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CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 21 novembre 2002

Nature : Décision
Titre : CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 21 novembre 2002
Pays : France
Juridiction : Toulouse (CA), 2e ch. sect. 1
Demande : 2001/03839
Décision : 444/02
Date : 21/11/2002
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 9/08/2001
Décision antérieure : T. COM. CASTRES (1re ch.), 25 juin 2001
Numéro de la décision : 444
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 825

CA TOULOUSE (2e ch. 1re sect.), 21 novembre 2002 : RG n° 2001/03839 ; arrêt n° 444/02

Publication : Juris-Data n° 200593 ; JCP 2002. IV. 2656

 

Extrait : « Il apparaît que M. X., dans la mesure où la location et la prestation de télésurveillance objet des contrats litigieux n'avaient pas de rapport direct avec ses activités de marchand de chaussures, est fondé à invoquer les articles L. 121-21 du Code de la consommation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

DEUXIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 2002

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 2001/03839. Arrêt n° 444/02.

Prononcé : A l'audience publique du VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE DEUX, par A. FOULQUIE, président, assisté de A. THOMAS, greffier.

Composition de la cour lors des débats et du délibéré :

Président : A. FOULQUIE - Conseillers : D. GRIMAUD, C. BABY

Greffier lors des débats : A. THOMAS

Débats : A l'audience publique du 9 octobre 2002. La date à laquelle l'arrêt serait rendu a été communiquée.

Avant l'ouverture des débats, les parties ont été informées des noms des magistrats composant la cour.

Nature de l'arrêt : Contradictoire.

 

APPELANT (E/S) :

SA PROTECTION ONE

[adresse], Ayant pour avoué la SCP RIVES PODESTA, Ayant pour avocat Maître BRIAND du barreau de Marseille

 

INTIMÉ (E/S) :

- Monsieur X.

[adresse], Ayant pour avoué la SCP B. CHATEAU - O. PASSERA, Ayant pour avocat la SCP PHILIPPO, PRESSECQ du barreau d'Albi

[minute page 2]

- SOCIETE GE CAPITAL EQUIPEMENT FINANCE SAS, ANCIENNEMENT CRÉDIT DE L'EST

[adresse], Ayant pour avoué la SCP BOYER LESCAT MERLE, Ayant pour avocat Maître BELLANGER-BARON du barreau de Tours

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

M. X., qui exploite à Y. un magasin de chaussures, a conclu le 6 avril 1995 un contrat d'abonnement de télésurveillance d'une durée de 48 mois auprès de la Compagnie Européenne de Télésurveillance (CET), actuellement dénommée Protection One. Parallèlement, il a souscrit auprès du Crédit de l'Est, aux droits duquel se trouve la société GE Capital Equipement Finance, un contrat de location de l'installation d'alarme destinée à équiper son entrepôt. Il était convenu que les mensualités correspondantes, d'un montant de 510 Francs, feraient l'objet d'un prélèvement automatique sur le compte bancaire de M. X. Ce matériel a été installé et mis en service le 30 novembre 1995. A compter du mois de septembre 1996, M. X. a cessé de payer les mensualités, et le Crédit de l'Est l'a mis en demeure le 4 mars 1997 de payer un arriéré de 19 328,03 Francs.

Le créancier a obtenu le 4 mai 1999 du président du tribunal de commerce de Castres une injonction de payer ce même montant, à laquelle M. X. a formé opposition.

Le 3 novembre 1999, M. X. a assigné la CET devant le tribunal de commerce de Castres, à l'effet de voir constater qu'elle n'avait pas exécuté le contrat de bonne foi et d'en demander la résolution, ainsi que celle du contrat souscrit auprès du Crédit de l'Est, avec effet à la date de leur signature, les sommes prélevées depuis lors, soit 3.075,30 Francs, devant lui être remboursées.

Le tribunal, par jugement en date du 25 juin 2001, a fait droit à l'opposition régularisée par M. X., a prononcé la résolution du contrat de télésurveillance et du contrat de location du matériel, enjoignant à M. X. de retourner celui-ci. Le Crédit de l'Est était condamné à rembourser à M. X. les 3.075,30 Francs de loyers payés. Cet organisme et la CET étaient enfin condamnés solidairement à payer à M. X. une somme de 2.500 Francs en indemnisation de ses frais irrépétibles.

[minute page 3] La SA Protection One a relevé appel de cette décision par déclaration remise le 9 août 2001 au greffe de la cour.

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon l'appelante, il n'est pas démontré que M. X. a demandé par courrier recommandé la résiliation du contrat, seule une preuve de dépôt d'un courrier recommandé étant produite.

Le contrat d'abonnement de télésurveillance et le contrat de location ont été signés par M. X., qui a apposé son cachet commercial et la mention manuscrite « lu et approuvé ».

Il a sollicité le 21 avril 1995 le report de la livraison du matériel, et celui-ci a été installé le 30 novembre 1995 en présence de sa mère, sans que M. X. proteste, de même qu'il n'a pas protesté lorsque les prélèvements ont commencé, comme prévu au contrat. Ni l'erreur ni le dol allégués tardivement ne sont démontrés, pas plus que la prétendue incohérence du montage contractuel, qui résulterait de la cession au Crédit de l'Est du matériel en cause par la CET en 1996 seulement.

M. X., qui est commerçant, ne peut bénéficier des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation, même si ces textes sont retranscrits sur le contrat qu'il a signé. En tout état de cause, il n'y a pas eu infraction à la loi de 1972, de sorte qu'aucune nullité n'est encourue.

Il est donc demandé à la cour de réformer le jugement, et de condamner M. X. au paiement de 10 000 F de dommages intérêts pour procédure abusive et de 10.000 Francs supplémentaires sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

M. X. prétend que le matériel n'a jamais été installé et demeure à la disposition des sociétés Protection One et Crédit de l'Est dans ses locaux. Aucun exemplaire des contrats proposés dans le cadre d'un démarchage ne lui a été remis, en infraction avec le Code de la consommation. Ses cocontractants ont manqué de loyauté, en infraction avec l'article 1134 du Code civil. Le Crédit de l'Est ne peut soutenir que le litige avec la société de télésurveillance lui est inopposable, les dispositions correspondantes de son contrat n'ayant pas été portées à la connaissance du concluant. Au contraire, ce contrat est l'accessoire du contrat d'abonnement, dont la résolution judiciaire entraîne dès lors l'anéantissement.

[minute page 4] II est donc demandé à la cour de confirmer le jugement.

M. X. soutient ensuite qu'il est fondé à invoquer le Code de la consommation, les contrats litigieux étant sans rapport direct avec l'exercice de ses activités. Les dispositions d'ordre public de ce Code n'ayant pas été respectées, le contrat d'abonnement doit être annulé, le contrat de « renting » qui en est l'accessoire l'étant également. L'ordre de prélèvement a été établi avant la livraison de l'installation, ce qui justifie encore l'annulation.

Il allègue un dol, résultant selon lui du fait qu'il n'a jamais donné son consentement au contrat de « renting » : il a seulement apposé son cachet et sa signature sur ce contrat à la demande du représentant de la CET, les deux sociétés étant « mandataires d'intérêt commun » dans le cadre de l'opération contractuelle envisagée.

Il prétend ensuite que les sociétés en cause ont gravement manqué à leur obligation précontractuelle d'information et de conseil, ce qui justifie l'annulation sur le fondement de l'article 1116 du Code civil et de l'article L 111-1 du Code de la consommation.

Il est enfin demandé la condamnation solidaire des deux sociétés au paiement de 1.524,49 € de dommages intérêts pour procédure abusive et de 3.048,98 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société GE Capital maintient que le litige opposant M. X. à Protection One lui est inopposable, conformément aux stipulations contractuelles, de sorte que M. X. devra être condamné à lui payer 2.946,54 € au titre des loyers impayés, outre les intérêts à compter de la première mise en demeure, ainsi que 1.219,59 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Il est justifié devant la cour de la signature d'un contrat d'abonnement de télésurveillance et d'un contrat de location de l'installation correspondante, tous deux en date du 6 avril 1995, ainsi que d'un deuxième contrat de location, relatif à la même installation et portant la date du 6 avril 1996.

Selon courrier recommandé que lui a adressé la CET dès le 21 avril 1995, M. X. avait demandé le report aux mois d'août ou septembre 1995 de la mise en place de l'installation.

[minute page 5] Il ressort des pièces produites que cette installation a été effectuée le 30 novembre 1995, Mme X. mère ayant signé le procès-verbal de réception et de conformité de cette installation, reconnaissant, aux termes de ce document, qu'une démonstration avait été effectuée et que le matériel lui donnait toute satisfaction. M. X. ne produit en revanche aucun justificatif à l'appui de ses affirmations selon lesquelles « le défaut d'installation est prouvé » et la société CET n'a pas exécuté ses obligations, lui-même n'ayant tiré aucune conséquence du retard de livraison au moment où cette livraison a eu lieu : il l'a donc accepté.

M. X., s'il produit la preuve du dépôt d'une lettre recommandée adressée à la CET le 1er septembre 1995, ne produit ni l'accusé de réception, ni même la copie du courrier, dont la teneur demeure donc totalement inconnue. Il ne prétend pas avoir protesté suite à l'installation du 30 novembre 1995.

Il ne s'explique pas davantage sur les raisons qui l'ont conduit, s'il ne souhaitait pas disposer du matériel correspondant, à signer un contrat de location en date du 6 avril 1996, revêtu de son cachet commercial et produit en original par GE Capital Finance. Rien n'établit que la date ait été apposée hors la vue de M. X. comme il l'affirme sans le démontrer.

M. X. ne peut non plus sérieusement prétendre qu'il n'a pas eu connaissance des prélèvements effectués avant que son comptable ne l'en informe : les relevés de compte lui sont adressés personnellement, et il n'a pas protesté pendant six mois, ce qui n'est pas l'attitude d'un commerçant normalement diligent.

Il apparaît que M. X., dans la mesure où la location et la prestation de télésurveillance objet des contrats litigieux n'avaient pas de rapport direct avec ses activités de marchand de chaussures, est fondé à invoquer les articles L. 121-21 du Code de la consommation.

L'ordre de prélèvement litigieux n'est certes pas produit, mais il est certain que la banque, qui a pris la responsabilité de l'exécuter et n'a pas été poursuivie de ce chef par son client, l'a reçu et vérifié comme elle en avait l'obligation. En tout état de cause, il ressort du rapprochement de la date de signature du contrat et de celle du premier prélèvement que le délai prévu à l'article L. 121-26-3ème alinéa du Code de la consommation a été respecté.

Contrairement aux affirmations de M. X., les contrats litigieux sont conformes aux exigences des articles L. 121-21 et suivants de ce Code, notamment à l'article L. 121-23 relatif aux mentions obligatoires, et M. X., qui n'établit pas avoir rétracté son accord dans le délai qui lui était offert, ne peut valablement soulever aucun grief sur le fondement de ces textes.

[minute page 6] Il n'établit pas davantage avoir été victime d'une erreur ou d'un dol susceptible d'avoir vicié son consentement : les contrats qui lui ont été soumis étaient précis quant aux prestations offertes, ils prévoyaient une possibilité de rétractation dont il n'a pas usé, il a même signé un nouveau contrat un an après le premier et plusieurs mois après l'installation de l'alarme, confirmant par là son accord sur l'ensemble de l'opération. Il n'est démontré la réalité d'aucune manœuvre dolosive, voire simple réticence de la part de la CET. Le fait qu'un courrier de 1997 lui rappelle les conditions de son engagement ne signifie pas que cette information, dont la loi n'exige pas qu'elle prenne en l'espèce une forme écrite, ne lui avait pas été délivrée avant qu'il ne s'engage.

Ainsi, M. X. ne démontre aucune des causes de nullité de ses engagements qu'il invoque, de sorte qu'il doit être condamné à exécuter complètement les contrats qu'il a souscrits en connaissance de cause et qu'il a d'ailleurs commencé d'exécuter.

Il ne conteste pas le montant des sommes qui lui sont réclamées, sinon pour prétendre, contre son intérêt, que l'installation litigieuse n'a pas été revendue, ce qui impliquerait que son prix de revente ne soit pas déduit des sommes dues. Cette dernière affirmation n'étant pas davantage démontrée que les précédentes, il sera fait droit à la demande de GE Capital Finance, les intérêts de retard étant accordés à compter de la date de signification de l'ordonnance d'injonction de payer, soit le 17 mai 1999.

Il ne pourra être fait droit à la demande de dommages intérêts présentée par la société Protection One, qui ne justifie d'aucun préjudice distinct de l'obligation de plaider.

L'équité commande en revanche d'accorder tant à GE Capital Equipement Finance qu'à Protection One une indemnisation de leurs frais irrépétibles.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Reçoit la SA Protection One en son appel qui est régulier,

Y faisant droit,

[minute page 7] Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 juin 2001 par le tribunal de commerce de Toulouse,

Statuant à nouveau,

Condamne M. X. à payer à la société GE Capital Equipement Finance, venant aux droits de la société en commandite Crédit de l'Est, la somme de 2.946,54 € (deux mille neuf cent quarante six euros et cinquante quatre centimes) en principal,

Dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 17 mai 1999,

Rejetant toutes autres demandes,

Condamne M. X. à payer à chacune des sociétés, Protection One et GE Capital Equipement Finance une somme de 1.000 € (mille euros) en indemnisation de ses frais irrépétibles,

Le condamne aux entiers dépens, dont distraction au profit des SCP Rives Podesta et Boyer Lescat Merle en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. FOULQUIE, Président et par Madame THOMAS Greffier présent lors du prononcé.