TI TOURS, 15 juin 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 1165
TI TOURS, 15 juin 2009 : RG n° 08-001444 ; jugt n° 897
(sur appel CA Orléans, 29 avril 2010 : RG n° 09/02406)
Extrait : « Attendu qu'en l'espèce le contrat initial prévoyait certes, ainsi que le souligne la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE un montant maximum du découvert global autorisé de 12.000 euros ; Attendu cependant que le découvert utile autorisé [a] été fixé contractuellement à la somme de 3.000 euros ; […] ; que force est de constater que cette augmentation n'a fait l'objet d'aucune nouvelle offre préalable alors que la loi du 28 janvier 2005, en ce reprenant une jurisprudence ancienne et constante, a ajouté à l'article L. 311-9 du code de la consommation l'obligation pour l'organisme de crédit de délivrer une nouvelle offre préalable en cas d'augmentation de découvert ;
Attendu [que] la clause, contenue dans le contrat d'ouverture de crédit utilisable par fractions qui prévoit que le découvert utile est de 3.000 euros et que l'emprunteur peut faire évoluer ce montant jusqu'au découvert maximum autorisé, qui est de 12.000 euros ne saurait être invoquée par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ; qu'en effet cette clause constitue une clause abusive, créant un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, car elle permet l'augmentation du crédit sans émission d'une nouvelle offre, sans information de l'emprunteur sur les conditions du nouveau crédit, notamment sur les charges de remboursement et laisse penser à cet emprunteur qu'il ne dispose pas, dans ce cas, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation ; […] ;
que c'est donc bien au regard de la somme du montant du découvert utile initial (3.000 euros) que doit s'apprécier le dépassement du découvert faisant courir le délai de forclusion ; […] ; Attendu que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera donc déclarée irrecevable en sa demande en paiement ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE TOURS
JUGEMENT DU 15 JUIN 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 08-001444. Jugement n° 897. Audience publique tenue le 15 juin 2009, Au siège du Tribunal, place Jean-Jaurès à TOURS.
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : VAN GAMPELAERE Véronique, Vice-Présidente, du Tribunal d'Instance de TOURS,
GREFFIER : VAUMORON Nadine, Greffier,
DÉBATS : A l'audience publique du 4 mai 2009
DÉCISION : Prononcé publiquement le 15 juin 2009 par mise à la disposition des parties au Greffe de ce Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 459 du Code de Procédure Civile.
ENTRE :
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la Sté CETELEM
[adresse], représenté(e) par SCP ENVERGURE - BAYLAC/ OTTAVY/ GEORGET/ DESHOULIERES, avocat au barreau de TOURS, D'une Part
ET :
Monsieur X.
[adresse], représenté(e) par Maître GENDRE Nicolas, avocat au barreau de TOURS, Aide juridictionnelle n° 2009/XXX du [date], D'autre Part ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant offre préalable acceptée le 9 février 2004, la société CETELEM aux droits de laquelle vient désormais la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a consenti à Monsieur X. une ouverture de crédit utilisable par fractions, le montant du découvert initial autorisé étant de 3.000 euros.
Par acte du 22 décembre 2008, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner Monsieur X. devant le tribunal d'instance de Tours pour le voir condamner à lui payer la somme de 10.094,96 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 3 juillet 2008, les intérêts devant se capitaliser en application de l'article 1154 du code civil.
Elle sollicite enfin l'allocation de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le bénéfice de l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Le défendeur soulève en la forclusion de l'action en paiement en faisant valoir que le montant du découvert autorisé (3.000 euros) a été dépassé le 16 mars 2006, point de départ du délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du code de la consommation.
Il soutient que la demanderesse ne peut se prévaloir pour échapper aux effets de la forclusion de la clause du contrat indiquant que le prêteur autorise l'emprunteur à tirer sur son compte dans la limite du découvert maximum autorisé de 12.000 euros le montant que l'emprunteur choisit d'utiliser constituant le découvert utile.
Il fait en effet valoir que cette clause est abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation.
Subsidiairement il sollicite la condamnation de la demanderesse à lui payer une somme de 11.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi en raison des manquements de l'organisme prêteur à son obligation de conseil.
Toujours subsidiairement il conclut à la déchéance du droit aux intérêts à compter du 16 mars 2004 faute pour la société CETELEM de lui avoir, à cette date, délivré une nouvelle offre de crédit.
Il sollicite, toujours subsidiairement, la compensation des créances.
Il demande enfin que la demanderesse soit condamnée à verser à son conseil, Maître Nicolas Gendre, la somme de 1.016,60 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
La demanderesse réplique que le contrat de crédit fait expressément référence à un montant de découvert maximum autorisé de 12.000 euros et que le découvert utile d'origine de 3.000 euros pouvait parfaitement être augmenté sans qu'il soit nécessaire de régulariser un avenant dans la limite de la somme de 12.000 euros.
Elle ajoute que le contrat a régulièrement été renouvelé.
Elle s'oppose à l'octroi de délais de paiement qui ne sont au demeurant pas demandés par le défendeur et ne fait aucun commentaire sur la demande indemnitaire en paiement de la somme de 11.000 euros formée, à titre subsidiaire, par le défendeur.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'action en paiement au regard du délai biennal de forclusion
Attendu qu'aux termes de l'article L. 311-37 du Code de la Consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée [minute page 3] dans le délai d'ordre public de deux ans qui suit l'événement qui lui a donné naissance ;
Attendu qu'en matière d'ouverture de crédit remboursable par fractions le point de départ du délai de forclusion est constitué par :
- la première échéance impayée non régularisée
- ou par un dépassement du découvert initialement autorisé, dès lors qu'il n'a pas ultérieurement été restauré (cf. sur ce point, pour des exemples, arrêt du 22 novembre 2007, Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile et arrêt de la Cour d'Appel d'Orléans du 18 décembre 2008), lesquels manifestent la défaillance de l'emprunteur ;
Attendu qu'en l'espèce le contrat initial prévoyait certes, ainsi que le souligne la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE un montant maximum du découvert global autorisé de 12.000 euros ;
Attendu cependant que le découvert utile autorisé [a] été fixé contractuellement à la somme de 3.000 euros ;
Attendu qu'il ressort du décompte que le capital restant dû a été porté à 3.403,51 euros le 30 janvier 2006 et qu'il n'est plus jamais redescendu en dessous depuis ;
que force est de constater que cette augmentation n'a fait l'objet d'aucune nouvelle offre préalable alors que la loi du 28 janvier 2005, en ce reprenant une jurisprudence ancienne et constante, a ajouté à l'article L. 311-9 du code de la consommation l'obligation pour l'organisme de crédit de délivrer une nouvelle offre préalable en cas d'augmentation de découvert ;
Attendu [que] la clause, contenue dans le contrat d'ouverture de crédit utilisable par fractions qui prévoit que le découvert utile est de 3.000 euros et que l'emprunteur peut faire évoluer ce montant jusqu'au découvert maximum autorisé, qui est de 12.000 euros ne saurait être invoquée par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;
qu'en effet cette clause constitue une clause abusive, créant un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, car elle permet l'augmentation du crédit sans émission d'une nouvelle offre, sans information de l'emprunteur sur les conditions du nouveau crédit, notamment sur les charges de remboursement et laisse penser à cet emprunteur qu'il ne dispose pas, dans ce cas, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation ;
que cette clause abusive se trouve donc réputée non écrite en application de l'article L. 121-1 [N.B. conforme à la minute] du code de la consommation ;
que c'est donc bien au regard de la somme du montant du découvert utile initial (3.000 euros) que doit s'apprécier le dépassement du découvert faisant courir le délai de forclusion ;
que l'action engagée en août 2008 est donc forclose, le dépassement du découvert autorisé de 3.000 euros, non restauré depuis, remontant à janvier 2006
Attendu que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera donc déclarée irrecevable en sa demande en paiement, ce qui rend sans objet les demandes subsidiaires du défendeur ;
Sur les dépens et les frais non répétibles
[minute page 4] Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais non répétibles ;
que la demanderesse supportera la charge des dépens ;
Sur l'exécution provisoire
Attendu qu'eu égard à ce qui vient d'être jugé, l'exécution provisoire de la présente décision est sans intérêt
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
Le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort :
Déclare la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE irrecevable en son action en paiement,
Constate que les demandes subsidiaires de Monsieur X. sont dès lors sans objet,
Déboute les parties de leurs demandes au titre de leurs frais non répétibles,
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,
Condamne la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle,
Ainsi fait et prononcé, les jours, mois et an que susdits,
Le greffier Le président
N. VAUMORON V. VAN GAMPELAERE
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives