CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 27 janvier 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9392
CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 27 janvier 2022 : RG n° 20/00988 ; arrêt n° 16-22
Publication : Jurica
Extrait (rappel du jugement) : « Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont retenu en substance que le contrat de prêt contenait, au paragraphe des conditions générales relatives à la déchéance du terme, des clauses permettant au prêteur de résilier unilatéralement le contrat à raison d'évènements subjectifs, notamment la dépréciation du bien financé ou le cas dans lequel l'emprunteur cesse de remplir les conditions qui lui ont permis d'obtenir le prêt.
Considérant que de telles clauses créaient un déséquilibre contractuel significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment de l'emprunteur, ainsi exposé, en dehors du mécanisme de la condition résolutoire, à une décision unilatérale de la banque pouvant conduire à une aggravation soudaine des conditions de remboursement et à une modification majeure de l'économie du contrat, les premiers juges ont conclu que ces clauses présentaient un caractère abusif qui en tant que telles ne devaient pas seulement être tenues comme non écrites, mais entraînaient la déchéance du droit aux intérêts conventionnels en ce que l'offre n'était pas conforme, dans ces circonstances, aux dispositions de l'article L. 132-1 ancien devenu L. 212-1 du code de la consommation.
En retenant qu'outre ces clauses abusives, le contrat de prêt comportait d'autres anomalies (taux de période non précisé et irrégularité du TEG), les premiers juges ont considéré que l'ensemble de ces irrégularités avait causé aux emprunteurs un préjudice dont le principe était acquis, mais dont les conséquences dommageables ne pouvaient être évaluées avec précision, et ont en conséquence condamné le prêteur à régler aux emprunteurs, à titre de dommages et intérêts, une indemnité de 1.000 euros. »
Extraits (motifs de l’arrêt) : 1/ « L'appelante, qui soutient que l'offre satisferait aux prescriptions légales, ne fournit aucune explication sur ce point. Elle indique en effet que le prêt précise en page 2 qu'une « ADI » est obligatoire et qu'une « ADI » est facultative, ce qui est exact, mais ne dit rien de ce que sont chacune de ces assurances décès invalidité obligatoire et facultative, de sorte que l'offre en cause, qui ne précise pas quelle(s) assurance(s) conditionne(nt) la conclusion du prêt, ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 312-8, 4° précité.
L'article L. 312-33 ancien du code de la consommation énonce à son dernier alinéa que lorsque le prêteur ne respecte pas l'une des obligations prévues aux articles L. 312-8, il peut être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
L'irrégularité en cause, en ce qu'elle a privé les emprunteurs de la possibilité de savoir quelle assurance était exigée par le prêteur, avec les incidences qu'une telle imprécision peut avoir sur la possibilité de comparer le coût de l'assurance souscrite à celui d'assurances proposées par d'autres assureurs, mais aussi le coût du prêt, puisque seul le coût de l'assurance obligatoire est intégré dans le calcul du TEG, justifie que le prêteur soit déchu, en totalité, du droit aux intérêts.
Le jugement déféré sera donc confirmé, par substitution de motifs. »
« En faisant valoir que le prêteur leur a accordé un prêt d'un coût total supérieur au capital emprunté, que le contrat ne contient pas toutes les énonciations prévues par la loi et comporte en outre une série de clauses qu'ils qualifient d'abusives, M. Y. et Mme X. soutiennent que « cette situation anormale » a généré un préjudice matériel et moral qui justifie que le Crédit agricole, qui a usé de méthodes déloyales qui relèvent selon eux d'un abus de position dominante, soit condamné à payer à chacun d'eux une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.
En réplique, le Crédit agricole fait valoir que les emprunteurs n'établissent aucune faute de sa part, ni aucun préjudice, en ajoutant que le contrat est régulier et qu'à supposer même qu'il contienne une ou des clauses qui puissent être qualifiées d'abusives, ou que le calcul du taux effectif global soit inexact, les sanctions susceptibles d'être appliquées sont exclusives de l'allocation de dommages et intérêts.
Outre qu'ils n'indiquent pas sur quel fondement ils entendent voir condamner le prêteur à leur régler des dommages et intérêts, les emprunteurs ne justifient d'aucune manière du préjudice matériel et moral dont ils réclament réparation.
Dans ces circonstances, M. Y. et Mme X. ne peuvent qu'être déboutés, par infirmation du jugement entrepris, de leur demande de dommages et intérêts. »
COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
ARRÊT DU 27 JANVIER 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00988. Arrêt n° 16-22. N° Portalis DBVN-V-B7E-GEWM. DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ORLÉANS en date du 13 mai 2020.
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: XXX
SA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE LOIRE
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...], [...], Ayant pour avocat Maître Pierre Yves W., membre de la SCP S., avocat au barreau d'ORLEANS, D'UNE PART
INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: YYY
Madame X.
née le [date] à [ville], [adresse], [...], Ayant pour avocat postulant Maître Daniel O., membre de la SCP S. V. -O.- C., avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Caroline C., membre de la SCP L. & C., avocat au barreau de LILLE,
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], [adresse], [...], Ayant pour avocat postulant Maître Daniel O., membre de la SCP S. V. -O.- C., avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Caroline C., membre de la SCP L. & C., avocat au barreau de LILLE, D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 5 juin 2020
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 7 octobre 2021
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du JEUDI 25 NOVEMBRE 2021, à 9 heures 30, devant Madame Fanny CHENOT, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.
Lors du délibéré : Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, Madame Nathalie MICHEL, Conseiller.
Greffier : Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats, Madame Karine DUPONT, Greffier lors du prononcé.
ARRÊT : Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 27 JANVIER 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon offre préalable acceptée le 4 octobre 2011, la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire (le Crédit agricole) a consenti à Mme X. et M. Y. un prêt immobilier d'un montant global de 170.130 euros, composé d'un prêt de 159.030 euros remboursable en 96 mensualités de 736,33 euros suivies de 264 mensualités de 851,96 euros incluant les intérêts au taux conventionnel de 4,49 % l'an, puis d'un prêt à taux zéro de 11.000 euros, remboursable en 96 mensualités de 115,63 euros.
Exposant l'offre de prêt irrégulière, notamment en ce qu'elle comporterait des clauses abusives et que le calcul des intérêts aurait été effectué sur la base d'une année bancaire de 360 jours, les emprunteurs ont fait assigner le Crédit agricole devant le tribunal de grande instance d'Orléans par acte du 24 mars 2016, aux fins de voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, condamner ce dernier à leur rembourser le montant des intérêts conventionnels réglés ainsi qu'à leur fournir un nouveau tableau d'amortissement exempt de tout intérêt et, subsidiairement, voir ordonner la substitution du taux légal au taux conventionnel.
Par jugement du 13 mai 2020 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire d'Orléans a :
- dit que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire est déchue du droit aux intérêts conventionnels sur le prêt immobilier l'ayant liée aux consorts Mme X. et M. Y.
- dit en conséquence que les emprunteurs n'étaient tenus qu'au remboursement du capital et des cotisations d'assurance
- vu la vente du bien immobilier et le remboursement anticipé du prêt « sous réserve de la présente décision », condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à rembourser à Mme X. et M. Y. le montant des intérêts conventionnels qu'elle a perçus depuis la date de conclusion du contrat jusqu'au jour du remboursement du prêt
- débouté les consorts X.-Y. de leur demande de communication sous astreinte du nouveau tableau d'amortissement et d'un décompte des intérêts
- condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à verser à Mme X. et M. Y. la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires
- condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à payer à Mme X. et M. Y. la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire aux dépens et accordé à la SCP S. V. O. C. le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont retenu en substance que le contrat de prêt contenait, au paragraphe des conditions générales relatives à la déchéance du terme, des clauses permettant au prêteur de résilier unilatéralement le contrat à raison d'évènements subjectifs, notamment la dépréciation du bien financé ou le cas dans lequel l'emprunteur cesse de remplir les conditions qui lui ont permis d'obtenir le prêt.
Considérant que de telles clauses créaient un déséquilibre contractuel significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment de l'emprunteur, ainsi exposé, en dehors du mécanisme de la condition résolutoire, à une décision unilatérale de la banque pouvant conduire à une aggravation soudaine des conditions de remboursement et à une modification majeure de l'économie du contrat, les premiers juges ont conclu que ces clauses présentaient un caractère abusif qui en tant que telles ne devaient pas seulement être tenues comme non écrites, mais entraînaient la déchéance du droit aux intérêts conventionnels en ce que l'offre n'était pas conforme, dans ces circonstances, aux dispositions de l'article L. 132-1 ancien devenu L. 212-1 du code de la consommation.
En retenant qu'outre ces clauses abusives, le contrat de prêt comportait d'autres anomalies (taux de période non précisé et irrégularité du TEG), les premiers juges ont considéré que l'ensemble de ces irrégularités avait causé aux emprunteurs un préjudice dont le principe était acquis, mais dont les conséquences dommageables ne pouvaient être évaluées avec précision, et ont en conséquence condamné le prêteur à régler aux emprunteurs, à titre de dommages et intérêts, une indemnité de 1.000 euros.
Le Crédit agricole a relevé appel de cette décision par déclaration du 5 juin 2020, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause lui faisant grief.
[*]
Dans ses dernières conclusions notifiées le 27 novembre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses moyens, le Crédit agricole demande à la cour, au visa des articles L. 132-1 ancien du code de la consommation, 1147 ancien du code civil, de :
- dire et juger son appel et bien fondé
- dire et juger et mal fondées les demandes de M. Y. et Mme X.,
- infirmer, en conséquence, le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Orléans en date du 13 mai 2020
- débouter, en conséquence, M. Y. et Mme X. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner in solidum M. Y. et Mme X. à lui payer et porter la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. Y. et Mme X. aux dépens
[*]
Dans leurs dernières conclusions notifiées le 28 octobre 2020, auxquelles il est pareillement renvoyé pour l'exposé détaillé de leurs moyens, Mme X. et M. Y. demandent à la cour, au visa des articles 1907 du code civil, L. 313-1, L. 313-2 et suivants et notamment L. 313-8 et R. 313-1, L. 132-1 du code de la consommation, de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Orléans en ce qu'il dit que la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire est déchue du droit aux intérêts conventionnels sur le prêt immobilier l'ayant liée aux consorts X. et Y.,
- dire en conséquence que les emprunteurs n'étaient tenus qu'au remboursement du capital et des cotisations d'assurance,
- vu la vente du bien immobilier et le remboursement anticipé du prêt « sous réserve de la présente décision », confirmer la condamnation de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à rembourser à Mme X. et M. Y. le montant des intérêts conventionnels qu'elle a perçus depuis la date de conclusion du contrat jusqu'au jour du remboursement du prêt.
Subsidiairement,
- déclarer nulle la stipulation d'intérêts conventionnels et ordonner en conséquence la substitution du taux légal au taux conventionnel depuis la date de conclusion du prêt et condamner la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à rembourser à Mme X. et à M. Y. le montant des intérêts conventionnels trop perçus par rapport aux intérêts légaux depuis la date de conclusion du contrat jusqu'au jour du remboursement du prêt
- condamner la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à verser à Mme X. et à M. Y., chacun, la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts
- condamner la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d'appel
[*]
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 7 octobre 2021, pour l'affaire être plaidée le 25 novembre suivant et mise en délibéré à ce jour.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Sur l'allégation du non-respect des prescriptions des articles L. 312-8 et L. 312-4 du code de la consommation :
Rétorquant aux intimés qui font valoir que l'offre de prêt litigieuse n'est pas conforme aux exigences de l'article L. 312-8 du code de la consommation, en ce qu'elle ne comporte pas d'énonciation sur la mise à disposition des fonds, sur l'assurance obligatoire qui conditionne l'octroi du prêt, ni d'énonciation précise sur le montant des frais, l'appelante assure que l'offre comporte toutes les indications en cause et satisfait à toutes prescriptions de la loi.
Selon l'article L. 312-18 du code de la consommation, pris dans son ancienne rédaction applicable à la cause, l'offre de prêt [immobilier] :
1° Mentionne l'identité des parties, et éventuellement des cautions déclarées ;
2° Précise la nature, l'objet, les modalités du prêt, notamment celles qui sont relatives aux dates et conditions de mise à disposition des fonds ;
2° bis Pour les offres de prêt dont le taux d'intérêts est fixe, comprend un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance la répartition du remboursement entre le capital et les intérêts ;
2° ter [inapplicable à la cause -concerne les offres de prêt dont le taux d'intérêt est variable]
3° Indique, outre le montant du crédit susceptible d'être consenti, et, le cas échéant, celui de ses fractions périodiquement disponibles, son coût total, son taux défini conformément à l'article L.313-1 ainsi que, s'il y a lieu, les modalités de l'indexation ;
4° Enonce, en donnant une évaluation de leur coût, les stipulations, les assurances et les sûretés réelles ou personnelles exigées, qui conditionnent la conclusion du prêt ;
4° bis Mentionne que l'emprunteur peut souscrire auprès de l'assureur de son choix une assurance dans les conditions fixées à l'article L. 312-9 ;
5° Fait état des conditions requises pour un transfert éventuel du prêt à une tierce personne,
6° Rappelle les dispositions de l'article L. 312-10
Toute modification des conditions d'obtention d'un prêt dont le taux d'intérêt est fixe, notamment le montant ou le taux du crédit, donne lieu à la remise à l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable.
En l'espèce, les conditions générales du prêt à intérêt prévoient en page 7, au paragraphe intitulé « réalisation », que « la remise des fonds pourra être effectuée sur le compte du notaire ou de l'emprunteur ou de toute autre personne convenue au moment de l'établissement de la demande de prêt », précisent les modalités spécifiques de déblocage des fonds dans les cas où le prêt finance la réalisation de travaux ou dans le cas où le contrat principal constitue un contrat de construction de maison individuelle soumis aux prescriptions des articles L. 231-1 et suivants du code de la consommation, puis à la même page, dans un paragraphe intitulé « non déblocage des fonds », stipulé au paragraphe 2 dénommée « conditions résolutoires », il est par ailleurs précisé que « il est convenu entre les parties que si le prêt n'a pas été l'objet d'un déblocage dans les quatre mois à compter de l'acceptation de l'offre, l'une ou l'autre des parties pourra se prévaloir de la résolution du contrat ».
Ces indications satisfont aux exigences de l'article 312-8, 2° précité ; c'est donc de manière inexacte que les emprunteurs soutiennent que l'offre de prêt litigieuse ne comporterait « pas d'énonciation sur la mise à disposition des fonds ».
En page 2 de l'offre de prêt, au paragraphe intitulé « coût du crédit », il est indiqué dans un tableau ce qui suit :
- « montant de l'assurance décès invalidité obligatoire » : 10.043,03 euros (pris en compte dans le calcul du TEG)
- « montant de l'assurance décès invalidité facultative » : 10.043,03 euros
coût total de l'assurance : 20.086,06 euros
Au paragraphe situé sous ce tableau, intitulé « conditions assurances groupe décès invalidité », il est indiqué que les emprunteurs ont sollicité l'adhésion à l'assurance décès invalidité dans les conditions de couverture qui sont précisées.
En page 6 enfin, au paragraphe « assurance décès invalidité » dans lequel il est rapporté que le prêteur a souscrit un contrat d'assurance collective destiné à garantir ses emprunteurs, il est précisé que si l'emprunteur rend l'assurance obligatoire pour obtenir le financement, l'emprunteur peut souscrire auprès de l'assureur de son choix une assurance dans les conditions fixées à l'article L. 312-9 du code de la consommation.
Cet ensemble de clauses, qui permet de connaître le coût total de l'assurance proposée aux emprunteurs, et même de distinguer le coût de l'assurance obligatoire de celui de l'assurance facultative, ne permet cependant pas de savoir quelles assurances ont conditionné la conclusion du prêt, au sens de l'article L. 312-8, 4°, puisqu'au tableau figurant en page 2, l'assurance « décès invalidité » est à la fois présentée comme obligatoire et facultative, sans aucune indication, à cette page ou ailleurs dans l'offre, de ce qui serait facultatif ou obligatoire - l'assurance décès, l'assurance invalidité, ou l'assurance de l'un ou de l'autre des emprunteurs seulement.
L'appelante, qui soutient que l'offre satisferait aux prescriptions légales, ne fournit aucune explication sur ce point. Elle indique en effet que le prêt précise en page 2 qu'une « ADI » est obligatoire et qu'une « ADI » est facultative, ce qui est exact, mais ne dit rien de ce que sont chacune de ces assurances décès invalidité obligatoire et facultative, de sorte que l'offre en cause, qui ne précise pas quelle(s) assurance(s) conditionne(nt) la conclusion du prêt, ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 312-8, 4° précité.
L'article L. 312-33 ancien du code de la consommation énonce à son dernier alinéa que lorsque le prêteur ne respecte pas l'une des obligations prévues aux articles L. 312-8, il peut être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
L'irrégularité en cause, en ce qu'elle a privé les emprunteurs de la possibilité de savoir quelle assurance était exigée par le prêteur, avec les incidences qu'une telle imprécision peut avoir sur la possibilité de comparer le coût de l'assurance souscrite à celui d'assurances proposées par d'autres assureurs, mais aussi le coût du prêt, puisque seul le coût de l'assurance obligatoire est intégré dans le calcul du TEG, justifie que le prêteur soit déchu, en totalité, du droit aux intérêts.
Le jugement déféré sera donc confirmé, par substitution de motifs.
Sur la demande de dommages et intérêts :
En faisant valoir que le prêteur leur a accordé un prêt d'un coût total supérieur au capital emprunté, que le contrat ne contient pas toutes les énonciations prévues par la loi et comporte en outre une série de clauses qu'ils qualifient d'abusives, M. Y. et Mme X. soutiennent que « cette situation anormale » a généré un préjudice matériel et moral qui justifie que le Crédit agricole, qui a usé de méthodes déloyales qui relèvent selon eux d'un abus de position dominante, soit condamné à payer à chacun d'eux une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.
En réplique, le Crédit agricole fait valoir que les emprunteurs n'établissent aucune faute de sa part, ni aucun préjudice, en ajoutant que le contrat est régulier et qu'à supposer même qu'il contienne une ou des clauses qui puissent être qualifiées d'abusives, ou que le calcul du taux effectif global soit inexact, les sanctions susceptibles d'être appliquées sont exclusives de l'allocation de dommages et intérêts.
Outre qu'ils n'indiquent pas sur quel fondement ils entendent voir condamner le prêteur à leur régler des dommages et intérêts, les emprunteurs ne justifient d'aucune manière du préjudice matériel et moral dont ils réclament réparation.
Dans ces circonstances, M. Y. et Mme X. ne peuvent qu'être déboutés, par infirmation du jugement entrepris, de leur demande de dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires :
Le Crédit agricole, qui succombe au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devra supporter les dépens de l'instance d'appel et sera débouté de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur ce dernier fondement, le Crédit agricole sera condamné à régler à Mme X. et M. Y., à qui il serait inéquitable de laisser la charge de la totalité des frais qu'ils ont exposés en cause cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens, une indemnité de procédure 2.000 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
INFIRME la décision entreprise, mais seulement en ce qu'elle a condamné la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à verser à Mme X. et M. Y. la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts,
STATUANT À NOUVEAU sur le seul chef infirmé :
REJETTE la demande de dommages et intérêts de Mme X. et M. Y.,
CONFIRME la décision pour le surplus de ses dispositions critiquées,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à payer à M. Y. et Mme X. la somme globale de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE la demande de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire formée sur le même fondement,
CONDAMNE la caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire aux dépens.
Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Karine DUPONT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5749 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets de l’action - Autres effets - Déchéance des intérêts
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