CA POITIERS (1re ch. civ.), 16 mars 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8855
CA POITIERS (1re ch. civ.), 16 mars 2021 : RG n° 19/00829 ; arrêt n° 166
Publication : Jurica
Extrait : « La commune demande à la cour de prononcer la nullité des clauses relatives à la résiliation du contrat au motif qu'elles seraient illicites dans la mesure où seul le loueur pourrait résilier le contrat et cela de manière unilatérale et discrétionnaire, où les indemnités contractuelles qui sont prévues en cas de résiliation du contrat seraient manifestement disproportionnées.
La société Viatelease fait valoir à juste titre que la commune a contracté pour les besoins de son activité, que les dispositions du code de la consommation dont la commune se prévaut concernent les non-professionnels et les consommateurs, qu'elles ne sont pas applicables en l'espèce.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que la location des défibrillateurs était en lien avec les missions de service public de la commune dans la mesure où ils ont pour finalité la sécurité des usagers de la mairie, des locaux annexes municipaux, en lien avec les fonctions de la commune, et en conséquence dit sans objet les demandes de nullité des clauses contractuelles relatives à la résiliation. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 16 MARS 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/00829. Arrêt n°166. N° Portalis DBV5-V-B7D-FV4M. Décision déférée à la Cour : jugement du 5 février 2019 rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS.
APPELANTE :
LA COMMUNE DE CHAMPIGNY EN ROCHEREAU
[...], [...], ayant pour avocat Maître Jessy R., avocat au barreau de POITIERS
INTIMÉE :
LA SAS VIATELEASE
[...], [...] ayant pour avocat postulant Maître Marie C., avocat au barreau de POITIERS et pour avocat Maître Sabrina B., avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR : En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant : Madame Anne VERRIER, Conseiller.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Thierry MONGE, Président de Chambre, Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller, Madame Anne VERRIER, Conseiller.
GREFFIER, lors des débats : Mme Chamsane ASSANI,
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Chamsane ASSANI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
La commune de Champigny le Sec devenue Champigny en Rochereau avait souscrit avec la société G. un contrat de location de longue durée portant sur du matériel de défibrillation.
Les 18 et 21 mars 2016, la commune a conclu avec la société Viatelease, société exerçant une activité de location financière de matériel, un second contrat portant sur la location de 2 défibrillateurs fournis par la société Myvisioprotect pour une période de 63 mois, moyennant un loyer trimestriel de 480 euros HT.
Les défibrillateurs livrés le 18 mars 2016 ont été achetés par la société Viatelease à la société Myvisioprotect pour un prix de 9.089,47 euros selon facture émise le 21 mars 2016.
La commune a cessé de régler les loyers à la société Viatelease soutenant n'avoir conclu le second contrat de location que parce qu'elle était convaincue qu'un transfert des contrats de location devait s'opérer.
Par courrier du 27 mars 2016, la société Viatelease faisait observer à la commune que le contrat de location était clair quant à l'identité des parties, qu'il n'était nullement fait état d'une novation du contrat, novation pour laquelle l'accord du créancier initial aurait alors été requis.
Elle la mettait en demeure de régler les 4 factures impayées (2.304 euros), l'indemnité de résiliation (10.379,52 euros).
Le 20 avril 2017, la société Viatelease notifiait la résiliation du contrat, visait la clause résolutoire de plein droit, rappelait à la commune qu'il lui appartenait de restituer le matériel. A défaut, nous procéderons à son enlèvement à vos frais soit à l'amiable soit par toutes voies de droit appropriées.
Par acte du 22 septembre 2017, la société Viatelease a assigné la commune de Champigny le sec devant le tribunal de grande instance de Poitiers aux fins de résiliation du contrat aux torts du locataire pour non-paiement des loyers.
Elle demandait en outre sa condamnation au paiement des loyers impayés, des loyers à échoir, de la clause pénale, soit une somme globale de 12.683,52 euros, outre la capitalisation des intérêts et la restitution des matériels loués.
La commune concluait à l'irrecevabilité des demandes pour défaut de qualité à agir de la société Viatelease, subsidiairement, à la nullité du contrat de location, à l'existence de clauses abusives et à la réduction des clauses pénales.
[*]
Par jugement du 5 février 2019, le tribunal de grande instance de Poitiers a statué comme suit :
« - condamne la Commune de Champigny-en-Rochereau à payer à la société VIATELEASE la somme de 10.304 € assortie des intérêts au taux légal ;
- condamne la Commune à restituer le matériel, objet du contrat de location conclu le 18 mars 2016, sous astreinte de 10 € par jour de retard ;
- rejette les autres demandes ;
-condamne la Commune aux dépens de l'instance »
Le premier juge a notamment retenu que :
- sur la recevabilité
Le fournisseur, la société Vysioprotect a été placé en liquidation judiciaire, ce qui ne concerne pas le bailleur, la société Viatelease, société distincte.
- sur le dol,
La commune prétend que le fournisseur l'avait assurée qu'un transfert de contrats interviendrait dans la mesure où le contrat conclu portait sur du matériel identique à celui qui avait été antérieurement conclu avec la société G.
La preuve de l'existence des manœuvres dolosives imputées à la société Viatelease n'est pas rapportée.
La commune qui ne peut se constituer de preuve à soi-même produit uniquement une attestation du maire, attestation non conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile.
La plus élémentaire prudence imposait au maire, retraité du notariat, d'obtenir un engagement écrit du cocontractant quant au transfert prétendument promis.
- sur l'existence de clauses abusives
Une commune peut être considérée comme un consommateur.
Les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation ne s'appliquent pas lorsque l'opération a été envisagée pour le service exclusif d'une activité professionnelle, en lien direct avec celle-ci.
L'acquisition des défibrillateurs avait pour objet la sécurité des tiers fréquentant les locaux de la mairie et du gymnase.
- sur le montant des sommes dues, la restitution du matériel
Le bailleur est fondé à demander les loyers échus impayés de 2304 euros.
L'indemnité de résiliation correspond aux loyers à échoir, majorés de 6 %. Elle s'analyse en une clause pénale, apparaît manifestement excessive, sera réduite à la somme de 8.000 euros.
La restitution du matériel sous astreinte sera ordonnée.
- sur l'application de l'article L. 441-6 du Code de commerce
Cet article ne s'applique pas aux sommes sollicitées qui sont consécutives à la résiliation du contrat. Ce ne sont pas des factures non payées à leur échéance.
LA COUR
Vu l'appel général en date du 26 février 2019 interjeté par la commune de Champigny en Rochereau
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions du 22 août 2019, la commune de Champigny en Rochereau a présenté les demandes suivantes :
Vu l'article 1116 (ancien) du Code civil
Vu l'article liminaire et les articles L. 132-1 ; L. 212.-1 ; L. 212-2 ; L.212.3 et R 212-1 ; R 212-2 ; R 212-5 du Code de la Consommation, l'article L. 441-6 (ancien) du Code de commerce
Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu les jurisprudences citées,
Vu les pièces versées aux débats,
- Dire et juger recevable l'appel formé par la Commune de Champigny-le-Sec devenue Champigny-en-Rochereau
- Débouter la société VIATELEASE de ses demandes incidentes visant à obtenir :
- la condamnation de la Commune à lui payer les sommes de 9.792,00 € (au titre des loyers à échoir) et 587,52 € (au titre de la clause pénale de 6 %) avec intérêts au taux contractuel (3 fois le taux d'intérêt légal) outre la capitalisation des intérêts à compter de la mise en demeure en date du 10 avril 2017
- la condamnation de la Commune au paiement de l'indemnité compensatrice de frais de recouvrement d'un montant de 120,00 €.
A TITRE PRINCIPAL :
- Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a refusé de :
- prononcer la nullité du contrat du 18 mars 2016 pour cause de dol de la part de la société VIATELEASE et ordonner la restitution du matériel aux frais de la Commune sous astreinte de 10 € par jour de retard
- condamner la société VIATELEASE à restituer les frais de livraison et d'installation du matériel payé par la Commune.
Par conséquent, statuant à nouveau :
- dire et juger nul le contrat de location passé entre la Commune et la société VIATELEASE pour cause de dol ;
- condamner la société VIATELEASE à rembourser à la commune le montant des loyers perçus ;
- condamner la société VIATELEASE au versement de la somme de 2.500 € à la commune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens de l'instance.
A TITRE SUBSIDIAIRE :
- infirmer le jugement du 5 février 2019 en ce qu'il a condamné la Commune au paiement de la somme de 10.304 € assortie des intérêts de retard au taux légal à la restitution du matériel, objet du contrat de location conclu le 18 mars 2016, à ses frais et sous astreinte de 10 € par jour de retard.
- dire et juger que la Commune est un « non professionnel » pouvant à ce titre bénéficier des dispositions protectrices du droit consumériste
Par conséquent, statuant à nouveau
- dire et juger illégales les clauses invoquées au soutien des prétentions de la société VIATELEASE ;
- Condamner la société VIATELEASE au versement de la somme de 2.500 € à la commune de Champigny-en-Rochereau au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et au paiement des dépens de l'instance.
A TITRE TRES SUBSIDIAIRE :
- infirmer le jugement du 5 février 2019 en ce qu'il a condamné la Commune au paiement de sommes en raison de leurs montants disproportionnés
[*]
Par conséquent, et statuant à nouveau :
- Réduire à plus juste proportion le montant des sommes dues.
A l'appui de ses prétentions, la commune soutient notamment que :
- Elle avait conclu un contrat de location de longue durée avec la société G., bailleur.
Le fournisseur du matériel était la société My Defib.
- La société My Defib, gérée par M. K. et Mme G., avait fourni 2 défibrillateurs.
- Le maire a été démarché le 18 mars 2016 par la société Myvisioprotect. Le matériel a été remis dès le 18 mars, sans bon de commande préalable.
- La commune a eu la mauvaise surprise de recevoir deux factures émanant de deux bailleurs.
- Le contrat est nul pour dol. Le loueur doit s'assurer qu'il finance une prestation réelle.
- La commune n'a pas disposé d'un délai de réflexion. La vente a été forcée.
- Le président des sociétés Mydefib et Myvisioprotect est la même personne physique.
- La société Myvisioprotect avait nécessairement connaissance de l'existence du premier contrat de location.
- Le dol provoqué par un tiers ou un mandataire est susceptible d'entraîner la nullité du contrat.
-La société Viatelease était représentant du fournisseur et du loueur.
-Elle a menti, lui a fait croire au transfert, a induit la commune en erreur.
Les manœuvres ont provoqué l’erreur du locataire. Elle n'a pas retranscrit l' engagement qui avait été donné oralement.
- La commune n'aurait pas pris l'engagement souscrit si elle n'avait pas été persuadée de la certitude du transfert. Le dol a vicié son consentement.
- Le contrat contient des clauses abusives.
Est considérée comme non-professionnel toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles. La location n'a pas pour objet l'exécution d'un service public. Le contrat est un contrat de droit privé.
- Est abusive la clause qui prévoit une faculté de résiliation unilatérale au profit du seul professionnel après mise en demeure préalable restée infructueuse. Cette faculté sans réciprocité crée un déséquilibre significatif. La faculté est unilatérale et discrétionnaire.
- Sont abusives les clauses qui prévoient des indemnités manifestement disproportionnées en cas d’inexécution du contrat.
- Subsidiairement, les sommes réclamées sont disproportionnées.
- Elle ne pouvait payer deux factures, a payé celle émise par la société G. jusqu'au 1er octobre 2016. Les loyers impayés devraient être réclamés à la société G.
- Les loyers à échoir correspondent à 17 loyers trimestriels entre le 1 juillet 2017 et le 1er juillet 2021 soit 8.160 euros HT, 9.792 euros TTC
- La majoration de 6 % doit être calculée sur le montant HT et non TTC.
- L'article L.441-6 s'applique aux commerçants, ne s'applique pas à une commune qui ne loue pas à titre habituel, n'exerce pas une activité commerciale.
- La commune avait payé des frais de livraison et d'installation (8-1 des CG).
[*]
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions du 21 décembre 2020, la société Viatelease a présenté les demandes suivantes :
Vu l'article 1134 (ancien)et 1193 (nouveau) du Code civil
Vu l'article 1116 (ancien) du Code civil
Vu l'article 1138 du Code civil
Vu l'article L. 441-6 du Code de commerce
Vu les pièces versées aux débats
- DÉBOUTER la Commune de CHAMPIGNY-LE-SEC de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en appel ;
- CONFIRMER le jugement du 5 février 2019 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :
- qualifié de clause pénale l'indemnité de résiliation visée à l'article 12.3 des conditions générales de location du contrat du 18 mars 2016 et en a minoré le montant;
- débouté la société VIATELEASE de sa demande de paiement de l'indemnité forfaitaire de frais de recouvrement sur le fondement de l'article L. 441-6 du code de commerce;
STATUANT À NOUVEAU :
- CONDAMNER la Commune de CHAMPIGNY-LE-SEC à payer à la société VIATELEASE les sommes suivantes :
- Les loyers à échoir 9.792,00 euros
- Clause pénale 6 % 587,52 euros
Avec intérêts au taux contractuel (3 fois le taux d'intérêt légal) outre la capitalisation des intérêts à compter de la mise en demeure, soit le 20 avril 2017
- L'indemnité compensatrice de frais de recouvrement 120,00 euros
EN TOUT ÉTAT DE CAUSE
- CONDAMNER la Commune de CHAMPIGNY-LE-SEC à payer à la société VIATELEASE une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Marie C., Avocat, qui pourra les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
A l'appui de ses prétentions, le bailleur soutient notamment que :
- Le locataire a attesté de la bonne réception du matériel, a confirmé le bon fonctionnement le 21 mars 2016.
- La société Viatelease n'était pas présente lors de la signature du contrat de location.
- Elle n'a pas commis de faute à consentir un contrat de location au vu d'un bon de commande confirmé par un bon de livraison.
- Le nouveau matériel pouvait faire double emploi. La société Viatelease n'en est pas responsable. Elle a signé un seul contrat avec la commune.
- Les manœuvres dolosives sont imputées à la société Myvisioprotect, ne sont pas démontrées.
- Le mensonge doit être établi. Le second contrat de location a été présenté par Mme G.
- Le délai de réflexion n'est pas légalement prévu au bénéfice de la commune qui pouvait néanmoins réfléchir et ne pas signer immédiatement le contrat.
- Le bailleur est sans lien avec le fournisseur. La société Myvisioprotect n'est pas mandatée par Viatelease.
- Le client donne mandat à Viatelease de rechercher un établissement financier qui acquiert le matériel pour le lui louer.
- La société Viatelease a acquis les défibrillateurs auprès de la société Myvisioprotect, société distincte de Mydefib. Si une faute a été commise, c'est la commune qui connaissait ses obligations antérieures à l'égard de la société G.
- La législation sur les clauses abusives est exclue, est inapplicable aux contrats qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle.
- Elle conteste l'existence de clause abusive.
- La faculté de résiliation n'est pas discrétionnaire. Le locataire a la même faculté prévue à l'article 12.2 du contrat.
- Bien que la commune ait cessé de payer dès l'émission de la seconde facture, elle n'a toujours pas restitué le matériel.
- La majoration de 6 %, soit 489,60 euros a bien été calculée sur le montant HT et non TTC.
- Elle n'est pas une clause pénale susceptible de réduction.
- L'article L. 441-6 du code du commerce s'applique aux factures émises avant la résiliation les 15 08, 15 11 2016, 15 02 2017, 18 05 2017. Elle demande 40 euros X 4 = 140 euros.
- Le locataire devait restituer le matériel immédiatement (12;3) sur simple demande de celui-ci.
- Le contrat prévoit que les frais de restitution sont à la charge du locataire.
[*]
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
L'ordonnance de clôture est du 28 décembre 2019.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur la nullité du contrat de bail :
L'article 1116 ancien du code civil dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il est de droit constant applicable à la date du contrat que le dol provoqué par un tiers ou un mandataire est susceptible d'entraîner la nullité du contrat.
La commune soutient qu'elle a été victime d'un dol qu'elle impute à Mme G., représentant du fournisseur, la société Myvisioproject.
Elle affirme que le maire a été démarché le 18 mars 2016 par la société Myvisioprotect, société qui lui a indiqué qu'elle remplaçait la société Mydefib.
Elle soutient que Mme G. s'était engagée, avait garanti le transfert de l'ancien contrat de location avec la société G.
Elle affirme que ce représentant était mandaté à la fois par le bailleur et par le fournisseur, qu'elle avait connaissance du contrat antérieur déjà souscrit par la commune.
La commune produit une attestation rédigée par le maire qui indique « avoir reçu le 18 mars 2016 Mme G. et M. K. qui nous ont présenté dans la hâte le transfert du contrat de location des défibrillateurs. Mme G. a expliqué que cette signature n'était qu'une simple formalité. Ils nous ont assuré que le transfert se ferait automatiquement. »
Mme L., rédactrice à la mairie a adressé un courriel à la société chargée de recouvrer la créance pour le compte de Viatelease le 23 février 2017.
Elle indique que Mme G. a informé la mairie que désormais la société chargée de louer le matériel était Viatelease et non plus G., que la société MyVisioprotect se chargeait de transférer le contrat de location de G. à Viatelease.
La commune affirme, mais ne démontre nullement que Mme G. ait promis, assuré que le contrat de location Viatelease allait remplacer le contrat de location G., ni qu'elle se soit présentée comme le représentant du fournisseur et du bailleur, ce qui ne ressort pas des documents contractuels signés le 18 mars.
La commune n'explique pas comment Mme G., représentant du fournisseur aurait pu s’engager pour le compte de la société G., loueur, tiers au nouveau contrat de location conclu.
La société Viatelease a fait valoir à juste titre que le contrat était clair s'agissant de l'identité des parties, loueur, locataire, fournisseur, que rien ne permettait de penser que la société Viatelease venait aux droits de la société G.
Force est de relever que la commune ne justifie pas avoir restitué ou tenté de restituer les anciens défibrillateurs loués à la société G., ce qui eût été logique dans l'hypothèse d'un transfert, d'une substitution de contrat. Elle a pris livraison des deux nouveaux défibrillateurs loués.
Elle ne justifie pas s'être rapprochée officiellement des sociétés Viatelease ou G. afin d'éclaircir le malentendu allégué.
Elle soutient avoir découvert à réception des factures qu'elle devait régler deux loueurs, situation qui n'avait pourtant rien de surprenant au regard du nombre de défibrillateurs loués, livrés et conservés.
Contrairement à ce que la commune soutient, elle ne peut reprocher au loueur de ne pas s'être assuré « qu'il finançait une prestation réelle ».
La commune était la mieux placée pour connaître ses besoins, les contrats déjà souscrits, leur durée, ne peut faire grief au loueur de lui avoir loué un matériel surnuméraire dont elle n'avait pas en fait besoin.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la commune de sa demande de nullité du contrat de location pour dol, des demandes consécutives de restitution des loyers et frais de livraison réglés.
Sur la nullité des clauses abusives entachant le contrat :
La commune demande à la cour de prononcer la nullité des clauses relatives à la résiliation du contrat au motif qu'elles seraient illicites dans la mesure où seul le loueur pourrait résilier le contrat et cela de manière unilatérale et discrétionnaire, où les indemnités contractuelles qui sont prévues en cas de résiliation du contrat seraient manifestement disproportionnées.
La société Viatelease fait valoir à juste titre que la commune a contracté pour les besoins de son activité, que les dispositions du code de la consommation dont la commune se prévaut concernent les non-professionnels et les consommateurs, qu'elles ne sont pas applicables en l'espèce.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que la location des défibrillateurs était en lien avec les missions de service public de la commune dans la mesure où ils ont pour finalité la sécurité des usagers de la mairie, des locaux annexes municipaux, en lien avec les fonctions de la commune, et en conséquence dit sans objet les demandes de nullité des clauses contractuelles relatives à la résiliation.
Sur la réduction de l'indemnité de résiliation :
L'article 12-3 du contrat stipule : En cas de résiliation du contrat pour quelque cause que ce soit, le locataire versera immédiatement au loueur, sans mise en demeure préalable, outre les loyers échus impayés et tous leurs accessoires une indemnité égale à la somme des loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat taxes en sus.
L'indemnité ci-dessus calculée portera intérêt au taux conventionnel de 1,50 % par mois à compter du jour de la résiliation sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure et il sera fait application de l'article 1154 du code civil.
A titre de pénalité pour inexécution du contrat, le locataire paiera en sus au loueur une somme égale à 6 % du montant HT de l'indemnité de résiliation stipulée ci-dessus.
Dans l'éventualité de résiliation du contrat, quelle qu'en soit la cause, le locataire devra restituer immédiatement l'équipement au loueur sur simple demande de celui-ci ; dans les conditions de l'article 16 ci-après.
La restitution du matériel à ses frais et risques incluant démontage, emballage transport, visites techniques.
Le premier juge a estimé que l'indemnité de résiliation correspondant aux loyers à échoir, majorés de 6 %, s'analyse en une clause pénale, apparaît manifestement excessive, l'a réduite à la somme de 8.000 euros.
Il a rappelé que le loueur obtenait la totalité des loyers prévus majorés d'une indemnité de 6 % sur les loyers à échoir, la restitution du matériel acquis pour un prix de 9.089,47 euros après deux années d'un contrat conclu pour une durée de 63 mois.
Le loueur soutient que la clause n'est pas une clause pénale susceptible de réduction.
L'article 1152 ancien du code civil dispose : Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.
Il est constant que la clause pénale est une stipulation contractuelle qui sanctionne l'inexécution d'une obligation qui présente un caractère forfaitaire sans lien avec l'étendue réelle du préjudice.
Le caractère manifestement excessif ou non de la clause doit être objectivement apprécié. Il ne peut résulter que de la comparaison entre le préjudice effectivement subi et le montant de l'indemnité prévue.
La clause de résiliation qui prévoit que les loyers à échoir jusqu'au terme fixé par le contrat deviendront exigibles constituent en réalité une clause pénale en ce qu'elle entraîne une majoration des charges financières pesant sur le débiteur et a été stipulée à la fois comme un moyen de contraindre le débiteur à l'exécution et comme une évaluation forfaitaire du préjudice futur subi par le bailleur consécutivement à l'interruption des paiements futurs.
En l'espèce, le montant des sommes demandées s'élève à 10.379,52 euros (9.792 + 587,52 euros). S'y ajoutent des intérêts au taux contractuel (3 x le taux d'intérêt légal), la capitalisation des intérêts.
La majoration de 6 % doit être fixée à la somme de 489,60 euros (6% de 8.160 euros HT) ainsi que le soutient l'appelante.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a modéré l'indemnité de résiliation qui est excessive au regard du préjudice subi et l'a fixée à la somme de 8.000 euros.
Sur l'application de l'article L. 441-6 du code du commerce :
Il ressort des pièces produites que 4 factures impayées émises les 15 08,15 11 2016, 15 02, 18 5 2017 portent effectivement sur des loyers impayés.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a débouté la société Viatelease de sa demande de condamnation au paiement d'une somme de 120 euros.
Sur les autres demandes :
La demande de capitalisation des intérêts a été formée lors de l'assignation du 22 décembre 2017. Le délai d'une année court à compter de l'assignation et non de la mise en demeure du 20 avril 2017.
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...). »
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de l'appelante.
Il est équitable de condamner l'appelante à payer à l'intimée la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort
- Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- débouté la société Viatelease de sa demande d'indemnité forfaitaire de recouvrement
Statuant de nouveau sur les points infirmés :
- Condamne la commune de Champigny le Sec à payer à la société Viatelease la somme de 120 euros
Y ajoutant :
- Dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt
- Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
- Condamne la commune de Champigny en Rochereau aux dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître C.
- Condamne la commune de Champigny Le Sec à payer à la société Viatelease la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
- 5878 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : besoins de l’activité
- 5905 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Protection et sécurisation de l’activité
- 5956 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Autres contrats