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CASS. CIV. 1re, 28 novembre 2018

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 28 novembre 2018
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 17-21625
Décision : 18-1141
Date : 28/11/2018
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:C101141
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA PARIS (pôle 4 ch. 8), 18 mai 2017, CA VERSAILLES (16e ch.), 24 septembre 2020
Numéro de la décision : 1141
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8464

CASS. CIV. 1re, 28 novembre 2018 : pourvoi n° 17-21625 ; arrêt n° 1141

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Attendu que, pour dire abusive la clause prévue à l'article 17 du contrat, selon laquelle les sommes dues par l'emprunteur seront de plein droit immédiatement exigibles en cas d'inexactitude de l'une de ses déclarations sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt, et, pour s'en prévaloir, le prêteur en avertira l'emprunteur par écrit, l'arrêt retient que la clause litigieuse laisse au seul prêteur l'appréciation du caractère inexact de ces déclarations en le laissant décider du caractère essentiel des éléments sur lesquels elles portent et décider si elles ont été de nature soit à déterminer l'accord de la banque, soit à compromettre le remboursement du prêt, et qu'une simple information de l'emprunteur suffit, sans même ouvrir la possibilité d'une contestation de l'emprunteur sur le bien-fondé de la déchéance, de sorte que la clause litigieuse octroyait au prêteur un pouvoir discrétionnaire de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse prévoyait le prononcé de la déchéance du terme seulement en cas de déclaration inexacte des emprunteurs sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou pouvant compromettre le remboursement du prêt, sans exclure le recours au juge, de sorte que cette stipulation, qui visait à prévenir un défaut d'exécution de leurs engagements par les emprunteurs ayant manqué à l'obligation de loyauté lors de la formation du contrat, n'avait pas pour objet ni pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment des emprunteurs, la cour d'appel a violé les dispositions de [l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation]. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 17-21625. Arrêt n° 1141.

DEMANDEUR à la cassation : Caisse de crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière

DÉFENDEUR à la cassation : Madame X. – Madame Y.

Mme Batut (président), président. Maître Le Prado, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 13 mai 2011, la Caisse de crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière (la banque) a consenti à Mme A., veuve X., et Mme D. X., épouse Y., (les emprunteurs) un prêt d'un montant de 232.530 euros, destiné à financer l'acquisition d'un bien immobilier ; que, par lettre recommandée du 15 novembre 2012, la banque a prononcé la déchéance du terme en application de l'article 17 du contrat, au motif que le prêt avait été obtenu à l'aide de documents falsifiés ; que, par acte du 1er octobre 2014, elle a signifié aux emprunteurs un commandement de payer valant saisie immobilière et les a assignés à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution ; que les emprunteurs ont soulevé une fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale et se sont prévalus du caractère illicite ou abusif de l'article 17 du contrat de prêt ;

 

Sur le premier moyen :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu'après avoir, dans ses motifs, retenu que l'action en paiement de la banque n'était pas prescrite, l'arrêt confirme, en toutes ses dispositions, le jugement, qui l'avait déclarée prescrite ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

 

Et sur le second moyen :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour dire abusive la clause prévue à l'article 17 du contrat, selon laquelle les sommes dues par l'emprunteur seront de plein droit immédiatement exigibles en cas d'inexactitude de l'une de ses déclarations sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt, et, pour s'en prévaloir, le prêteur en avertira l'emprunteur par écrit, l'arrêt retient que la clause litigieuse laisse au seul prêteur l'appréciation du caractère inexact de ces déclarations en le laissant décider du caractère essentiel des éléments sur lesquels elles portent et décider si elles ont été de nature soit à déterminer l'accord de la banque, soit à compromettre le remboursement du prêt, et qu'une simple information de l'emprunteur suffit, sans même ouvrir la possibilité d'une contestation de l'emprunteur sur le bien-fondé de la déchéance, de sorte que la clause litigieuse octroyait au prêteur un pouvoir discrétionnaire de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse prévoyait le prononcé de la déchéance du terme seulement en cas de déclaration inexacte des emprunteurs sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou pouvant compromettre le remboursement du prêt, sans exclure le recours au juge, de sorte que cette stipulation, qui visait à prévenir un défaut d'exécution de leurs engagements par les emprunteurs ayant manqué à l'obligation de loyauté lors de la formation du contrat, n'avait pas pour objet ni pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment des emprunteurs, la cour d'appel a violé les dispositions du texte susvisé ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-huit et signé par lui et par Mme Pecquenard, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyens produits par Maître E., avocat aux Conseils, pour la Caisse de crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière

 

PREMIER MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR confirmé le jugement ayant constaté que l'action de la Caisse de Crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière à l'encontre de Mme C. X. et Mme D. Y. est atteinte par la prescription ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE « Pour juger prescrite l'action de la banque, le premier juge a retenu que la prescription applicable était celle, biennale, de l'article L. 137-2 du code de la consommation, et que, ne s'agissant pas d'un défaut de paiement, la prescription courait non à compter de la déchéance du terme, mais à compter de la date où la banque avait eu en sa possession les éléments démontrant la fraude et conduisant à ladite déchéance, soit le 24 septembre 2012, étant rappelé que le commandement de payer à fin de saisie a été délivré le 1er octobre 2014.

Le Crédit mutuel soutient que les dispositions de l'article L. 137-2 du code de la consommation ne seraient pas applicables au litige, s'agissant de recouvrer des sommes versées indûment à des débitrices ayant obtenu un prêt immobilier au moyen de manœuvres dolosives ; que ce n'est pas le régime général de prescription de l'article 2224 du code civil qui doit s'appliquer, mais le régime spécial de l'article 2233 du code civil ; que, s'agissant d'un prêt immobilier, le point de départ du délai de prescription doit être fixé au jour du prononcé de la déchéance du terme et, pat ailleurs, que les règlements faits chaque mois par Mmes X... depuis quatre ans valent reconnaissance du droit du Crédit mutuel de prescrire à leur encontre, qu'ainsi le délai de prescription a été valablement interrompu.

L'article L. 137-2 du code de la consommation, devenu L. 218-2 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, selon lequel l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, est énoncé de façon générale et a vocation à s'appliquer à tous les contrats de consommation, en particulier aux crédits immobiliers consentis par des organismes de crédit au consommateur, lesquels constituent des services financiers fournis par des professionnels.

Ce texte ne distingue pas selon le type d'action, et notamment pas entre les actions en recouvrement à la suite d'impayés et celles fondées sur d'autres stipulations contractuelles. Il institue un régime de prescription dérogatoire au droit commun, applicable à toutes les actions engagées par un professionnel tendant au paiement des sommes dues pour les biens ou les services qu'il a fournis à un consommateur. Les lois spéciales dérogeant aux lois générales, il ne peut être distingué là où la loi ne distingue pas. Le premier juge sera approuvé en ce qu'il a retenu que la prescription applicable est la prescription biennale de l'article L. 137-2 du code de la consommation devenu L. 218-2 du même code.

Quant au point de départ de la prescription, la banque soutient que, s'agissant d'une obligation assortie d'un terme, le point de départ du délai serait, en application de l'article 2233 du code civil selon lequel, en pareil cas, la prescription ne court qu'à compter de l'arrivée du terme, la date de la déchéance du terme, soit le 15 novembre 2012.

Il est constant que le contrat en cause contient une créance à terme et qu'il doit donc être tenu compte, pour la détermination du point de départ de la prescription, tant de l'article 2224 que de l'article 2233 du code civil, même si l'action exercée n'est pas une action en recouvrement d'impayés.

La banque fonde son action sur l'article 17 de l'offre de prêt, lequel prévoit que « les sommes dues seront de plein droit immédiatement exigibles dans l'un quelconque des cas suivants. Pour s'en prévaloir, le prêteur en avertira l'emprunteur par écrit ». Suit la liste des nombreux cas prévus, notamment « en cas (...) d'inexactitude de l'une de ses déclarations sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt ».

Ainsi, le délai de prescription ne peut commencer à courir qu'à compter de la date à laquelle le créancier a le droit, selon ladite clause, d'exiger le paiement et en l'espèce, à la date de la déchéance du terme qui emporte l'exigibilité de la créance, soit en l'espèce le 15 novembre 2012.

Si les intimées contestent l'effectivité de la déchéance du terme en ce qu'une seule lettre recommandée leur a été adressée le 12 novembre 2012 à leur adresse commune, c'est à bon droit que la banque fait valoir que le principe de représentation mutuelle des codébiteurs solidaires exclut l'obligation pour le créancier de procéder à des notifications distinctes à leur égard.

L'action du Crédit mutuel n'est donc pas prescrite.

Mmes X. soutiennent que la clause permettant au préteur d'exiger un règlement anticipé du capital en cas d'inexactitude des renseignements confidentiels qui lui sont fournis par l'emprunteur est abusive ou illicite et doit être réputée non écrite. Elles estiment, par ailleurs, que, le contrat étant formé et les fonds débloqués, la seule obligation à laquelle elles demeurent tenues est celle de payer.

Le Crédit mutuel s'oppose à ces prétentions, faisant valoir que, destiné à sanctionner un éventuel dol des emprunteurs ainsi que l'exécution de mauvaise foi de la convention par ceux-ci, cet article serait parfaitement licite et ne saurait être considéré comme une clause abusive. Il ajoute que les articles L. 311-13 et L. 311-33 du code de la consommation ne visent que le formalisme des offres de crédit à la consommation et ne seraient pas applicables en l'espèce s'agissant d'une offre de prêt immobilier.

La clause litigieuse se trouve dans l'article 17 de l'offre de prêt, lequel prévoit que « les sommes dues seront de plein droit immédiatement exigibles dans l'un quelconque des cas suivants » [...] « en cas ... d'inexactitude de l'une de ses déclarations sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt ».

Il ressort de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à l'époque du contrat, que « dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Par sa généralité, cet article est parfaitement applicable en la cause.

En l'espèce, force est de constater que la clause vise en termes généraux les éléments essentiels des déclarations des emprunteurs, laissant au seul prêteur l'appréciation du caractère inexact de ces déclarations en le laissant décider du caractère essentiel des éléments sur lesquels elles portent et déterminer si elles ont été de nature soit à déterminer l'accord de la banque soit à compromettre le remboursement du prêt. La clause prévoit que dès lors le prêteur pourra prononcer l'exigibilité des sommes et donc la déchéance du terme, et, pour son application, il suffit d'une simple information de l'emprunteur (« Pour s'en prévaloir, le préteur en avertira l'emprunteur par écrit »), sans même ouvrir la possibilité d'une contestation du consommateur quant au bien-fondé de la déchéance.

Ainsi, et quand bien même il s'agirait pour la banque de se prémunir contre le dol ou la mauvaise foi, par cette clause, elle s'octroie un pouvoir discrétionnaire de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte que ladite clause présente un caractère abusif et sera déclarée non écrite.

Il en résulte que la déchéance du terme a été prononcée à tort et ne peut fonder la procédure de saisie immobilière, le jugement, malgré le rejet de la fia de non-recevoir prise de la prescription, devant être confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a mis fin aux poursuites.

La saisie immobilière étant annulée, la cour, statuant avec les pouvoirs le juge de l'exécution, rejettera comme irrecevables toutes les autres demandes des intimées, les pouvoirs du juge de l'exécution pour trancher les questions de fond étant limités à celles dont dépend la validité de la mesure » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en énonçant, dans ses motifs, que « l'action du Crédit mutuel n'est (…) pas prescrite », tout en confirmant dans son dispositif le jugement qui avait constaté que l'action de la Caisse de Crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière à l'encontre de Mme C. X. et Mme D. Y. est atteinte par la prescription, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile.

 

SECOND MOYEN DE CASSATION :

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR constaté que le créancier poursuivant ne peut justifier d'un titre exécutoire contenant une créance liquide et exigible envers Mme C. X. et Mme D. Y., mis fin en conséquence aux poursuites de saisie immobilière engagées par la Caisse de Crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière à l'encontre de Mme C. X. et Mme D. Y. et débouté la Caisse de Crédit mutuel d'Ozoir-la-Ferrière de l'ensemble de ses demandes ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE « Mmes X. soutiennent que la clause permettant au préteur d'exiger un règlement anticipé du capital en cas d'inexactitude des renseignements confidentiels qui lui sont fournis par l'emprunteur est abusive ou illicite et doit être réputée non écrite. Elles estiment, par ailleurs, que, le contrat étant formé et les fonds débloqués, la seule obligation à laquelle elles demeurent tenues est celle de payer.

Le Crédit mutuel s'oppose à ces prétentions, faisant valoir que, destiné à sanctionner un éventuel dol des emprunteurs ainsi que l'exécution de mauvaise foi de la convention par ceux-ci, cet article serait parfaitement licite et ne saurait être considéré comme une clause abusive. Il ajoute que les articles L. 311-13 et L. 311-33 du code de la consommation ne visent que le formalisme des offres de crédit à la consommation et ne seraient pas applicables en l'espèce s'agissant d'une offre de prêt immobilier.

La clause litigieuse se trouve dans l'article 17 de l'offre de prêt, lequel prévoit que « les sommes dues seront de plein droit immédiatement exigibles dans l'un quelconque des cas suivants » [...] « en cas ... d'inexactitude de l'une de ses déclarations sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt ».

Il ressort de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à l'époque du contrat, que « dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». Par sa généralité, cet article est parfaitement applicable en la cause.

En l'espèce, force est de constater que la clause vise en termes généraux les éléments essentiels des déclarations des emprunteurs, laissant au seul prêteur l'appréciation du caractère inexact de ces déclarations en le laissant décider du caractère essentiel des éléments sur lesquels elles portent et déterminer si elles ont été de nature soit à déterminer l'accord de la banque soit à compromettre le remboursement du prêt. La clause prévoit que dès lors le prêteur pourra prononcer l'exigibilité des sommes et donc la déchéance du terme, et, pour son application, il suffit d'une simple information de l'emprunteur (« Pour s'en prévaloir, le préteur en avertira l'emprunteur par écrit »), sans même ouvrir la possibilité d'une contestation du consommateur quant au bien-fondé de la déchéance.

Ainsi, et quand bien même il s'agirait pour la banque de se prémunir contre le dol ou la mauvaise foi, par cette clause, elle s'octroie un pouvoir discrétionnaire de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte que ladite clause présente un caractère abusif et sera déclarée non écrite.

Il en résulte que la déchéance du terme a été prononcée à tort et ne peut fonder la procédure de saisie immobilière, le jugement, malgré le rejet de la fin de non-recevoir prise de la prescription, devant être confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a mis fin aux poursuites.

La saisie immobilière étant annulée, la cour, statuant avec les pouvoirs le juge de l'exécution, rejettera comme irrecevables toutes les autres demandes des intimées, les pouvoirs du juge de l'exécution pour trancher les questions de fond étant limités à celles dont dépend la validité de la mesure » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que l'article 17 de l'offre de prêt immobilier stipulait que « les sommes dues seront de plein droit immédiatement exigibles dans l'un quelconque des cas suivants. Pour s'en prévaloir, le préteur en avertira l'emprunteur par écrit (…) : en cas (...) d'inexactitude de l'une de ses déclarations sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt » ; qu'en jugeant, pour déclarer abusive cette clause, qu'elle octroyait au prêteur « un pouvoir discrétionnaire de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties », tandis qu'elle réservait le prononcé de la déchéance du terme au cas où la déclaration inexacte portait sur des éléments essentiels ayant déterminé l'accord de la banque ou de nature à compromettre le remboursement du prêt sans exclure le recours au juge pour contester cette appréciation, de sorte qu'elle ne créait pas au détriment de l'emprunteur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties au contrat, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation devenu L. 212-1 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.