CA CHAMBÉRY (2e ch.), 27 mai 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8956
CA CHAMBÉRY (2e ch.), 27 mai 2021 : RG n° 19/01334
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Il convient de relever que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens de ce texte, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. A cet égard, la Cour de justice de l'Union Européenne a dit pour droit que l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que la notion d'« objet principal du contrat », couvre une clause contractuelle insérée dans un contrat de prêt libellé en devise étrangère, n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle et selon laquelle le prêt doit être remboursé dans la même devise étrangère que celle dans laquelle il a été contracté, dès lors que cette clause fixe une prestation essentielle caractérisant ce contrat et que, par conséquent, cette clause ne peut pas être considérée comme étant abusive, pour autant qu'elle soit rédigée de façon claire et compréhensible (arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a.C-186/16).
En l'espèce, les clauses discutées (montant du prêt en CHF et modalités de remboursement des échéances) constituent bien l'objet principal du contrat des prêts immobiliers souscrits entre les appelants et l'intimée et ne peuvent donc être considérées comme abusives que si elles ne sont pas rédigées de façon claire et compréhensible. Il est tout aussi constant que le caractère abusif d'une clause s'apprécie au regard de toutes les circonstances qui entourent la conclusion du contrat au moment où il est conclu et de toutes les autres clauses du contrat. […]
Il convient de constater qu'il s'agit de clauses parfaitement claires concernant des prêts consentis en francs suisses, remboursables dans la même devise par des emprunteurs qui, de surcroît, percevaient leurs revenus en francs suisses au temps de la conclusion des contrats. Il n'existait donc, aux termes des contrats litigieux, aucun risque de change au préjudice des emprunteurs lesquels ont fait le choix en toute conscience, pour financer l'achat d'un bien immobilier situé en France, de recourir à un prêt en devises, remboursable en devises. Il sera observé, pour le surplus, que la jurisprudence, nationale ou européenne citée par les appelants au soutien de leurs prétentions, se rapporte à des prêts libéllés dans une devise étrangère mais remboursables dans la devise nationale, situation ne correspondant pas au cas d'espèce.
En conséquence, il convient de dire, à la suite du premier juge, que les clauses litigieuses ne présentent pas de caractère abusif au sens du code de la consommation. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point. »
2/ « Il est constant que la demande d'interprétation soumise à la Cour de Justice de l'Union Européenne tend au renvoi de l'affaire devant cette Cour pour interprétation des textes communautaires et qu'elle peut donc être présentée en tout état de cause.
Toutefois, si la demande est ici recevable en la forme, elle est, en l'espèce, mal fondée. En effet, il ressort de l'article 234 précité du traité instituant la communauté européenne, que la transmission de la demande n'est qu'une faculté pour la juridiction interne sauf si l'affaire est pendante devant une juridiction rendant des décisions insusceptibles de recours juridictionnel de droit interne. Pour transmettre la question, lorsque cette transmission n'est pas obligatoire, la juridiction nationale doit estimer qu'une décision sur les points soulevés est nécessaire pour pouvoir rendre sa décision.
En l'espèce, l'arrêt rendu par la Cour de céans est susceptible d'un pourvoi en cassation, recours juridictionnel de droit interne. La transmission de la demande n'est donc pas obligatoire. Au fond, les appelants souhaitent soumettre neuf questions à la Cour de Justice de l'Union Européenne. Or, huit d'entre elles (n°1 à n°3 et n°5 à n°9) sont fondées sur la question du risque de change dont il a été dit ci-dessus, qu'il n'existait pas en l'espèce. Quant à la dernière question (n°4), elle traite du risque de déplafonnnement sans limite des mensualités lequel, à nouveau, n'est pas en cause dans le présent litige. En effet, dans les deux prêts litigieux le montant des remboursements mensuels est prévu à l'avance, les clauses de remboursement visant même expressément des montants maximum. En conséquence, une décision de la Cour de Justice de l'Union Européenne sur ce point n'est pas nécessaire à la Cour de céans pour rendre sa décision.
Il en résulte que les époux X. seront déboutés de leur demande de saisine de la Cour de Justice de l'Union Européenne et de sursis à statuer subséquente. »
3/ « Il convient toutefois de relever que ces paramètres se trouvaient parfaitement établis à la date de l'octroi du prêt étant entendu qu'il ne saurait être retenu que la banque était débitrice d'un nouveau devoir de mise en garde au titre de la suppression par la Banque Centrale Suisse du taux plancher intervenue le 15 janvier 2015, soit plus de sept et huit ans après la conclusion des prêts litigieux, ni que la banque aurait dû anticiper cette suppression lors de la souscription du contrat de crédit. De la même manière, le fait pour l'emprunteur de perdre son emploi en Suisse ne saurait générer un nouveau devoir de mise en garde à la charge du prêteur. Il apparaît ainsi que, en présence de clauses parfaitement claires et compréhensibles, aucun élément ne permet de retarder la date du point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité.
Les contrats de prêt litigieux ayant été souscrits le 13 mars 2008 et le 15 juillet 2009 et les époux X. recherchant la responsabilité de la banque dans le cadre d'une action intentée suivant assignation du 10 juillet 2017, soit plus de cinq années plus tard, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré prescrite la demande de dommages et intérêts des emprunteurs. »
4/ « Sur le fond, il convient de rappeler qu'il est constant que constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne. Dans un contrat de prêt immobilier, l'emprunteur doit restituer les fonds prêtés dans leur intégralité, les intérêts conventionnellement prévus étant versés à titre de rémunération de ces fonds. Ainsi, dès lors que les parties n'ont pas entendu déroger aux règles du code civil, le prêteur ne peut être tenu, même temporairement, au paiement d'une quelconque rémunération à l'emprunteur.
En l'espèce, la clause litigieuse prévoit un « taux fixe de 3,70 % p.a. pendant les 5 premières années » et un « taux Libor CHF à un an + une marge fixe p.a. pour les années suivantes dès la sixième année ». Il en résulte que la rémunération de la banque se trouvait calculée, à compter de la sixième année, sur la base de deux éléments cumulatifs : le taux Libor à un an et la marge fixe. Le second doit rester, comme son nom l'indique, invariable. Quant au premier, la banque ne pouvait le prendre en compte en dessous de zéro, sauf à admettre l'éventualité d'intérêts mensuellement négatifs ce qui n'est pas possible, même de façon temporaire, en l'absence d'accord exprès entre les parties. »
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 27 MAI 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/01334. N° Portalis DBVY-V-B7D-GISJ. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de THONON-LES-BAINS en date du 28 mai 2019, R.G. n° 17/01127.
Appelants :
M. X.
né le [date] à [ville],
et
Mme Y. épouse X.
née le [date] à [ville],
demeurant [adresse], Représentés par Maître Aline B., avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL D., avocat plaidant au barreau de VERSAILLES
Intimée :
SA CRÉDIT AGRICOLE NEXT BANK
dont le siège social est sis [...] prise en la personne de son représentant légal, Représentée par la SELARL JULIETTE C.-B. LEXAVOUE CHAMBERY, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELAS FIDUCIAL LEGAL BY LAMY, avocat plaidant au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 30 mars 2021 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par : - Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, - Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, - Monsieur Fabrice GAUVIN, Vice-Président Placé, qui a procédé au rapport
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le Crédit Agricole Financement, banque suisse, aux droits duquel intervient aujourd'hui le Crédit Agricole Next Bank (Suisse) a consenti à Madame X., née Y. et à Monsieur X. (ci-après, les époux X.), résidents français percevant alors des revenus en francs suisses, deux crédits :
- un crédit IM 001XX19 accepté en mars 2008 pour un montant de 296.000 CHF, destiné à financer l'achat d'une résidence principale à [ville V.] et comportant deux tranches :
- une première tranche de 137.000 CHF remboursable en 25 ans en amortissement direct linéaire,
- une seconde tranche de 159.000 CHF remboursable en 30 ans en amortissement indirect.
Le taux d'intérêt était calculé sur la base d'un taux fixe de 3,70 % l'an pendant 5 ans, suivi d'un taux « Libor » CHF à un an, plus une marge de 0,80 % l'an, à partir de la 6ème année.
Ce crédit a fait l'objet d'un avenant en date du 21 juillet 2009 portant modification du taux d'intérêt et d'un avenant en date du 26 juin 2015 précisant que la seconde tranche serait soumise, à compter du 1er août 2015, à un amortissement linéaire direct.
- un crédit IM 002ZZ59 accepté en juillet 2009 pour un montant de 46.000 CHF destiné à financer des travaux dans la résidence de [ville V.]. Ce prêt était remboursable en 24 ans avec un taux « Libor » CHF à 3 mois, soit 1,17 % comprenant une marge fixe de 0,80 % l'an.
Par acte en date du 10 juillet 2017, les époux X. ont fait assigné le Crédit Agricole Next Bank devant le Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains en arguant de manquements de la banque à ses obligations, en soutenant à titre principal le caractère abusif des clauses « montant du prêt en CHF » et « modalités de paiement des échéances » et à titre subsidiaire, le manquement au devoir de mise en garde.
Par jugement en date du 28 mai 2019, le Tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains a :
- constaté que l'action en responsabilité au titre du devoir de mise en garde de la banque était prescrite au 19 juin 2013 pour le prêt n° IM001XX19 et en juillet 2014 pour le prêt n° IM002ZZ59,
- en conséquence, déclaré irrecevable cette action en responsabilité,
- constaté que l'action en nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts pour le prêt n° IM001XX19 était prescrite au 19 juin 2013,
- en conséquence déclaré irrecevable cette action,
- débouté les époux X. du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné les époux X. aux dépens, avec distraction au profit de Maître Carine A. G.
Par déclaration au greffe en date du 9 juillet 2019, les époux X. ont interjeté appel de la décision.
[*]
Par conclusions n° 4 notifiées par voie électronique le 2 février 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, les époux X. ont demandé à la Cour de :
- reporter la clôture,
- renvoyer l'affaire à une prochaine audience,
A défaut,
- infirmer le jugement attaqué, et statuant à nouveau,
- juger que les clauses « montant du prêt en CHF » et « modalités de paiement des échéances » ou l'ensemble de ces clauses qui figurent dans les offres de prêt du 13 mars 2008 et du 15 juillet 2009, ne sont pas claires et compréhensibles et créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties,
- juger que les clauses « montant du prêt en CHF » et « modalités de paiement des échéances » ou l'ensemble de ces clauses qui figurent dans les offres de prêt du 13 mars 2008 et du 15 juillet 2009, sont abusives et sont réputées non écrites,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à communiquer aux époux X. :
- deux nouveaux tableaux d'amortissement, afférents aux deux tranches du prêt du 13 mars 2008 de 137.000 CHF et de 159.000 CHF, au même taux et sur la même durée de 25 ans pour la 1ère tranche de 137.000 CHF et de 30 ans pour la 2nde tranche de 159.000 CHF, avec substitution de l'euro au franc suisse, prenant en compte le nouveau capital restant dû, déduction faite des échéances déjà versées réactualisées au cours de change au 9 avril 2008, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
- un nouveau tableau d'amortissement afférent au prêt du 15 juillet 2009 d'un montant de 46.000 CHF, au même taux et sur la même durée de 288 mois, avec substitution de l'euro au franc suisse, prenant en compte le nouveau capital restant dû, déduction faite des échéances déjà versées réactualisées au cours de change au 15 juillet 2009, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
A titre subsidiaire :
- juger recevable et bien fondée la demande tendant à soumettre à la Cour de justice de l'Union Européenne en vue de l'interprétation des traités européens des questions préjudicielles,
- soumettre à la Cour de justice de l'Union Européenne en vue de l'interprétation des traités européens les questions préjudicielles suivantes ou toutes autres questions qui lui sembleront pertinentes :
- 1 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle visé par la directive 93/13 doit-il s'entendre en ce sens que la banque est tenue de préciser explicitement par une clause l'existence, en cas de perte de ressources en devise, d'une variation permanente du taux de change, notamment lorsque les emprunteurs sont en zone euro, et que cette variation a pour conséquence de créer au seul détriment du consommateur un risque illimité de change et que ce risque de change a pour conséquence de faire varier de manière illimité le capital à rembourser ainsi que la valeur de ses remboursements ou la description du mécanisme contractuel conduisant à ces effets, comme c'est le cas en l'espèce »,
- 2 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle visé par la directive 93/13 doit-il s'entendre en ce sens que le juge national se limite à contrôler formellement la rédaction des clauses du contrat, comme en l'espèce, sans s'assurer qu'une clause rende concret et explicite et puisse évaluer les conséquences économiques du risque de change lui-même »,
- 3 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle visé par la directive 93/13 est-il compatible avec l'absence d'information chiffrée sur l'évolution du capital à rembourser, des mensualités, ou encore de la durée du crédit, afin de permettre au consommateur de comprendre concrètement son exposition au risque de change, notamment en l'absence d'une clause explicitant l'existence d'un risque de change »,
- 4 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle visé par la directive 93/13 n'impose-t-il pas au banquier d'attirer l'attention du consommateur sur le risque d'un déplafonnement sans limite des mensualités, ou revient-il au consommateur de déduire ce déplafonnement des autres clauses du contrat »,
- 5 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle visé par la directive 93/13 n'impose-t-il pas au banquier de rendre explicite et concret par une clause les modalités de réalisation et de paiement du risque de change, en l'espèce par l'augmentation du capital sans limite et un déplafonnement sans limite des mensualités de remboursement »,
- 6 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle visé par la directive 93/13 n'impose-t-il pas au banquier d'attirer l'attention du consommateur sur le risque de ne pouvoir rembourser un tel crédit hypothécaire lorsque le capital augmente du fait de la réalisation du risque de change et devient sans rapport avec la valeur du bien immobilier financé en France par le biais d'un prêt en devise »,
- 7 « Le caractère clair et compréhensible d'une clause contractuelle, ainsi que l'exigence de bonne foi, visés par la directive 93/13, n'imposent-ils pas au juge national de s'assurer que le professionnel a bien informé le consommateur sur les anticipations de marché, ou les propres anticipations de la banque en matière de taux de change, spécialement lorsque le crédit est commercialisé en période de crise économique telle que celle des subprimes comme en l'espèce, et partant a bien informé sur les perspectives d'exécution du contrat, notamment sur la réalisation du risque de change ' À l'inverse, revient-il au consommateur, notamment lorsqu'il est situé en zone euro, de se documenter sur l'évolution du risque de change »,
- 8 « Dans l'hypothèse de l'absence de transparence de la clause telle qu'examinée au principal, le fait que le consommateur supporte entièrement, sans limite et seul, le risque de change qui résulte de l'application de cette clause, est-il constitutif d'un déséquilibre significatif imposant que le consommateur ne soit pas lié par la stipulation abusive au sens de la directive 93/13 »,
- 9 « L'existence d'un déséquilibre significatif peut-il être caractérisé dans un contrat tel que celui en cause au principal dans lequel les deux parties subissent un risque de change, dès lors que, d'une part, le professionnel dispose de moyens supérieurs au consommateur pour anticiper le risque de change »,
- prononcer un sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de Justice de l'Union Européenne se soit prononcée sur lesdites questions,
En tout état de cause :
- juger que le Crédit Agricole Next Bank a manqué à son obligation de mise en garde des époux X. ce qui leur a causé un préjudice important,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à verser aux époux X. la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son manquement au devoir de mise en garde,
sur l'application de l'indice Libor,
- déclarer la demande relative à l'application de l'indice Libor recevable,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à appliquer au prêt 296.000 CHF souscrit par les époux X. un taux d'intérêt déterminé après application de l'indice Libor réel (même négatif) auquel est additionné la marge de 0,80 %, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à rembourser aux époux X. les sommes dues en application de l'indice Libor réel, augmenté de la marge de 0,80 % de février 2015 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir selon décompte à établir par la banque,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à fournir aux époux X. un tableau d'amortissement conforme à la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard et par document à compter de la décision à intervenir,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à verser aux époux X. la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son manquement contractuel,
Sur le manquement de la banque relatif au calcul des intérêts sur 360 jours au lieu de l'année civile dans l'offre de prêt du 13 mars 2008 de 296.000 CHF :
- juger que les époux X. sont recevables en leur action,
- constater que les intérêts ont été calculés sur 360 jours et non sur l'année civile,
- prononcer la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts de l'offre de prêt du 13 mars 2008,
- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel,
- condamner en conséquence le Crédit Agricole Next Bank à payer aux époux X. la somme de 57.166,44 euros,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à payer aux époux X. les sommes dues au titre de la substitution des intérêts au taux légal aux intérêts contractuels à compter du mois de janvier 2017 jusqu'au jugement à intervenir, suivant décompte à communiquer par la banque,
- ordonner au Crédit Agricole Next Bank de substituer le taux d'intérêt légal au taux conventionnel pour les échéances restantes postérieures au jugement et jusqu'au complet remboursement du prêt,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à établir un nouveau tableau d'amortissement conforme, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, avec substitution du taux légal au taux d'intérêt contractuel,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank à payer la somme de 6.000 euros aux époux X. au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le Crédit Agricole Next Bank aux entiers dépens,
- débouter le Crédit Agricole Next Bank de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens
[*]
Par conclusions n° 4, notifiées par voie électronique le 1er février 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens le Crédit Agricole Next Bank demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
- juger que la demande de sursis à statuer est irrecevable et infondée ou, subsidiairement la rejeter,
- juger que la demande se rapportant à l'indice Libor est irrecevable comme nouvelle à hauteur d'appel,
- en toute hypothèse, rejeter toutes les demandes, fins et conclusions des époux X.,
- débouter les époux X. de leurs demandes,
- condamner les époux X. à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Juliette C.-B., avocat, sur son affirmation de droit.
[*]
Par conclusions d'incident notifiées par voie électronique le 1er février 2021, les époux X. ont demandé à la Cour de surseoir à statuer dans l'attente de décisions de la Cour de justice de l'Union Européenne.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 février 2021, le Crédit Agricole Next Bank a demandé à la Cour de rejeter comme irrecevable la demande de sursis à statuer et de condamner les époux X. à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance en date du 11 mars 2021 le conseiller de la mise en état de la 2ème Chambre civile de la Cour d'appel de céans a déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer présentée le 1er février 2021 par les époux X., les a condamnés solidairement aux dépens de l'incident et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 mars 2021.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre liminaire, il convient de relever que les contrats litigieux datant des 13 mars 2008 et 15 juillet 2009, il sera fait application, pour le code civil, des règles dans leur version antérieure à la réforme opérée par l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, en application de son article 9 diposant que les contrats conclus avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur des dispositions nouvelles, demeurent soumis à la loi ancienne.
1°) Sur la demande de report de l'ordonnance de clôture et de renvoi de l'affaire :
Il convient de relever que cette demande présentée le 2 février 2021 est devenue sans objet, la clôture étant intervenue le 18 mars 2021.
2°) Sur le caractère abusif des clauses « montant du prêt en CHF » et « modalités de paiement des échéances » :
L'article L. 132-1 ancien du code de la consommation, applicable au temps de la conclusion des prêts litigieux (aujourd'hui article L 212-1 du Code de la consommation), dispose que : « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».
Il convient de relever que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens de ce texte, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. A cet égard, la Cour de justice de l'Union Européenne a dit pour droit que l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que la notion d'« objet principal du contrat », couvre une clause contractuelle insérée dans un contrat de prêt libellé en devise étrangère, n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle et selon laquelle le prêt doit être remboursé dans la même devise étrangère que celle dans laquelle il a été contracté, dès lors que cette clause fixe une prestation essentielle caractérisant ce contrat et que, par conséquent, cette clause ne peut pas être considérée comme étant abusive, pour autant qu'elle soit rédigée de façon claire et compréhensible (arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a.C-186/16).
En l'espèce, les clauses discutées (montant du prêt en CHF et modalités de remboursement des échéances) constituent bien l'objet principal du contrat des prêts immobiliers souscrits entre les appelants et l'intimée et ne peuvent donc être considérées comme abusives que si elles ne sont pas rédigées de façon claire et compréhensible. Il est tout aussi constant que le caractère abusif d'une clause s'apprécie au regard de toutes les circonstances qui entourent la conclusion du contrat au moment où il est conclu et de toutes les autres clauses du contrat.
Les époux X. exposent que les clauses litigieuses ne sont pas claires dans la mesure où elles ne les mettent pas en mesure de connaître la possibilité de hausse ou de baisse de la devise étrangère dans laquelle le prêt a été contracté ni de connaître les conséquences économiques d'une telle clause sur leurs obligations financières. Ils se plaignent de l'absence d'information personnalisée sur les risques encourus dans le cadre d'un prêt en devises (possibilité de hausse ou de dépréciation de la devise / risques liés aux disparités de change / augmentation du capital). Ils expliquent que, s'agissant d'un prêt en francs suisses pour un bien acheté en France, le prêt n'est plus en rapport avec le bien financé en raison de la dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse. Ils jugent ainsi les clauses comme n'étant ni claires ni compréhensibles et ajoutent qu'elles entraînent bien un déséquilibre significatif à leur préjudice dans la mesure où la banque dispose, à la différence du consommateur, de moyens lui permettant d'absorber le risque en question. Pour le surplus, ils indiquent que le contrat ne dit pas comment serait déterminé le cours du change et ne donne pas d'information sur le risque d'augmentation du capital restant dû.
Il convient de relever que le prêt souscrit en 2008 indique (pièce appelant n°1) :
- dans la clause « montant du prêt » : CHF 296'000.00, francs suisses dont 1ère tranche CHF 137'000.00 soumis à un amortissement linéaire, 2ème tranche CHF 159'000.00 francs suisses soumis à un amortissement direct,
- dans la clause « modalité de paiement des échéances » : pour la première tranche « paiement de 300 échéances d'au maximum CHF 704.45 (intérêts plus capital) et pour la deuxième tranche » paiement mensuel de 359 échéances d'au maximum CHF 506.60 calculées sur le capital restant dû.
Le prêt souscrit en 2009 indique (pièce appelant n°4) :
- dans la clause « montant du prêt » : CHF 46'000.00 francs suisses soumis à un amortissement linéaire,
- dans la clause « modalités de paiement des échéances » : paiement mensuel de 288 échéances d'au maximum CHF 873.00 (intérêts plus capital).
Il convient de constater qu'il s'agit de clauses parfaitement claires concernant des prêts consentis en francs suisses, remboursables dans la même devise par des emprunteurs qui, de surcroît, percevaient leurs revenus en francs suisses au temps de la conclusion des contrats. Il n'existait donc, aux termes des contrats litigieux, aucun risque de change au préjudice des emprunteurs lesquels ont fait le choix en toute conscience, pour financer l'achat d'un bien immobilier situé en France, de recourir à un prêt en devises, remboursable en devises. Il sera observé, pour le surplus, que la jurisprudence, nationale ou européenne citée par les appelants au soutien de leurs prétentions, se rapporte à des prêts libéllés dans une devise étrangère mais remboursables dans la devise nationale, situation ne correspondant pas au cas d'espèce.
En conséquence, il convient de dire, à la suite du premier juge, que les clauses litigieuses ne présentent pas de caractère abusif au sens du code de la consommation. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
3°) Sur la demande de sursis à statuer et de soumission de questions préjudicielles à la Cour de Justice de l'Union Européenne :
L'article 234 du traité instituant la communauté européenne dispose que : « la Cour de justice est compétente pour statuer, à titre préjudiciel :
a) sur l'interprétation du présent traité ;
b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions de la Communauté et par la BCE ;
c) sur l'interprétation des statuts des organismes créés par un acte du Conseil, lorsque ces statuts le prévoient.
Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de justice de statuer sur cette question.
Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour de justice ».
Il est constant que la demande d'interprétation soumise à la Cour de Justice de l'Union Européenne tend au renvoi de l'affaire devant cette Cour pour interprétation des textes communautaires et qu'elle peut donc être présentée en tout état de cause.
Toutefois, si la demande est ici recevable en la forme, elle est, en l'espèce, mal fondée. En effet, il ressort de l'article 234 précité du traité instituant la communauté européenne, que la transmission de la demande n'est qu'une faculté pour la juridiction interne sauf si l'affaire est pendante devant une juridiction rendant des décisions insusceptibles de recours juridictionnel de droit interne. Pour transmettre la question, lorsque cette transmission n'est pas obligatoire, la juridiction nationale doit estimer qu'une décision sur les points soulevés est nécessaire pour pouvoir rendre sa décision.
En l'espèce, l'arrêt rendu par la Cour de céans est susceptible d'un pourvoi en cassation, recours juridictionnel de droit interne. La transmission de la demande n'est donc pas obligatoire. Au fond, les appelants souhaitent soumettre neuf questions à la Cour de Justice de l'Union Européenne. Or, huit d'entre elles (n°1 à n°3 et n°5 à n°9) sont fondées sur la question du risque de change dont il a été dit ci-dessus, qu'il n'existait pas en l'espèce. Quant à la dernière question (n°4), elle traite du risque de déplafonnnement sans limite des mensualités lequel, à nouveau, n'est pas en cause dans le présent litige. En effet, dans les deux prêts litigieux le montant des remboursements mensuels est prévu à l'avance, les clauses de remboursement visant même expressément des montants maximum. En conséquence, une décision de la Cour de Justice de l'Union Européenne sur ce point n'est pas nécessaire à la Cour de céans pour rendre sa décision.
Il en résulte que les époux X. seront déboutés de leur demande de saisine de la Cour de Justice de l'Union Européenne et de sursis à statuer subséquente.
4°) Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de mise en garde :
L'article 2224 du code civil dispose que : « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ». La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Le dommage résultant d'un manquement de la banque à son obligation de mise en garde consiste en une perte de chance de ne pas contracter.
Les appelants soutiennent que le délai de prescription n'a commencé à courir qu'au jour où le dommage qu'ils subissent leur a été révélé. Ils exposent que c'est à compter de l'envolée du franc suisse par rapport à l'euro en 2015 et à la perte de son emploi par Monsieur X. en 2016, qu'ils ont eu conscience des conséquences du changement de parité, de sorte que leur action, initiée en 2017, ne serait pas prescrite. Ils reprochent donc, en substance, à la banque suisse de ne pas les avoir mis en garde contre le risque de change inhérent à un contrat de prêt consenti, en francs suisses et remboursable en francs suisses, alors que l'un et l'autre travaillaient, au moment du prêt, en Suisse et étaient rémunérés en francs suisses.
Il convient toutefois de relever que ces paramètres se trouvaient parfaitement établis à la date de l'octroi du prêt étant entendu qu'il ne saurait être retenu que la banque était débitrice d'un nouveau devoir de mise en garde au titre de la suppression par la Banque Centrale Suisse du taux plancher intervenue le 15 janvier 2015, soit plus de sept et huit ans après la conclusion des prêts litigieux, ni que la banque aurait dû anticiper cette suppression lors de la souscription du contrat de crédit. De la même manière, le fait pour l'emprunteur de perdre son emploi en Suisse ne saurait générer un nouveau devoir de mise en garde à la charge du prêteur. Il apparaît ainsi que, en présence de clauses parfaitement claires et compréhensibles, aucun élément ne permet de retarder la date du point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité.
Les contrats de prêt litigieux ayant été souscrits le 13 mars 2008 et le 15 juillet 2009 et les époux X. recherchant la responsabilité de la banque dans le cadre d'une action intentée suivant assignation du 10 juillet 2017, soit plus de cinq années plus tard, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré prescrite la demande de dommages et intérêts des emprunteurs.
5°) Sur la violation des stipulations de l'offre de prêt quant à l'application de l'indice Libor :
Les appelants soutiennent que la banque aurait dû, s'agissant du prêt de 296.000 CHF souscrit le 13 mars 2008, faire application de l'indice Libor, y compris lorsque ce dernier est devenu négatif en 2015. Ils exposent que l'application du taux Libor à 12 mois ne pouvait pas conduire à un taux négatif dès lors que l'on applique le taux sur la marge fixe de 0,8 % de la banque. Ils expliquent enfin que cette demande n'est pas nouvelle au sens de l'article 565 du code de procédure civile dès lors qu'il avait été demandé en première instance la restitution d'une partie des intérêts versés en raison d'un taux effectif global erroné et que la demande en appel tend donc aux mêmes fins.
La banque estime, quant à elle, que la demande est irrecevable comme développée pour la première fois en cause d'appel et tendant en réalité à obtenir un nouveau calcul de la créance outre l'octroi de dommages et intérêts au titre d'un préjudice distinct des préjudices allégués en première instance. Au fond, l'intimée rappelle que le contrat de crédit est un contrat à titre onéreux et que, sauf accord exprès des parties il ne peut être fait application d'un taux d'intérêt mensuellement négatif. Elle ajoute qu'elle avait contractualisé une marge fixe de 0,8 % correspondant à sa rémunération fixe et ne pouvant donc pas être amputée par l'effet de l'indice devenu négatif.
L'article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Selon l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
En l'espèce, la demande relative à l'application de l'indice Libor tend bien aux mêmes fins que les demandes présentées en première instance c'est-à-dire un nouveau calcul global des sommes dues par les emprunteurs. Les époux X. avaient en effet présenté cette demande sous couvert de la substitution, dans les contrats de prêts, de l'euro au franc suisse en première instance. A hauteur d'appel, tout en reprenant ce même fondement, ils soumettent également à la cour l'examen de cette demande sous couvert de l'application du taux Libor négatif. En conséquence la demande est recevable.
Sur le fond, il convient de rappeler qu'il est constant que constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne. Dans un contrat de prêt immobilier, l'emprunteur doit restituer les fonds prêtés dans leur intégralité, les intérêts conventionnellement prévus étant versés à titre de rémunération de ces fonds. Ainsi, dès lors que les parties n'ont pas entendu déroger aux règles du code civil, le prêteur ne peut être tenu, même temporairement, au paiement d'une quelconque rémunération à l'emprunteur.
En l'espèce, la clause litigieuse prévoit un « taux fixe de 3,70 % p.a. pendant les 5 premières années » et un « taux Libor CHF à un an + une marge fixe p.a. pour les années suivantes dès la sixième année ». Il en résulte que la rémunération de la banque se trouvait calculée, à compter de la sixième année, sur la base de deux éléments cumulatifs : le taux Libor à un an et la marge fixe. Le second doit rester, comme son nom l'indique, invariable. Quant au premier, la banque ne pouvait le prendre en compte en dessous de zéro, sauf à admettre l'éventualité d'intérêts mensuellement négatifs ce qui n'est pas possible, même de façon temporaire, en l'absence d'accord exprès entre les parties.
Par conséquent les époux X. seront déboutés de leur demande au titre de l'application de l'indice Libor.
6°) Sur les manquements de la banque dans le calcul des intérêts sur 360 jours au lieu de l'année civile :
L'article 2224 du code civil dispose que : « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».
Il est constant que le point de départ de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel se situe au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global soit, s'agissant d'un prêt consenti à un consommateur ou à un non professionnel, la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur.
En l'espèce, il ressort de l'article 6 des conditions générales annexées à l'offre de prêt acceptée le 13 mars 2008 paraphées par les emprunteurs que : « les intérêts courent dès le jour de la mise à disposition des fonds. Ils sont calculés, conformément aux usances bancaires, soit nombre de jours réels / 360 jours ».
Il apparaît ainsi que, dès la signature du contrat, les appelants disposaient des éléments leur permettant de vérifier le calcul du taux effectif global. Ainsi le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date de conclusion du contrat soit le 13 mars 2008. Il ressort des éléments du dossier que l'assignation en justice a été délivrée par les époux X. à la société Crédit Agricole Next Bank (Suisse) le 10 juillet 2017, soit plus de 5 années après la conclusion du contrat.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action en nullité de la stipulation d'intérêts pour le prêt IM 001XX19.
7°) Sur les autres demandes :
Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les époux X. qui succombent seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel, Maître Juliette C.-B. étant autorisée à recouvrer directement à leur encontre, les dépens d'appel dont elle a fait l'avance, sans en avoir reçu provision, par application de l'article 699 du même code.
Il n'est pas inéquitable en l'espèce de faire supporter aux époux X. tout ou partie des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par l'intimé. Ils seront en conséquence condamnés in solidum à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Déboute Monsieur X. et Madame Y. épouse X. de leur demande de report de l'ordonnance de clôture et de renvoi de l'affaire,
Déboute Monsieur X. et Madame Y. épouse X. de leur demande de saisine de la Cour de Justice de l'Union Européenne et de la demande de sursis à statuer afférente,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute Monsieur X. et Madame Y. épouse X. de leur demande relative à l'application du taux d'indice Libor,
Condamne in solidum Monsieur X. et Madame Y. épouse X. aux dépens de première instance et d'appel, Maître Juliette C.-B. étant autorisée à recouvrer directement à leur encontre, les dépens d'appel dont elle a fait l'avance, sans en avoir reçu provision,
Condamne in solidum Monsieur X. et Madame Y. épouse X. à payer à la société Crédit Agricole Next Bank (Suisse) la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi prononcé publiquement le 27 mai 2021 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente
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