T. COM. ROUEN, 3 novembre 1997
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 973
T. COM. ROUEN, 3 novembre 1997 : RG n° 96/017391
(sur appel CA Rouen (2e ch.), 10 nov. 1999 : RG n° 97/05449)
Extrait : « Attendu également que, sur ce même contrat, au verso, le nom et la qualité du signataire ne sont pas complétés. Le nombre d'exemplaires ainsi que la date de signature du locataire n'est pas mentionné. La signature du locataire n'est pas précédée de la mention « lu et approuvé » ; Attendu que le Tribunal constate que le bordereau d'annulation de commande n'est pas établi de façon apparente et lisible tel que le prévoit la loi du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile ; Attendu qu'il y a lieu de considérer que le contrat avait plusieurs défauts de forme et qu'il pouvait par ce fait entraîner une confusion dans l'esprit de MME X. ; En conséquence le Tribunal déclare recevable l'opposition à ordonnance portant injonction de payer et que le contrat est nul ».
TRIBUNAL DE COMMERCE DE ROUEN
JUGEMENT DU 3 NOVEMBRE 1997
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 96/017391. Audience Publique du Tribunal de Commerce de ROUEN (Seine-Maritime) du trois novembre mil neuf cent quatre vingt dix sept où siégeaient MME DELECLUSE, Président d'audience, MRS RAVIER et DROUIN, Juges, assistés de MR CLERC, Greffier,. Le Tribunal vidant son délibéré du quinze septembre mil neuf cent quatre vingt dix sept où siégeaient MME DELECLUSE, Président d'audience, MRS FELIS et DROUIN, Juges, Assistés de MR CLERC, Greffier, a rendu le jugement suivant :
ENTRE :
PREFI SA
[adresse], demandeur(s) à l'injonction de payer et défendeur(s) à l'opposition, plaidant par MAÎTRES BONIFACE BUHOT LENGLET MALBESIN, d'une part
ET :
MME X. [enseigne]
[adresse], demandeur(s) à l'opposition d'injonction de payer, plaidant par MAÎTRE BOURDON d'autre part
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles 1405 et suivants du Nouveau Code de Procédure Civile régissant la procédure d'injonction de payer.
Attendu que Monsieur le Président du Tribunal de Céans a rendu une ordonnance en date du 19 juillet 1996 enjoignant à MME X. [enseigne] de payer à PREFI SA la somme principale de 29.957,04 francs outre les frais.
Attendu que cette ordonnance a été signifiée par acte de Maître(s) A. Huissier(s) de justice à [ville], en date du 29 août 1996.
Attendu que MME X. [enseigne] a formé opposition le 11 septembre 1996.
Que, suite à cette opposition, Monsieur le Greffier a, en application de l'Art. 1418 du NCPC, convoqué les parties, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour l'audience du 18 novembre 1996.
Attendu que par voie de conclusions reconventionnelles, MME X. demanderesse à l'opposition et défenderesse à l'injonction demande au Tribunal de :
- la recevoir en son opposition à ordonnance portant injonction de payer ;
A titre principal :
- constater l'existence de manœuvres dolosives à la charge de la Société PREFI ;
- constater l'absence de cause ;
- prononcer la nullité du contrat à l'encontre de MME X. ;
- [minute page 2] condamner la Société PREFI au paiement d'une somme de 10.000 francs à titre de dommages et intérêts ;
A titre subsidiaire :
- dire et juger que la Société PREFI a manqué à son obligation de conseil en qualité de professionnel ;
- dire et juger que sa responsabilité est engagée ;
- condamner la Société PREFI au paiement d'une somme de 35.000 francs à titre de dommages et intérêts ;
- dire et juger que PREFI est mal venue et irrecevable en sa demande au titre de la clause pénale ;
- condamner PREFI au paiement d'une somme de 6.030 francs sur le fondement de l'art 700 du NCPC ainsi qu'aux entiers dépens ;
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution ;
Attendu que par voie de conclusions en réponse, la Société PREFI demande au Tribunal de :
- confirmer les termes de l'ordonnance d'injonction de payer,
- condamner MME X. au paiement de la somme principale de 29.957,70 francs avec intérêts au taux conventionnel à compter de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 29 août 1996 ;
- condamner MME X. au paiement de la somme de 2.995,70 francs à titre de clause pénale ;
- condamner MME X. à restituer le matériel sous astreinte de 200 francs par jour de retard ;
- condamner MME X. au paiement de la somme de 5.000 francs à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- condamner MME X. au paiement de la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'art 700 du NCPC ;
- condamner MME X. aux entiers dépens ;
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;
LES FAITS :
Le 10 janvier 1996, MME X. a signé un contrat avec la Société PREFI pour un matériel terminal de paiement et lecteur de chèque fourni par la Société TELESIX. Aux termes de ce contrat, elle s'engageait à régler du 10 février 1996 au 10 janvier 2000 un loyer mensuel de 651,24 francs TTC.
Le même jour, MME X. signe un contrat de maintenance avec la Société TELESIX.
MME X. a cessé de payer le loyer à compter de la mensualité du 10 avril 1996. Le 26 juin 1996, la Société PREFI met en demeure MME X. de procéder au règlement de l'arriéré en l'informant qu'à défaut sous huit jours, le contrat serait résilié avec déchéance du terme, l'intégralité des loyers dus jusqu'au terme prévu du contrat devenant immédiatement exigible.
MME X. n'a rien réglé à la suite de cette lettre, ainsi qu'à la suite de l'ordonnance d'injonction de payer pour laquelle elle fait opposition.
D'où le litige.
[minute page 2]
MOYENS DES PARTIES :
Pour MME X., demanderesse à l'opposition
Nullité du contrat pour dol :
MME X. fait valoir qu'elle a été amenée de force à contracter puisque le matériel lui a été déposé et installé sur son bureau, deux jours après le passage de deux représentants dans son magasin.
Le contrat a été présenté de façon repliée ce qui ne permet pas de voir l'intitulé et aucune des mentions concernant la personnalité de la contractante n'a été remplie. Ceci tend à démontrer que son consentement a été obtenu de manière dolosive.
Le formulaire relatif à l'annulation du contrat est extrêmement mince et ne permet pas une bonne information.
Nullité du contrat pour absence de cause :
L'obligation de la Société PREFI était de fournir un matériel qui puisse être utilisé et rentabilisé par MME X.
Or le commerce de MME X., et son exploitation ne permettait aucune utilisation concrète et encore moins une rentabilité de ce matériel.
PREFI n'a donc fourni aucune contre partie à l'obligation souscrite par MME X. Cette obligation se trouve donc nulle pour absence de cause.
Manquement du cocontractant à son obligation de conseil :
Cette obligation de conseil s'impose à tout professionnel. Or ce professionnel a loué pour une durée de quatre ans à raison de plus de 500 francs par mois à MME X., petite commerçante, ayant un chiffre d'affaire peu important, un matériel qui ne pouvait lui être d'aucune utilité. Mme X. avait d'ailleurs demandé d'attendre le retour de son banquier pour prendre une décision.
Pour la Société PREFI :
La mise en demeure de procéder au règlement de l'arriéré du par MME X. a été faite conformément à l'art 6 des conditions générales du contrat de location.
MME X. n'a adressé à la Société PREFI aucune lettre de résiliation et ne peut donc être prise en compte.
L'argumentation développée par MME X. concerne en réalité la Société TELESIX. C'est avec cette société qu'elle a eu contact au moment de la passation des contrats de location maintenance et abonnement au service RESIST.
Le contrat de location est parfaitement clair, explicite et précis, et ne peut en aucun être qualifié abusivement contractuel et de médiocre présentation.
Le bordereau de rétractation comporte toutes les mentions imposées par la loi du 22 décembre 1972 et les articles 2.2 bis, 3 et 4 de la loi, sont intégralement reproduits conformément aux prescriptions légales.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] MOTIVATIONS :
Attendu que le contrat de location N° XX comporte au recto dans sa partie supérieure un cachet dont une partie n'est pas lisible ;
Attendu que ce contrat ne comporte aucune date de rédaction ;
Attendu également que, sur ce même contrat, au verso, le nom et la qualité du signataire ne sont pas complétés. Le nombre d'exemplaires ainsi que la date de signature du locataire n'est pas mentionné. La signature du locataire n'est pas précédée de la mention « lu et approuvé » ; Attendu que le Tribunal constate que le bordereau d'annulation de commande n'est pas établi de façon apparente et lisible tel que le prévoit la loi du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile ; Attendu qu'il y a lieu de considérer que le contrat avait plusieurs défauts de forme et qu'il pouvait par ce fait entraîner une confusion dans l'esprit de MME X. ;
En conséquence le Tribunal déclare recevable l'opposition à ordonnance portant injonction de payer et que le contrat est nul ;
Attendu que MME X. ne justifie pas avoir subi un préjudice quelconque, le Tribunal dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de MME X. les frais irrépétibles qu'elle a du engager, le Tribunal faisant partiellement droit à sa demande devra condamner PREFI à lui payer la somme de 1.500 francs en application de l'art 700 du NCPC
Attendu qu'elle succombe, la Société PREFI devra être condamnée aux entiers dépens de la présente instance
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, après en avoir délibéré, statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire.
Reçoit PREFI SA, en ses demandes, fins et conclusions, les dit mal fondées ;
Reçoit MME X. en son opposition la déclare fondée
Déclare recevable l'opposition à injonction de payer ;
Prononce la nullité du contrat de location ;
Dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts en faveur de MME X. ;
Condamne la STÉ PREFI à payer à MIME X. la somme de mille cinq cent francs (1.500 francs) sur le fondement de l'art 700 du NCPC ;
Condamne la Société PREFI en tous les dépens liquidés à ce jour à la somme de cinq cent trente francs 35 (530,35) ;
Rejette comme inutiles et mal fondées, toutes autres demandes, fins et conclusions des parties, le tout pour les causes sus énoncées.
Ont signé l'original : le Président MME DELECLUSE
Le Greffier MR CLERC