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CASS. CIV. 2e, 16 juillet 2020

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 2e, 16 juillet 2020
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 2
Demande : 19-17331
Décision : 20-678
Date : 16/07/2020
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:C200678
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Numéro de la décision : 678
Référence bibliographique : 6190 (avocat et art. L. 441-3 C. com.), 6387 (avocat et C. consom.)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8571

CASS. CIV. 2e, 16 juillet 2020 : pourvoi n° 19-17331 ; arrêt n° 678 

Publication : Legifrance ; Bull. civ.

 

Extrait : « Vu les articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et L. 441-3 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, applicable au litige ; 4. Il résulte de ces textes que le juge saisi d'une contestation des honoraires d'un avocat en fixe le montant conformément aux dispositions du premier, nonobstant les irrégularités pouvant affecter la facturation de ceux-ci au regard des prescriptions du second. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 16 JUILLET 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : F 19-17.331. Arrêt n° 678 F-P+B+I.

DEMANDEUR à la cassation : Société CSF Jurco

DÉFENDEUR à la cassation : Madame X.

Président : M. Pireyre (président). Avocat(s) : Maître Balat, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

 

La société CSF Jurco, prise en la personne de M. Z., société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [adresse], a formé le pourvoi n° F 19-17.331 contre l'ordonnance rendue le 2 avril 2019 par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-11 OP), dans le litige l'opposant à Mme X., domiciliée [adresse], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société CSF Jurco, de Maître Balat, avocat de Mme X., et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 2 avril 2019), Mme X. a confié, en mai 2016, la défense de ses intérêts dans divers litiges à la société CSF Jurco (l'avocat).

2. Dessaisi le 20 octobre 2016 par sa cliente, l'avocat a saisi le bâtonnier de l'ordre pour fixer le montant des honoraires lui restant dus.

 

Examen du moyen :

Sur le moyen pris en sa première branche

Enoncé du moyen

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

3. L'avocat fait grief à l'ordonnance de limiter les honoraires restant dus par Mme X. à la somme de 919,67 euros toutes taxes comprises, alors que « la sanction du défaut de respect des règles de facturation ne consiste pas en la nullité de la facture émise, de sorte que l'absence de précision, sur la facture adressée par l'avocat à son client, de la nature des diligences accomplies ne confère pas un caractère indu aux sommes réclamées par l'avocat ; que le premier président a retenu, pour dire que les sommes réclamées au titre des factures n° 16XX57 du 19 octobre 2016 d'un montant de 3.390 euros et n° 16YY74 du 23 novembre 2016 d'un montant de 6.970,50 euros, adressées par l'avocat à sa cliente, n'étaient pas dues, que même si des précisions sur la nature des diligences effectuées par l'avocat avaient été apportées dans des documents extérieurs remis ultérieurement à la cliente, aucune précision n'avait été donnée dans ces factures elles-mêmes sur la nature desdites diligences, de sorte que les sommes réclamées n'étaient pas justifiées et que ces factures ne pouvaient donner lieu à versement d'honoraires ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de précision relative à la nature des diligences effectuées par l'avocat sur lesdites factures, n'avait pas pour conséquence de conférer un caractère indu aux sommes réclamées, le premier président a violé l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, ensemble l'article L. 441-3 du code de commerce ».

 

Réponse de la Cour :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu les articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et L. 441-3 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, applicable au litige ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

4. Il résulte de ces textes que le juge saisi d'une contestation des honoraires d'un avocat en fixe le montant conformément aux dispositions du premier, nonobstant les irrégularités pouvant affecter la facturation de ceux-ci au regard des prescriptions du second.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

5. Pour infirmer la décision du bâtonnier et fixer à la somme de 919,67 euros TTC les honoraires restant dus par Mme X. à l'avocat, l'ordonnance retient que les factures des 19 octobre et 23 novembre 2016 concernent les diligences accomplies respectivement en août 2016 et de septembre à novembre 2016 par l'avocat, calculées au temps passé, mais qu'aucune précision n'a été donnée dans les factures même sur la nature des diligences effectuées et que même si ces précisions sont apportées dans un document extérieur remis ultérieurement, ces factures ne peuvent donner lieu à versement d'honoraires.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

6. En statuant ainsi, le premier président a violé les textes susvisés.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 2 avril 2019, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant la juridiction du premier président de cour d'appel d'Aix en Provence autrement composée ;

Condamne Mme X. aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X. et la condamne à payer à la société CSF Jurco une somme de 1.500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juillet deux mille vingt, et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société CSF Jurco.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir limité les honoraires restant dus par madame X., cliente, à la société CSF Jurco, avocat, à la somme de 919,67 euros toutes taxes comprises ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs que « - la facture n° 16ZZ08 du 5 septembre 2016 = cette facture concerne des frais d'huissier ; il résulte de la pièce 13 de la société Csf Jurco Avocats que madame X. ayant refusé de régler ces frais à la demande de l'huissier, ce dernier s'est adressé au cabinet Csf Jurco ; aucun élément ne permet de remettre en cause le montant de ces frais, facturés 919,67 euros TTC ; - la facture n° 161XX57 du 19 octobre 2016 = cette facture concerne les diligences accomplies en août 2016 par la société Csf Jurco Avocats calculées au temps passé ; toutefois, aucune précision n'a été donnée dans la facture même sur la nature des diligences effectuées ; même si ces précisions sont apportées dans un document extérieur remis ultérieurement, la facture susdite ne peut donner lieu à versement d'honoraires ; la somme de 3.390 euros, non justifiée, n'est donc pas due ; - la facture n° 161YY74 du 23 novembre 2016 = cette facture concerne les diligences accomplies pour septembre-octobre et novembre 2016 par la société Csf Jurco Avocats calculées au temps passé ; toutefois, aucune précision n'a été donnée dans la facture même sur la nature des diligences effectuées ; même si ces précisions sont apportées dans un document extérieur remis ultérieurement, la facture susdite ne peut donner lieu à versement d'honoraires ; la somme de 6 970,50 euros, non justifiée, n'est donc pas due ; il reste donc à régler par madame X. à la société Csf Jurco Avocats la somme de 919,67 euros TTC ; la décision déférée sera donc infirmée en ce qu'elle fixe les honoraires dus à la somme totale de 11.280,17 euros TTC » (ordonnance, p. 4) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) Alors que la sanction du défaut de respect des règles de facturation ne consiste pas en la nullité de la facture émise, de sorte que l'absence de précision, sur la facture adressée par l'avocat à son client, de la nature des diligences accomplies ne confère pas un caractère indu aux sommes réclamées par l'avocat ; que le premier président a retenu, pour dire que les sommes réclamées au titre des factures n°161XX57 du 19 octobre 2016 d'un montant de 3 390 euros et n°161YY74 du 23 novembre 2016 d'un montant de 6.970,50 euros, adressées par l'avocat à sa cliente, n'étaient pas dues, que même si des précisions sur la nature des diligences effectuées par l'avocat avaient été apportées dans des documents extérieurs remis ultérieurement à la cliente, aucune précision n'avait été donnée dans ces factures elles-mêmes sur la nature desdites diligences, de sorte que les sommes réclamées n'étaient pas justifiées et que ces factures ne pouvaient donner lieu à versement d'honoraires ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de précision relative à la nature des diligences effectuées par l'avocat sur lesdites factures, n'avait pas pour conséquence de conférer un caractère indu aux sommes réclamées, le premier président a violé l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, ensemble l'article L. 441-3 du code de commerce ;

2°) Alors que le premier président de cour d'appel, saisi d'une contestation d'honoraires d'avocat, ne peut rejeter la demande en fixation d'honoraires qu'en l'état d'un défaut complet de diligences de la part de l'avocat ou de diligences toutes manifestement inutiles ; que le premier président a constaté que des précisions relatives à la nature des diligences effectuées au titre des factures n° 161XX57 du 19 octobre 2016 d'un montant de 3.390 euros et n°161YY74 du 23 novembre 2016 d'un montant de 6.970,50 euros, adressées par l'avocat à sa cliente, avaient été apportées par l'avocat au moyen de documents extérieurs à ces factures remis ultérieurement à sa cliente ; qu'en retenant néanmoins que les sommes réclamées au titre de ces factures n'étaient pas dues, sans constater que les diligences mentionnées par ces documents remis ultérieurement auraient été inexistantes ou toutes manifestement inutiles, le premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.