contrat de travail avec la SEM Elan Sportif Chalonnais.

Faisant valoir que le 27 décembre 2012, M. X., assisté d'un autre agent, M. Z., a signé un contrat avec le club serbe du Partizan Belgrade et que, par courrier daté du même jour, mais posté le 3 janvier 2013, il a dénoncé le mandat qu'il lui avait consenti, s'exonérant ainsi de ses obligations contractuelles, la société Manage & Co l'a, par acte extra-judiciaire du 27 mars 2015, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris. »

Extrait (motifs) : « Considérant en premier lieu, que M. X. prétend que l'action en paiement de la rémunération de [M. Y.] au titre du contrat conclu avec l'Elan chalonnais est éteinte en raison de l'acquisition de la prescription biennale du code de la consommation, le 30 juin 2012, soit avant la délivrance de l'assignation du 17 mai 2013, le tribunal ne pouvant comme il l'a fait, lui dénier la qualité de consommateur, dès lors qu'il n'exerçait aucune activité commerciale, libérale, artisanale ou indépendante à la date de la signature du mandat le liant à son agent ; qu'il relève que l'objectif était la recherche d'un contrat de travail salarié, le fait qu'il soit un joueur professionnel ne lui faisant pas perdre la qualité de consommateur ; qu'à titre subsidiaire, l'appelant invoque, s'appuyant sur l'article 9-2 du mandat qui précise que le pourcentage peut être revu à la baisse en raison des négociations et de la spécificité de chaque contrat, la commune intention des parties d'écarter toute rémunération au titre du premier contrat, en voulant pour preuve l'absence de réclamation jusqu'à l'assignation et disant qu'il s'agit d'un usage constant dans ce milieu professionnel ; que l'intimée conteste l'application de la prescription du code de la consommation, M. X. ayant contracté pour les besoins de sa profession, ajoutant en dernier lieu que, s'agissant d'une créance à termes successifs, la prescription a atteint, tout au plus, la première échéance due compte tenu de la facture émise au mois de décembre 2012 ; qu'elle conteste toute volonté de renoncer à sa rémunération, ainsi que l'usage allégué par l'appelant ;

Considérant qu'en application de l'article L. 137-2 du code de la consommation, l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ;

Que si M. X. ne peut utilement revendiquer la définition du consommateur énoncée à l'article préliminaire du code de la consommation, celle-ci ayant été introduite dans la législation par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, le bénéfice de la prescription biennale était, avant ce texte, réservée au consommateur par opposition au professionnel ;

Qu'en l'espèce, il ressort des explications des parties et de la convention les liant, que jeune sportif, titulaire d'un contrat de travail de joueur aspirant, M. X. souhaitait s'entourer de toutes les garanties nécessaires à la gestion de sa carrière sportive et qu'en conséquence, il s'est adjoint les services de la société Manage & Co afin de négocier les conditions de son engagement, la société lui proposant également une assistance juridique en cas de litige avec son employeur, ainsi que de trouver les prestataires adéquats afin de satisfaire à ses besoins, dans la gestion du patrimoine, le conseil en investissement ou le suivi médical ; qu'il s'ensuit que M. X. a contracté, non à l'occasion de l'exercice de sa profession, mais dans la perspective de se faire assister à l'occasion de la conclusion d'un contrat et de se procurer des services étrangers à son domaine de compétence professionnelle, agissant en conséquence comme consommateur et non comme professionnel ;

Que dès lors, l'action en paiement de son cocontractant est enfermée dans le délai biennal de l'article L. 137-2 du code de la consommation, la décision déférée devant être infirmée en ce qu'elle a exclu l'application de ce texte ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 2 CHAMBRE 2

ARRÊT DU 23 MAI 2019