CA NÎMES (ch. civ. 2 A), 25 octobre 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 1656
CA NÎMES (ch. civ. 2 A), 25 octobre 2007 : RG n° 06/04211 ; arrêt n° 459
Publication : Juris-Data n° 360214
Extrait : « Le matériel loué par M. X. était destiné à son salon de coiffure. Il avait donc pour but d'améliorer le confort et le bien être de sa clientèle, laquelle est souvent contrainte de demeurer un long moment dans le salon de coiffure selon les soins qui lui sont prodigués (coloration, etc.). Même si la clientèle ne réglait pas sa consommation, ce qui aurait constitué une augmentation du bénéfice, la boisson offerte était de nature à la fidéliser, donc à l'augmenter. C'est dès lors en vain que M. X. fait soutenir que les contrats souscrits n'avaient pas un rapport direct avec son activité professionnelle et que les dispositions concernant le démarchage étaient applicables aux contrats litigieux. »
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE 2 A
ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 06/04211. Arrêt n° 459.
APPELANTE :
SAS PARFIP FRANCE poursuites et diligences de son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
[adresse], représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour, assistée de Maître Valérie YON, avocat au barreau de VERSAILLES, substituée par Maître AMANN, avocat
INTIMÉS :
Monsieur X. exerçant sous l'enseigne [Y. Coiffure]
[adresse], représenté par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour, assisté de Maître Jean-Michel ABENSOUR, avocat au barreau d'AVIGNON
ASSIGNÉ EN INTERVENTION FORCÉE :
Maître Jean-Pierre LOUIS, mandataire judiciaire pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société FONTEX.
[adresse], n'ayant pas constitué avoué assigné à sa personne
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 11 juin 2007
[minute page 2] COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, après rapport, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, Monsieur Philippe DE GUARDIA, Conseiller, Monsieur Daniel BACHASSON, Conseiller,
GREFFIER : Madame Mireille DERNAT, Premier Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS : à l'audience publique du 12 juin 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 juillet 2007, prorogé à celle de ce jour. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT : Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Jean-Loup OTTAVY, Président, le 25 octobre 2007, par mise à disposition au greffe de la Cour ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
X., artisan coiffeur, a signé le 1er mars 2002 un bon de commande avec la SA Fontex portant sur un contrat Service Plus comprenant l'entretien du matériel et la livraison de consommables pour une quantité déterminée dès l'origine et non révisable, et la location d'un distributeur de boissons chaudes et d'une fontaine d'eau à bonbonnes.
Le même jour il a signé avec Fontex un contrat de location longue durée portant sur le même matériel, pour une mensualité identique de 134 euros HT ou 160,26 euros TTC, pendant 60 mois, stipulant la possibilité pour Fontex de céder le matériel et le contrat de location à un tiers, attirant son attention sur l'indépendance juridique du contrat de location et du contrat de prestation liant le locataire au fournisseur, et emportant [minute page 3] renonciation de sa part à toute suspension ou réduction du loyer motivée par un litige avec le fournisseur.
Ce contrat de location a été cédé par Fontex à la SAS Parfip France, laquelle a accepté cette cession par fax du 4 mars 2002.
La SA Fontex a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 13 mai 2002.
Arguant du défaut de fourniture de la prestation de services, X. a cessé de payer les mensualités à compter du 8 mai 2003.
Le 10 octobre 2003, il a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer signifiée par Parfip.
Par jugement du 17 mai 2005, le Tribunal d'Instance d'AVIGNON a prononcé la nullité des contrats conclus le 1er mars 2002 avec Fontex, a condamné la SAS Parfip France à payer à X. 535,56 euros avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance, au titre du remboursement du prix des prestations d'entretien et de livraison non effectuées, à retirer à ses frais le matériel loué des locaux du preneur, et à payer 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à X.
Parfip France a régulièrement relevé appel de ce jugement.
Le dossier a été initialement fixé à l'audience du 10 octobre 2006 d'où les parties l'ont fait retirer du rôle, n'étant pas prêtera plaider.
Par conclusions du 31 octobre 2006, la SAS Parfip France conteste l'application des textes sur le démarchage au contrat souscrit et invoque l'absence d'indivisibilité des contrats de location et de prestation, contractuellement décidée par les parties.
Elle demande de prononcer la résiliation du contrat de location au 10 juillet 2003 et de condamner X. à lui payer, sur la base d'une mensualité expurgée du coût de la prestation de service : 283,96 euros TTC de mensualités impayées, majorées de 10 %, outre 15 euros de frais, avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2003, et 6.247,12 euros à titre d'indemnité de résiliation, majorée de 10 % de pénalité contractuelle.
Elle demande d'ordonner la restitution du matériel loué sous astreinte de 50 euros par jour de retard, aux frais exclusifs du preneur et de condamner ce dernier à lui payer 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par conclusions déposées le 9 février 2007, X. soutient que la cession du contrat à Parfip est nulle, car le contrat signé avec Fontex était nul pour infraction aux dispositions des articles L. 121-33 et suivants du Code de la Consommation, 1131 et suivants, 1134 et 1109 du Code Civil, et en vertu du principe « fraus omnia corrumpit. »
[minute page 4] Il fait valoir en outre que les contrats de location et de prestation de service étaient indivisibles, que la carence de Fontex dans la livraison des consommables et dans le défaut d'entretien des appareils loués, a privé de cause le contrat de location, qui se trouve caduc.
Il demande d'annuler, « au moins par résiliation », le contrat de location.
Il forme appel incident pour obtenir la restitution par Parfip des sommes perçues au titre des prestations non effectuées, qu'il chiffre à 54,51 euros TTC chaque mois, soit au total 2.243,64 euros TTC ou subsidiairement 2.032,14 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance et application de l'anatocisme.
Il réclame en outre 2.000 euros de dommages-intérêts pour l'atteinte à sa trésorerie et l'encombrement par le matériel inutile, la récupération dudit matériel par Parfip, sous astreinte de 100 euros par jour, la confirmation du jugement sur les dépens de première instance et l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et enfin 2.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile devant la Cour.
Jean-Pierre LOUIS, mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA Fontex ne comparaît pas, quoique régulièrement assigné à sa personne le 15 février 2007.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
L'article L. 121-21 du Code de la Consommation dispose que toute personne physique bénéficie de la protection légale relative aux opérations de démarchage dès lors que celles-ci n'ont pas un rapport direct avec son activité professionnelle.
L'article L. 121-22 du Code de la Consommation dispose que ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 du Code de la Consommation les locations de biens ou prestations de services lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation artisanale ou de toute autre profession.
Le matériel loué par X. était destiné à son salon de coiffure. Il avait donc pour but d'améliorer le confort et le bien être de sa clientèle, laquelle est souvent contrainte de demeurer un long moment dans le salon de coiffure selon les soins qui lui sont prodigués (coloration, etc.).
Même si la clientèle ne réglait pas sa consommation, ce qui aurait constitué une augmentation du bénéfice, la boisson offerte était de nature à la fidéliser, donc à l'augmenter.
[minute page 5] C'est dès lors en vain que X. fait soutenir que les contrats souscrits n'avaient pas un rapport direct avec son activité professionnelle et que les dispositions concernant le démarchage étaient applicables aux contrats litigieux.
D'autre part, il résulte de l'article 6 in fine du contrat de location signé le 1er mars 2002, que la commune intention des parties étaient de conclure un contrat de location juridiquement distinct et indépendant du contrat de prestation de service.
Ainsi aucune indivisibilité des deux contrats ne peut être sérieusement invoquée, d'autant que le preneur renonce, par la même disposition, à toute suspension ou réduction du loyer qui serait motivée par un litige avec le fournisseur.
La cessation de fournitures des prestations par Fontex est donc inopérante et la caducité du contrat de location est écartée.
Aucune fraude n'est démontrée.
Il convient dès lors de faire droit à la demande de résiliation de Parfip, à compter du 10 juillet 2003, deux mensualités n'ayant pas été payées et 44 mensualités restant à payer.
Parfip soutient que le montant de la mensualité concernant la prestation de service était de 15,29 euros HT. Il s'agit effectivement de la part revenant à Fontex aux termes de la cession du contrat de location.
Cependant, il résulte du bon de commande souscrit le 1er mars 2002 avec Fontex, article 13, que le prix de la dose de café était de 0,077 euros et la bonbonne d'eau, avec 100 gobelets, coûtait 3,82 euros, et que la différence entre le prix des consommables et le prix total figurant sur le bon de commande correspond à la location de matériel.
Le forfait des consommables avait été contractuellement fixé à 4.032 boissons chaudes annuelles et 36 bonbonnes d'eau. De la sorte le coût des consommables peut être fixé à (336 x 0,077 euros) + (3 x 3,82 euros) = 37,33 euros HT et 44,64 euros TTC.
Ainsi, selon ce contrat qui est seul opposable au preneur, quant au montant du loyer, ce dernier s'élève à 160,26 euros - 44,64 euros = 115,62 euros TTC.
Sur 60 mois le montant des loyers aurait atteint :
6.937,20 euros TTC, pour une valeur du contrat estimée, selon le fax de cession de location, à 4.843,33 euros HT ou 5.792,62 euros TTC.
C'est donc sur la base de ce loyer que Parfip peut prétendre au paiement de :
- [minute page 6] 231,24 euros de mensualités impayées TTC avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2003.
- 5.087,28 euros de mensualités à échoir TTC.
Compte tenu de ce qui vient d'être indiqué sur la valeur du contrat cédé, l'indemnité de 10 % sur les sommes hors taxes due au titre de la clause pénale apparaît manifestement excessive et doit être réduite à 100 euros. Les frais d'impayés sont rejetés.
Il n'est pas contesté que X. a réglé à Parfip au titre des prestations non fournies 44,64 euros TTC, de mai 2002 à avril 2003. C'est à bon droit qu'il réclame le remboursement de ces sommes, soit 535,68 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2005, faute de justification d'une mise en demeure antérieure aux débats devant le premier juge, avec application de l'anatocisme.
Conformément aux dispositions contractuelles, X. doit restituer à ses frais le matériel loué, sans qu'une astreinte n'apparaisse nécessaire, eu égard à son impatience de se débarrasser des appareils.
La demande de dommages-intérêts n'est nullement justifiée.
Succombant pour l'essentiel en cause d'appel, X. supporte les entiers dépens, sans que l'équité ne commande de faire application à son détriment des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré.
Statuant à nouveau,
Condamne X. à payer à la SAS Parfip France :
- 231,24 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2003.
- 5.087,28 euros au titre des loyers à échoir.
- 100 euros au titre de la clause pénale.
[minute page 7] Condamne la SAS Parfip France à payer à X. 535,68 euros au titre des prestations non fournies, mais réglées, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2005 et application de l'article 1154 du Code Civil.
Dit que X. doit restituer, à ses frais, les deux appareils loués à la SAS Parfip France, sans délai.
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Condamne X. aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Arrêt signé par Monsieur OTTAVY, Président et par Madame DERNAT, Premier Greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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