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CA AIX-EN-PROVENCE (15e ch. B), 5 juin 2008

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (15e ch. B), 5 juin 2008
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 15e ch. B
Demande : 07/01610
Décision : 2008/236
Date : 5/06/2008
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : TGI MARSEILLE (10e ch. civ.), 16 janvier 2007
Numéro de la décision : 236
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1662

CA AIX-EN-PROVENCE (15e ch. B), 5 juin 2008 : RG n° 07/01610 ; arrêt n° 2008/236

Publication : Juris-Data n° 2008-003934

 

Extrait : « Attendu que sur le premier moyen invoqué d'une mobilisation nécessaire de la garantie contractuelle « indemnité valeur à neuf » force est de relever que l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne s'applique pas aux contrats, tel celui en cause, ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par la contractante, la SCI X., dont l'objet social est selon le Kbis produit aux débats : « L'acquisition, la vente, la location de tous immeubles et bien et droits immobiliers sur le territoire française et notamment l'acquisition d'un immeuble à MARSEILLE [adresse] » alors que cette société a assuré l'immeuble acquis auprès de la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES après l'avoir donné en location à une société de transports et aux archives du Crédit Universel, cette police d'assurance ayant donc un rapport direct avec l'activité professionnelle de la SCI X. ; Qu'il en résulte nécessairement que le régime des clauses abusives ne peut être invoqué par l'appelante ».

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

QUINZIÈME CHAMBRE B

ARRÊT DU 5 JUIN 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 07/01610. Arrêt n° 2008/236. ARRÊT AU FOND.

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 16 janvier 2007 enregistré au répertoire général sous le n° 05/8553.

 

APPELANTE :

SCI X.,

dont le siège social est : [adresse], représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour, Maître Frédéric CHOLLET, avocat au barreau de MARSEILLE

 

INTIMÉE :

Compagnie AXA FRANCE ASSURANCES,

dont le siège social est : [adresse], représentée par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour, Maître Jean-François ABEILLE, avocat au barreau de MARSEILLE

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 24 avril 2008 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Jean-François CAMINADE, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Monsieur Serge KERRAUDREN, Président, Monsieur Jean-François CAMINADE, Conseiller, Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 mai 2008.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 5 juin 2008, après prorogation. Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SCI X. a interjeté appel du jugement rendu le 16 janvier 2007 dans une instance l'opposant à la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES par le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, lequel l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à lui payer la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Par dernières écritures au fond, dites récapitulatives, notifiées et déposées le 12 février 2008, l'appelante, la SCI X., a conclu, au visa des articles 1134 et 1153 alinéa 4 du Code civil et L. 121-1 du Code des assurances ;

- à ce que le jugement entrepris soit infirmé en ce que, d'une part, il a estimé que l'indemnité « valeur à neuf » n'était pas due et, d'autre part, en ce qu'il n'a pas conclu à la faute de la compagnie AXA ;

- à ce que la compagnie AXA soit condamnée à lui payer la somme de 178.896 € au titre de l'indemnité « valeur à neuf », cette somme devant être affectée des intérêts légaux depuis la mise en demeure du 16 juillet 2004 ;

- à ce que, subsidiairement, il soit jugé que la compagnie AXA a commis une faute et à ce qu'elle soit condamnée au paiement de la somme de 178.896 € à titre de dommages et intérêts ;

- à ce que la compagnie AXA soit condamnée à lui payer la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive et de la faute commise par l'assureur ;

- à ce que la compagnie AXA soit condamnée à lui verser 1.500 € par application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

 

Par dernières écritures au fond, dites récapitulatives, notifiées et déposées le 10 janvier 2008, l'intimée, la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES, a conclu, au visa de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, des articles 1134 et 1315 du Code civil et des articles L. 121-16, L. 121-1 et L. 121-10 du Code des assurances ;

- à ce qu'il soit jugé que la réglementation consumériste sur les clauses abusives ne peut trouver application au cas d'espèce et qu'en tout état de cause, la clause litigieuse ne présente pas un caractère abusif aux sens des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ;

- à ce qu'il soit jugé que la SCI X. ne démontre pas que les conditions de mobilisation de la garantie sont réunies ;

- à ce qu'il soit jugé tout au contraire que ces conditions ne sont pas remplies ;

- à ce qu'il soit jugé que le versement de l'indemnité au profit de la SCI X. constituerait un avantage indu ;

- à ce qu'il soit jugé en tout état de cause qu'en raison de l'aliénation du bien la SCI X. n'est plus liée contractuellement à la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES et ne peut donc prétendre au versement de l'indemnité « valeur à neuf » ;

- [minute page 4] à ce qu'en conséquence l'ensemble des demandes de la SCI soit rejeté ;

- à ce que réformant le jugement entrepris, la SCI X. soit déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

- à ce que la SCI X. soit condamnée au paiement de la somme de 3.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

 

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2008.

La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Au fond :

Attendu qu'il résulte des pièces et documents régulièrement produits aux débats que la SCI X., qui a souscrit le 3 mars 1995 auprès de la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES un contrat « Multirisque de l'entreprise » couvrant notamment le risque incendie concernant un ensemble immobilier sis [adresse] à MARSEILLE […], a été victime d'un incendie, dont l'origine criminelle n'est pas discutée, détruisant les locaux dans la nuit du 1er novembre 2003, alors que le gérant de la SCI X., M. Y., avait la veille, soit le 31 octobre 2003, régularisé un compromis de vente pour l'immeuble litigieux envers un acquéreur pour un prix global de 3.658.000 € ;

Attendu que la SCI X. ayant déclaré ce sinistre auprès de son assureur le 4 novembre 2003, une expertise a été confiée au Cabinet A. dans le cadre du contrat d'assurances souscrit qui prévoit qu'en cas d'incendie l'assureur doit verser deux indemnités, d'une part, une indemnité immédiate correspondant à la valeur de l'immeuble sinistrée, vétusté déduite, et d'autre part une indemnité « valeur à neuf » qui, en substance, est versée lorsque l'assuré a procédé à la reconstruction à l'identique de l'immeuble détruit dans un délai de deux années ;

Que le Cabinet d'expertise A. a donc au terme d'une expertise contradictoire amiable ainsi fixé lesdites indemnités : règlement immédiat 276.157,51 € hors taxes, et le règlement différé : 178.896 € hors taxes ;

Attendu que par acte en date du 28 janvier 2004 les consorts Z. ont cédé au gérant de la SCI X., M. Y., l'ensemble des parts par eux détenues dans la SCI pour un prix de vente d'un montant de 495.028 € ;

Qu'un nouveau protocole de vente a été régularisé le 17 février 2004 puis un troisième protocole en date du 20 juillet 2004 est venu préciser que la SCI X. transférait les indemnités versées par la compagnie AXA FRANCE [minute page 5] ASSURANCES entre les mains de l'acquéreur, la SCI LES HUILERIES DE L'ETOILE ;

Qu'enfin, par acte en date du 1er décembre 2004, cette délégation a été annulée, les parties régularisant la vente par-devant notaire moyennant un prix de 3.288.437,16 €, le prix de vente ayant été réduit d'un commun accord entre les parties du montant de l'indemnité partielle et forfaitaire à devoir par l'assureur ;

Attendu que l'assureur ayant été condamné à verser, à titre provisionnel, à son assurée, la SCI X., la somme de 276.157,51 € correspondant à l'indemnité immédiate prévue au contrat, demeure seule en litige l'indemnité valeur à neuf que l'appelante sollicite, outre les intérêts légaux depuis la mise en demeure en date du 16 juillet 2004, soit à titre de l'application contractuelle de la police d'assurance souscrite, soit subsidiairement à titre de dommages et intérêts en réparation du comportement prétendument fautif de l'assureur ;

Attendu que sur le premier moyen invoqué d'une mobilisation nécessaire de la garantie contractuelle « indemnité valeur à neuf » force est de relever que l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne s'applique pas aux contrats, tel celui en cause, ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par la contractante, la SCI X., dont l'objet social est selon le Kbis produit aux débats : « L'acquisition, la vente, la location de tous immeubles et bien et droits immobiliers sur le territoire française et notamment l'acquisition d'un immeuble à MARSEILLE [adresse] » alors que cette société a assuré l'immeuble acquis auprès de la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES après l'avoir donné en location à une société de transports et aux archives du Crédit Universel, cette police d'assurance ayant donc un rapport direct avec l'activité professionnelle de la SCI X. ;

Qu'il en résulte nécessairement que le régime des clauses abusives ne peut être invoqué par l'appelante ;

Attendu que la police d'assurance souscrite prévoit très clairement au paragraphe « Convention d’Assurance en valeur à neuf » des conditions particulières ainsi posées à la mise en œuvre de cette garantie complémentaire :

« L'indemnisation en valeur à neuf ne sera due que si la reconstruction, en ce qui concerne les bâtiments ou le remplacement, en ce qui concerne le mobilier ou le matériel, est effectué, sauf impossibilité absolue dans un délai de deux ans, à partir de la date du sinistre. La reconstruction devra, sauf impossibilité absolue, s’effectuer sur l'emplacement du bâtiment sinistré, sans qu’il soit apporté de modification importante à sa destination initiale » ;

Attendu qu'il en résulte que c'est à l'assuré qui se prévaut du contrat souscrit d'établir que sont parfaitement réunies les conditions posées par la police d'assurance pour une mise en œuvre de cette garantie ;

Qu'en l'occurrence, il n'est aucunement contesté que la reconstruction de l'immeuble sinistré sis [adresse] à MARSEILLE […], détruit dans l'incendie dans la nuit du 1er novembre 2003, n'était toujours pas achevée alors qu'un délai de plus de trois années s'était écoulé après le sinistre ;

Que bien plus il est parfaitement établi par les pièces et documents régulièrement produits aux débats que la reconstruction n'a jamais été effectuée « sans qu’il soit apporté de modification importante à sa destination initiale », l'immeuble, [minute page 6] travaux finis, étant devenu un véritable centre d'affaires, et ce, sans que pour autant il soit établi en l'espèce l'existence d'une « impossibilité absolue » ;

Attendu qu'à raison de cette seule exigence contractuelle non remplie, au sens de l'article 1134 du Code civil faisant loi des parties, d'une reconstruction à l'identique, même si sa destination demeure identique : la location de bureaux et de commerces, sans que l'appelante puisse exciper d'une quelconque « impossibilité absolue », c'est à tort que la SCI X., qui n'a jamais eu l'intention de reconstruire l'immeuble sinistré, prétend ouvrir droit à la mise en œuvre de la garantie « valeur à neuf », en se contentant de soutenir que l'indemnité lui est due dès lors que la reconstruction est achevée alors que par application du principe indemnitaire l'indemnité d'assurance relative à un immeuble doit être affectée à cet immeuble ; Que cela est d'autant plus impossible que la SCI X. n'est actuellement plus la propriétaire du bien assuré et n'a d'ailleurs pas assumé le coût d'une reconstruction totalement différente de sa composition initiale ;

Attendu qu'en définitive la police d'assurance stipulant clairement, comme conditions de paiement de l'indemnité différée en valeur à veuf, la reconstruction à l'identique dans un délai de deux ans à compter de la date du sinistre, il appartient à l'assurée, la SCI X., de démontrer que les conditions de cette garantie sont bien en l'espèce réunies ;

Qu'à défaut de rapporter une telle preuve, la SCI X. doit être déboutée de toutes ses prétentions contractuelles mal fondées ;

Attendu que l'appelante invoque subsidiairement un second moyen en ce que l'assureur lui aurait opposé un refus abusif et préjudiciable de règlement de « l’indemnité valeur à neuf » l'empêchant de disposer d'une certaine somme d'argent et l'obligeant à vendre cet immeuble à un prix inférieur à celui qui avait été initialement convenu ;

Mais attendu que le fait générateur de la mobilisation de la garantie complémentaire « indemnité valeur à neuf » étant la reconstruction conformément aux dispositions contractuelles, nullement réalisée à ce jour, c'est-à-dire « sans qu'il soit apporté de modification importante à sa destination initiale » et « sauf impossibilité absolue », dans un délai de deux ans à compter de la date du sinistre, il en résulte que l'assureur n'a eu aucun comportement abusif ou fautif et qui soit dommageable à l'égard de son assurée, la SCI X. ;

Que l'appelante doit donc être déboutée de son chef de demande d'allocation de dommages et intérêts tout aussi mal fondé ;

Attendu que c'est donc à juste titre que le premier juge, par motifs conformes aux faits de la cause que la Cour adopte, outre ses motifs propres, a débouté la SCI X. de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à verser à la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, répondant ainsi exactement aux moyens respectifs avancés par les parties ;

Attendu qu'en définitive l'appel de la SCI X. n'est pas fondé et doit dès lors être rejeté ;

Que la décision déférée sera en conséquence confirmée en son intégralité ;

[minute page 7]

Sur les dommages et intérêts :

Attendu qu'a défaut de preuve d'une faute de nature à rendre réellement abusive ou dilatoire l'attitude de la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES, la demande de dommages et intérêts de la SCI X. doit être rejetée comme mal fondée ;

 

Sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civile :

Attendu qu'il serait particulièrement inéquitable de laisser à la charge exclusive de la partie intimée, la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES les frais irrépétibles qu'elle a nécessairement dû engager en cause d'appel ;

Qu'il lui sera donc alloué, de ce chef, la somme de 3.000 euros ;

Attendu que la partie qui succombe doit supporter la charge des dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

DÉBOUTE la SCI X. de son appel mal fondé ;

CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions ;

Y AJOUTANT, CONDAMNE la SCI X. à payer à la compagnie AXA FRANCE ASSURANCES la somme de 3.000 € (trois mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la SCI X. aux entiers dépens et dit qu'ils seront recouvrés, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, par la SCP d'avoués BOISSONNET & ROUSSEAU, sur son affirmation de droit.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT