CA NANCY (1re ch. civ.), 4 mars 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 1657
CA NANCY (1re ch. civ.), 4 mars 2008 : RG n° 05/02284 ; arrêt n° 08/594
Publication : Juris-Data n° 364673
Extrait : « … force est de constater que l'obligation essentielle de la commune était de consentir un droit de stationnement sur un emplacement déterminé, ce dont il résulte que la convention en cause s'analyse en un contrat de louage, moyennant une redevance journalière. En considération du classement du terrain de camping « domaine de Longemer » en catégorie tourisme 2 étoiles, par arrêté préfectoral du 18 juillet 1995, la commune, propriétaire du terrain, avait certes l'obligation accessoire d'assurer un gardiennage de jour.
Contrairement à ce qu'ont énoncé les premiers juges l'existence de cette obligation accessoire n'emporte pas à elle seule l'inefficacité de la clause exonératoire de responsabilité en cas de vols ou de dégradations insérée au règlement intérieur, dont les termes sont réputés acceptés par le locataire lorsqu'il s'installe sur le terrain. En effet, aucune disposition légale ne prohibe de façon générale l'insertion de telles clauses dans les contrats d'adhésion. Et par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'article 18 du règlement intérieur, qui ne nécessite aucune interprétation, exonère la commune de toute responsabilité, d'une part en cas de vol, hypothèse qui inclut les vols des caravanes elles-mêmes, indépendamment du vol de leur contenu, et d'autre part en cas de dégradations aux caravanes. L'obligation de gardiennage prétendument inexécutée n'étant pas l'obligation essentielle contractée par la commune, celle-ci est en droit de se prévaloir de la clause contestée, étant précisé que M. X. ne soutient ni qu'elle serait abusive, ni que son dommage serait la conséquence d'une faute lourde imputable à la commune. Sur ce dernier point, il y a lieu de relever que si à l'époque de la commission du vol dénoncé par M. X., la gérante du terrain de camping était absente, le gardiennage de jour était néanmoins assuré par sa remplaçante, Mme B., entendue le 8 novembre 1996 par les services de gendarmerie dans le cadre de l'enquête qui a ultérieurement été classée sans suite. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE NANCY
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 4 MARS 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : R.G. n° 05/02284. ARRÊT N°08/594. Décision déférée à la Cour : déclaration d'appel du 8 août 2005 d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINT DIÉ DES VOSGES, R.G. n° 03/00728, en date du 17 juin 2005,
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité belge, demeurant [adresse], Comparant et procédant par le ministère de la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour, Plaidant par Maître GASSE, avocat à la Cour,
INTIMÉE :
COMMUNE DE XONRUPT LONGEMER
prise en la personne de son Maire pour ce domicilié audit siège, dont le siège est [adresse], Comparant et procédant par le ministère de Maître GRÉTÉRÉ, avoué à la Cour, Plaidant par Maître COUSIN, avocat au barreau d'ÉPINAL,
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 janvier 2008, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, entendu en son rapport, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, Madame Pascale TOMASINI- KRIER, Conseiller, qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Madame STUTZMANN ;
ARRÊT : contradictoire, prononcé à l'audience publique du 4 MARS 2008 date indiquée à l'issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l'article 452 du Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame DEANA, greffier présent lors du prononcé ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :
Le 13 octobre 1996 M. X. a rejoint son domicile en Belgique, laissant sa caravane en stationnement sur le terrain de camping municipal de Xonrupt Longemer, classé en catégorie « Tourisme 2 étoiles » par arrêté préfectoral du 18 juillet 1995. En se rendant sur place le 30 octobre suivant, le fils de M. X. a constaté la disparition de la caravane. La plainte pénale ayant été classée sans suite, faute d'identification des auteurs du vol, M. X. a demandé à la commune de Xonrupt Longemer de réparer son préjudice. La commune lui a opposé un refus en invoquant l'article 18 du règlement intérieur du camping, ainsi rédigé :
« la commune n'est pas responsable des vols ou dégradations qui pourraient être provoqués aux caravanes, ainsi que des dégâts causés par les intempéries ».
Faisant valoir que cette clause d'exonération vise le cas des vols dans les caravanes et non pas le vol des caravanes elles-mêmes, M. X., par acte du 16 octobre 2003, a fait assigner la commune de Xonrupt Longemer, au visa de l'article 1147 du Code civil, devant le tribunal de grande instance de Saint-Dié-des-Vosges en indemnisation de son préjudice constitué de la valeur de la caravane disparue (24.391,84 €) et des frais engagés en vain pour la retrouver (2.347,50 €). Dans le dernier état de ses conclusions il a imputé un manquement par la commune à ses obligations de dépositaire, et à tout le moins à son obligation, découlant de l'arrêté ministériel du 13 janvier 1993, d'assurer un gardiennage de jour.
Par jugement du 17 juin 2005, M. X. a été débouté de toutes ses demandes et condamné aux dépens. Pour se prononcer ainsi, le tribunal a d'abord constaté que la commune a contracté le seul engagement de mettre à la disposition de M. X. un emplacement pour sa caravane. Il a relevé que le demandeur ne rapporte pas la preuve par écrit de la conclusion d'un contrat de dépôt. Ensuite, il a estimé que même si la commune ne peut pas se prévaloir de l'article 18 du règlement intérieur pour s'exonérer d'un manquement à son obligation de gardiennage, il n'en demeure pas moins que la preuve d'un tel manquement n'est pas rapportée, M. X. n'établissant pas que le vol a eu lieu de jour.
M. X. a interjeté appel le 8 août 2005.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 5 novembre 2007, M. X. demande à la cour, par voie de réformation du jugement déféré, de condamner la commune de Xonrupt Longemer à lui payer une somme de 26.373,68 € en réparation de son préjudice ainsi qu'une somme [minute page 3] de 2.000 € en remboursement de ses frais de défense non compris dans les dépens.
L'appelant maintient que la commune, engagée par un dépôt salarié, a manqué à son obligation de restituer la caravane. Il soutient qu'à tout le moins elle a manqué à son obligation de surveillance le vol ayant été commis sans effraction, circonstance dont il résulte soit que le gardiennage n'a pas été assuré, si le vol a eu lieu en journée, soit que le système de fermeture a été défaillant, dans l'hypothèse où les faits ont été commis de nuit.
Il réitère également, en invoquant les dispositions de l'article 1162 du Code civil, que la clause d'exonération de responsabilité doit être interprétée de manière restrictive, pour en déduire qu'elle ne vise pas le cas du vol de caravane elle-même, mais seulement celui du vol de leur contenu. Il conteste avoir méconnu une obligation d'assurance, ajoutant qu'en tout état de cause, même s'il s'était assuré contre le risque de vol, son préjudice serait identique.
Par ses écritures dernières, notifiées et déposées le 17 septembre 2007, la commune de Xonrupt Longemer conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de M. X. au paiement d'une somme de 2.000 € en remboursement des frais exposés pour sa défense.
L'intimée réplique que M. X. ne produit aucun écrit de nature à rapporter la preuve de la conclusion d'un contrat de dépôt. Elle affirme avoir contracté la seule obligation de mettre à disposition un emplacement privatif moyennant une redevance journalière, si bien que les parties étaient liées par un contrat de louage n'emportant aucune obligation de garde. Elle admet que par décision ministérielle elle était assujettie à un gardiennage de jour mais maintient que M. X., ne rapporte pas la preuve d'un manquement à cette obligation de moyens. Elle considère que la clause d'exonération de responsabilité, opposable à M. X., ne nécessite aucune interprétation. Elle affirme que ce dernier est responsable du préjudice dont il fait état, dès lors qu'il n'a pas satisfait à l'obligation d'assurance qui s'imposait à lui.
L'instruction a été déclarée close le 20 décembre 2007.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Ainsi que l'ont relevé de façon pertinente les premiers juges, M. X. ne produit aucun écrit dont il résulterait que la commune de Xonrupt Longemer se serait engagée à supporter les obligations d'un dépositaire salarié. L'appelant ne contestant d'ailleurs pas que les dispositions du règlement intérieur du camping municipal lui étaient opposables, force est de constater que l'obligation essentielle de la [minute page 4] commune était de consentir un droit de stationnement sur un emplacement déterminé, ce dont il résulte que la convention en cause s'analyse en un contrat de louage, moyennant une redevance journalière.
En considération du classement du terrain de camping « domaine de Longemer » en catégorie tourisme 2 étoiles, par arrêté préfectoral du 18 juillet 1995, la commune, propriétaire du terrain, avait certes l'obligation accessoire d'assurer un gardiennage de jour.
Contrairement à ce qu'ont énoncé les premiers juges l'existence de cette obligation accessoire n'emporte pas à elle seule l'inefficacité de la clause exonératoire de responsabilité en cas de vols ou de dégradations insérée au règlement intérieur, dont les termes sont réputés acceptés par le locataire lorsqu'il s'installe sur le terrain. En effet, aucune disposition légale ne prohibe de façon générale l'insertion de telles clauses dans les contrats d'adhésion. Et par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'article 18 du règlement intérieur, qui ne nécessite aucune interprétation, exonère la commune de toute responsabilité, d'une part en cas de vol, hypothèse qui inclut les vols des caravanes elles-mêmes, indépendamment du vol de leur contenu, et d'autre part en cas de dégradations aux caravanes.
L'obligation de gardiennage prétendument inexécutée n'étant pas l'obligation essentielle contractée par la commune, celle-ci est en droit de se prévaloir de la clause contestée, étant précisé que M. X. ne soutient ni qu'elle serait abusive, ni que son dommage serait la conséquence d'une faute lourde imputable à la commune. Sur ce dernier point, il y a lieu de relever que si à l'époque de la commission du vol dénoncé par M. X., la gérante du terrain de camping était absente, le gardiennage de jour était néanmoins assuré par sa remplaçante, Mme Y., entendue le 8 novembre 1996 par les services de gendarmerie dans le cadre de l'enquête qui a ultérieurement été classée sans suite.
Le jugement sera donc confirmé. Si M. X., qui succombe en son recours, doit supporter les dépens, l'équité commande cependant de ne pas faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
Y ajoutant :
Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
[minute page 5] Condamne M. X. aux dépens de l'instance d'appel et accorde à l'avoué de l'intimée un droit de recouvrement direct dans les conditions prévues par l'article 699 du Code de procédure civile ;
L'arrêt a été prononcé à l'audience publique du quatre Mars deux mille huit par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame DEANA, Greffier.
Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.
Signé : C. DEANA.- Signé : G. DORY.-
Minute en cinq pages.
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