CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-8), 9 juin 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9651
CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-8), 9 juin 2022 : RG n° 19/01826 ; arrêt n° 2022/221
Publication : Jurica
Extrait : « Mais, l'argumentation ainsi développée par la SARL Nice et Bristol au visa de l'article 1103 du code civil ne peut être retenue dès lors que les dispositions dont elle se prévaut pour bénéficier du droit de rétractation prévu à l'article L. 221-18 précité sont d'ordre public, étant d'ailleurs observé que, si tel n'était pas le cas, pourrait lui être opposée la mention par elle signée selon laquelle elle déclare « renoncer expressément à (son) droit de rétractation ».
Ceci étant, se pose donc la question de savoir si la location d'espace publicitaire entre ou non dans le champ de l'activité principale de l'intimée.
Or, si la publicité a nécessairement pour objectif de promouvoir l'activité du professionnel sollicité, elle ne ressort pas pour autant obligatoirement de cette activité.
En l'espèce, l'activité exercée par la SARL Nice et Bristol consistant, au vu de l'extrait Kbis produit aux débats, en la « location d'appartements nus avec conciergerie », il ne saurait être considéré que l'objet du contrat conclu entre les parties le 16 novembre 2017 relève de cette activité.
Ainsi, comme l'a retenu à juste titre le tribunal, l'intimée, qui peut bénéficier des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation, est fondée à se prévaloir de celles de l'article L. 221-18 lui permettant d'exercer un droit de rétractation.
Les conditions d'exercice de ce droit n'étant pas discutées, le jugement est confirmé en toutes ses dispositions. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
CHAMBRE 3-3
ARRÊT DU 8 JUIN 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Rôle N° RG 19/01826. Arrêt n° 2022/221. N° Portalis DBVB-V-B7D-BDW3L. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 9 janvier 2019 enregistrée au répertoire général sous le R.G. n° 2018F00274.
APPELANTE :
SAS INFOCOM FRANCE
poursuites et diligences de son représentant légal, dont le siège social est sis [Adresse 2], représentée par Maître Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉE :
SARL NICE ET BRISTOL
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, dont le siège social est sis [Adresse 1], représentée par Maître Pascale FABRE de la SCP CF SUD, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise PETEL, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Valérie GERARD, Président de chambre, Madame Françoise PETEL, Conseiller, Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 9 juin 2022.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022, Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 16 novembre 2017, la SARL Nice et Bristol a signé avec la SAS Infocom France un contrat de location d'espaces publicitaires sur un véhicule Renault Trafic de la mairie de [Localité 3], d'une durée de deux ans à compter de la livraison du véhicule, pour un montant total de 6.240 euros.
Par courrier recommandé du 21 novembre 2017, la SARL Nice et Bristol a indiqué à la SAS Infocom France annuler sa commande.
Suivant courrier du 9 janvier 2018, la SAS Infocom France lui a répondu qu'elle ne pouvait accepter sa demande d'annulation et poursuivait donc l'exécution du contrat signé.
Le 28 février 2018, le véhicule a été livré, et la facture établie pour une somme de 4.160 euros, correspondant au solde de la commande.
Par acte du 10 avril 2018, la SAS Infocom France a fait assigner la SARL Nice et Bristol en paiement devant le tribunal de commerce de Nice.
Par jugement du 9 janvier 2019, ce tribunal a :
- prononcé la nullité du contrat du 16 novembre 2017,
- condamné la SAS Infocom France à payer à la SARL Nice et Bristol la somme de 2.080 euros au titre des sommes indument perçues,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné la SAS Infocom France à payer à la SARL Nice et Bristol la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de 1'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions,
- condamné la SAS Infocom France aux entiers dépens.
Suivant déclaration du 30 janvier 2019, la SAS Infocom France a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt du 20 mai 2021, auquel il convient de se reporter, la cour a :
- dit l'appel recevable,
avant dire droit au fond,
- invité les parties à conclure sur la condition concernant l'effectif de la SARL Nice et Bristol à la date de souscription du contrat, en particulier au regard de la mention portée sur ladite convention du 16 novembre 2017,
- invité l'intimée à produire, notamment, son registre du personnel,
- renvoyé l'affaire à la mise en état,
- réservé les dépens.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées et déposées le 20 septembre 2021, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la SAS Infocom France demande à la cour de :
- débouter purement et simplement la société Nice et Bristol de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- dire que les conditions visant à octroyer un droit de rétractation selon les articles L. 221-3 et L. 221-18 du code de la consommation ne sont pas réunies,
- dire que la société Nice et Bristol ne dispose pas d'un droit de rétractation,
en conséquence,
- réformer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nice le 9 janvier 2019, en toutes ses dispositions,
- condamner la société Nice et Bristol à lui payer la somme de 4.160 euros due en vertu du contrat du 16 novembre 2017, somme portant intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société Nice et Bristol à lui payer la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, sur le fondement des articles 1231 et suivants du code civil,
- débouter la société Nice et Bristol de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Nice et Bristol à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner en outre la société Nice et Bristol aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de la SCP Tollinchi Perret-Vigneron Bujoli-Tollinchi, avocat aux offres de droit.
[*]
Par conclusions récapitulatives notifiées et déposées le 4 novembre 2021, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la SARL Nice et Bristol demande à la cour de :
- dire bien jugé mal appelé,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- y ajoutant, lui allouer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens,
à titre subsidiaire,
- dire que les termes du contrat rédigé par la société Infocom revêtent volontairement un caractère ambigu et équivoque constitutifs d'une faute grave qui doit être sanctionnée par la somme de 6.420 euros à titre de dommages et intérêts,
- ordonner la compensation,
- condamner la société Infocom à lui payer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Au vu des pièces désormais versées aux débats, et notamment du registre du personnel de la SARL Nice et Bristol, il apparaît que, malgré la mention figurant sur le contrat du 16 novembre 2017, le nombre de salariés employés à cette date par ladite société était bien « inférieur ou égal à cinq ».
La SAS Infocom France soutient que, cependant, les conditions cumulatives visées à l'article L. 221-3 du code de la consommation ne sont pas réunies dès lors que l'objet du contrat litigieux, la location d'espace publicitaire, entre dans le champ de l'activité principale, puisque destiné à la promouvoir, de la SARL Nice et Bristol, laquelle n'est en conséquence pas titulaire du droit de rétractation de quatorze jours prévu à l'article L. 221-18 du même code.
L'intimée réplique qu'il est constant, aux termes de 1'article 8 du contrat qui lie les parties, qu'est expressément prévu un délai de rétractation pour les entreprises dont 1'effectif est inférieur ou égal à cinq salariés, que l'on ne peut ajouter des dispositions supplémentaires au contrat sous prétexte d'une interprétation élargie, qu'il résulte en effet du contrat en cause que, si la rétractation n'est pas possible, c'est à la seule condition que l'entreprise ait un effectif supérieur à cinq salariés, qu'il n'existe aucune condition cumulative prévue au contrat ou dans les dispositions légales du code de la consommation visées à la convention.
Mais, l'argumentation ainsi développée par la SARL Nice et Bristol au visa de l'article 1103 du code civil ne peut être retenue dès lors que les dispositions dont elle se prévaut pour bénéficier du droit de rétractation prévu à l'article L. 221-18 précité sont d'ordre public, étant d'ailleurs observé que, si tel n'était pas le cas, pourrait lui être opposée la mention par elle signée selon laquelle elle déclare « renoncer expressément à (son) droit de rétractation ».
Ceci étant, se pose donc la question de savoir si la location d'espace publicitaire entre ou non dans le champ de l'activité principale de l'intimée.
Or, si la publicité a nécessairement pour objectif de promouvoir l'activité du professionnel sollicité, elle ne ressort pas pour autant obligatoirement de cette activité.
En l'espèce, l'activité exercée par la SARL Nice et Bristol consistant, au vu de l'extrait Kbis produit aux débats, en la « location d'appartements nus avec conciergerie », il ne saurait être considéré que l'objet du contrat conclu entre les parties le 16 novembre 2017 relève de cette activité.
Ainsi, comme l'a retenu à juste titre le tribunal, l'intimée, qui peut bénéficier des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation, est fondée à se prévaloir de celles de l'article L. 221-18 lui permettant d'exercer un droit de rétractation.
Les conditions d'exercice de ce droit n'étant pas discutées, le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris,
Condamne la SAS Infocom France à payer à la SARL Nice et Bristol la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
La condamne aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 5901 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Promotion de l’activité
- 5943 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : publicité