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CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 20 avril 2022

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 20 avril 2022
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 4
Demande : 20/11023
Date : 20/04/2022
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 27/07/2020
Référence bibliographique : 7138 (442-1 C. com., conseil en recrutement), 6169 (L. 442-6 C. com, notion de partenariat), 6170 (L. 442-1 C. com., soumission)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9572

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 20 avril 2022 : RG n° 20/11023 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Par des motifs pertinents, non utilement contredits par la société T. et que la Cour adopte, le tribunal a constaté que les conditions générales de vente ont été incorporées au contrat signé par les parties et acceptées par la société T. et que la clause prévue à l'article 8 a bien pour contrepartie commerciale la sélection et la présentation d'un candidat ayant fait l'objet d'une embauche ultérieure.

La Cour ajoute que la société T. ne justifie d'aucune circonstance particulière permettant d'établir qu'elle a été soumise par la société Hays aux conditions du contrat sans négociation effective et lui imposant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que la clause 8 du contrat est valable et n'est pas abusive. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 20 AVRIL 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/11023 (7 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFJV. Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2019036480

 

APPELANTE :

SARL T.

 prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de TOURS sous le numéro XXX, Représentée par Maître Chrystelle D. de la SELARL V. & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, Ayant pour avocat plaidant Maître Augustin L. de la SELARL V. & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SAS HAYS OUEST aux droits de laquelle vient la SAS HAYS

 prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro YYY, Représentée par Maître Barthélémy L. de l'AARPI V. AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0386, Ayant pour avocat plaidant Maître Baptiste DE C., avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Sophie DEPELLEY, Conseillère, chargée du rapport, et Mme Camille LIGNIERES, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, Mme Sophie DEPELLEY, Conseillère, Mme Camille LIGNIERES, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Meggy RIBEIRO

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Mme Meggy RIBEIRO, Greffière placée, présente lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

La SARL T. (ci-après « la société T. ») est spécialisée dans les travaux de menuiserie métallique, de serrurerie et la construction de vérandas en aluminium.

La SAS Hays Ouest (ci-après « la société Hays »), devenue la société Hays, a pour activité le conseil et le recrutement de main d'œuvre.

Afin de recruter un chargé d'affaires (conducteur de travaux) menuiserie aluminium, la société T. a conclu le 6 septembre 2016, un contrat avec la société Hays, prévoyant à l'article 3 des conditions générales de vente « Honoraires de recrutement » :

« Le Client s'engage à prévenir immédiatement Hays dès qu'un candidat sélectionné et présenté par Hays est recruté ou qu'une collaboration salariée ou non salariée est conclue avec ce candidat.

Les honoraires sont intégralement dus au premier jour d'entrée en fonction du candidat chez le Client ou à la date de commencement de la collaboration.

Les honoraires sont également intégralement dus dans le cas où le Client embaucherait le candidat pour un autre poste que celui pour lequel Hays le lui a présenté.

Enfin, les honoraires sont intégralement dus dans le cas où le Client recruterait uncandidat présenté par Hays en dehors de toute mission de recrutement confiée à Hays ».

Par courriel du 24 janvier 2018, la société Hays a transmis à M. T., la candidature de Monsieur X. pour le poste de chargé d'affaires Menuiserie aluminium. Elle a confirmé le 26 janvier 2018 un entretien avec le candidat pour le même jour.

Informée de l'embauche de Monsieur X. par la société T. le 12 mars 2018, la société Hays a facturé le 19 avril 2018 ses honoraires que la société T. a refusé de régler au motif que M. X. avait été embauché en tant qu'intérimaire présenté par la société Intérim 37.

Le 23 janvier 2019, la société Hays a mis en demeure la société T. de payer la facture.

Par acte du 11 juin 2019, la société Hays a assigné la société T. devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir le paiement de sa prestation commerciale ainsi que les intérêts.

Par jugement du 3 juillet 2020, le tribunal de commerce de Paris a :

- Dit non recevable et débouté T. de sa demande d'incompétence du tribunal de commerce de Paris au profit du tribunal de commerce de Tours,

- S'est déclaré compétent,

- Dit que la clause 8 du contrat est valable et n'est pas une clause abusive,

- Condamné T. à payer à Hays la somme de 12.280 euros TTC avec intérêt à trois fois le taux légal à compter du 6 avril 2018,

- Débouté T. de sa demande d'indemnité de 2.000 euros au motif d'un avantage financier sans contrepartie,

- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- Condamné T. à payer à Hays la somme de 2.250 euros de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- Condamné T. aux entiers dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA.

Par déclaration reçue au greffe le 27 juillet 2020, la société T. a interjeté appel de ce jugement.

[*]

Aux termes des dernières conclusions de la société T., déposées et notifiées le 22 octobre 2020, il est demandé à la Cour de :

Vu l'article 1315 du code civil,

Vu l'article L. 442-6 du Code de commerce,

Vu les conditions générales de HAYS OUEST,

Vu les pièces versées au débat,

Il est demandé à la Cour de :

« - Réformer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 3 juillet 2020 en toutes ses dispositions.

Et statuant à nouveau :

- Dire et juger que la créance de la société HAYS OUEST n'est pas fondée en son principe ;

- Débouter la SAS Hays Ouest de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la SAS Hays Ouest à payer à la société T. la somme de 2000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice résultant du déséquilibre significatif constaté ;

- Condamner la SAS Hays Ouest au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner la SAS Hays Ouest aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.

[*]

Aux termes des dernières conclusions de la société Hays, déposées et notifiées le 21 janvier 2021, il est demandé à la Cour de :

Vu l'article 1134 du Code civil,

Vu l'article L. 442-6 du Code de commerce,

Vu les articles 3 et 8 des Conditions Générales de HAYS OUEST,

Vu les pièces produites,

- Juger que l'article 8 des Conditions Générales de la société HAYS OUEST est parfaitement valable,

- Juger que la société HAYS OUEST n'a nullement tenté d'obtenir un avantage financier ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu,

En conséquence :

- Confirmer le jugement du 3 juillet 2020 en toutes ses dispositions notamment en ce qu'il a condamné la SARL T. au paiement de la somme de 12.280 euros TTC avec intérêt à trois fois le taux légal à compter du 6 avril 2018 et débouté la SARL T. de toutes ses demandes,

En tout état de cause, de :

- Condamner la SARL T. à payer la somme de 3.900 euros à la société HAYS OUEST au titre de l'article 700 du Code de procédure ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure.

[*]

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

La société T. prétend que la société Hays ne démontre pas l'existence d'une créance, que les seuls mails de présentation du candidat (du 24 janvier 2018) et d'organisation d'un entretien (du 26 janvier 2018) ne prouvent pas l'exécution d'une prestation d'accompagnement effectuée par Hays. Elle ajoute que la prestation a été réalisée par une autre société, la SARL Intérim 37, que M. X. était dans les fichiers de 37 Intérim depuis plusieurs mois et que son recrutement était engagé bien avant les mails envoyés par la société Hays.

La société T. fait en outre valoir que l'obligation dont la société Hays souhaite obtenir le paiement est non seulement une obligation sans cause, mais encore que la clause de l'article 8 des CG de vente induit un déséquilibre significatif entre les parties en raison de l'absence de contrepartie commerciale (au sens de l'art. L. 442-6-1-2e du Code de com). Elle soutient que le contrat du 6 septembre 2016, est un contrat d'adhésion qui met à sa charge une obligation dénuée de contrepartie et que l'envoi de deux mails restés sans réponse ne peuvent pas être considérés comme la réalisation d'une prestation.

La société Hays soutient que ses prestations existent et sont dues en application de l'art. 1134 ancien du Code civil dès lors qu'elles ont permis le recrutement de M. X. à compter du 12 mars 2018 par la société T., après avoir transmis sa candidature le 24 janvier 2018 et organisé un entretien le 26 janvier 2018 à 17 h. dans les locaux de cette dernière. La société Hays prétend que la société T. et M. X. n'ont pas prévenu des suites données à l'entretien, alors que ces obligations figuraient dans le contrat (art. 3 des CG).

Elle fait en outre valoir que le contrat qui la lie à la société T. n'est pas un contrat d'adhésion, celui-ci a été librement négocié par les parties et la société T. était libre de faire des propositions de dérogations aux conditions générales. Elle ajoute que l'équilibre du contrat repose sur la rémunération de la société Hays qui n'a droit à ses honoraires que dans l'hypothèse où un candidat est effectivement embauché dans la structure de son client. A défaut, la société Hays n'est pas rémunérée pour les prestations réalisées dans le cadre du recrutement. Elle estime que l'article 8 est nécessaire pour qu'elle se protège des comportements frauduleux de certains clients et vise à se prémunir des clients qui bénéficieraient de ses prestations mais qui ne la préviendrait pas d'un recrutement pour échapper au paiement de la prestation. Cette clause n'empêchait pas la société T. de faire appel à d'autres agences de recrutement ou d'intérim.

Sur ce,

Les conditions générales de vente du contrat signé entre les parties stipulent :

Article 3 « Honoraires de recrutement » :

« Le Client s'engage à prévenir immédiatement Hays dès qu'un candidat sélectionné et présenté par Hays est recruté ou qu'une collaboration salariée ou non salariée est conclue avec ce candidat.

Les honoraires sont intégralement dus au premier jour d'entrée en fonction du candidat chez le Client ou à la date de commencement de la collaboration.

Les honoraires sont également intégralement dus dans le cas où le Client embaucherait le candidat pour un autre poste que celui pour lequel Hays le lui a présenté.

Enfin, les honoraires sont intégralement dus dans le cas où le Client recruterait un candidat présenté par Hays en dehors de toute mission de recrutement confiée à Hays ».

Article 8 « Réserve » :

« Dans un délai de 12 mois suivant la présentation au Client d'un candidat sélectionné pour lui par HAYS (caractérisée par l'envoi du CV et/ou l'organisation d'un entretien), le Client sera redevable des honoraires prévus au paragraphe 3 ci-dessus :

- Si le client engage directement ou indirectement par toute personne interposée ou société interposée ledit candidat (…)

- qu'il s'agisse d'un recrutement ou d'une collaboration salariée ou non salariée. ».

 

* Sur la validité de la clause prévue à l'article 8

Par des motifs pertinents, non utilement contredits par la société T. et que la Cour adopte, le tribunal a constaté que les conditions générales de vente ont été incorporées au contrat signé par les parties et acceptées par la société T. et que la clause prévue à l'article 8 a bien pour contrepartie commerciale la sélection et la présentation d'un candidat ayant fait l'objet d'une embauche ultérieure.

La Cour ajoute que la société T. ne justifie d'aucune circonstance particulière permettant d'établir qu'elle a été soumise par la société Hays aux conditions du contrat sans négociation effective et lui imposant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que la clause 8 du contrat est valable et n'est pas abusive.

 

* Sur le paiement des honoraires

Par des motifs pertinents, non utilement contredits par la société T. et que la Cour adopte le tribunal a retenu que la société Hays justifiait par les échanges de courriels en janvier 2018 de la prestation de sélection et de présentation du candidat M. X. à la société T. et qu'il n'est pas contesté que ce dernier a été embauché en mars 2018 sans information de la société Hays.

La Cour ajoute que :

- les pièces versées aux débats par la société T. ne démontrent pas qu'elle aurait confié son besoin en recrutement à la société 37 Intérim,

- l'attestation versée aux débats par la société T. (pièce n° 2) n'apporte pas la preuve de l'antériorité de la présentation de M. X. à T., ni d'une date d'entretien ou d'embauche établissant que le candidat avait été présenté avant l'envoi du CV et de l'entretien organisé par la société Hays,

- ni le candidat, ni le client ne se seraient positionnés en situation de recherche auprès d'Hays et n'auraient laissé l'entretien être organisé par Hays s'ils avaient déjà été présentés l'un à l'autre par 37 Intérim.

Dès lors que la société Hays justifie avoir réalisé la prestation prévue au contrat, elle est en droit d'obtenir la rémunération conformément aux dispositions du contrat et à l'indemnité forfaitaire de l'article L. 441-6 du code de commerce.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société T. de sa demande d'indemnité et l'a condamnée à payer à la société Hays la somme de 12.280 euros TTC avec intérêts à trois fois le taux légal à compter du 6 avril 2018.

 

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société T. aux dépens de première instance et à payer à la société Hays la somme de 2.250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société T., partie qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, la société T. sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société Hays la somme de 3.900 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société T. aux dépens d'appel,

CONDAMNE la société T. à payer à la société HAYS, venant aux droits de la S.A.S. HAYS OUEST, la somme de 3.900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE toute autre demande.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT