CA LYON (6e ch. civ.), 29 mars 2007
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1211
CA LYON (6e ch. civ.), 29 mars 2007: RG n° 05/07687
Publication : Juris-Data n° 342005
Extrait : « Attendu que l’article 2 des conditions générales figurant au dos du bon de commande de la cuisine stipule que « les délais de livraison sont maintenus dans la limite du possible et sont soumis aux circonstances indépendantes de la volonté du vendeur. Un retard éventuel dans la livraison ne pourra, en aucun cas, constituer pour l’acheteur un motif de demande de dommages et intérêts ou de résiliation de la commande » ; Attendu que si ces dispositions ont été effectivement acceptées par l’acheteur selon la mention portée sur le verso du bon de commande signé, elles s’analysent en une clause abusive au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation car elles privent de tout recours le consommateur en cas de retard de livraison, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations du contrat ; Qu’une telle clause est réputée non écrite ».
COUR D’APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 29 MARS 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/07687. Décision déférée : Décision du Tribunal d'Instance de LYON du 8 septembre 2005 - (R.G. : 2004/1598). Nature du recours : APPEL
Affaire : Demande en paiement du prix, ou des honoraires formée contre le client et/ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix, ou des honoraires.
APPELANTE :
SA ASTRAL
Siège social : [adresse], représentée par Maître DE FOURCROY, Avoué, assistée par Maître NICOLET, Avocat,
INTIME :
Monsieur X.
Demeurant [adresse], représenté par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, Avoués, assisté par Maître BUREL, Avocat,
[minute page 2]
DÉBATS en audience publique du 27 février 2007 tenue par Madame DUMAS, Conseiller rapporteur, (sans opposition des avocats dûment avisés) qui a fait le rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté lors des débats de Madame SENTIS, Greffer,
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Monsieur LECOMTE, Président, Madame DUMAS, Conseiller, Madame de la LANCE, Conseiller
a rendu le 29 MARS 2007, l’ARRÊT contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour d’Appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2éme alinéa de l’article 450 du nouveau Code de procédure civile, signé par Monsieur LECOMTE, Président, et par Madame CARRON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon bon de commande du 7 octobre 2002, Monsieur X. a confié à la Société ASTRAL la réalisation d’une cuisine intégrée à son domicile à [ville] représentant la somme de 20.423,88 €.
Monsieur X. se plaignant d’un retard de livraison et de diverses anomalies a refusé de signer le bon de réception et de régler le solde de la facture s’élevant à 2.722,32 €.
Le 20 avril 2004 la Société ASTRAL l’a assigné en paiement devant le tribunal d’instance de Lyon.
Par jugement du 8 septembre 2005, le tribunal a rejeté la demande en paiement après avoir retenu un retard imputable à la Société ASTRAL quant à la réalisation de ses obligations contractuelles et chiffré le préjudice consécutif à ce retard à la somme de 2.722,32 €. Le tribunal a également condamné la SA ASTRAL à réparer la poignée du réfrigérateur dans le délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision.
La Société ASTRAL, ayant relevé appel de cette décision, conclut à sa réformation en faisant valoir, que les conditions générales de vente sont opposables à Monsieur X. et non abusives. Elle souligne que nonobstant le retard de livraison d’une semaine, la cuisine était opérationnelle pour les fêtes de Noël, comme demandé. D’autre part, elle conteste l’existence des divers désordres allégués en expliquant que l’insuffisance du diamètre de la gaine d’évacuation posée par l’électricien ne lui est pas imputable, que la surchauffe d’éclairage n’est pas établie, pas plus que la mauvaise fixation des poignées du réfrigérateur ou la surchauffe de la plaque à induction laquelle n’a pas fourni par elle, et que la doléance relative à l’enlèvement des filtres de la hotte n’est pas sérieuse. La société appelante demande à la Cour de condamner Monsieur X. au paiement des sommes suivantes :
* 2.722,32 € outre intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 3 juillet 2003 ;
* [minute page 3] 800,00 € outre intérêts de dommages et intérêts pour résistance abusive en application de l’article 1382 du Code civil ;
* 2.500,00 € en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Monsieur X. conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a chiffré le préjudice lié au retard de livraison à la somme de 2.722,32 € mais à sa réformation quant aux désordres importants affectant le bon fonctionnement de la cuisine à savoir : insuffisance du diamètre du tuyau d’évacuation de la hotte, surchauffe éclairage, fixation des plinthes de la table, dévissage de la poignée du réfrigérateur, grille de la hotte coincée par une crédence, surchauffe sous la plaque à induction, etc. justifiant l’octroi de la somme de 4.500 € en réparation du préjudice subi et persistant, ainsi que la reprise des désordres dans le cadre du service après-vente. En toute hypothèse, l’intimé demande à la Cour de débouter la Société ASTRAL de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 500 € sur le fondement de l’article 32-I du nouveau Code de procédure civile outre la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le retard de livraison :
Attendu que l’article 2 des conditions générales figurant au dos du bon de commande de la cuisine stipule que « les délais de livraison sont maintenus dans la limite du possible et sont soumis aux circonstances indépendantes de la volonté du vendeur. Un retard éventuel dans la livraison ne pourra, en aucun cas, constituer pour l’acheteur un motif de demande de dommages et intérêts ou de résiliation de la commande » ;
Attendu que si ces dispositions ont été effectivement acceptées par l’acheteur selon la mention portée sur le verso du bon de commande signé, elles s’analysent en une clause abusive au sens de l’article L. 132-1 du Code de la consommation car elles privent de tout recours le consommateur en cas de retard de livraison, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations du contrat ;
Qu’une telle clause est réputée non écrite ;
Attendu, en l’espèce, que les conditions particulières portées sur le bon de commande stipulent une réalisation des travaux du 9 au 15 décembre 2002 alors qu’en réalité les travaux ont été commencés le 19 décembre 2002, puis achevés pour les ultimes finitions le 31 janvier 2003 ;
Que comme l’a relevé à juste titre le premier juge, il n’existe aucun cas de force majeure justifiant le retard ; qu’en effet, les difficultés rencontrées par le fournisseur en période de décembre n’étaient pas imprévisibles et irrésistibles ;
Que, toutefois, les attestations produites des artisans font apparaître que l’installation était quasi-opérationnelle pour les fêtes de Noël ;
Que le retard dans la livraison, certes préjudiciable au regard des impératifs de réaménagement suite à un incendie, ne saurait justifier l’exception d’inexécution du règlement du solde de la facture s’élevant à 2.722,32 € ;
[minute page 4] Que la Cour, réformant en cela la décision déférée, évalue le préjudice subi de ce chef à la somme de 1.000 € ;
Sur les désordres :
Attendu que Monsieur X. verse aux débats un nouveau constat d’huissier du 24 mai 2006 ;
- Désordres de la hotte aspirante :
Attendu que l’insuffisance du diamètre du trou d’évacuation et la fonction défectueuse de marche/arrêt en rapport avec le défaut d’aspirateur ne peuvent être imputés à la Société ASTRAL qui n’a pas effectué les travaux de trou d’évacuation et a rempli son devoir de conseil, ainsi qu’il en est attesté ;
Attendu que la difficulté d’accès au filtre pour le nettoyer en raison d’un retour inox ne peut être considérée comme un désordre imputable au cuisiniste ;
- Défaut d’isolation thermique et éclairage :
pas révélatrice d’une malfaçon vu le système de chauffage impliquant un vide sous la plaque qui peut être un tiroir contenant des objets adaptés ;
Attendu que la surchauffe des spots d’éclairage halogène n’est pas non plus révélatrice d’un désordre et il appartient à l’utilisateur d’éviter de placer à proximité des denrées fragiles ;
Attendu en revanche que la non fixation du fil électrique constitue une anomalie justifiant une moins-value ;
- Sur la réfrigération et les tiroirs :
Attendu que la mauvaise fixation de la poignée encore branlante, comme l’a constaté l’huissier, doit être imputée à la Société ASTRAL et donner lieu à une moins-value ; que l’absence de la pièce du haut permettant la distribution de l’air froid, constatée seulement en mai 2006, ne peut être imputée au cuisiniste ;
Qu’il en est de même pour le mauvais fonctionnement des fermetures des tiroirs et de l’absence de fixation de l’angle de protection du bas du plan de travail ;
Qu’enfin les plinthes de la table ont été fixées ;
Sur le compte entre les parties :
Attendu, en définitive, que les désordres imputables à la Société ASTRAL, relativement peu importants, justifient une moins-value globale de 500 € à laquelle s’ajoute un trouble de jouissance indemnisé à hauteur de 300 € ;
Attendu qu’après compensation entre les créances réciproques des parties comprenant aussi la somme de 1.000 € au titre du retard de livraison, Monsieur X. reste débiteur de la somme de 922,32 € outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure ;
Attendu qu’il n’y a pas lieu d’ordonner la reprise de travaux ;
[minute page 5] Attendu qu’au vu de la solution donnée au litige, aucune attitude abusive ne peut être retenue à l’encontre de l’une ou l’autre des parties de nature à donner lieu à des dommages et intérêts ;
Attendu que l’équité ne conduit pas non plus à faire application des dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que les dépens de première instance et d’appel seront partagés par moitié entre les parties ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR
Réforme partiellement le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Condamne Monsieur X. à payer à la Société ASTRAL la somme de 922,32 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 3 juillet 2003, ce, après compensation entre les créances réciproques des parties,
Déboute chacune des parties de leurs autres demandes,
Fait masse des dépens de première instance et d’appel et les partage par moitié entre les parties avec distraction au profit des avoués de la cause conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 6087 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Opposabilité des conditions générales - Conditions figurant sur l’écrit signé par le consommateur - Clauses de reconnaissance et d’acceptation
- 6475 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Vente en général (7) - Obligations du vendeur - Obligation de délivrance : délai de livraison
- 6483 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Vente d’ameublement - Cuisine intégrée (vente et installation) (3) - Exécution du contrat