CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 19 mai 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9594
CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 19 mai 2022 : RG n° 19/07680 ; arrêt n° 2022/174
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Par ailleurs compte tenu de la date de signature des contrats (juin 2015) et en application de l'article 9 de l'ordonnance du 10 février 2016 relatif à l'entrée en vigueur de cette ordonnance portant réforme du droit des obligations, le litige sera tranché selon les dispositions du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, les articles visés étant les articles anciens de ce code.
De même sont applicables les dispositions du code de la consommation dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 14 mars 2016. »
2/ « Il convient de rappeler que lorsque des contrats conclus de manière concomitante ou successive participent d'une même opération économique, notamment lorsque l'un d'eux est un contrat de location de longue durée qui constitue une modalité de financement de l'autre contrat, il existe entre eux une interdépendance de sorte que la résiliation du contrat principal emporte la caducité du contrat de location. Toute clause du contrat de location financière qui serait inconciliable avec ce principe d'interdépendance des contrats est réputée non écrite.
En l'espèce l'interdépendance des contrats de fourniture/maintenance/ location longue durée/ vente signés le 24 juin 2015 entre INPS/ M. X. / LOCAM n'est pas contestée par cette dernière et est bien établie au vu des pièces versées aux débats. »
3/ « L'article L. 121-16-1-III, (repris à l'article L. 221-3 depuis le 1er juillet 2016) énonce que les dispositions des sections II, III, VI du présent chapitre applicable aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre 2 professionnels alors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Le chapitre premier du titre deuxième du livre deuxième du code de la consommation est relatif aux contrats conclus à distance et hors établissement. La section II est intitulée Obligation d'information précontractuelle.
L'article L. 121-17-I (devenu L. 221-5) énonce à son alinéa 1 que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique aux consommateurs, de manière lisible et compréhensible les informations suivantes : « 2° lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dans les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fait par décret en Conseil d'État, » L'article L. 121- 18-1 (devenu l'article L. 221-9) précise dans son dernier alinéa que lorsque le contrat est conclu hors établissement, il est accompagné du formulaire type de rétractation mentionnée au 2° de l'article L. 121-17-I. Enfin du code de la consommation qui reprend les dispositions de l'ancien article L. 121- 18-1 alinéa 1er (devenu l'article L. 242-1), édicte que les dispositions de l'article L. 121-18-1 sont prévus à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Dans la présente instance, M. X. qui exerce à [ville] son activité de médecin, a signé le 24 juin 2015 le bon de commande avec la SAS INPS Groupe, le contrat de maintenance avec la SAS INPS et le contrat de location longue durée avec la SAS Locam à [ville], soit hors des établissements des sociétés INPS Groupe et Locam.
Par ailleurs il s'agit bien d'un groupe contractuel autonome, distinct de celui signé en juin 2014, de telle sorte que c'est vainement que la SAS LOCAM prétend que les dispositions susvisées ne seraient pas applicables en ce qu'il s'agirait de « relations commerciales suivies » et d'une « opération de renouvellement. »
M. X., médecin, n'a pas pour activité la reprographie, et si la location des photocopieurs a été souscrite à titre professionnel, elle n'entre pas dans le champ principal de son activité, contrairement aux affirmations de la SAS LOCAM, un photocopieur n'étant pas un outil permettant à un professionnel de santé d'exercer son activité.
Enfin il justifie par les documents qu'il verse, qu'il emploie uniquement une personne, soit moins de 5 salariés. »
4/ « La SAS LOCAM soutient ensuite que le contrat de location longue durée serait exclu du champ d'application de ces articles en application de l'article L. 121-2-4° en ce qu'il s'agit d'un contrat financier expressément exclu par cette disposition.
Cependant, comme le souligne à juste titre M. X., d'une part le contrat de fourniture, qui est le contrat principal dans l'opération économique d'ensemble, est incontestablement soumis à ces dispositions légales, de telle sorte que la nullité de celui-ci affecte celle du contrat de location qui en est l'accessoire. D'autre part les contrats de location longue durée sont des contrats de location, impliquant une chose louée en contrepartie du paiement de loyers, il ne s'agit pas d'un contrat de service financier au sens du code monétaire et financier, mais bien un contrat de prestation de service soumis au code de la consommation.
Les dispositions du code de la consommation ci-dessus rappelées sont donc applicables au présent litige.
Il n'est pas contestable que les contrats proposés à la signature de M. X. par le représentant de la société INPS Groupe n'étaient pas accompagnés d'un quelconque formulaire de rétractation. En conséquence, les contrats signés par Monsieur Pascal G. le 14 octobre 2015 encourent la nullité. »
COUR D’APPEL D’ AIX-EN-PROVENCE
CHAMBRE 3-4
ARRÊT DU 19 MAI 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Rôle N° RG 19/07680. Arrêt n° 2022/174. N° Portalis DBVB-V-B7D-BEH6I. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AIX EN PROVENCE en date du 18 mars 2019 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 2017007330.
APPELANT :
Monsieur X.
demeurant [adresse], représenté par Maître Agnès E. de la SCP E.-C. & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Maître Sophie A., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉS :
Maître Vincent DE C. mandataire judiciaire, agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS INPS GROUPE
demeurant [...], défaillant
SAS LOCAM
dont le siège est sis [adresse], représentée et assiste de Maître Alain K., avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Florence ALQUIE VUILLOZ, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Madame Laure BOURREL, Président, Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, Madame Florence ALQUIE-VUILLOZ, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022.
ARRÊT : Réputé contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022, Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits, procédure, prétentions et moyens :
M. X. est médecin généraliste à [ville].
Courant 2014 il a été démarché par deux commerciaux de la société INPS, société fournisseur de photocopieurs.
Selon bon de commande du 23 juin 2014, M. X. a commandé auprès de la société INPS GROUPE (anciennement COPY MANAGEMENT) la fourniture d'un copieur TRIUMPH ADLER Neuf + fax, scanner copieur, prestation compensatoire fax TA 3525 et d'une imprimante TA 5030 neuve, moyennant un contrat de location longue durée avec un coût locatif mensuel de 450 HT dont 55 euros de services pendant 12 trimestres, avec prélèvement mensuel.
La société INPS GROUPE s'engageait à :
- la livraison, installation, connexion et formation incluse
- une garantie totale pièces, main d'œuvre, déplacement du technicien sous 4 heures ouvrées,
Il était mentionné au titre des conditions particulières :
- versement d'une « participation au solde » pour un montant de 5.340 euros TTC, par chèque 45 jours après la livraison et réception de la facture, soit un montant de 2.250 euros au 45ème jour et le solde au 31/01/2015
- Renouvellement de l'opération à la demande du client à compter du 12ème mois, incluant : solde du dossier en cours, Copies à disposition, participation au solde.
Le Dr X. ne disposait à cette date d'aucun contrat antérieur à solder.
Un contrat de maintenance et de garantie a été conclu le même jour prévoyant un forfait copies sur les 12 premiers mois du contrat de 36.000 copies NB, au-delà un coût copie était prévu. Un abonnement mensuel incluant 3.000 copies NB était également prévu.
Le 23 juin 2014 un contrat de location longue durée n° 1121524 a été signé par M. X. avec la SAS LOCAM pour financer la location du matériel commandé, moyennant 36 loyers mensuels de 474 € TTC plus un prélèvement pour compte de 66 €. La facture unique de loyers fait mention d’échéances de 551,77 € au total.
Un procès-verbal de livraison et d'installation a été signé le 3 juillet 2014.
Selon un second bon de commande du 24 juin 2015, M. X. a commandé auprès de la société INPS GROUPE la fourniture d'un copieur TRIUMPH ADLER TA 3525 SNR (= Standard Neuf Reconditionné) avec copieur, fax et scanner et d'un copieur DC6240 (SNR), moyennant un contrat de location longue durée avec un coût mensuel locatif de 550 HT pendant 21 trimestres, avec 1er prélèvement 3 mois après la livraison.
La société INPS GROUPE s'engageait à la livraison, installation, connexion et formation incluse.
Il était mentionné au titre des conditions particulières :
- versement d'une « participation au solde » pour un montant de 9.300 euros TTC, payable par chèque, 1.650 TTC à la livraison, puis 3.825 € TTC 90 jours après la livraison et 3.825 € TTC sur l'exercice 2016 à réception de facture,
- Solde du dossier existant par nous-même,
- Renouvellement de l'opération à la demande du client à compter du 20ème mois, incluant : solde du dossier en cours, Copies à disposition participation au solde.
Un contrat de maintenance et de garantie a été conclu le même jour prévoyant un forfait copies pour 20.000 copies NB, avec un transfert des copies restantes « sur nouvelles machines ».
Le même jour un contrat de location longue durée n° 1196800 a été signé par M. X. avec la SAS LOCAM pour financer la location du matériel commandé, moyennant 21 loyers trimestriels de 1.800€ TTC plus un prélèvement pour compte de 180 €. La facture unique de loyers fait mention d’échéances de 551,77 € au total.
Un procès-verbal de livraison et d'installation a été signé le 1er juillet 2015.
M. X. a reçu le 7 juillet 2015, un échéancier de la société LOCAM pour le financement de :
- 1 multifonction NSE n° LYJ4403247 (soit le numéro du copieur objet du précédent contrat)
- 1 copieur TA DC6240 NSE n° NNZ1X01028.
Le premier contrat de juin 2014 a été soldé par la société INPS GROUPE, aucune échéance de loyer n'étant plus prélevée à compter d'août 2015.
Par courrier en date du 31 mars 2017 M. X. a écrit à la SAS LOCAM pour dénoncer le contrat de location en raison du non-renouvellement de l'opération par la société INPS GROUPE considérant que le contrat de location était caduc. Il a signifié cette dénonciation par courrier du 6 avril 2017 adressé à la société INPS.
La société INPS GROUPE a récupéré le copieur TA P-3525 n° LYJ4403247 objet du contrat du 23 juin 2014, puis du contrat du 24 juin 2015, le 7 avril 2017, de telle sorte que M. X. n'est plus en possession des copieurs loués depuis le 7 avril 2017.
Puis par courrier du 10 avril 2017 la société INPS GROUPE a indiqué à M. X. que faute d'accord de ce dernier sur le renouvellement de l'opération, le contrat du 24 juin 2015 continuait à produire ses effets jusqu'à échéance.
M. X. a déposé plainte pour pratiques commerciales trompeuses le 27 avril 2017.
Par courrier recommandé en date du 8 août 2017 la SAS LOCAM a mis en demeure M. X. de régler les loyers impayés depuis le 31 mars 2017, faite de quoi la résiliation du contrat serait prononcée, le montant exigible à la déchéance du terme étant alors de 33.947,53 €.
Par actes d'huissier des 21 et 22 août 2017 M. X. a assigné la société INPS GROUPE et la SAS LOCAM devant le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence aux fins de prononcer la nullité des contrats de fourniture établis par INPS et des contrats de location longue durée des 23 juin 2014 et 24 juin 2015, à titre subsidiaire prononcer la résolution de ces contrats aux torts de la société INPS GROUPE, condamner in solidum le fournisseur et le bailleur au paiement d'une somme de 5.000€ à titre de dommages-intérêts, condamner la société INPS GROUPE à indemniser la SAS LOCAM de toutes sommes dues à cette dernière au titre des loyers impayés, condamner la société INPS GROUPE à le relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, la condamner à restituer les photocopieurs litigieux, et condamner in solidum les défenderesses au paiement d'une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 14 juin 2018, la société INPS a été placée en liquidation judiciaire, et Maître de C. a été désigné en qualité de liquidateur.
Par courrier du 20 août 2018, M. X. a déclaré sa créance auprès du liquidateur pour un montant de 66.020 € correspond à hauteur de 61.020,00 € aux loyers échus ou à échoir et pénalités dus au titre des contrats pour lesquels il demande d'être relevé et garanti et 5.000 € à titre de dommages-intérêts, et a invité ce dernier à se prononcer sur la poursuite des contrats en cours, conformément aux dispositions de l'article L. 641-11-1 du code de commerce.
Le liquidateur n'a pas répondu dans le délai d'un mois de telle sorte que les contrats de maintenance et de renouvellement se trouvent donc résiliés de plein droit, à compter du 20 septembre 2018.
Par acte du 25 novembre 2018, M. X. a fait assigner en intervention forcée, Maître De C. ès qualités de liquidateur de la société INPS GROUPE. Les deux procédures ont fait l'objet d'une jonction.
Maître De C. ès qualités de liquidateur de la société INPS GROUPE est intervenu à l'instance.
Par jugement contradictoire en date du 18 mars 2019 le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence a :
- débouté M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- condamné M. X. à payer à la SAS LOCAM la somme de 3.741,60 euros, au titre des échéances du 31 mars et du 30 juin 2017, à laquelle s'ajoute la somme de 9.698,21 euros au titre de la clause pénale soit la somme de 13.439,81 euros outre intérêts au taux légal à compter du 19 août 2017,
- ordonné à M. X. de restituer à ses frais à la SAS LOCAM, les matériels objets du contrat du 24 juin 2015, encore en sa possession et en bon état de marche, sous astreinte de 50 euros par jour ouvrable de retard à compter du trentième jour suivant la date de la notification qui lui sera faite de la présente décision,
- condamné M. X. à payer à la SAS LOCAM une somme de 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. à payer à Maître Vincent de C., ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS INPS GROUP, une somme de 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. aux entiers dépens de la présente instance, qui comprennent notamment le coût des frais de Greffe liquidés à la somme de 110,07 euros.
Le tribunal a dit que les contrats de fourniture et les contrats de location longue durée étaient interdépendants entre eux, que les contrats étaient certes soumis aux dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation relatif à la signature de contrats hors établissement entre professionnels, mais qu'aucune sanction n'était encourue du fait de l'absence de bordereau de rétractation au visa de l'article L. 221-20, le matériel ayant été livré et aucune réclamation n'ayant été faite dans le délai d'un an à compter de la livraison. Il a rejeté la demande de nullité des contrats fondée sur le dol en l'absence de manœuvre ayant conduit le signataire à une mauvaise appréciation de l'étendue de ses engagements, ainsi que la demande fondée sur le manquement au devoir de conseil de INPS. Il a également rejeté les moyens tirés de la nullité de la vente de la chose d'autrui concernant le second contrat de fourniture, considéré que M. X. ne rapportait pas la preuve de ce qu'il n'était plus en possession des photocopieurs litigieux, et fait droit aux demandes en paiement de la SAS LOCAM suite à la résiliation du contrat de 2015, sauf à diminuer la somme réclamée à titre de clause pénale.
M. X. a interjeté appel par déclaration en date du 9 mai 2019.
M. X. a fait signifier sa déclaration d'appel à Maître De C. ès qualités de liquidateur de la société INPS GROUPE et à la SAS LOCAM par acte des 21 et 25 juin 2019, puis ses conclusions d'appelant par acte du 29 juillet 2019.
Par courrier du 30 juillet 2019 reçu le 2 août 2019 Maître De C. ès qualités de liquidateur de la société INPS GROUPE a indiqué que cette société était en liquidation et qu'en l'absence de fonds il ne constituerait pas avocat.
[*]
Par conclusions récapitulatives notifiées et déposées par RPVA le 28 décembre 2021 et signifiées par acte d'huissier du janvier 2022 à Maître De C. ès qualités de liquidateur de la société INPS GROUPE, M. X. demande de :
Vu la jurisprudence du 17 mai 2013 de la Chambre Mixte de la Cour de Cassation,
Vu les dispositions des articles L. 121-16 et suivants du code de la consommation,
Vu la Jurisprudence du 12 septembre 2018 de la 1ère Chambre de la Cour de cassation
Vu les dispositions des articles L. 121-1 à L. 121-5 du code de la consommation,
Vu les dispositions des anciens articles 1108, 1109, 1116, 1117, 1134, 1147, 1152, 1162 et 1184 du Code civil,
Vu les dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce,
Vu les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation
Vu les articles 1126 et 1152 du Code civil,
* A titre principal,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a débouté Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a condamné Monsieur X. à payer à la SAS LOCAM la somme de 3.741,60 euros, au titre des échéances du 31 mars et du 30 juin 2017, à laquelle s'ajoute la somme de 9 698,21 euros au titre de la clause pénale soit la somme de 13.439,81 euros outre intérêts au taux légal à compter du 19 août 2017,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a ordonné à Monsieur X. de restituer à ses frais à la SAS LOCAM, les matériels objets du contrat du 24 juin 2015, encore en sa possession et en bon état de marche, sous astreinte de 50 euros par jour ouvrable de retard à compter du trentième jour suivant la date de la notification qui lui sera faite de la présente décision,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a condamné Monsieur X. à payer à la SAS LOCAM une somme de 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du CPC, et condamné Monsieur X. à payer à Maître Vincent de C., ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS INPS GROUP, une somme de 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a condamné Monsieur X. aux entiers dépens de la présente instance, qui comprennent notamment le coût des frais de Greffe liquidés à la somme de 110,07 euros,
Et statuant à nouveau
- prononcer la nullité des contrats de fourniture établis par la société INPS et des contrats de location longue durée signés avec la société LOCAM le 24 juin 2015,
- dire et juger que la société INPS a d'ores et déjà repris les copieurs le 1er juillet 2015 et le 7 avril 2017 comme en attestent les bons de restitution,
- condamner la société LOCAM à restituer à Monsieur X. la somme de 13.686,85 euros correspondant aux loyers et sommes versés, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir et avec intérêt légal,
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'ancien article 1342-1 du code civil.
- débouter la société LOCAM de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions,
* A titre subsidiaire
- dire et juger que le liquidateur a mis fin aux contrats en cours, ces derniers étant résiliés de plein droit à compter du 20 septembre 2018,
- prononcer la caducité du contrat de location longue durée, à compter du 20 septembre 2018,
* En tout état de cause,
- débouter la société INPS et la société LOCAM de l'ensemble de leurs arguments, fins et prétentions,
- dire et juger que l'indemnité de résiliation sollicitée par LOCAM peut être qualifiée de clause pénale, et que la Cour devra apprécier le montant selon le préjudice réellement subi, Hors taxe, s'agissant d'une indemnité et correspondant à la véritable valeur du bien loué,
- condamner la société INPS et la société LOCAM au paiement in solidum de la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- fixer la créance de Monsieur X. au passif de la société COPYMANAGEMENT - INPS à la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profil de Maître E., Avocat.
[*]
Par ses uniques conclusions d'intimée signifiées et déposées le 29 octobre 2019, la SAS LOCAM demande de :
- dire inapplicables les dispositions du code de la consommation et notamment les articles L. 121-16-1 III et suivants du code de la consommation,
- dire et juger que Monsieur X. s'est engagé dans le champ de l'activité principale
- Si par extraordinaire la cour entendait appliquer les dispositions du code de la consommation à Monsieur X. ou à celui-ci en tant qu'associé gérant de la SCM Pôle médical de La C., rejeter sa demande d'annulation en vertu des dispositions de l'article L. 121-21-1 du code de la Consommation,
- dire et juger que Monsieur X. s'est engagé en qualité de responsable du bien à conserver le bien et à le restituer à la SAS LOCAM en vertu des articles 8 et 15 du contrat
- dire et juger la liquidation judiciaire d'INPS sans effet à l'égard de la SAS LOCAM compte tenu de la résiliation préalable du contrat de location longue durée pour défaut de paiement des loyers et l'acquisition de la clause résolutoire antérieurement à l'absence de poursuite du contrat de maintenance par le liquidateur dans le cadre de l'article L. 641-11-1 du code de commerce ;
Reconventionnellement
- dire et juger que les loyers à échoir définis dans le cadre d'un contrat ferme et irrévocable ne s'analysent pas en une clause pénale, en conséquence, condamner Monsieur X. à régler au titre des loyers à échoir la somme de
- 13 loyers à échoir du 30 septembre 2017 au 30 septembre 2020 : 13 x 3.060 € = 26.650 €
Augmentée de la clause pénale de 10 % soit la somme de 2.665,00 €
Reconventionnellement à titre subsidiaire, si la COUR devait estimer qu'il s'agit d'une clause pénale, dire et juger que les sommes réclamées ne sont pas manifestement excessives, en conséquence condamner Monsieur X.à régler au titre des loyers à échoir la somme de
- 13 loyers à échoir du 30 septembre 2017 au 30 septembre 2020 13 x 3060 € = 26.650 €
augmentée de la clause pénale de 10 % soit la somme de 2.665,00 €
- ordonner la capitalisation des intérêts en vertu de l'article 1154 du code civil
- condamner Monsieur X. à verser une somme de 2.000 € au 700 du code de procédure civile
- condamner Monsieur X. aux dépens.
[*]
La clôture a été prononcée par ordonnance du 22 février 2022.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
Maître de C. ès liquidateur de la société INPS GROUPE ayant été assigné à domicile mais ayant eu connaissance de la déclaration d'appel puisqu'il a répondu, il sera statué par arrêt réputé contradictoire.
A titre préalable il convient de relever qu'en cause d'appel, aux termes des conclusions tant de M. X. que de la SAS LOCAM, seuls les contrats de fourniture, de maintenance et de location signés le 24 juin 2015 sont concernés, le contrat de location de juin 2014 ayant été soldé et aucune demande n'étant plus formulée à ce titre.
Par ailleurs compte tenu de la date de signature des contrats (juin 2015) et en application de l'article 9 de l'ordonnance du 10 février 2016 relatif à l'entrée en vigueur de cette ordonnance portant réforme du droit des obligations, le litige sera tranché selon les dispositions du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, les articles visés étant les articles anciens de ce code.
De même sont applicables les dispositions du code de la consommation dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 14 mars 2016.
Sur l'interdépendance des contrats :
Il convient de rappeler que lorsque des contrats conclus de manière concomitante ou successive participent d'une même opération économique, notamment lorsque l'un d'eux est un contrat de location de longue durée qui constitue une modalité de financement de l'autre contrat, il existe entre eux une interdépendance de sorte que la résiliation du contrat principal emporte la caducité du contrat de location. Toute clause du contrat de location financière qui serait inconciliable avec ce principe d'interdépendance des contrats est réputée non écrite.
En l'espèce l'interdépendance des contrats de fourniture/maintenance/ location longue durée/ vente signés le 24 juin 2015 entre INPS/ M. X. / LOCAM n'est pas contestée par cette dernière et est bien établie au vu des pièces versées aux débats.
Sur la validité des contrats signés le 24 juin 2015 pour non-respect des dispositions des articles L.121-16-1 III et suivants du code de la consommation :
M. X. soulève la nullité des contrats signés le 24 juin 2015 pour non-respect des dispositions des articles L.121-16-1 III et suivants du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi du 17 mars 2014 dite « loi Hamon » entrée en vigueur le 13 juin 2014, notamment pour absence de bordereau de rétractation, et prétend que ces dispositions sont bien applicables aux contrats litigieux. Il indique qu'alors que le Tribunal de Commerce a retenu que ces dispositions étaient applicables, il n'a pas prononcé la nullité de telle sorte que l'infirmation du jugement doit être prononcée.
La SAS LOCAM soutient que ces dispositions ne sont pas applicables aux contrats notamment en ce que le docteur X. s'est bien engagé dans le cadre de son champ d'activité principal.
[*]
L'article L. 121-16-1-III, (repris à l'article L. 221-3 depuis le 1er juillet 2016) énonce que les dispositions des sections II, III, VI du présent chapitre applicable aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre 2 professionnels alors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Le chapitre premier du titre deuxième du livre deuxième du code de la consommation est relatif aux contrats conclus à distance et hors établissement.
La section II est intitulée Obligation d'information précontractuelle.
L'article L. 121-17-I (devenu L. 221-5) énonce à son alinéa 1 que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique aux consommateurs, de manière lisible et compréhensible les informations suivantes :
« 2° lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dans les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fait par décret en Conseil d'État, »
L'article L. 121- 18-1 (devenu l'article L. 221-9) précise dans son dernier alinéa que lorsque le contrat est conclu hors établissement, il est accompagné du formulaire type de rétractation mentionnée au 2° de l'article L. 121-17-I.
Enfin du code de la consommation qui reprend les dispositions de l'ancien article L. 121- 18-1 alinéa 1er (devenu l'article L. 242-1), édicte que les dispositions de l'article L. 121-18-1 sont prévus à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Dans la présente instance, M. X. qui exerce à [ville] son activité de médecin, a signé le 24 juin 2015 le bon de commande avec la SAS INPS Groupe, le contrat de maintenance avec la SAS INPS et le contrat de location longue durée avec la SAS Locam à [ville], soit hors des établissements des sociétés INPS Groupe et Locam.
Par ailleurs il s'agit bien d'un groupe contractuel autonome, distinct de celui signé en juin 2014, de telle sorte que c'est vainement que la SAS LOCAM prétend que les dispositions susvisées ne seraient pas applicables en ce qu'il s'agirait de « relations commerciales suivies » et d'une « opération de renouvellement. »
M. X., médecin, n'a pas pour activité la reprographie, et si la location des photocopieurs a été souscrite à titre professionnel, elle n'entre pas dans le champ principal de son activité, contrairement aux affirmations de la SAS LOCAM, un photocopieur n'étant pas un outil permettant à un professionnel de santé d'exercer son activité.
Enfin il justifie par les documents qu'il verse, qu'il emploie uniquement une personne, soit moins de 5 salariés.
La SAS LOCAM soutient ensuite que le contrat de location longue durée serait exclu du champ d'application de ces articles en application de l'article L. 121-2-4° en ce qu'il s'agit d'un contrat financier expressément exclu par cette disposition.
Cependant, comme le souligne à juste titre M. X., d'une part le contrat de fourniture, qui est le contrat principal dans l'opération économique d'ensemble, est incontestablement soumis à ces dispositions légales, de telle sorte que la nullité de celui-ci affecte celle du contrat de location qui en est l'accessoire.
D'autre part les contrats de location longue durée sont des contrats de location, impliquant une chose louée en contrepartie du paiement de loyers, il ne s'agit pas d'un contrat de service financier au sens du code monétaire et financier, mais bien un contrat de prestation de service soumis au code de la consommation.
Les dispositions du code de la consommation ci-dessus rappelées sont donc applicables au présent litige.
Il n'est pas contestable que les contrats proposés à la signature de M. X. par le représentant de la société INPS Groupe n'étaient pas accompagnés d'un quelconque formulaire de rétractation.
En conséquence, les contrats signés par Monsieur Pascal G. le 14 octobre 2015 encourent la nullité.
Pour s'opposer à cette nullité, la société Locam invoque L. 121- 21-1. (devenu l'article L. 221-20) du code de la consommation relatif à la prolongation du délai de rétractation en cas d'absence de bordereau, et l'absence de rétractation de M. X. dans le délai ainsi calculé. C'est le raisonnement qu'à retenu le Tribunal de Commerce pour rejeter la demande de nullité des contrats.
Cependant, cet article énonce que lorsque les informations relatives aux droits de rétractation n'ont pas été fournies aux consommateurs dans les conditions prévues par la loi, le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initiale, déterminé conformément à l'article L. 121-21. Toutefois, lorsque la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d'une période de 14 jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations.
Aucune disposition ne prévoit que le consommateur serait privé de son droit de faire valoir la nullité du contrat pour absence de formulaire de rétractation lorsqu'il n'a pas exercé préalablement son droit de rétractation.
C'est donc vainement que la société Locam soutient que les dispositions des articles relatifs aux contrats conclus hors établissement du code de la consommation ne seraient pas applicables à la présente instance.
En conséquence, le bon de commande, le contrat de maintenance et le contrat de location signés le 24 juin 2015 par M. X. avec la SAS INPS Groupe et la SAS Locam sont nuls.
Le jugement déféré est infirmé.
De plus, la nullité de ces 3 contrats entraîne la caducité de la vente du matériel entre la SAS INPS Groupe et la SAS Locam.
Il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens invoqués au soutien de la demande de nullité des contrats, dès lors que ce premier moyen est accueilli.
Sur la remise en état des parties :
La nullité des contrats a pour effet leur anéantissement avec effet rétroactif. Les parties doivent donc être remises dans l'état où elles se trouvaient avant leurs conclusions.
En conséquence la SAS Locam est tenue de restituer à M. X. les loyers qu'elle a perçus uniquement au titre du contrat du 24 juin 2015, soit la somme de 12.304,80 € TTC (2.050,80 / trimestre x 6 = 12.304,80€), l'échéance de mars 2017 n'ayant pas été réglée, ni les échéances postérieures. Le montant sollicité par M. X. de 13.686,85 €, dépourvu de toute explication, ne peut être retenu, n'étant pas conforme à la facture unique de loyers.
Il est fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1352-1 du code civil.
Par ailleurs il résulte clairement du bon d'intervention du 7 avril 2017, sur lequel il est indiqué « RESTITUTION DU MATERIEL » qu'à cette date la société INPS GROUPE a récupéré sur site dans les locaux de M. X. le photocopieur TA MPF 3525 n°LYJ4403247. Cette restitution faite entre les mains de la société INPS GROUPE, mandataire apparent de la SAS LOCAM, est opposable à cette dernière, dès lors qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la restitution de ce matériel.
En revanche il n'est pas démontré par M. X. qu'il ne serait plus détenteur du photocopieur TA DC 6240 H, cet appareil n'étant pas visé comme étant repris dans le bon du 7 avril 2017.
Mais, seule la société INPS Groupe aurait pu solliciter la restitution du matériel ensuite de la caducité de la vente.
La société Locam est déboutée de sa demande de restitution du photocopieur qui est toujours en possession de M. X.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
La société INPS GROUPE et la SAS LOCAM ayant succombé à l'instance, elles sont tenues in solidum aux dépens et au paiement à M. X. d'une somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Compte tenu de la liquidation judiciaire de la société INPS GROUPE, ces sommes seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par ces motifs :
La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire
Infirme le jugement du Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau
Déclare nul les contrats de fourniture, maintenance et location longue durée signés le 24 juin 2015 entre M. X., la société INPS GROUPE et la SAS LOCAM ;
Condamne en conséquence la SAS LOCAM à restituer à M. X. les loyers qu'elle a perçus uniquement au titre du contrat du 24 juin 2015, soit la somme de 12.304,80 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-1 du code civil ;
Rejette les autres demandes des parties ;
Dit que la société INPS GROUPE et la SAS LOCAM sont tenues in solidum aux dépens et au paiement à M. X. d'une somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS LOCAM aux dépens avec distraction au profit des avocats en la cause ;
Condamne la SAS LOCAM à payer à M. X. ladite somme de 3.000 € ;
Fixe au passif de la procédure collective de la société INPS GROUPE la somme de 3.000 € allouée à M. X. au titre des dépens et celle correspondant aux dépens de la présente instance.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 5947 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Reprographie : présentation globale
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte