5850 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Principes
- 5807 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (6) - Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014
- 5851 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Absence de lien avec la profession
- 5852 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Consommateur partie au contrat
- 5853 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Consommateur tiers au contrat
- 5854 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Présentation générale et évolution des textes
- 5859 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection explicite
- 5864 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Principes - Droit postérieur à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016
- 5959 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats mixtes - Usage mixte professionnel et privé
- 5922 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Immeubles - Contrats relatifs au local professionnel
- 5830 - Code de la consommation - Domaine d’application - Application conventionnelle - Clauses abusives : principes
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 6011 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Principes généraux - Appréciation de la personne du consommateur
- 5820 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans le temps - Illustrations : Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5850 (19 janvier 2024)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION
DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE LA PROTECTION
NOTION DE CONSOMMATEUR - PARTICULIER PERSONNE PHYSIQUE - PRINCIPES
A. RAPPEL DE L’ÉVOLUTION DES TEXTES
Directive 93/13/CEE. Selon l’art. 2 de la directive du 5 avril 1993, « aux fins de la présente directive, on entend par : […] b) « consommateur » : toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ». Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854 (art. 2, b).
Pour une application stricte : la notion de consommateur, telle que définie dans la directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens qu’elle vise exclusivement les personnes physiques. CJCE (3e ch.), 22 novembre 2001, Cape Snc / Idealservice : aff. C-541/99 et C-542/99 ; Cerclab n° 4377 ; JCP 2002. II. 10047, note Paisant ; D. 2002. AJ. 90, note Rondey ; Petites affiches 22 mai 2002, note Nourissat - CJUE (4e ch.), 9 juillet 2020, SC Raiffeisen Bank SA / JB // BRD Groupe Société Générale SA/ KC : aff. n° C‑698/18 et C-699/18 ; Cerclab n° 8522 (point n° 70 ; est un « consommateur » toute personne physique qui, dans les contrats relevant de cette directive, agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ; arrêt citant l’arrêt du 21 mars 2019, Pouvin et Dijoux, C‑590/17, point 22).
Loi du 17 mars 2014 et ordonnance du 14 mars 2016 et loi de ratification du 21 février 2017. La loi n° 2014-34 du 17 mars 2014 a introduit dans le Code de la consommation un article préliminaire apportant pour la première fois une définition du consommateur. Selon cet article, « au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ».
L’ordonnance du 14 mars 2016 a maintenu cette définition en ajoutant l’omission incompréhensible des activités agricoles : « Pour l'application du présent code, on entend par : - consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».
Enfin, la loi de ratification n° 2017-203 du 21 février 2017 a transformé l’article préliminaire en article liminaire. Si elle a modifié la définition du non-professionnel, elle a maintenu identique la définition du consommateur.
Ces dispositions appellent plusieurs observations.
1/ Ces définitions rejoignent celle qui a toujours été retenue par les textes européens et la Cour de justice de l’Union européenne. Elle rejoint aussi celle qui était déjà retenue par la Cour de cassation à partir de 2005 qui distinguait très clairement le consommateur du « non-professionnel » (Cerclab n° 5859).
2/ La définition retenue adopte une conception étroite du consommateur, limitée aux personnes physiques (pour les personnes morales, V. Cerclab n° 5854) et totalement détachée de l’activité professionnelle, en retenant un des critères les plus restrictifs (V. Cerclab n° 5864).
Cette limitation des consommateurs aux seules personnes physiques est parfois rappelée par les décisions consultées. V. par exemple : l'article préliminaire du code de la consommation, qui réserve la qualité de consommateur aux personnes physiques, exclut nécessairement la qualité de consommateur d'une personne morale, quelle que soit son activité. CA Lyon (6e ch.), 5 août 2021 : RG n° 21/00951 ; Cerclab n° 9100 (application de la prescription de droit commun et non de la prescription du Code de la consommation pour un prêt immobilier à une SCI ; N.B. la référence à l’art. préliminaire est erronée, s’agissant d’un contrat conclu en 2010, mais le texte sur la prescription ne concerne effectivement que le consommateur qui était cantonné aux personnes physiques depuis 2005), sur appel de TJ Lyon (Jex), 12 janvier 2021 : RG n° 20/00070 ; Dnd. § Sous l’empire du droit antérieur à l’ord. du 14 mars 2016 et dans le cadre de l’anc. art. L. 132-1 C. consom., une commune, personne morale de droit public, ne peut être considérée comme un consommateur. CA Poitiers (2e ch. civ.), 12 janvier 2021 : RG n° 19/02856 ; arrêt n° 27 ; Cerclab n° 9040 (contrats de locations de défibrillateurs pour une commune conclus en août et novembre 2014 ; N.B. l’affirmation ne suffit pas à écarter la qualité de non-professionnel, qui n'était pas légalement définie à l’époque), sur appel de TI Poitiers, 3 juillet 2019 : Dnd. § Il résulte de l'article L. 212-1 C. consom., que la notion de consommateur, telle que définie dans la directive 93/13/CEE, doit être interprétée en ce sens qu'elle vise exclusivement les personnes physiques, même si certaines personnes morales ne sont pas exclues ; ne peut bénéficier de ce texte la SCI, personne morale, qui a contracté en qualité de professionnelle. CA Paris (pôle 4 ch. 9-A), 28 janvier 2021 : RG n° 17/08153 ; Cerclab n° 8766 (mission de diagnostics immobiliers, de contrôle technique et de coordination SPS par une SCI à une société spécialisée dans le bâtiment ; contrats conclus les 6 mai et 17 septembre 2014), sur appel de TI Paris (17e arrdt), 31 janvier 2017 : RG n° 11-16-000826 ; Dnd - CA Bordeaux (2e ch. civ.), 19 novembre 2020 : RG n° 17/04032 ; Cerclab n° 8654 (clauses abusives ; maintenance de matériel informatique pour une association d’handicapés ; une association à but non lucratif, dont l'objet est l'accueil d'enfants et d'adultes handicapés, a agi dans un cadre professionnel et ne peut se prévaloir de la qualité de consommateur lorsqu'elle a souscrit auprès deux contrats de services, dont les prestations consistaient notamment dans l'administration du système informatique de la direction générale et de l'un des établissements dépendant de l'association ; les contrats ayant été conclus en 2012, l’arrêt semble se référer à la notion de consommateur antérieure à la loi du 17 mars 2014 : « le consommateur était défini par la jurisprudence de l'Union européenne applicable en droit interne comme une personne physique agissant pour un usage étranger à ses activités professionnelle », ce qui ne règle pas la question de la qualité de non-professionnel), confirmant sur ce point TGI Bordeaux (5e ch. civ.), 2 mai 2017 : RG n° 15/03730 ; Dnd - CA Lyon (6e ch.), 18 novembre 2021 : RG n° 21/02539 ; Cerclab n° 9260 (une personne morale ne peut être qualifiée de consommateur ; contrat conclu en 2004, l’arrêt visant à tort l’art. préliminaire, en réalité l’article liminaire de 2016).
3/ La loi du 17 mars 2014 n’a pas utilisé de formule générale (« activité professionnelle ») ultérieurement illustrée par une énumération d’activités, et elle s’est contentée d’une telle énumération. Le risque d'une telle méthode est d’oublier un secteur d’activité (V. ci-dessous pour le secteur agricole), ce qui soulève aussi le caractère limitatif ou pas de l’énumération (V. ci-dessous).
4/ Les deux textes ne traitent pas des contrats mixtes, privé et professionnel, ce qui risque de soulever des hésitations d’interprétation (V. Cerclab n° 5959).
5/ Désormais, le consommateur doit être entendu dans tous les textes dans ce sens étroit, sauf dispositions contraires, dont il est possible de fournir au moins deux séries d’illustrations :
* Lorsque les textes visent un non-professionnel, ce qui est le cas de la protection contre les clauses abusives, la protection peut être accordée à une personne morale concluant à des fins n’entrant pas dans le cadre de son activité professionnelle (V. Cerclab n° 5854). § Pour les contrats conclus après l’entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014 et jusqu’au 30 juin 2016, le non-professionnel pouvait aussi inclure une personne physique ou morale, dès lors qu’elle ne contractait pas une convention de nature professionnelle (le critère pouvait varier : rapport direct, besoins, cadre de l’activité, etc. ; V. Cerclab n° 5856).
* Le législateur peut également prévoir une extension tout à fait spécifique. Tel est le cas notamment de la protection en matière de démarchage à domicile et de contrats à distance, que la loi n° 2014-34 du 17 mars 2014 étend partiellement mais explicitement « aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq » (art. L. 121-16-1-III ancien, repris partiellement par l’art. L. 221-3 C. consom. à compter de l’ordonnance du 14 mars 2016). § Sur l’influence de cette modification par rapport à la jurisprudence antérieure, V. Cerclab n° 5889.
* Les parties peuvent décider d’appliquer conventionnellement une protection prévue par le Code de la consommation (Cerclab n° 5830).
Application dans le temps. La loi du 17 mars 2014 a institué pour la première fois une définition générale du consommateur, ce qui peut soulever des problèmes d’application dans le temps (V. la présentation générale Cerclab n° 5820).
La question peut d’ailleurs se poser dans des termes différents selon l’existence ou non d’une définition spéciale antérieure comme dans le cas du démarchage. V. explicite : avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014 créant l’article préliminaire, les textes relatifs au démarchage à domicile ne définissaient pas la notion de consommateur. CA Reims (ch. civ. 1re sect.), 20 février 2018 : RG n° 16/03136 ; Cerclab n° 7438 ; Juris-Data n° 2018-002189 (absence d’application de l’article préliminaire à un contrat conclu en mars 2013 ; l'appréciation du rapport direct était alors soumise à l'appréciation du juge du fond), sur appel de TGI Charleville-Mézières, 9 novembre 2016 : Dnd.
En revanche, la définition du consommateur n’était pas explicite en droit des clauses abusives (interne, car la directive contient une définition étroite), ce qui peut autoriser une évolution immédiate, si on suit le principe posé par la Cour de cassation selon lequel nul n’a droit à une jurisprudence constante. § N.B. Ce principe est loin d’emporter l’adhésion en matière contractuelle, puisque c’est la loi en vigueur à la conclusion qui survit lorsqu’il s’agit d’apprécier le caractère abusif d’une clause contre le professionnel et qu’il serait inégalitaire de réduire rétroactivement au détriment du consommateur le champ d’application de la protection.
N.B. Les décisions consultées sont parfois assez peu rigoureuses dans le respect de la chronologie des textes et mélangent parfois les différentes versions. V. par ex. : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 14 mai 2021 : RG n° 18/26743 ; Cerclab n° 8984 (contrat conclu en 2012 ; éviction justifiée de l’anc. art. 121-16-III, créé par la loi du 17 mars 2014, mais référence, dans le cadre de l’anc. art. L. 133-2 au fait que le « caractère professionnel d'une activité s'évince de l'origine industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale », définition inspirée de la loi de l’ord. du 14 mars 2016 compte tenu de l’inclusion de l’activité agricole), sur appel de T. com. Paris, 10 octobre 2018 : RG n° 2017056817 ; Dnd.
Caractère limitatif de la liste. Le recours à une énumération d’activités professionnelles soulève inévitablement la question du caractère limitatif ou pas de la liste. La loi du 22 décembre 1972 (démarchage) évoquait les « les besoins d'une exploitation agricole, industrielle ou commerciale ou d'une activité professionnelle », la mention finale permettant d’inclure les activités éventuellement omises. De même, lors de sa modification en 1989, l’anc. art. L. 121-22-4° C. consom. excluait « les ventes, locations ou locations-ventes de biens ou les prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession ». L’article préliminaire et l’article liminaire ne contiennent pas cette adjonction finale aux autres professions. On aurait pu douter du caractère volontaire de cette omission, mais la loi de ratification a fourni un argument important en faveur du caractère limitatif de la liste, puisque pour les non-professionnels, elle s’est référée globalement à l’activité professionnelle, alors que les définitions du consommateur et du professionnel n’étaient pas modifiées (ce qui maintient d’ailleurs leur cohérence).
Le problème pourrait par exemple pour se poser pour les activités religieuses, syndicales ou politiques qui n’entrent dans aucune des activités listées. § Comp. dans un cadre totalement différent : une fonction religieuse, fut-elle bénévole, constitue une activité de nature professionnelle ou sociale au sens de l'art. 138-12° C. proc. pén. Cass. crim., 4 novembre 2021 : pourvoi n° 21-85144 ; arrêt n° 1457 : Bull. crim. ; Dnd (conséquence : interdiction d’exercer la profession d’imam à la suite d’infractions sexuelles). § V. aussi : Cass. crim., 4 novembre 2021 : pourvoi n° 21-80413 ; Bull. crim. ; Dnd (même analyse ; selon l'article 223-15-3 C. pén., les personnes physiques déclarées coupables d'abus de faiblesse encourent la peine complémentaire de l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, et aucune disposition n'en excepte un ministère sacerdotal ; prêtre ayant commis des abus de faiblesse).
Cas de l’activité agricole. La loi du 17 mars 2014 a oublié de mentionner l’activité agricole. L’ordonnance du 14 mars 2016 a rectifié cette erreur. Pour les contrats conclus entre les deux textes par des agriculteurs, deux questions peuvent se poser : la liste initiale était-elle limitative (V. ci-dessus) ? l’ordonnance du 14 mars 2016 peut-elle être considérée comme un texte interprétatif ? Une réponse positive à la seconde question pourrait sembler raisonnable, un souhait délibéré du législateur en 2014 de favoriser les seuls agriculteurs pouvant paraître peu crédible. § Rappr. sans que la question soit abordée : CA Paris (pôle 5 ch. 11), 2 avril 2021 : RG n° 18/07255 ; Cerclab n° 9039 (contrat conclu le 15 janvier 2016 ; arrêt incluant l’activité agricole dans la définition du consommateur, qui n’est apparue que dans l’ordonnance du 14 mars 2016), sur appel de TGI Paris, 5 février 2018 : RG n° 17/02145 ; Dnd.
V. cep. en sens contraire : si l’article préliminaire avait été applicable, un exploitant agricole de tabac aurait été considéré comme un consommateur, puisque dans la première définition du consommateur donnée par le Code de la consommation en 2014, l'activité agricole n'était pas visée. CA Colmar (2e ch. civ.), 21 avril 2021 : RG n° 19/03988 ; arrêt n° 199/2021 ; Cerclab n° 8898 (livraison de gaz naturel ; contrat conclu en 2012), sur appel de TGI Colmar, 1er août 2019 : Dnd.
B. LIEN AVEC LA COMPÉTENCE DU CONSOMMATEUR
Loi du 17 mars 2014 et ordonnance du 14 mars 2016. N.B. Ces deux textes retenant une définition étroite du consommateur ne remettent pas en cause les solutions décrites ci-dessous.
Indifférence de la compétence effective du consommateur. La protection contre les clauses abusives et, de façon générale, la protection des consommateurs, ne dépend pas d’une appréciation in concreto des compétences du consommateur, même si le déséquilibre des connaissances entre le professionnel et le consommateur, tant sur le service rendu ou le bien fourni que sur le contenu du contrat, est une des justifications de l’existence de cette protection.
Le principe est quasi unanimement respecté, pour ainsi dire par défaut, la protection n’étant jamais écartée en raison des connaissances du consommateur au regard de l’objet du contrat. V. explicite pour la CJUE : la notion de « consommateur », au sens de l’article 2, sous b), de la directive 93/13, a un caractère objectif et est indépendante des connaissances concrètes que la personne concernée peut avoir, ou des informations dont cette personne dispose réellement. CJUE (4e ch.), 3 septembre 2015, Costea : aff. C‑110/14 ; Cerclab n° 6672 (point n° 21). § Un avocat qui conclut, avec une personne physique ou morale agissant dans le cadre de son activité professionnelle, un contrat qui, faute, notamment, d’avoir trait à l’activité de son cabinet, n’est pas lié à l’exercice de la profession d’avocat, se trouve, à l’égard de cette personne, dans la situation d’infériorité visée au point 18 du présent arrêt ; dans un tel cas, quand bien même il serait considéré qu’un avocat dispose d’un niveau élevé de compétences techniques (voir arrêt Šiba, C‑537/13, EU:C:2015:14, point 23), cela ne permettrait pas de présumer qu’il n’est pas une partie faible en relation avec un professionnel. CJUE (4e ch.), 3 septembre 2015, Costea : aff. C‑110/14 ; Cerclab n° 6672 (point n° 26 et n° 27).
Dans le même sens pour les clauses abusives : CA Fort-de-France (ch. civ.), 19 mars 2019 : RG n° 17/00006 ; Cerclab n° 7887 ; Juris-Data n° 2019-004668 (vente en l’état futur d’achèvement ; qualité de consommateur reconnue à l’acheteur qui a réalisé cette acquisition pour un usage personnel et a agi à des fins dépourvues de tout rapport avec son activité professionnelle, exercée à titre salarié, de direction d'un service juridique d'une grande entreprise dont l'activité de service est au surplus elle-aussi totalement étrangère au secteur de l'immobilier, quelle que soit la compétence dans le domaine du droit de ce dernier, par ailleurs profane dans celui de l'immobilier), sur appel de TGI Fort-de-France, 25 octobre 2016 : RG n° 13/00822 ; Dnd - CA Montpellier (4e ch. civ.), 7 décembre 2023 : RG n° 20/03345 ; Cerclab n° 10627 (clauses abusives ; conclusion entre professionnels ; crédits consentis pour l’achat d’un véhicule professionnel et une nouvelle activité de pompes funèbres ; l’arrêt considère que l’argumentation du premier arrêt est pertinente s'agissant de l'obligation de mise en garde mais étrangère à l'application de la législation sur les clauses abusives gouvernée par le code de la consommation), désavouant CA Montpellier (4e ch. civ.), 6 avril 2023 : RG n° 20/03345 ; Dnd (relevé d’office admis en raison de l’assimilation de l’emprunteur à un consommateur aux motifs qu’il s’agissait d’un profane dans ses rapports avec la banque, n'ayant aucune compétence ou qualification particulière en matière financière), sur appel de TJ Rodez, 31 janvier 2020 : RG n° 18/01061 ; Dnd.
V. aussi pour une illustration explicite en matière de démarchage : toute personne physique, quelle que soit sa compétence juridique, bénéficie de la protection légale relatives aux opérations de démarchage, dès lors que celles-ci n'ont pas de rapport direct avec son activité professionnelle. CA Rennes (4e ch.), 30 mars 2000 : RG n° 99/01649 ; arrêt n° 159 ; Cerclab n° 1811 ; Juris-Data n° 2000-121063 (conclusion d’un contrat de maîtrise d’œuvre par un clerc de notaire pour ses besoins privés), infirmant TI Saint-Malo, 22 décembre 1998 : RG n° 97/000333 ; jugt n° 618/98 ; Cerclab n° 140 (exclusion du démarchage au motif erroné que les contrats consensuels seraient exclus de la protection).
En sens contraire : CA Paris (pôle 5 ch. 10), 28 février 2022 : RG n° 20/14712 ; Cerclab n° 9474 (prêt accordé par une banque à des salariés ; « en souscrivant le prêt immobilier, les époux n'étaient pas de simples consommateurs, mais des professionnels avertis, salariés de la banque X., le prêt mentionnant pour chacun : « profession : cadre de la banque depuis 2004 » »), sur appel de TJ Paris, 14 septembre 2020 : RG n° 17/10071 ; Dnd. § En sens contraire aussi, mais à titre d’argument supplémentaire : CA Aix-en-Provence (2e ch.), 31 octobre 2013 : RG n° 12/01600 ; arrêt n° 2013/356 ; Cerclab n° 4485 (arrêt écartant le caractère abusif d’une clause d’exclusion d’un contrat d’assurance et ajoutant in fine qu’au moment de la conclusion, l’assuré était courtier en assurances, « ce qui signifie qu'il était particulièrement bien placé pour choisir un contrat d'assurance le garantissant au mieux »). § V. aussi : un consommateur est un profane qui n'a aucune expérience professionnelle dans le domaine où il contracte ; il conclut ce contrat de biens de consommation ou de services pour son usage personnel. CA Colmar (1re ch. civ. sect. A), 27 mai 2015 : RG n° 13/03529 ; Cerclab n° 5237 ; Juris-Data n° 2015-013606. § Rappr. CA Paris (pôle 2 ch. 2), 23 mai 2019 : RG n° 16/02277 ; arrêt n° 2019-172 ; Cerclab n° 8084 (mandataire sportif ; résumé Cerclab n° 5851), infirmant TGI Paris, 8 décembre 2015 : RG n° 15/00475 ; Dnd.
N.B. La compétence du contractant a en revanche été, pendant un temps, prise en compte pour l’application de la protection à certains professionnels placés « dans la même situation d’ignorance qu’un consommateur », mais ce critère, source d’insécurité juridique, a été abandonné (sur cette évolution, V. Cerclab n° 5880 et n° 5885), avant que la possibilité de protéger un professionnel soit définitivement écartée par l’ordonnance du 14 mars 2016 (article liminaire).
Comp. pour la prise en compte de la profession du consommateur pour l’appréciation du caractère clair et compréhensible d’une clause définissant l’objet principal, Cerclab n° 6018, résumant CA Paris (pôle 5 ch. 6), 16 juin 2017 : RG n° 15/23333 ; Cerclab n° 6937, confirmant TGI Paris, 29 septembre 2015 : RG n° 14/07116 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 6), 6 octobre 2017 : RG n° 16/03076, Cerclab n° 7092 ; Juris-Data n° 2017-024451, sur appel de TGI Paris, 19 janvier 2016 : RG n° 14/09707 ; Dnd.
Indifférence de l’exécution intégrale du contrat sur la qualité du consommateur et sur sa compétence. La notion de « consommateur » figurant à l’art. 2, sous b), de la directive 93/13, doit être interprétée en ce sens que le fait qu’un contrat est intégralement exécuté n’exclut pas qu’une partie à ce contrat soit susceptible d’être qualifiée de « consommateur », au sens de cette disposition (point n° 74). CJUE (4e ch.), 9 juillet 2020, SC Raiffeisen Bank SA / JB // BRD Groupe Société Générale SA/ KC : aff. n° C‑698/18 et C-699/18 ; Cerclab n° 8522 (point n° 74). § Sur le raisonnement suivi par l’arrêt pour justifier cette solution : 1/ la définition de la notion de « consommateur » figurant à l’art. 2, sous b), de la directive 93/13 ne comporte aucun élément permettant de déterminer à quel moment un contractant cesse d’être un consommateur au sens de celle-ci et cesse, partant, de pouvoir se prévaloir de la protection que lui confère cette directive (point n° 71) ; il convient dès lors d’interpréter cette disposition dans le contexte du système de protection mis en œuvre par la directive, eu égard à l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité face au professionnel (point n° 72) ; 3/ l’exécution du contrat en cause ne change pas rétroactivement la circonstance que, au moment de la conclusion de ce contrat, le consommateur se trouvait dans cette situation d’infériorité (point n° 73) ; limiter la protection que la directive 93/13 confère au consommateur à la seule durée de l’exécution du contrat en cause, en ce sens que l’exécution intégrale de ce contrat exclut toute possibilité pour le consommateur de se prévaloir de cette protection, n’est pas conciliable avec le système de protection instauré par cette directive et une telle limitation serait particulièrement inadmissible dans le cadre de contrats qui, tel un contrat de vente, sont exécutés immédiatement après ou au moment de leur conclusion dès lors qu’elle ne laisserait pas de délai raisonnable aux consommateurs pour contester les clauses abusives figurant éventuellement dans de tels contrats (point n° 73).
Consommateur assisté. Pour le refus de prendre en compte l’éventuelle assistance du consommateur : CA Versailles (14e ch.), 15 février 2018 : RG n° 17/03779 ; Cerclab n° 7439 (contrat de conseil fiscal et successoral ; preuve non rapportée qu’une héritière française, résidant en France, ne maîtrisant pas l'espagnol et désireuse de bénéficier en Espagne de conseils éclairés sur une succession complexe et litigieuse puisse dans de telles conditions négocier dans un rapport équilibré les termes d'une clause compromissoire manifestement prérédigée par la société cocontractante, peu important la présence à ses côtés d'un employé de banque susceptible, selon le professionnel, de la conseiller utilement), confirmant de TGI Pontoise (JME), 2 mai 2017 : RG n° 14/05624 ; Dnd, pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 30 septembre 2020 : pourvoi n° 18-19241 ; arrêt n° 556 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 8590 (problème non examiné). § Un contrat d'entreprise conclu entre un professionnel et un consommateur, n'exclut pas l'application du Code de la consommation ; le fait que les maîtres de l’ouvrage aient activement participé à l'élaboration du projet par l'intermédiaire de leur fils, architecte de métier, ne peut permettre de les considérer comme des professionnels en la matière. CA Rennes (2e ch.), 10 juillet 2020 : RG n° 17/01353 ; arrêt n° 389 ; Cerclab n° 8513 (démarchage ; aménagement d'un hangar dans un jardin en vue d’une réception familiale ; échange de mails démontrant que l’entrepreneur a, en sa qualité d'homme de l'art, apporté de nombreuses rectifications aux suggestions faites par les clients, seuls signataires du contrat et devant être considérés comme des consommateurs), infirmant TGI Lorient, 1er février 2017 : Dnd.
En sens contraire : jugé que les dispositions de l’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. ne sauraient trouver application dès l’instant où les acheteurs n’avaient pas la qualité de consommateur isolé, dans la mesure où le contrat de vente avait été passé en forme authentique, et qu’ils avaient signé, en toute connaissance de cause, un contrat de vente d’immeuble achevé. CA Toulouse (1re ch. sect. 1), 3 septembre 2007 : RG n° 06/00270 ; arrêt n° 281 ; Cerclab n° 1650 ; Juris-Data n° 2007-345939, confirmant sur ce point TGI Toulouse (1re ch.), 8 décembre 2005 : RG n° 03/03368 ; Cerclab n° 3087. § N.B. : cette décision est erronée et isolée, la protection étant applicable aux actes authentiques (V. Cerclab n° 5836) et un éventuel consentement éclairé du consommateur restant sans effet sur l’applicabilité de la protection contre les clauses abusives (V. Cerclab n° 5827).
Rappr. pour la prise en compte de l’assistance du consommateur dans l’appréciation du déséquilibre significatif, Cerclab n° 6011 et, par exemple : Cass. civ. 3e, 11 juillet 2001 : pourvoi n° 99-20970 ; arrêt n° 1197 ; Cerclab n° 1945 (la cour d’appel a exactement retenu que les clauses de la norme AFNOR n’étaient pas abusives, dans la mesure où le maître de l’ouvrage ne pouvait ignorer les délais prévus au contrat et où il était assisté par un maître d’œuvre professionnel), rejetant le pourvoi contre CA Douai (1re ch.), 11 octobre 1999 : RG n° 97/09261 ; Cerclab n° 1687. § V. aussi peut-être, implicitement : CA Aix-en-Provence (3e ch. B), 9 octobre 2008 : RG n° 07/19139 ; arrêt n° 2008/372 ; Cerclab n° 5182 (n’est pas abusive la clause d’un marché de travaux qui stipule que la norme NF P03001 de septembre 1991 est applicable au contrat, laquelle prévoit des intérêts moratoires au taux des obligations cautionnées augmenté de 2,5 points (en l’espèce 17 % après majoration), dès lors que cette clause figure à l’article 1er du contrat et que le cahier des charges a été signé par la SCI assistée de son architecte et d’un économiste), sur appel de TGI Toulon, 12 novembre 2007 : RG n° 04/6083 ; Dnd.
V. aussi pour l’absence de protection renforcée pour un contractant handicapé, juridiquement capable, et contractant en vue d’une activité professionnelle future. CA Toulouse (2e ch. sect. 1), 13 novembre 2013 : RG n° 12/02340 ; arrêt n° 377 ; Cerclab n° 4575 (vente d’une unité de torréfaction à un commerce de vente au détail ; preuve au surplus non rapportée que ce statut ait été porté à la connaissance du professionnel), sur appel de T. com. Toulouse, 20 mars 2012 : RG n° 2011J1468 ; Dnd.