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CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 16 avril 2019

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 16 avril 2019
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 2 ch. 5
Demande : 18/05147
Décision : 2019/119
Date : 16/04/2019
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 8/03/2018
Numéro de la décision : 119
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8107

CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 16 avril 2019 : RG n° 18/05147 ; arrêt n° 2019/119

Publication : Jurica

 

Extrait (rappel des faits) : « Par acte du 23 juillet 2010, madame X. a souscrit auprès de la société E CIE VIE, aux droits de laquelle se trouve désormais la société GENERALI VIE, un contrat d'assurance vie dénommé « Generali Épargne » portant le numéro de police E00XX179. Ce contrat offre au souscripteur le choix d'affecter les primes versées sur un support libellé en euros ou libellés en unités de compte. Il est également possible de choisir entre deux options, une première dénommée « limitation des moins-values » garantissant le souscripteur de toutes pertes pouvant faire diminuer le capital initialement versé et une seconde intitulée « limitation des moins-values relatives » limitant les pertes en fonction d'un seuil défini par le souscripteur.

La société GENERALI VIE donne également aux souscripteurs la faculté d'effectuer depuis leur compte client électronique des opérations de rachat partiel en 72 heures.

Le 16 avril 2015, alors que le solde de son compte était de 64.011,52 euros, pour un capital initial de 54.000 euros, madame X. a tenté, depuis son espace client, de procéder à un rachat partiel d'un montant de 30.000 euros. Cette opération s'est révélée impossible en raison d'un problème technique affectant l'espace client de madame X.

Contrainte de procéder à sa demande de rachat par voie postale, madame X. s'est finalement vue créditée des fonds sollicités le 19 mai 2015. Considérant que l'impossibilité de procéder au rachat partiel de son contrat par la voie électronique et le refus opposé par la société GENERALI VIE d'appliquer l'option de limitation des moins-values relatives lui ont causé un préjudice financier important, elle a vainement mis en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 décembre 2015, son assureur de l'indemniser à hauteur de 9.856,41 euros.

Les parties n'étant pas parvenues à trouver une solution amiable à leur litige, par exploit du 19 septembre 2016, madame X. a assigné la société GENERALI VIE devant le tribunal de grande instance de PARIS.

Par jugement du 19 février 2018, ledit tribunal a débouté madame X. de l'ensemble de ses demandes, l'a condamnée aux entiers dépens ainsi qu'à verser à la société GENERALI VIE la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il a également débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires et a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire. »

Extrait (motifs) : « Considérant que madame X. soutient ce que suit : - qu'elle a souscrit au contrat dont s'agit, en raison de la possibilité d'effectuer des rachats partiels à 72 h, ce qui a été une condition essentielle et déterminante de son consentement ; - qu'elle démontre l'absence d'information pré-contractuelle dont elle a été victime, ainsi que de celle au jour de la formation du contrat ; - qu'elle établit qu'il y a eu une volonté des parties et notamment de l'assurée de voir appliquer l'option de limitation des moins-values relatives sur son contrat d'assurance à compter du 1er janvier 2015, que cette modification était parfaitement possible et que la lettre du 5 novembre 2014 à cet effet est constitutive d'un avenant ; - qu'il y a une responsabilité contractuelle de la société GENERALI VIE au titre du dysfonctionnement de l'accès aux services en ligne, que la banque a imposé à sa cliente dans les Conditions générales une clause pour s'exonérer de toute responsabilité en cas de dysfonctionnement de son service en ligne, ce qui constitue une clause abusive ;

Considérant que la SA GENERALI VIE explique ce que suit : - qu'il n'y a eu aucune faute de sa part en ce que selon le bulletin de souscription du 23 juillet 2010, il est manifeste que madame X. a opté pour l'option : limitation des moins-values, et sachant que le courrier du 5 novembre 2014 ne saurait être qualifié d'avenant ; - qu'il n'y a eu également de sa part aucun manquement au titre de son obligation d'information ; - que s'agissant du dysfonctionnement de l'accès au service en ligne, la clause contestée ne provoque aucun déséquilibre au détriment de l'assuré, et sachant qu'en réalité, il est établi que l'appelante n'a subi aucune moins-value par rapport au capital versé, de sorte qu'il n'est rapporté la preuve d'aucun préjudice ;

SUR CE

Considérant que selon un bulletin du 23 juillet 2010, madame X. a souscrit auprès de la société E CIE VIE devenue GENERALI VIE un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte et/ou en euros, et qu'il est constant que les montants affectés aux supports libellés en euros bénéficient d'une garantie du capital versé quand les sommes affectées aux supports libellés en unités de compte subissent les aléas du marché avec les variations qui le caractérisent à la hausse et à la baisse pouvant permettre de réaliser des plus-values substantielles, mais également des pertes ;

Que le risque de moins-value est effectivement mentionné sur le bulletin en lui-même, et porté à la connaissance du souscripteur, car le document signé comporte les mentions suivantes : - « Je reconnais avoir reçu les prospectus simplifiés des unités de compte sélectionnées dans le présent bulletin de souscription dont la liste figure en Annexes Financières et pris connaissance de leurs principales caractéristiques. Les prospectus simplifiés des unités de compte présentes au contrat sont disponibles sur simple demande auprès de mon conseiller ou via le site internet des sociétés de gestion. Je déclare avoir été clairement informé qu'en investissant sur des unités de compte, je prends à ma charge le risque lié à la variation des cours de chacune de celles que j'ai souscrites.

- Je reconnais avoir reçu et pris connaissance de la notice d'information valant conditions générales du contrat figurant dans la proposition d'assurance remise avec le double du présent bulletin de souscription » ;

Considérant que madame X. a réalisé un versement d'origine de 24.000 euros, et qu'elle a opté pour une gestion libre ;

Que la notice d'information valant Conditions générales que madame X. ne conteste pas avoir reçue mentionne que la gestion libre est celle où : -« A tout moment vous avez la faculté de modifier la répartition initialement choisie, la gestion libre étant celle où le souscripteur conserve la maîtrise totale de la répartition de ses investissements entre les différents supports proposés » ;

Qu'il est également constant que madame X. à la signature du bulletin dont s'agit, a choisi entre les deux options qui lui étaient proposées, celle de la limitation des moins-values et non pas celle de la limitation des moins-values relatives, que par ailleurs, l'appelante n'a pas précisé quel était le taux de moins-value de référence qu'elle retenait entre 5 %, 10 % 15 % et 20 % ;

Qu'il est acquis aux débats que faute de choix du pourcentage indiqué, GENERALI IARD a retenu d'office comme mentionné dans les conditions particulières le taux de 5 % qui est celui le plus bas et celui le plus favorable au particulier/souscripteur ;

Que la distinction entre la limitation de moins-values et celle de moins-values relatives est explicitée dans les Conditions générales en son article 13 et cela comme suit : - « L'assureur vous propose pour chaque support sélectionné et en fonction d'un seuil de moins-value ou de moins-value relative que vous aurez déterminé, support par support, de transférer totalement et automatiquement la valeur atteinte de chaque support sélectionné vers le support de sécurisation le fonds Eurossima dès lors que le seuil déterminé aura été constaté » ;

Que l'option limitation des moins-values est définie comme suit : pour l'assiette de calcul : elle est égale au cumul des investissements nets réalisés sur le support déduction faite des désinvestissements bruts réalisés sur ce même support hors arbitrage de sécurisation ;

Que l'option limitation des moins-values relatives est définie comme suit : pour l'assiette de calcul : elle est égale au cumul des investissements nets réalisés sur le support valorisés sur la base de la plus haute valeur liquidative atteinte sur la période considérée, déduction faite des désinvestissements bruts réalisés sur ce même support hors arbitrage de sécurisation ;

Que sur le bulletin de souscription signé, madame X. a approuvé en le signant la mention suivante :  -Je reconnais avoir pris connaissance des modalités de fonctionnement des options Limitation des moins-values et Limitation des moins-values relatives...- ;

Considérant sur la clause par laquelle l'assureur se réserve le droit de suspendre ou de mettre un terme à l'accès des opérations de gestion en ligne et l'échec du rachat partiel à 72h du montant de 30.000 euros sur l'espace client qu'il y a lieu de statuer comme suit ;

Considérant s'agissant de la clause contestée, que madame X. la qualifie d'abusive, au motif que selon elle, par cette disposition, l'assureur a entendu se dispenser de toute responsabilité, ce qui représente un avantage abusif au détriment du consommateur ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction ici applicable, antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations, du régime général et de la preuve des obligations, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».

Considérant que l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction également antérieure à la réforme visée ci-dessus, dispose que « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ».

Considérant sur ce chef, que la cour doit relever que les premiers juges par une juste appréciation au regard des articles 1134 et 1315 du code civil précités, ont expliqué que les Conditions générales que madame X. ne conteste pas sérieusement avoir reçues au jour de la signature du bulletin d'adhésion et qu'en tout état de cause elle déclare avoir reçues, comportent la mention suivante : - « Vous reconnaissez de manière expresse et irrévocable que l'accès à la consultation et à la gestion en ligne de son contrat ne constitue pas une condition essentielle et déterminante de votre souscription ; (article 31 des conditions générales titre Souscription-consultation et gestion en ligne) » ;

Que de plus les Conditions générales comprennent également les éléments suivants : - « vous pourrez procéder en ligne à des opérations de consultation et de gestion de votre contrat directement sur le site. A titre d'information les opérations de gestion pouvant être réalisées en ligne sont notamment des opérations d'arbitrages. L'assureur se réserve à tout moment la possibilité de modifier cette liste. En cas de suppression de l'accès à l'une des opérations de gestion en ligne, vous transmettrez vos instructions de gestion à l'assureur sur support papier et par voie électronique. L'assureur se réserve le droit de suspendre ou de mettre un terme à l'accès de tout ou partie des opérations de gestion en ligne pour des raisons de sécurité juridique ou technique. Aucune responsabilité ne pourra être retenue à ce titre » ;

Considérant que madame X. n'explicite pas pour quel motif caractérisé cette clause serait abusive, en quoi elle comporterait un avantage au détriment du consommateur, et cela en ce que la faculté d'arbitrage de ce dernier n'est pas supprimée, que des demandes faites par papier demeurent utilisables, que la clôture de l'accès en ligne est limitée à des cas précis soit technique ou juridique et non pas à la discrétion de l'assureur ;

Que madame X. par son acceptation des Conditions générales a admis que la gestion en ligne n'était pas une condition déterminante de son consentement, que de plus, comme cela a été rappelé par les premiers juges, le dysfonctionnement dénoncé n'a pas résulté de la volonté de GENERALI VIE mais d'une cause technique, que celle-ci s'est avérée isolée et non pas permanente, que madame X. en dehors de cet incident ne prétend pas que son accès aurait été systématiquement bloqué ou refusé ;

Que madame X. a en l'espèce pu exercer son arbitrage à hauteur de 30.000 euros, que certes le délai n'a pas été à 72 heures, mais qu'il doit être constaté que la demande de rachat datée du 16 avril 2015 a été reçue le 24 avril 2015, que celle-ci visant des supports BNP Paribas Etheis n'a pas pu être exécutée, que madame X. justement informée dès le 24 avril 2015 de cette situation, a pu modifier sa demande le jour même, que celle-ci réceptionnée le 27 avril 2015 a été exécutée le 13 mai 2015, qu'ainsi le délai de 30 jours convenu a été respecté conformément à l'article 21 des Conditions générales sous le titre : « Modalités de règlement et adresse de correspondance » ;

Qu'il résulte de tout ce qui précède que madame X. sur le défaut de fonctionnement du site internet qui a eu en réalité, un caractère ponctuel qui n'est survenu qu'une seule fois, alors qu'elle a pu exercer son arbitrage litigieux, pour lequel elle ne rapporte pas la preuve d'une perte financière réelle imputable au temps écoulé entre le 16 avril et le 13 mai, ne démontre pas la réalité d'un comportement fautif de GENERALI VIE ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 2 CHAMBRE 5

ARRÊT DU 16 AVRIL 2019