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CA LYON (1re ch. civ. A), 23 septembre 2021

Nature : Décision
Titre : CA LYON (1re ch. civ. A), 23 septembre 2021
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 1re ch. A
Demande : 18/07073
Date : 23/09/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 10/10/2018
Référence bibliographique : 5997 (portée d’une recommandation)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9143

CA LYON (1re ch. civ. A), 23 septembre 2021 : RG n° 18/07073 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Les époux X. font valoir que la clause de stipulation d'intérêts conventionnels doit être déclarée abusive et donc non écrite dès lors que les intérêts sont calculés sur la base d'une année bancaire et non civile.

En l'espèce, l'offre de prêt prévoit que : « Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an. »

A l'appui de leur argumentation, ils invoquent la Recommandation n°2005-02 de la Commission des clauses abusives.

Toutefois, cette recommandation concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement, une telle clause ayant des conséquences à chaque calcul d'intérêts, ce qui n'est pas le cas du prêt immobilier des époux.

En effet, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel ; aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours, ainsi que l'expose la banque dans ses conclusions.

Ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas, en soi, contraire aux prescriptions légales sus-mentionnées.

Il en résulte que cette clause ne peut pas créer de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive. »

2/ « Il résulte toutefois des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et de l'article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016, que la mention, dans l'offre de prêt acceptée, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, ne peut être sanctionnée que par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge, sous réserve que ce calcul ait généré au détriment de l'emprunteur un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 précité.

En l'espèce, les époux X. ne rapportant nullement la preuve de ce que les erreurs qu'ils allèguent affectent la première décimale, leurs demandes ne peuvent qu'être rejetées et le jugement qui les a déboutés de leurs demandes confirmé. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/07073. N° Portalis DBVX-V-B7C-L6ZX. Décision du tribunal de grande instance de Lyon, Au fond du 4 septembre 2018, 4e ch. : R.G. n° 16/07038.

 

APPELANTS :

M. X.

né le [date] à [ville], [...], [...]

Mme Y. épouse X.

née le [date] à [ville], [...], [...]

représentés par la SELARL C&S AVOCATS, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1246, et pour avocat plaidant Maître Fiona B., avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SA CRÉDIT LYONNAIS

[...], [...], représentée par Maître Pierre B., avocat au barreau de LYON, toque : 140

 

Date de clôture de l'instruction : 24 septembre 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 février 2021

Date de mise à disposition : 8 avril 2021, prorogée au 1er juillet 2021, puis au 23 septembre 2021, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Anne WYON, président - Annick ISOLA, conseiller - Dominique DEFRASNE, conseiller, assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier. A l'audience, Anne WYON a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Estimant que des erreurs affectent le taux effectif global du prêt de 178.252 euros qu'ils ont souscrit auprès de la société Crédit Lyonnais (la banque) suivant offre acceptée le 20 mai 2011, M. X. et Mme Y. son épouse ont saisi le tribunal de grande instance de Lyon qui, par jugement du 4 septembre 2018, les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes, condamnés aux dépens et au paiement à la banque d'une somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 10 octobre 2018, ils ont relevé appel de ce jugement.

[*]

Par conclusions déposées au greffe par voie dématérialisée le 3 janvier 2019, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement et, en substance, de :

- déclarer abusive et par conséquent réputée non écrite la clause figurant dans le contrat de prêt prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours ;

- condamner la banque à leur payer la somme de 23.000,00 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion, sauf à parfaire ;

- enjoindre la banque sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un avenant accompagné d'un nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal soit 0,38 % au taux conventionnel.

A titre subsidiaire,

- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt litigieux ;

- prononcer la substitution du taux légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38 % au taux d'intérêt conventionnel ;

- condamner Le Crédit Lyonnais à leur payer la somme de 23.000,00 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion, sauf à parfaire ;

- enjoindre Le Crédit Lyonnais, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un avenant, accompagné du nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel.

A titre infiniment subsidiaire,

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt à hauteur du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38 % ;

- condamner Le Crédit Lyonnais à leur payer la somme de 23.000,00 euros correspondant à la différence entre le montant des intérêts versés en application du taux conventionnel depuis la conclusion du contrat et le montant des intérêts au taux légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38 %, sauf à parfaire ;

- enjoindre Le Crédit Lyonnais, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un avenant, accompagné du nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel.

En tout état de cause,

- condamner Le Crédit Lyonnais à leur payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son manquement à son obligation d'information, de loyauté et d'honnêteté ;

- condamner Le Crédit Lyonnais à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner le Crédit Lyonnais aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Fiona B., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

[*]

Par conclusions déposées au greffe par voie dématérialisée le 27 mars 2019, la banque demande en substance à la cour de confirmer le jugement attaqué, de condamner les époux X. à lui payer 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens d'appel avec application de l'article 699 du même code au bénéfice de Me B., avocat.

À titre subsidiaire, elle demande à la cour de limiter la restitution d'intérêt mise à sa charge à une somme forfaitaire symbolique et plus subsidiairement de dire que le taux d'intérêt légal substitue au taux conventionnel subira les variations périodiques auxquelles la loi le soumet.

[*]

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 septembre 2019.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande tendant à faire juger certaines stipulations abusives :

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Les époux X. font valoir que la clause de stipulation d'intérêts conventionnels doit être déclarée abusive et donc non écrite dès lors que les intérêts sont calculés sur la base d'une année bancaire et non civile.

En l'espèce, l'offre de prêt prévoit que : « Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an. »

A l'appui de leur argumentation, ils invoquent la Recommandation n°2005-02 de la Commission des clauses abusives.

Toutefois, cette recommandation concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement, une telle clause ayant des conséquences à chaque calcul d'intérêts, ce qui n'est pas le cas du prêt immobilier des époux.

En effet, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel ; aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours, ainsi que l'expose la banque dans ses conclusions.

Ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas, en soi, contraire aux prescriptions légales sus-mentionnées.

Il en résulte que cette clause ne peut pas créer de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive.

 

Sur la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels et la demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour indication d'un TEG erroné :

Les époux X. font valoir que dès lors qu'une clause relative à l'année lombarde est insérée dans l'offre de prêt immobilier régi par les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation, la responsabilité de la banque est engagée dans la mesure où le taux effectif global doit être calculé sur la base d'une année civile sans que l'emprunteur soit tenu de produire une démonstration mathématique.

Ils soutiennent également que la banque est tenue d'indiquer dans le contrat la durée de la période et que l'absence d'une telle indication est sanctionnée par la nullité de la clause de stipulation d'intérêts contractuels.

Enfin, ils s'appuient sur l'étude réalisée par le cabinet Humania Consultants qui a calculé le taux de période, et dont la méthode a été validée par M. R., expert près la cour d'appel de Montpellier, pour affirmer que le taux de période de leur prêt est de 0,33373 % et par suite le TEG réel de 4,060381 % et non de 4,01 % comme stipulé au contrat, de sorte que le TEG contractuel est erroné.

Il résulte toutefois des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et de l'article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016, que la mention, dans l'offre de prêt acceptée, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, ne peut être sanctionnée que par la déchéance, totale ou partielle, du droit du prêteur aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge, sous réserve que ce calcul ait généré au détriment de l'emprunteur un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 précité.

En l'espèce, les époux X. ne rapportant nullement la preuve de ce que les erreurs qu'ils allèguent affectent la première décimale, leurs demandes ne peuvent qu'être rejetées et le jugement qui les a déboutés de leurs demandes confirmé.

 

Sur les dommages-intérêts :

En l'absence d'erreur affectant le TEG, il convient de dire que la banque n'a manqué à aucune de ses obligations et de débouter les époux X. de leur demande en paiement de dommages-intérêts, le jugement étant confirmé de ce chef.

Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné les époux X. aux dépens de première instance et à payer à la banque une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de la banque et de rejeter celle formée par les époux X., qui supporteront les dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 4 septembre 2018,

Y ajoutant,

Condamne les époux X. aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître B., avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette la demande des époux X. au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les condamne à payer à ce titre à la société anonyme Crédit Lyonnais la somme de 3.000 euros.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT