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CA NANCY (2e ch. civ.), 1er juin 2006

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 1er juin 2006
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 04/00184
Décision : 1698/06
Date : 1/06/2006
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 16/01/2004
Décision antérieure : TI NANCY, 18 novembre 2003
Numéro de la décision : 1698
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1523

CA NANCY (2e ch. civ.), 1er juin 2006 : RG n° 04/00184 ; arrêt n° 1698/06

Publication : Juris-Data n° 330232

 

Extrait  : « Que vainement M. X. soutient-il que la clause prévoyant un délai de carence constituerait une clause abusive et donc nulle ; Qu'en effet, aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, est abusive la clause qui a pour objet ou effet de créer au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Qu'en l'espèce, ce « déséquilibre significatif » n'est nullement réalisé ; Qu'il est par ailleurs d'usage dans les contrats d'assurance de prévoir un délai de carence, ou de non prise en charge ; Qu'un délai de 120 jours, pour un contrat de 24 mois n'avait rien d'anormal ; Qu'enfin, la clause de non prise en charge (délai de carence) stipulée au contrat, était libellée en caractères gras et apparents ; Qu'elle a donc vocation à s'appliquer en vertu des dispositions de l'article 1134 du Code civil ».

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 01 JUIN 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 04/00184. Arrêt n° 1698/06.

 

APPELANTE :

SA QUATREM - ASSURANCES COLLECTIVES

dont le siège est [adresse], agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège, Suivant Déclaration d'appel déposée au Greffe de la Cour d'Appel de NANCY le 16 Janvier 2004 d'un jugement rendu le 18 novembre 2003 par le Tribunal d'Instance de NANCY, Comparant et procédant par le ministère de la SCP MILLOT-LOGIER - FONTAINE, ses avoués associés constitués, Plaidant par Maître THIBAUT, Avocat à la Cour,

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

demeurant [adresse], AJ 55 % n° […] du […], Comparant et procédant par le ministère de Maître GRÉTÉRÉ, son avoué constitué, [minute page 2] Plaidant par Maître MERY, Avocat à la Cour,

 

DÉBATS : La cause a été débattue à l'audience publique du 16 février 2006, devant Monsieur MERLE, Président, Monsieur MAGNIN et Monsieur RUFF, Conseillers, assistés de Mademoiselle CHOUIEB, Greffier, Les Avocats assistés des Avoués des parties ayant été entendus,

Le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu à l'audience publique du 23 mars 2006,  Il a été délibéré de la cause par les Magistrats susdits, qui ont assisté aux débats,

A l'audience publique du 23 mars 2006, le Président a annoncé que le prononcé de l'arrêt était reporté à l'audience publique du 20 avril 2006, A l'audience publique du 20 avril 2006, le Président a annoncé que le prononcé de l'arrêt était reporté à l'audience publique du 1er juin 2006, Et, à l'audience publique de ce jour, 1er juin 2006, la Cour a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] FAITS ET PROCÉDURE :

Selon acte sous seing privé du 28 novembre 2000, M. X. a souscrit auprès de la DIAC un prêt de 7.622 euros destiné à l'acquisition d'un véhicule automobile.

En outre, il a adhéré à l'assurance QUATREM « décès, incapacité, perte d'emploi » ;

Il a signé une déclaration d'état de santé ainsi qu'une déclaration d'activité, en indiquant qu'il n'était pas en état d'incapacité de travail totale ou partielle suite à un accident ou à une maladie.

Le 31 janvier 2001 il a fait l'objet d'un licenciement économique par son employeur, la Maison Construction Lorraine, où il bénéficiait d'un C.D.I. ;

Il a alors opté pour le plan d'aide au retour à l'emploi et a perçu l'indemnité correspondante à compter du 8 septembre 2001.

Il a sollicité auprès de la Société d'assurance QUATREM la prise en charge du prêt, et cette demande a été réceptionnée le 18 septembre 2001.

Cependant par courrier du 3 janvier 2002, l'assurance lui a notifié un refus de prise en charge pour fausse déclaration et mauvaise foi, en soutenant que le 9 novembre 2000 il se trouvait en arrêt de travail alors qu'il avait certifié le contraire.

C'est dans ces conditions que par exploit du 26 mars 2003, M. X., a fait assigner devant le Tribunal d'Instance de NANCY, la SA QUATREM ASSURANCES COLLECTIVES, afin qu'elle soit condamnée à le garantir en raison de son licenciement économique, et à lui payer la somme de 1.500 euros à tire de dommages et intérêts outre la somme de 548,60 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement contradictoire du 18 novembre 2003, le Tribunal d'Instance de NANCY a fait droit aux demandes de M. X.

[minute page 4] La SA QUATREM ASSURANCES COLLECTIVES a relevé appel de ce jugement. Elle demande à la Cour de l'infirmer, à titre principal de prononcer la nullité du contrat pour fausse déclaration, et à titre subsidiaire, de constater que la Société QUATREM n'avait pas à prendre en charge les échéances du prêt souscrit par M. X., et de condamner ce dernier à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu qu'il est constant que lors de la souscription du contrat d'assurance accessoire à la conclusion de l'offre préalable de crédit le 28 novembre 2000, M. X. a apposé sa signature sous la mention dactylographiée aux termes de laquelle il a déclaré « ne pas se trouver en état d'incapacité de travail totale ou partielle suite à accident ou maladie, ne pas suivre ou devoir suivre un traitement médical régulier, ne pas prendre régulièrement de médicaments » ;

Qu'il est tout aussi constant que M. X. se trouvait pourtant en arrêt maladie depuis le 9 novembre 2000, et ce, jusqu'au 15 décembre 2000 ;

Qu'ainsi au jour de la souscription de ce contrat d'assurance, M. X. ne pouvait ignorer qu'il se trouvait effectivement en arrêt de travail, et ce, malgré ses origines étrangères et le fait qu'il connaissait peu la langue française ;

Attendu que M. X. met toutefois en cause la lisibilité du formulaire et fait valoir qu'il ne maîtrisait pas bien la langue française, pour exciper de sa bonne foi ;

Or attendu que le formulaire dont s'agit répond parfaitement aux conditions de clarté et de lisibilité exigées par la jurisprudence ;

Que par ailleurs, force est de relever que le manque de maîtrise de la langue française invoqué par M. X., ne l'a nullement empêché de signer son contrat de travail, de souscrire un prêt en vue de l'achat d'un véhicule automobile, et de solliciter un arrêt de travail ;

[minute page 5] Qu'admettre le raisonnement de M. X. aboutirait au fait qu'aucune clause d'aucun contrat ne pourrait lui être opposable ;

Que par ailleurs, rien n'établit en l'espèce que M. X. ne parlerait pas ou ne comprendrait pas correctement la langue française ;

Que de plus, M. X. a bien effectué une déclaration d'arrêt de travail auprès de la CPAM de sorte qu'il savait qu'il se trouvait en arrêt de travail au jour de la souscription du contrat ci-dessus ;

Qu'en outre, il ressort des pièces versées aux débats qu'à la suite de la perte d'emploi de M. X., survenue le 31 janvier 2001, la DIAC lui a adressé le 13 novembre 2001, un questionnaire, auquel il a répondu « NON » aux deux questions suivantes :

- « Avez-vous reçu des soins ou subi des traitements médicaux au cours de la période du 28/11/1998 au 2811112000 ? »

- « Au cours de cette même période avez-vous été en arrêt de travail pour cause de maladie ou d'accident ? »

Or attendu que le relevé des prestations versées par la CPAM, fait apparaître que M. X. a subi trois arrêts pour maladie au cours de cette période, à savoir : du 24.11.98 au 06.12.99, du 17.05.99 au 28.05.99, puis du 09.11.00 au 15.12.00 ;

Que vainement M. X. vient-il prétendre qu'il ne comprend pas bien le français, alors qu'il lui était tout à fait loisible de solliciter une aide pour se faire traduire ou expliquer les documents portés à sa connaissance ;

Qu'admettre la thèse de M. X. reviendrait ni plus ni moins qu'à lui rendre inopposables toutes clauses contractuelles de quelque nature qu'elles soient ;

Qu'au vu de tout ce qui précède, il convient de retenir la mauvaise foi de M. X. contrairement à ce qu'a décidé le premier juge ;

[minute page 6] Attendu que c'est en vain que M. X. affirme que l'arrêt de travail, étant relatif à une maladie bénigne, n'aurait eu aucune incidence sur la souscription du contrat d'assurance :

Qu'en effet, un tel motif est d'autant plus inopérant, que l'arrêt de travail étant soumis au secret médical, la Société QUATREM n'aurait pu en connaître ni la teneur ni la gravité ;

Qu'au surplus il convient de relever qu'il s'agissait en l'espèce d'un arrêt de travail de 34 jours, ce qui n'est pas négligeable et encore moins bénin... ;

Que pour l'ensemble des motifs ci-dessus, il y a lieu de constater la nullité du contrat litigieux souscrit par M. X.

Attendu de surcroît, que M. X. avait demandé la mise en oeuvre de la garantie perte d'emploi, le 31 janvier 2001 ;

Qu'il a souscrit le contrat d'assurance le 28 novembre 2000, soit, deux mois et deux jours avant d'être mis au chômage ;

Or attendu que le § IV « garanties de l'assurance » dudit contrat, stipule un délai de carence de 90 jours pour les crédits d'une durée inférieure à 20 mois, et de 120 jours pour ceux d'une durée supérieure à 20 mois ;

Qu'en l'espèce le nombre d'échéances du prêt souscrit par M. X. étant de 24, le délai de carence (non prise en charge) était donc de 120 jours.

Qu'en la cause, l'adhésion datant du 28 novembre 2000 le délai de carence (non prise en charge) expirait le 28 mars 2001 ;

Que le sinistre étant intervenu le 31 janvier 2001, M. X. se trouvait encore dans le délai de carence (non prise en charge) et ne pouvait donc pas faire l'objet d'une prise en charge par l'assurance ;

Qu'il s'ensuit donc, que la Société QUATREM n'avait pas à prendre en charge les échéances du prêt.

[minute page 7] Que vainement M. X. soutient-il que la clause prévoyant un délai de carence constituerait une clause abusive et donc nulle ;

Qu'en effet, aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, est abusive la clause qui a pour objet ou effet de créer au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Qu'en l'espèce, ce « déséquilibre significatif » n'est nullement réalisé ;

Qu'il est par ailleurs d'usage dans les contrats d'assurance de prévoir un délai de carence, ou de non prise en charge ;

Qu'un délai de 120 jours, pour un contrat de 24 mois n'avait rien d'anormal ;

Qu'enfin, la clause de non prise en charge (délai de carence) stipulée au contrat, était libellée en caractères gras et apparents ;

Qu'elle a donc vocation à s'appliquer en vertu des dispositions de l'article 1134 du Code civil.

Qu'il ressort donc de ce qui précède, qu'en tout état de cause la Société QUATREM n'avait pas à prendre en charge les échéances du prêt, et ce, en application des stipulations du contrat signé par M. X. ;

Attendu en conséquence, qu'il y a lieu d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et de débouter M. X. de toutes ses demandes.

Attendu que l'équité ne commande pas qu'il soit fait en la cause application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Qu'enfin M. X. succombant en ses prétentions, supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 8] PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

- DÉCLARE recevable et bien fondé l'appel de la SA QUATREM ASSURANCES COLLECTIVES,

- INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

- DÉCLARE nul le contrat d'assurance souscrit par M. X. en application des dispositions de l'article L 113-8 du Code des Assurances,

- DÉBOUTE en conséquence M. X. de toutes ses demandes.

- Surabondamment, CONSTATE que la SA QUATREM n'avait pas à prendre en charge les échéances du prêt souscrit par M. X., compte tenu du délai de carence stipulé au contrat.

- DÉBOUTE les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires,

- CONDAMNE M. X. aux entiers dépens de première instance.

- CONDAMNE M. X. aux entiers dépens d'appel et AUTORISE la SCP d'avoués MILLOT-LOGIER-FONTAINE à faire application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'arrêt a été prononcé à l'audience publique du premier juin deux mil six par Monsieur MERLE, Président, en application de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame OLMEDO, Greffier,

[minute page 9] Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.

Signé : OLMEDO.       Signé : MERLE.

Minute en neuf pages.