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CA BESANÇON (2e ch. com.), 15 octobre 2008

Nature : Décision
Titre : CA BESANÇON (2e ch. com.), 15 octobre 2008
Pays : France
Juridiction : Besancon (CA), 2e ch. com.
Demande : 07/01510
Date : 15/10/2008
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Recueil Dalloz
Date de la demande : 13/07/2007
Décision antérieure : T. COM. BESANÇON, 4 juin 2007
Numéro de la décision : 663
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1660

CA BESANÇON (2e ch. com.), 15 octobre 2008 : RG n° 07/01510 ; arrêt n° 663

(sur appel CA Paris (25e ch. A), 16 avril 1995 : RG n° 94/23456)

Publication : D. 1995. 324, note Paisant

 

Extrait : « Il convient de rappeler à l'intimée, et au premier juge, que ces articles s'appliquent même lorsque le démarchage à domicile a été effectué à la demande du client, de sorte qu'il importe peu qu'à la suite de sa première commande M. X. ait ou non sollicité une seconde visite, la notion de courant d'affaires étant inopérante en ce domaine ; qu'il est aussi indifférent que le démarchage ait eu lieu au domicile privé ou au lieu de travail du client ; enfin que la législation protectrice est exclue par l'article L. 121-22-4° du Code au cas où la vente en cause est en rapport direct (souligné par la Cour) avec l'activité professionnelle de l'acheteur, et qu'il n'existe pas un tel lien entre l'exercice de la profession d'expert-comptable et l'achat d'articles de décoration. Le contrat du 22 décembre 2004 est en conséquence soumis à l'article L. 121-26 du Code de la Consommation, qui prohibe la remise par le client, avant l'expiration du délai de réflexion de 7 jours, d'une contrepartie quelconque.

Or la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON a reçu de M. X. le 22 décembre 2004 3 traites couvrant l'intégralité du prix payable au comptant, certes dites « de garantie » mais cette mention apparaît pour le moins de circonstance, puisque selon la prétendue créancière elle-même (cf. son courrier du 28 juillet 2005) la première traite a été présentée au paiement (et impayée) ; au surplus les termes de l'article L. 121-26 précité, par leur généralité, interdisent même la remise de toutes garanties. Cette disposition étant d'ordre public, M. X. est fondé à s'en prévaloir pour faire déclarer nulle la convention du 22 décembre 2004, quelles qu'aient été les errements des relations des parties après la signature de cette convention (demande de délais ou d'autres modalités de paiement). Au demeurant, la qualité d'expert-comptable n'est pas nécessairement un gage de connaissance des dispositions légales en matière de consommation, tandis que la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON, professionnelle en la matière, devait veiller à les appliquer loyalement ».

 

COUR D’APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

DEUXIÈME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/01510. Arrêt n° 663. ARRÊT contradictoire. Audience publique du 16 septembre 2008 S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON en date du 4 JUIN 2007 [RG N° 2006/00714]

Code affaire : 50B - Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

 

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur X.,

né le [date], de nationalité française, demeurant [adresse], APPELANT, Ayant la SCP LEROUX pour avoué et Maître Olivier LEVY, avocat au barreau de BESANÇON

 

ET :

SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON,

ayant son siège, [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux en exercice demeurant pour ce audit siège,

SCP PERNEY - ANGEL,

mandataire judiciaire, ayant son siège, [adresse], ès qualités de liquidateur judiciaire du redressement judiciaire de la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON,

INTIMÉES, Ayant la SCP DUMONT - PAUTHIER pour avoué et Maître Jacques FABIGNON, avocat au barreau de SENLIS

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties :

MAGISTRATS RAPPORTEURS : M. SANVIDO, Président de Chambre et M. POLANCHET, Conseiller,

GREFFIER : M. ANDRE, Greffier,

Lors du délibéré : M. SANVIDO, Président de Chambre, M. POLANCHET et R. VIGNES, Conseillers, qui en ont délibéré sur rapport des Magistrats Rapporteurs.

L'affaire plaidée à l'audience du 16 septembre 2008, a été mise en délibéré au 15 octobre 2008. Les parties ont été avisées qu’à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu le jugement du 4 juin 2007 aux termes duquel le Tribunal de Commerce de Besançon a condamné M. X., expert-comptable, à payer à la SCP PERNEY-ANGEL, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON la somme de 17.000 € correspondant au prix de tapisseries livrées le 14 avril 2005, outre une indemnité de 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, les dépens et la somme de 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

Vu la déclaration d'appel déposée au greffe de la Cour le 13 juillet 2007 par M. X. ;

Vu les dernières conclusions des parties, du 21 février 2008 (pour l'appelant) et du 3 avril 2008 (pour la SCP PERNEY-ANGEL, intimée ès qualités), auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile pour l'exposé de leurs prétentions respectives et de leurs moyens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 5 juin 2008 ; Vu les pièces régulièrement produites ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

[minute page 3] L'intimée ne développe aucun moyen à l'appui de ses conclusions d'irrecevabilité de l'appel : présenté dans les formes légales, sans que soit justifiée devant la Cour la date de la signification du jugement entrepris, ce recours apparaît recevable.

M. X. a commandé le 6 octobre 2004 à la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON, représentée par son « décorateur » J. Y., une tapisserie tissée main intitulée « Quand te maries-tu ? » d'après Gauguin, au prix de 10.000 € TTC réglé à crédit.

Cette commande, livrée le 5 avril 2005, ne donne pas lieu à litige.

Le 22 décembre 2004, M. X. a signé un nouveau bon de commande portant sur 3 tapisseries (Deux Tahitiennes, Un instant de Bonheur et Nu de Renoir) au prix global de 26.460 € payable « au comptant soit 3 traites de garantie », l'une de 2.646 € au 30 janvier 2005, la deuxième de 7.938 € au 30 avril 2005 et la troisième de 15.876 € au 15 septembre 2005.

Il est constant que la commande de la tapisserie Nu de Renoir a été résolue ultérieurement d'un commun accord entre les parties.

Les 2 tapisseries Un Instant de Bonheur et Deux Tahitiennes ont été livrées le 5 avril 2005 ; la seconde nommée a été reprise par la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON pour être retissée et en l'absence de bon de livraison, rien ne démontre qu'un article satisfaisant a été à nouveau remis à M. X.

Celui-ci fait donc observer à juste titre que le montant réclamé, soit 17.000 € pour une commande de 26.460 € qui ne détaillait pas le prix de chacune des 3 tapisseries, n'est pas sérieusement justifié.

Mais, au-delà du quantum, la créance n'est pas fondée en son principe.

En effet, la commande a été passée à l'issue d'une présentation à domicile par le « conseiller en décoration » de la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON (cf. son courrier remerciant M. X. de cette commande) qui ne prétend d'ailleurs pas avoir reçu ce client dans un magasin ou autre lieu de commercialisation et a recueilli l'engagement de M. X. sur un document reproduisant les articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la Consommation relatifs au démarchage à domicile, comportant un formulaire détachable de renonciation - et prévoyant le cas de commandes exceptionnelles, comme celle qu'aurait passée M. X. en dehors du catalogue pour la tapisserie Deux Tahitiennes.

Il convient de rappeler à l'intimée, et au premier juge, que ces articles s'appliquent même lorsque le démarchage à domicile a été effectué à la demande du client, de sorte qu'il importe peu qu'à la suite de sa première commande M. X. ait ou non sollicité une seconde visite, la notion de courant d'affaires étant inopérante en ce domaine ; qu'il est aussi indifférent que le démarchage ait eu lieu au domicile privé ou au lieu de travail du client ; enfin que la législation protectrice est exclue par l'article L. 121-22-4° du Code au cas où la vente en cause est en rapport direct (souligné par la Cour) avec l'activité professionnelle de l'acheteur, et qu'il n'existe pas un tel lien entre l'exercice de la profession d'expert-comptable et l'achat d'articles de décoration.

Le contrat du 22 décembre 2004 est en conséquence soumis à l'article L. 121-26 du Code de la Consommation, qui prohibe la remise par le client, avant l'expiration du délai de réflexion de 7 jours, d'une contrepartie quelconque.

Or la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON a reçu de M. X. le 22 décembre 2004 3 traites couvrant l'intégralité du prix payable au comptant, certes dites « de garantie » mais cette mention apparaît pour le moins de circonstance, puisque selon la prétendue créancière elle-même (cf. son courrier du 28 juillet 2005) la première traite a été présentée au paiement (et impayée) ; au surplus les termes de l'article L. 121-26 précité, par leur généralité, interdisent même la remise de toutes garanties.

[minute page 4] Cette disposition étant d'ordre public, M. X. est fondé à s'en prévaloir pour faire déclarer nulle la convention du 22 décembre 2004, quelles qu'aient été les errements des relations des parties après la signature de cette convention (demande de délais ou d'autres modalités de paiement).

Au demeurant, la qualité d'expert-comptable n'est pas nécessairement un gage de connaissance des dispositions légales en matière de consommation, tandis que la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON, professionnelle en la matière, devait veiller à les appliquer loyalement.

Il y a donc lieu à confirmation, et à rejet des prétentions de la partie intimée et demanderesse, qui supporte les dépens.

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 au bénéfice de M. X., vu la situation de la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON,

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré, DÉCLARE l'appel recevable,

INFIRME le jugement prononcé le 4 juin 2007 par le Tribunal de Commerce de Besançon,

Et statuant à nouveau,

DÉCLARE nul le contrat de vente conclu le 22 décembre 2004 entre la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON et M. X.,

DÉBOUTE la SCP PERNEY-ANGEL, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL TAPISSERIES D'ART D'AUBUSSON, de l'ensemble de ses prétentions,

DÉBOUTE M. X. de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SCP PERNEY-ANGEL, ès qualités, aux dépens des deux instances avec possibilité de recouvrement direct au profit de la SCP LEROUX, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

LEDIT arrêt a été signé par M. SANVIDO, Président de Chambre, ayant participé au délibéré et M. ANDRE, Greffier.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,