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CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 27 mai 2021

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 27 mai 2021
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 9
Demande : 18/08166
Date : 27/05/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 18/04/2018
Référence bibliographique : 5823 (crédit, application dans le temps), 5721 (L. 212-1, obligation de relever d’office), 5716 (crédit à la consommation, obligation de relever d’office), 5725 (R. 632-1, relevé d’office, prescription)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9079

CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 27 mai 2021 : RG n° 18/08166 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Au regard de sa date de conclusion, le contrat litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat. Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive ; en revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Si le contrat litigieux est antérieur à la mise en application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, il faut néanmoins observer que les dispositions de droit interne précitées sont en cohérence avec la Directive n° 2008/48/CE du 23 avril 2008 concernant les crédits à la consommation qui consacre dans sa lecture par la Cour de justice de l'Union européenne le rôle du juge dans le respect des dispositions d'un ordre public économique européen. En outre, attachée à l'expression d'une prétention, la notion de prescription est indifférente à la présentation par une partie d'un moyen de défense au fond qui ne tend qu'à faire échec à la demande de son contradicteur sans en retirer quelque autre avantage.

Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat aux articles L. 311-6 à L. 311-13 anciens dans leur rédaction applicable au litige. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 9-A

ARRÊT DU 27 MAI 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/08166 (5 pages). N° Portalis 35L7-V-B7C-B5RMD. Décision déférée à la Cour : Jugement du 7 novembre 2017 - Tribunal d'Instance d'AUBERVILLIERS – R.G. n° 11-17-000265.

 

APPELANTE :

La société SOGEFINANCEMENT

société par actions simplifiée prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège, N° SIRET : XXX, [...], [...], [...], représentée et assistée de Maître Sébastien M. G. de la SELARL C. & M.-G., avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

né le [date] au [pays], Chez Mme Y., [...], [...], DÉFAILLANT

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 avril 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente de chambre, Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller.

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT : - DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par contrat du 20 octobre 2009, la société Sogefinancement a consenti un prêt personnel à M. X. d'un montant de 16.500 euros remboursable en 84 mensualités de 259,36 euros assurance comprise au taux d'intérêt nominal annuel de 6,95 %.

Le 14 mai 2012, la société Sogefinancement a accepté un réaménagement de la dette de 12.142,78 euros en 55 mensualités d'un montant unitaire de 266,33 euros à partir du 30 juin 2012.

Saisi par la société Sogefinancement d'une action tendant principalement au paiement de mensualités impayées, le tribunal d'instance d'Aubervilliers par jugement contradictoire rendu le 7 novembre 2017 auquel il convient de se reporter a :

- constaté que la déchéance du terme est intervenue le 30 avril 2016 ;

- dit la société Sogefinancement recevable en son action ;

- dit que la société Sogefinancement est déchue de son droit aux intérêts conventionnels ;

- débouté la société Sogefinancement de toutes ses demandes en paiement ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a principalement retenu que le prêteur avait agi dans un délai utile mais n'avait pas respecté l'article L. 311-10 du code de la consommation et que les paiements effectués par l'emprunteur étant supérieurs au moment du capital emprunté restant dû, M. X. n'était plus redevable d'aucune somme.

[*]

Le 18 avril 2018, la société Sogefinancement a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 17 juillet 2018 et signifiées le 19 juillet 2018, elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit qu'elle était déchue de son droit aux intérêts conventionnels, en ce qu'il a débouté la société Sogefinancement de toutes ses demandes,

- de déclarer le moyen tenant à l'irrégularité de l'offre de crédit irrecevable,

- de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit et de fixer la date des effets de la résiliation au 7 janvier 2016,

- de condamner M. X. à payer à la société Sogefinancement la somme de 2.600,54 euros outre intérêts au taux contractuel de 6,95 % l'an à compter du 18/07/2018 en remboursement du crédit souscrit le 20 octobre 2009,

- de condamner M. X. à payer à la société Sogefinancement la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sous le visa de l'article 2222 alinéa 2 du code civil et L. 110-4 du code de commerce, l'appelant expose que le juge ne pouvait soulever d'office l'irrégularité formelle de l'offre de crédit au-delà du délai quinquennal de prescription auquel le débiteur était lui-même soumis.

Sous le visa de l'article L. 311-10 du code de la consommation, elle soutient que l'offre de crédit est conforme à la loi qui n'impose pas la mention du coût total du crédit sans assurance, en valeur absolue ; elle rappelle que l'emprunteur a été informé du coût de l'assurance facultative conformément à l'article L. 311-11 du même code.

Selon l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures de l'appelante.

[*]

Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré le 12 juin 2018 selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile, M. X. n'a pas constitué avocat.

[*]

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 avril 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Au regard de sa date de conclusion, le contrat litigieux est soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.

Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive ; en revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.

Si le contrat litigieux est antérieur à la mise en application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, il faut néanmoins observer que les dispositions de droit interne précitées sont en cohérence avec la Directive n° 2008/48/CE du 23 avril 2008 concernant les crédits à la consommation qui consacre dans sa lecture par la Cour de justice de l'Union européenne le rôle du juge dans le respect des dispositions d'un ordre public économique européen.

En outre, attachée à l'expression d'une prétention, la notion de prescription est indifférente à la présentation par une partie d'un moyen de défense au fond qui ne tend qu'à faire échec à la demande de son contradicteur sans en retirer quelque autre avantage.

Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.

C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat aux articles L. 311-6 à L. 311-13 anciens dans leur rédaction applicable au litige.

* * *

La disposition par laquelle le premier juge a déclaré recevable l'action de la société Sogefinancement ne fait l'objet d'aucune critique.

Selon l'article L. 311-10 ancien du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, l'offre préalable de crédit :

1° mentionne l'identité des parties et, le cas échéant, des cautions ;

2° précise le montant du crédit et éventuellement de ses fractions périodiquement disponibles, la nature, l'objet et les modalités du contrat, y compris, le cas échéant, les conditions d'une assurance ainsi que le coût total ventilé du crédit et, s'il y a lieu, son taux effectif global ainsi que le total des perceptions forfaitaires demandées en sus des intérêts en ventilant celles correspondant aux frais de dossiers et celles correspondant aux frais par échéance ;

3° rappelle les dispositions des articles L. 311-15 à L. 311-17 et L. 311-32 et, s'il y a lieu, des articles L. 311-20 à L. 311-31, L. 313-13, et reproduit celles de l'article L. 311-37 ;

4° indique, le cas échéant, le bien ou la prestation de services financé.

Alors que cette disposition n'impose pas la mention du coût total du crédit sans assurance, l'offre de crédit litigieuse satisfait pleinement les dispositions précitées en mentionnant notamment expressément le coût total du crédit, sa ventilation entre intérêts, cotisations d'assurance et frais de dossier et le taux effectif global, de sorte que la société Sogefinancement n'encourt pas la déchéance du droit aux intérêts contractuels.

En conséquence, le jugement est infirmé en ce qu'il a privé la société Sogefinancement du droit aux intérêts contractuels.

* * *

Contrairement à ce que soutient la société Sogefinancement, il n'apparaît pas que M. X. ait été informé du prononcé de la déchéance du terme avant le 30 avril 2016 ; le jugement est donc confirmé sur ce point.

Il ressort du décompte détaillé établi à cette date que la créance de la société Sogefinancement s'établit ainsi :

- mensualités échues et impayées : 1.331,65 euros

- capital restant dû : 2.987,53 euros

- intérêts de retard : 18,75 euros

soit un total de 4.337,93 euros duquel doivent être déduits les paiements faits postérieurement par M. X. à hauteur de 2.600 euros.

M. X. reste donc redevable de la somme de 1.737,93 euros.

La société Sogefinancement sollicite en outre le paiement d'une indemnité de résiliation de 333,69 euros qui, constituant une clause pénale au sens de l'article 1152 devenu 1231-5 du code civil, revêt un caractère manifestement excessif en ce qu'elle s'ajoute aux indemnités et pénalités déjà incluses dans le montant du prêt réaménagé ; il convient de la réduire à 10 euros.

En conséquence, M. X. est condamné à payer à la société Sogefinancement la somme de 1.747,93 euros augmentée des intérêts au taux contractuel sur la somme de 1.719,18 euros et des intérêts au taux légal sur le surplus à compter du 30 avril 2016.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,

- Infirme le jugement dont appel sauf en ce qu'il a déclaré l'action de la société Sogefinancement recevable et a dit que la déchéance du terme du prêt litigieux était intervenue le 30 avril 2016 ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

- Condamne M. X. à payer à la société Sogefinancement la somme de 1.747,93 euros augmentée des intérêts au taux contractuel sur la somme de 1.719,18 euros et des intérêts au taux légal sur le surplus à compter du 30 avril 2016 ;

- Déboute la société Sogefinancement du surplus de ses demandes ;

- Condamne M. X. aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la société Sogefinancement la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Dit que la SELARL C. & M.-G. pourra recouvrer les dépens par elle avancés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière                           La présidente